La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/02/2007 | FRANCE | N°06DA00202

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 08 février 2007, 06DA00202


Vu la requête, enregistrée le 10 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD, dont le siège est situé ZI les portes du Nord, BP 107, à Libercourt (62820), par la SCP Huglo, Lepage et associés ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0302142, en date du 15 décembre 2005, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 151 458,88 euros en raison de l'illégalité de l'arrêté du préfet du Nord, e

n date du

9 novembre 1999, lui ayant imposé des prescriptions complémentai...

Vu la requête, enregistrée le 10 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD, dont le siège est situé ZI les portes du Nord, BP 107, à Libercourt (62820), par la SCP Huglo, Lepage et associés ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0302142, en date du 15 décembre 2005, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 151 458,88 euros en raison de l'illégalité de l'arrêté du préfet du Nord, en date du

9 novembre 1999, lui ayant imposé des prescriptions complémentaires pour la remise en état du site ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser ladite indemnité augmentée des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué a été rendu irrégulièrement ; qu'il n'est pas suffisamment motivé ; que ce jugement ne présente pas les motifs pour lesquels elle doit être considérée comme le titulaire de l'obligation de remise en état des lieux ; que le Tribunal n'a pas motivé son jugement en ce qui concerne le lien de causalité entre la faute commise par l'Etat et le préjudice qu'elle subit ; que le Tribunal a omis de statuer sur le moyen relatif aux pressions constitutives d'une faute de la part de l'administration ; que le jugement est également irrégulier au fond ; qu'elle entend en effet démontrer que l'administration a commis plusieurs fautes ; qu'en premier lieu, les arrêtés préfectoraux du 9 novembre 1999 sont illégaux et, par suite, constitutifs d'une faute ; qu'en second lieu, le comportement de l'administration à son endroit démontre l'existence d'une pression également constitutive d'une faute ; que le contrôle de pleine juridiction impose au juge de statuer au vu des circonstances de fait et de droit existantes à la date de son jugement ; que le Tribunal ne s'est pas conformé à cette obligation ; qu'il a établi une distinction erronée entre les conclusions relatives à la légalité des arrêtés pris en matière d'installations classées, pour lesquelles cette obligation jouerait, et les conclusions indemnitaires, pour lesquelles elle ne s'appliquerait pas ; que toute illégalité étant fautive, la responsabilité de l'Etat est encourue dès lors que l'arrêté du 9 novembre 1999 a été annulé par un jugement précédent du Tribunal administratif de Lille pour absence de motivation ; que ce motif de forme rejoint d'ailleurs un motif de fond, tiré de l'incapacité de l'Etat à donner les motifs justifiant l'engagement des travaux supplémentaires de dépollution ; qu'en outre, ainsi que le précise le jugement entrepris, l'arrêté du 9 novembre 1999 est entaché d'un autre motif d'illégalité tiré de la violation du principe du contradictoire ; que c'est à tort que le Tribunal s'est refusé à voir l'existence d'un lien de causalité entre ce motif d'illégalité et le préjudice subi ; que c'est par une erreur de fait et de droit que le Tribunal a refusé de constater qu'elle n'avait pas la qualité d'exploitant de l'installation classée et ne pouvait se voir imposer, en sa qualité de détenteur du bien, l'obligation de remise en état du site ; que cette obligation ne peut incomber qu'au dernier exploitant en vertu de la jurisprudence administrative ; qu'elle n'a pas la qualité d'exploitant à l'origine des désordres, ni même celle de dernier exploitant du site ; qu'elle a seulement la qualité de détenteur ou de propriétaire du site ; que l'étendue des obligations de remise en état est excessive ; que les mesures imposées n'ont pas été conçues en fonction de l'usage industriel du site ; que, pour cette raison, l'arrêté de 1999 est également illégal ; que l'administration l'a également soumise à des pressions fautives afin qu'elle remette le site en état ; qu'elle a droit à la réparation du préjudice subi en raison de ces pressions ; qu'elle a subi un préjudice important ; que le dommage résulte du préjudice subi à la suite de l'exécution de l'arrêté illégal ; que les dépenses injustifiées qu'elle a dû exposer sont à l'origine des difficultés financières qui l'ont conduite à son état de cessation de paiement et à sa mise en redressement judiciaire ; que l'ensemble des coûts liés à la remise en état du site s'élève à la somme totale de 151 458,88 euros ; que le lien de causalité est en l'espèce évident ; qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais de procédure exposés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2006, présenté par le ministre de l'écologie et du développement durable qui demande à la Cour le rejet de la requête et soutient que la motivation du Tribunal en ce qui concerne sa qualité d'exploitant était tout à fait suffisante au regard du caractère imprécis de l'argumentation de la requérante sur ce point ; que, dès lors que le Tribunal a considéré que la faute commise par l'Etat n'était pas de nature à engager sa responsabilité, le Tribunal n'avait pas à se prononcer sur l'existence d'un lien de causalité ; que le jugement est, par suite, suffisamment motivé ; que le Tribunal ayant retenu de manière motivée que le préfet avait refusé d'approuver les conclusions de l'étude du bureau Antea, il n'avait pas à se prononcer sur le caractère prétendument arbitraire du rejet du préfet ; que la lettre du 21 octobre 1998 contenant les conclusions de cette étude n'était pas, par suite, constitutive de « pressions » exercées par l'administration ; que l'illégalité de l'arrêté du 11 novembre 1999 a été constatée au regard des dispositions applicables à la date du jugement du 17 octobre 2002 ; que si le Tribunal devait estimer le préjudice, à le supposer établi, à la date où il statue, il ne lui appartenait pas de se prononcer à nouveau sur la légalité de l'arrêté annulé ; que le Tribunal a correctement jugé en retenant que si toute illégalité est fautive, toute faute n'implique pas nécessairement la condamnation de l'Etat ; que si, en l'espèce, l'arrêté du 9 novembre 1999 a été annulé pour vice de forme, le bien-fondé des mesures prescrites pour assurer la remise du site dans un état tel qu'il ne s'y manifeste pas d'atteinte aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ne saurait être contesté ; que les mesures prescrites sont fondées sur des préconisations formulées par des bureaux d'études à la suite de l'analyse du site à propos de l'opportunité desquelles l'exploitant n'avait pas soulevé à l'occasion des arrêtés préfectoraux précédents de réserves ; que certains travaux prescrits par l'arrêté du 9 novembre 1999 avaient été réalisés par anticipation par la société sans en informer le préfet ; que, pour autant, la société ne peut sérieusement prétendre que les mesures imposées n'étaient pas justifiées ; que, par ailleurs, le préfet n'a jamais soutenu que la société devait réaliser un seconde fois ces travaux ; que le préfet avait indiqué en première instance que la société avait obtenu le

30 mars 1982 une attestation donnant acte de sa reprise des activités de la SARL SERAC - Laboratoires Melgad dont le dirigeant de la SFDPI était un ancien employé ; qu'en conséquence, le Tribunal a pu considérer à bon droit qu'aucune pièce du dossier ne démontre que l'administration s'est trompée dans la détermination du titulaire de l'obligation de remise en état du site ; que l'arrêté du 9 novembre 1999 ainsi que les arrêtés antérieurs avaient pour objet principal de prévenir une pollution des eaux, dès lors que le site se situe dans une zone de protection des champs captants d'eau potable de l'agglomération lilloise ; que la commune de Gondecourt se situe en zone de très forte vulnérabilité ; qu'ainsi, avant même de définir l'usage du site, en application de l'article

L. 512-17 du code de l'environnement, il importait d'engager, compte tenu des études réalisées, les mesures nécessaires à la préservation de la qualité des eaux ; que le moyen tiré de l'absence de définition de l'usage futur du site est donc inopérant ; que le moyen tiré de prétendues pressions exercées par l'administration à l'encontre de la société manque en fait ;

Vu la lettre en date du 24 octobre 2006 comportant demande de pièces complémentaires, ensemble les réponses apportées les 7 novembre, 14 et 19 décembre 2006 ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 janvier 2007 par télécopie et régularisé par la réception de son original le 23 janvier 2007, présenté pour la SFDPI ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 janvier 2007 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et M. Alain Stéphan, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- les observations de Me Gossement, pour la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour le 25 janvier 2001, présentée pour la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'en retenant qu'« aucune pièce produite à l'instance ne démontre que l'administration se serait trompée dans la détermination du titulaire de l'obligation de remise en état du site litigieux », le Tribunal administratif de Lille n'a pas, notamment compte tenu du caractère sommaire du moyen présenté pour la première fois dans la note en délibéré, enregistrée le 6 décembre 2005, produite par la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD, entaché son jugement d'un défaut de motivation ; que s'il est également reproché au Tribunal de n'avoir pas motivé son jugement pour écarter l'existence d'un lien de causalité entre la faute commise et le préjudice, un tel moyen doit être écarté dès lors qu'il ressort dudit jugement que le Tribunal, ayant écarté l'existence d'une faute de l'Etat, n'avait pas à se prononcer sur l'existence d'un tel lien et n'a pas de ce fait insuffisamment motivé sa décision ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort du jugement attaqué, que, contrairement à ce qui est soutenu, le Tribunal a entendu répondre, dans son sixième considérant, au moyen tiré d'une faute résultant, selon la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD, des « pressions » exercées à son endroit par l'administration ; que, par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité pour défaut de réponse à ce moyen ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant que si l'arrêté en date du 9 novembre 1999 par lequel le préfet du Nord avait adressé à la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD des prescriptions complémentaires destinées à la remise en état de son site industriel situé à Gondecourt a été annulé par un jugement du Tribunal administratif de Lille, en date du 17 octobre 2002, pour un défaut de motivation, l'illégalité ainsi commise qui a constitué une faute n'est pas susceptible d'ouvrir droit à réparation si le préjudice dont la réparation est demandée ne résulte pas directement de la faute ainsi commise ou si la mesure était justifiée sur le fond ; que la société n'établit pas ni même n'allègue que le préjudice dont elle se prévaut résulterait directement du vice de forme qui a entaché d'illégalité l'arrêté annulé ; que, toutefois, elle prétend que les prescriptions complémentaires contenues dans l'arrêté annulé et, d'une manière générale, les obligations de remise en état du site de Gondecourt qui lui ont été imposées par l'Etat, n'étaient pas justifiées au fond et sont à l'origine directe de ses difficultés financières qu'elle a connues et qui ont conduit à la procédure collective dont elle fait l'objet ;

Sur la détermination du débiteur de l'obligation de remise en état du site :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, dont les dispositions ont été reprises à l'article

L. 511-1 du code de l'environnement : « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et d'une manière générale les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement (…) » ; qu'aux termes de l'article 23 de la même loi, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 514-1 du code de l'environnement : « I. - Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : 1º Obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l'exploitant au fur et à mesure de l'exécution des mesures prescrites ; il est procédé au recouvrement de cette somme comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine. Pour le recouvrement de cette somme, l'Etat bénéficie d'un privilège de même rang que celui prévu à l'article 1920 du code général des impôts ; 2º Faire procéder d'office, aux frais de l'exploitant, à l'exécution des mesures prescrites ; 3º Suspendre par arrêté, après avis de la commission départementale consultative compétente, le fonctionnement de l'installation, jusqu'à exécution des conditions imposées et prendre les dispositions provisoires nécessaires » ; enfin, qu'il résulte des dispositions figurant à l'origine à l'article 34 du décret du 21 septembre 1977, puis reprises au I de l'article 34-1 depuis l'intervention du décret du 9 juin 1994, qu'en cas de cessation définitive de l'activité, l'exploitant doit remettre le site dans un état tel qu'il ne s'y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement et que le préfet peut lui imposer des prescriptions à cette fin ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de la loi du 19 juillet 1976, reprises aux articles L. 511-1 et suivants du code de l'environnement, que l'obligation de remise en état du site est applicable aux installations de la nature de celles soumises à autorisation en application du titre 1er du livre V du code de l'environnement, dès lors que ces installations demeurent susceptibles de présenter les dangers ou inconvénients énumérés à l'article L. 511-1 de ce code ; que, dans cette hypothèse, l'obligation de remise en état du site imposée par l'article 34-I du décret du

21 septembre 1977 pèse sur l'ancien exploitant ou, si celui-ci a disparu, sur son ayant droit ; que lorsque l'exploitant ou son ayant droit a cédé le site à un tiers, cette cession ne l'exonère de ses obligations que si le cessionnaire s'est substitué à lui en qualité d'exploitant ;

Considérant qu'incombe ainsi à l'exploitant d'une installation classée, à son ayant droit ou à celui qui s'est substitué à lui, la mise en oeuvre des mesures permettant de remettre en état le site qui a été le siège de l'exploitation dans l'intérêt, notamment, de la santé ou de la sécurité publique et de la protection de l'environnement ; que l'administration peut contraindre les personnes en cause à prendre ces mesures et, en cas de défaillance de celles-ci, y faire procéder d'office à leurs frais ;

Considérant que les pouvoirs de police spéciale conférés par la loi à l'autorité administrative peuvent, par leur objet et leur nature mêmes, être exercés par celle-ci à toute époque et vis-à-vis de tout détenteur d'un bien qui a été le siège de l'exploitation d'une installation classée, dès lors que s'y manifestent des dangers ou inconvénients de la nature de ceux auxquels la législation des installations classées a pour objet de parer ;

Considérant, toutefois, que les principes dont s'inspire l'article 2262 du code civil font obstacle à ce que le préfet impose à l'exploitant, à son ayant droit ou à la personne qui s'est substituée à lui la charge financière des mesures à prendre au titre de la remise en état d'un site lorsque plus de trente ans se sont écoulés depuis la date à laquelle la cessation d'activité a été portée à la connaissance de l'administration, sauf dans le cas où les dangers ou inconvénients présentés par le site auraient été dissimulés ;

Considérant, en outre, que cette même charge financière ne peut être légalement imposée au détenteur d'un bien qui n'a pas la qualité d'exploitant, d'ayant droit de l'exploitant ou qui ne s'est pas substitué à lui en qualité d'exploitant ; que lorsque l'autorité administrative entend exercer les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 514-1 du code de l'environnement et de l'article 34-1 du décret du 21 septembre 1977 vis-à-vis du détenteur actuel du bien, elle doit suivre la procédure prévue à l'article 18 du décret et prendre une décision motivée ;

Considérant qu'enfin, en vertu de l'article 34 du décret du 21 septembre 1977 dans sa rédaction alors en vigueur : « Lorsqu'une installation classée change d'exploitant, le nouvel exploitant ou son représentant doit en faire la déclaration au préfet dans le mois qui suit la prise en charge de l'exploitation. Cette déclaration doit mentionner, s'il s'agit d'une personne physique, les nom, prénoms et domicile du nouvel exploitant et, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination ou sa raison sociale, sa forme juridique, l'adresse de son siège social ainsi que la qualité du signataire de la déclaration. Il est délivré un récépissé sans frais de cette déclaration » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'inspection des installations classées en date du 2 juillet 1993, de l'arrêté du préfet du Nord en date du 11 août 1993 non contesté et des pièces produites en cause d'appel, d'une part, que la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD a exploité, entre le 1er février 1982 et 1995, sur son site de Gondecourt, situé 7 place de la Gare avant transfert du siège à Libercourt, une installation de conditionnement et de commercialisation de produits chimiques (solvants, détergents et décapants) à usages multiples avec une dominante pour l'entretien automobile , relevant des rubriques

nos 170 2° C, 261-A et 261 bis de la nomenclature des installations classées et, d'autre part, qu'elle a adressé au préfet du Nord, en application de l'article 34 du décret du 21 septembre 1977, une déclaration de changement d'exploitant à compter du 1er février 1982, lequel lui en a donné acte par un récépissé en date du 30 mars 1982, à la suite de la reprise de l'activité précédemment exercée sur le site par la société SARL SERAC - Laboratoires Melgad dont le dirigeant de la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD était un des anciens employés ; que, dans ces conditions, la société appelante ne peut valablement soutenir qu'elle n'aurait eu que la qualité de propriétaire du site de Gondecourt alors qu'il est constant qu'elle y a exploité une activité liée à l'industrie chimique ; que si elle fait valoir, par ailleurs, que ses activités n'étaient pas identiques à celles des deux sociétés qui se sont succédé sur le site entre 1978 et 1982, à savoir la SCI Melchior - Gardenne et la

SARL SERAC - Laboratoires Melgad, et que seules les activités de ces sociétés et non les siennes seraient à l'origine des pollutions constatées, ces affirmations ne sont corroborées par aucune pièce produite au cours de l'instruction et, notamment, pas par les rapports et études menées sur le site au fur et à mesure de la découverte des différentes zones polluées ; que, dès lors, la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD qui n'a, au demeurant, directement contesté entre 1993 et 2002 que l'arrêté du 9 novembre 1999 et qui ne fournit aucun élément permettant de déterminer l'origine exacte des diverses pollutions, doit être regardée, en sa qualité d'exploitant du site, comme étant débitrice de l'obligation de remise en état du site pollué, laquelle a été mise en oeuvre avant l'expiration du délai trentenaire mentionné ci-dessus ;

Sur les autres critiques adressées à l'autorité administrative :

Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, il ne résulte pas de l'instruction que le choix de la société ATI, après le rejet de l'étude ANTEA par l'administration, révèlerait l'existence d'une pression fautive des services de l'Etat ou aurait conduit à un renchérissement non justifié du coût des travaux de remise en état du site industriel ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relatif au respect des droits de la défense est, en tout état de cause, inopérant dès lors que, s'agissant d'un moyen relevant de la procédure pouvant affecter la légalité externe, sa portée doit être appréciée, même dans le cadre du contentieux de pleine juridiction des installations classées, à la date de l'édiction de l'arrêté du 9 novembre 1999 et non à celle du présent arrêt ; que, dès lors, cette disposition législative n'était pas applicable ;

Considérant que les opérations de remise en état du site doivent remédier aux dangers ou inconvénients énumérés à l'article L. 511-1 de ce code ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les prescriptions exécutées au cours de l'année 1999 et reprises dans l'arrêté annulé aient comporté des mesures excessives au regard de l'obligation de remise en état du site, même au regard des exigences fixées désormais par les dispositions de l'article 34-2 du décret du 21 septembre 1977 introduites par l'article 34 du décret n° 2005-1170 du 13 septembre 2005 ; que, par suite, la circonstance que l'autorité préfectorale se serait abstenue de définir précisément l'usage futur du site ne constitue pas une illégalité ou un agissement fautif ; qu'il n'est pas davantage établi que, malgré leur nombre, les différentes mesures liées aux études ou aux travaux ordonnées par l'administration se seraient révélées inadaptées ou incohérentes ; qu'en particulier, l'Etat n'a jamais imposé à la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD de réaliser une nouvelle fois des études ou des travaux qui avaient déjà été exécutés par anticipation, même si les prescriptions de l'arrêté n'ont été édictées que postérieurement à ces opérations, comme ce fut le cas en 1999 ; que si la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD prétend que l'excavation totale des terres et leur traitement dans un centre agréé au lieu d'un traitement sur site n'étaient pas justifiés, elle n'apporte à l'appui de ses affirmations aucun élément de nature à en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Etat n'a pas commis de faute en retenant les mesures figurant dans l'arrêté du 9 novembre 1999 ou lui imposant plus généralement des obligations de remise en état du site ; que, dès lors, la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande indemnitaire ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société SFDPI - LABORATOIRES MELGAD et au ministre de l'écologie et du développement durable.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

N°06DA00202 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA00202
Date de la décision : 08/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP HUGLO LEPAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-02-08;06da00202 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award