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12/04/2007 | FRANCE | N°05DA00861

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (ter), 12 avril 2007, 05DA00861


Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Jean-Pierre X, demeurant ..., par la SCP Lamoril, Robiquet, Delevacque, Pagin ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102849 en date du 13 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du

29 décembre 2000 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a autorisé l'EARL du Prieuré à exploiter 15 hectares de terres ;

2°) d'annuler les décisions pris

es par le préfet du Pas-de-Calais le 29 décembre 2000 et la décision implicite de ...

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Jean-Pierre X, demeurant ..., par la SCP Lamoril, Robiquet, Delevacque, Pagin ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102849 en date du 13 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du

29 décembre 2000 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a autorisé l'EARL du Prieuré à exploiter 15 hectares de terres ;

2°) d'annuler les décisions prises par le préfet du Pas-de-Calais le 29 décembre 2000 et la décision implicite de rejet du ministre de l'agriculture et de la pêche ;

Ils soutiennent que l'auteur de la demande d'autorisation, à savoir M. Bertrand Y ou l'EARL du Prieuré, n'est pas clairement identifié ; que le salarié, visé par la décision, est un employé de l'EARL du Prieuré ; que le préfet a retenu une superficie exploitée par le demandeur de 117 hectares alors que plus de 30 hectares relèvent de l'activité forestière ; que l'argument selon lequel l'EARL du Prieuré n'aurait pas effectué d'opération forestière au cours de l'année 2000 est contredit par les éléments qui ressortent des précédentes procédures concernant la même EARL ; que M. Y est cadre à temps plein dans l'usine familiale d'emballage plastique située à Villeneuve d'Ascq ; que la situation des parties en litige n'a pas été prise exactement en compte tant pour l'unité de main d'oeuvre que pour la configuration du parcellaire ; que la reprise entraîne des enclaves qui empêchent toute exploitation des terres ; que la décision est ainsi entachée d'erreur d'appréciation ; que les articles L. 331-1 et suivants du code rural ne prévoient pas qu'il soit fait une péréquation de la surface par rapport aux actifs ; que le schéma directeur départemental prévoit que la comparaison des situations des parties en litige se fait par rapport à l'excédent brut d'exploitation par actif ; que l'impact de la reprise sur la situation des exposants a également été ignoré ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 21 juillet 2005 portant clôture de l'instruction au

30 novembre 2005 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2005, présenté pour l'EARL du Prieuré, représenté par son gérant en exercice M. Bertrand Y, dont le siège est situé à Cambigneul (62690), par la SCP Lefranc-Bavencoffe-Meillier qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation conjointement et solidairement de M. et Mme X à lui payer une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir qu'elle est la seule demanderesse à l'autorisation d'exploiter ; qu'elle a fourni l'ensemble des éléments justifiant de ce qu'elle n'avait plus qu'une activité agricole ; que si M. et Mme X allèguent que cette situation serait contraire aux éléments révélés à l'occasion de précédentes procédures, ils ne l'établissent pas ; que si seuls 71 hectares de son exploitation étaient à usage agricole et à prendre en compte par le préfet, comme le font valoir les époux X, la comparaison des superficies leur serait encore plus défavorable dès lors qu'ils exploitent 193 hectares ; que le moyen tiré de ce que la situation de M. Y, cadre à temps plein au sein d'une entreprise familiale, n'aurait pas été prise en considération par le préfet devra nécessairement être écarté ; que la participation effective de M. Y à l'exploitation agricole ne peut être contestée ; qu'il ne peut être fait grief au préfet d'avoir établi une péréquation entre les surfaces mises en oeuvre pour chacune des exploitations en présence et le nombre d'unités de main d'oeuvre sur chacune d'entre elles ; que la référence faite aux priorités du schéma directeur départemental n'intervient qu'en cas de demande concurrente ; que le préfet n'a pas commis d'erreur de droit ; que l'excédent brut d'exploitation par unité de main d'oeuvre pour son exploitation présente approximativement la moitié de celui dégagé par les époux X ; que le démembrement que provoquerait l'opération sur l'exploitation de M. X n'est pas réel ; que si la parcelle 27 est contiguë à certaines parcelles mises en culture par M. X, elle l'est également avec d'autres parcelles qui n'étaient pas mises en culture par ce dernier ; que les parcelles 268 et 269 ne sont pas contiguës à celles exploitées par M. X ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 28 novembre 2005 et son original enregistré le 2 décembre 2005, présenté par le ministre de l'agriculture et de la pêche, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. X à lui verser une somme de 639 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; le ministre fait valoir que la demande d'autorisation d'exploiter a été déposée par l'EARL du Prieuré, représentée par son gérant M. Bertrand Y ; que les appelants ne précisent pas en quoi la circonstance que l'EARL du Prieuré ait une double activité serait de nature à entacher la décision d'illégalité ; qu'en tout état de cause, l'activité forestière a été abandonnée par l'EARL du Prieuré et ne devait pas être prise en compte par le préfet, de même que la surface forestière à la supposer existante ; qu'il n'est pas contestable que M. Y a justifié de son inscription en qualité d'agriculteur auprès de la mutuelle sociale agricole et de sa participation en qualité d'associé exploitant de l'EARL du Prieuré ; qu'en tout état de cause, la reconnaissance de l'expérience ou de la capacité professionnelle n'est pas prévue comme critère d'instruction des demandes ; que la reprise ne saurait sérieusement porter atteinte à l'exploitation du preneur en place ; que le préfet a mis en oeuvre une méthode de comparaison de surface par actif qui n'est, en aucune manière, proscrite par les dispositions du schéma directeur départemental des structures agricoles faisant référence à une méthode d'évaluation forfaitaire de l'excédent brut d'exploitation par actif et que la méthode employée par le préfet rejoint celle prévue par le schéma qui permet de retenir, dans le cas d'espèce, le caractère prioritaire de la demande de l'EARL du Prieuré en raison d'un excédent brut d'exploitation par actif moins important que celui de M. X ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 avril 2006, présenté pour M. et Mme X, qui concluent aux mêmes fins que leur requête et, notamment, à ce que la Cour invite l'EARL du Prieuré à verser aux débats son relevé d'exploitation, les déclarations PAC de l'EARL du Prieuré en 2000 et les déclarations de revenus de son gérant au cour des années 2000, 2001 et 2002, à la condamnation de l'Etat et de l'EARL du Prieuré à leur verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance en date du 24 avril 2006 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2007 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian,

président-assesseur et M. Albert Lequien, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- les observations de Me Lefranc, avocat, pour M. Y ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural dans sa rédaction issue de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 : « L'autorité administrative, après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : / (…) / 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; / (…) / 6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées ; (…) » ; qu'aucun critère issu de la loi précitée du 9 juillet 1999 ne reprend celui tiré de la comparaison des surfaces tel qu'il figurait au 2° de l'article L. 331-7 du code rural dans sa rédaction issue de la loi n° 95-25 du 1er février 1995 ;

Considérant que le préfet du Pas-de-Calais, dans sa décision du 29 décembre 2000, a retenu, d'ailleurs conformément à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, pour accorder à l'EARL du Prieuré l'autorisation d'exploiter 15 hectares de terres, le motif suivant : « Prenant en compte les déclarations respectives du demandeur et du preneur en place, on constate que : - vous mettez en valeur avec l'aide d'un salarié permanent une exploitation ayant une superficie de 117 hectares, soit une surface de 58 hectares 50 ares par actif. L'occupant dispose d'une surface de 193 hectares qu'il met en valeur avec l'aide d'un fils aide-familial et de son épouse, soit trois actifs familiaux, ce qui donne une surface moyenne par actif de 64 hectares. La surface par actif de l'EARL du Prieuré est donc inférieure à celle du preneur en place alors que deux actifs familiaux sont âgés de plus de 55 ans. » ; que le préfet a ainsi entendu se référer à un critère tiré de la comparaison des superficies du demandeur, l'EARL du Prieuré, et du preneur en place, les époux X ; que ce critère ne figure plus au nombre de ceux repris à l'article L. 331-3 du code rural, dans sa rédaction alors applicable issue de la loi du 9 juillet 1999, et notamment, ceux prévus par les paragraphes 4 et 6 sus-rappelés, alors même, d'ailleurs, que le préfet a, pour procéder à cette comparaison des surfaces, utilisé un ratio « surface par actif » ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, un tel critère ne résulte pas davantage des orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles du Pas-de-Calais, en date du 27 octobre 2000, applicable à la date de la décision attaquée et n'est pas équivalent au critère tiré de la comparaison des excédents bruts d'exploitation (EBE) par actif prévu par l'article 8 dudit schéma ; que, par suite, en retenant le motif sus-analysé, le préfet du Pas-de-Calais a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. et Mme X sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 29 décembre 2000 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a autorisé l'EARL du Prieuré à exploiter 15 hectares de terres et de la décision implicite de rejet du ministre de l'agriculture et de la pêche ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner, d'une part, le ministre de l'agriculture et de la pêche à verser à M. et

Mme X une somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, de condamner l'EARL du Prieuré à leur verser la même somme ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de condamner M. et Mme X à verser à l'EARL du Prieuré et au ministre de l'agriculture et de la pêche les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0102849, en date du 13 mai 2005, du Tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La décision du préfet du Pas-de-Calais, en date du 29 décembre 2000, ainsi que la décision implicite de rejet du ministre de l'agriculture et de la pêche sont annulées.

Article 3 : L'EARL du Prieuré et le ministre de l'agriculture et de la pêche verseront chacun à M. et Mme X une somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par l'EARL du Prieuré et le ministre de l'agriculture et de la pêche sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-Pierre X, au ministre de l'agriculture et de la pêche ainsi qu'à l'EARL du Prieuré.

Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.

N°05DA00861 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Olivier (AC) Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP LAMORIL ROBIQUET DELEVACQUE PAGIN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (ter)
Date de la décision : 12/04/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05DA00861
Numéro NOR : CETATEXT000018003741 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-04-12;05da00861 ?
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