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12/04/2007 | FRANCE | N°06DA01553

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 12 avril 2007, 06DA01553


Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Yvon Rodrigues X, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602624 en date du 30 octobre 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2006 du préfet de la Somme portant décision de reconduite à destination du pays dont il a la nationalité, à savoir le Congo ;
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Il soutient qu'à la suite d'une pathologie ophtal...

Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Yvon Rodrigues X, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602624 en date du 30 octobre 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2006 du préfet de la Somme portant décision de reconduite à destination du pays dont il a la nationalité, à savoir le Congo ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

Il soutient qu'à la suite d'une pathologie ophtalmologique sévère, ayant nécessité plusieurs interventions chirurgicales, son état de santé requiert une surveillance bi-annuelle, laquelle ne pourra être assurée au Congo, son pays d'origine, présentant à l'heure actuelle une structure sanitaire précaire, ne lui permettant pas de bénéficier d'un traitement approprié ; qu'il se trouvera isolé et sans ressources au Congo, cette situation ne lui permettant pas de bénéficier de soins adéquats au regard de sa pathologie ; que l'absence de suivi de son état de santé peut conduire à des complications non négligeables et donc revêtir des conséquences directes et graves sur sa santé et plus particulièrement sur sa vue ; qu'il était marié à la date où le préfet de la Somme a pris sa mesure de reconduite à la frontière ; que l'arrêté de reconduite à la frontière ne mentionne pas cette nouvelle situation ; que cette absence de mention traduit une absence d'examen suffisant par l'administration ; qu'il réside depuis plus de quatre ans sur le territoire français ; qu'il a bénéficié en février 2005 d'un titre de séjour régulier valable une année, l'autorisant à résider et à travailler en France ; qu'il travaille depuis avril 2005 sans interruption, afin de subvenir aux besoins de sa concubine et de l'enfant de cette dernière, né d'une précédente relation ; qu'il vivait en concubinage avec Mme Y au Congo avant le départ de cette dernière pour la France ; qu'ils se sont revus en France peu de temps après son arrivée sur le territoire français ; qu'il l'a soutenue au cours de sa grossesse, issue d'une précédente union, et a assisté à l'accouchement ; qu'il déclare posséder, auprès de cet enfant, de nationalité française et portant comme prénoms, son nom et son prénom, le rôle de substitut paternel ; qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de cet enfant ; qu'il dispose de liens familiaux incontestables sur le territoire français, puisque sa soeur, titulaire d'une carte de résident, y habite ; que cette dernière a contribué à son intégration sociale et professionnelle ; que ses autres frères et soeurs ne résident plus au Congo Brazzaville mais à Abidjan et à Johannesburg ; que son père est décédé au Congo ; que sa mère et l'un de ses frères ont quitté le Congo Brazzaville pour s'installer au Congo Kinshasa, plus aucun membre de sa famille ne résidant dans son pays d'origine ; qu'il a reconstitué sur le territoire français, avec Mme Y, une cellule familiale depuis plus de trois ans ; qu'il démontre une réelle volonté d'intégration dans la mesure où il parle sans aucune difficulté le français, le lit et l'écrit et où il a déjà travaillé sur le territoire français ; qu'il ressort de ce qui précède que la décision de du préfet de la Somme est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et que l'arrêté de reconduite à la frontière viole les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 4 décembre 2006 fixant la clôture de l'instruction au

5 février 2007 à 16 heures 30 ;

Vu la décision en date du 6 décembre 2006 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la délégation du président de la Cour en date du 26 septembre 2006 prise en vertu de l'article R. 222-33 du code de justice administrative ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2007 :

- le rapport de M. Albert Lequien, magistrat désigné ;

- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, né le 9 mars 1968 à Brazzaville (Congo), de nationalité congolaise, s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 5 août 2006, d'un refus de titre de séjour en date du 2 août 2006 l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas où, en application du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Somme n'a pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. X ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi » ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'eu égard à son état de santé l'exécution de l'arrêté de reconduite à la frontière risque de remettre en cause les soins qui lui ont été dispensés en France et les efforts déjà accomplis, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé nécessite des soins dont l'absence entraînerait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il réside depuis plus de quatre ans sur le territoire français, qu'il a bénéficié en février 2005 d'un titre de séjour régulier valable une année l'autorisant à travailler et à résider en France, qu'il travaille depuis avril 2005 sans interruption, qu'il a épousé le 20 septembre 2006 Mme Y avec laquelle il a vécu au Congo et en France, qu'il joue le rôle de père auprès de l'enfant de son épouse, issu d'une précédente union, qu'il démontre une réelle volonté d'intégration, que sa soeur, titulaire d'une carte de résident, vit sur le territoire français, que ses autres frères et soeurs vivent à Abidjan et à Johannesburg, que son père est décédé, qu'il a reconstitué sa cellule familiale en France depuis plus de trois ans ; que, toutefois, M. MAYALA n'apporte pas d'élément permettant de constater la longueur de la vie commune avec celle qui est devenue son épouse et n'établit pas davantage s'occuper de l'enfant de celle-ci ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. X qui est entré en France en 2002, à l'âge de 34 ans et de la possibilité pour son épouse de demander un regroupement familial, l'arrêté du préfet de la Somme en date du 18 octobre 2006 aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière pris le 18 octobre 2006 par le préfet de la Somme ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Yvon Rodrigues X et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie sera transmise au préfet de la Somme.

N°06DA01553 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 06DA01553
Date de la décision : 12/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Le Garzic
Avocat(s) : SCP CARON-DAQUO-AMOUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-04-12;06da01553 ?
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