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20/02/2007 | FRANCE | N°06DA01071

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 20 février 2007, 06DA01071


Vu la requête, enregistrée le 7 août 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Didier X, demeurant ..., par Me Amédée-Manesme ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403189 en date du 12 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la restitution d'une somme de 365 835 francs

(55 771,19 euros) qu'il a acquittée au titre de la taxe sur la valeur ajoutée pour la période de 1979 au 31 décembre 1992, majorée des intérêts moratoires et à la condamnation de l'Etat à lui ve

rser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de ...

Vu la requête, enregistrée le 7 août 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Didier X, demeurant ..., par Me Amédée-Manesme ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403189 en date du 12 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la restitution d'une somme de 365 835 francs

(55 771,19 euros) qu'il a acquittée au titre de la taxe sur la valeur ajoutée pour la période de 1979 au 31 décembre 1992, majorée des intérêts moratoires et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer la restitution demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que c'est à tort que la taxe sur la valeur ajoutée qui grevait les véhicules dont se servait l'auto-école Gael a été exclue du droit à déduction de 1979 au 31 décembre 1992 ; que

M. X est en droit de réclamer cette taxe non déduite ; que la demande de

M. X a été faite dans les délais, compte tenu de la survenance d'un événement nouveau en la décision en date du 20 octobre 2000 du Conseil d'Etat, n° 203793, SARL auto-école Schlub ; que les textes fermant le droit de recours sont incompatibles avec les dispositions combinées des articles 1 du 1er protocole et des articles 13 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'administration a violé les principes communautaires de confiance légitime et de sécurité juridique ainsi que les articles 4, 5, 6, 14 et 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen desquels résulte le principe d'intelligibilité de la loi ainsi que le principe de sécurité juridique reconnu en droit interne par la jurisprudence ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 décembre 2006, présenté pour l'Etat par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête par les motifs que les arrêts rendus par le Conseil d'Etat concernant la recevabilité des actions des gestionnaires d'auto-école ne sont pas contraires à l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni à l'article 13 de cette convention ; que l'existence d'une discrimination avec les contribuables qui ont intenté une action dans les délais n'est pas établie ; que le litige ne se situe pas dans l'un des cas où le principe de confiance légitime peut être utilement invoqué dès lors qu'à aucun moment les règles applicables n'ont été modifiées de façon brutale et que l'essence même de la fonction juridictionnelle est d'interpréter les lois sans que cette interprétation puisse être limitée par le principe de confiance légitime ; que la demande est soumise aux règles du contentieux fiscal qui excluent la prescription trentenaire et est tardive ; que le juge de l'impôt ne peut apprécier les principes de clarté et d'intelligibilité de la loi fiscale qui relèvent du contrôle du Conseil Constitutionnel ; que la demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative n'est pas fondée ; que les intérêts moratoires ne seraient exigibles que si l'Etat venait à être tenu au dégrèvement de la taxe en cause ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 29 janvier 2007, tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Manuel Delamarre, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le directeur des services fiscaux :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 196-1 : « Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) b) du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; c) de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation » ;

Considérant que M. Didier X soutient que sa réclamation tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il avait acquittée pour la période de 1979 au 31 décembre 1992 à raison de son activité d'exploitation d'une auto-école n'était pas tardive, dès lors que, statuant le

20 octobre 2000 sur la requête de la SARL auto-école Schlub, le Conseil d'Etat a rendu une décision susceptible d'être regardée, pour l'application des dispositions du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, comme un événement de nature à motiver la réclamation qu'il a présentée le

8 janvier 2002 ; que, par cette décision concernant un autre contribuable, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux ne s'est prononcé, pour le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé leur acquisition, que sur la qualification des véhicules utilisés pour l'enseignement de la conduite au regard des dispositions de l'article 237 de l'annexe II au code général des impôts interdisant la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux véhicules conçus pour transporter des personnes, mais n'a ni annulé, ni déclaré invalide une disposition fiscale fondant l'imposition de M. X ; qu'il suit de là que cette décision ne constituait pas un événement de nature à rouvrir le délai de réclamation au bénéfice de M. X ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions réglementaires du livre des procédures fiscales précitées relatives au délai de réclamation ne méconnaissent pas les principes communautaires de confiance légitime et de sécurité juridique ni l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme ni le principe général de sécurité juridique ;

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente convention ont été violés a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles » ; qu'aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la même convention : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions et des amendes » ;

Considérant que l'existence d'un délai de réclamation ne fait pas, par elle-même, obstacle au droit à un recours effectif prévu par les stipulations précitées de l'article 13 de la convention ; que

M. X n'a pas été privé de la faculté de faire reconnaître l'existence de droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée dans le délai de réclamation de deux ans prévu au b) de l'article

R. 196-1 précité du livre des procédures fiscales ; que le refus d'admettre, pour les raisons qui viennent d'être exposées, que la décision du Conseil d'Etat du 20 octobre 2000 puisse constituer un événement au sens du c) du même article et ouvrir ainsi un nouveau délai de réclamation, ne saurait être regardé comme apportant au droit d'accès du contribuable au juge de l'impôt une restriction incompatible avec les exigences de l'article 13 ; qu'il résulte des termes mêmes des stipulations de l'article 1er du protocole additionnel que le droit au respect de ses biens reconnu à toute personne physique ou morale ne fait pas obstacle au droit de chaque Etat de mettre en oeuvre les lois qu'il juge nécessaires pour assurer le paiement des impôts ; que l'existence d'un délai de réclamation ne porte pas, en elle-même et, en tout état de cause, atteinte au respect des biens du contribuable au sens de cet article ; que, par ailleurs, elle ne méconnaît pas les stipulations combinées de l'article 1er du protocole additionnel et de l'article 14 de la convention prohibant les discriminations injustifiées entre contribuables, dès lors que le requérant n'était pas dans la même situation que les contribuables qui ont présenté une réclamation dans le délai général ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. X la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Didier X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Didier X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

N°06DA01071 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA01071
Date de la décision : 20/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Brigitte Phémolant
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : S.E.L.A.F.A. CEJEF - ALEXEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-02-20;06da01071 ?
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