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10/05/2007 | FRANCE | N°06DA00479

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 10 mai 2007, 06DA00479


Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Hervé X, demeurant ..., par la SCP Corsaut, Verdez, avocats ; M. X demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0202066 en date du 19 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de

M. et Mme Pierre Y, annulé la décision en date du 29 juillet 2002, par laquelle le préfet de la Somme l'a autorisé à exploiter 10 hectares 28 ares à Villers-les-Roye ;

Il soutient que, pour l'autoriser à exploiter une surface supplémentaire de

10 hectares 28 ares, c'est à juste titre que le préfet a considéré que M. Y...

Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Hervé X, demeurant ..., par la SCP Corsaut, Verdez, avocats ; M. X demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0202066 en date du 19 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de

M. et Mme Pierre Y, annulé la décision en date du 29 juillet 2002, par laquelle le préfet de la Somme l'a autorisé à exploiter 10 hectares 28 ares à Villers-les-Roye ;

Il soutient que, pour l'autoriser à exploiter une surface supplémentaire de 10 hectares 28 ares, c'est à juste titre que le préfet a considéré que M. Y met en valeur 211 hectares, soit 3,5 fois l'unité de référence fixée à 60 hectares dans le département de la Somme, alors qu'il met, quant à lui, à disposition de l'EARL X une surface de 44 hectares 46 ares, inférieure à l'unité de référence, même si ladite EARL exploite une surface supérieure à deux fois cette unité de référence ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 24 avril 2006 portant clôture de l'instruction au 10 juillet 2006 à 16 h 30 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2006, présenté pour M. et Mme Pierre Y, demeurant ..., par la SCP J.P. et C. Sterlin, qui concluent au rejet de la requête et à la condamnation de M. X à leur verser une somme de

1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme Y font valoir que l'arrêté du 19 juillet 2002 est particulièrement ambigu quant à la situation de M. X ; que l'arrêté d'autorisation d'exploiter est non seulement empreint d'une contradiction de motifs mais est également insuffisamment motivé au regard de la jurisprudence Torsy du Conseil d'Etat ; qu'aucune précision n'est notamment apportée sur la situation de

M. François Y, demandeur concurrent ; que le procès-verbal de la séance de la commission n'ayant pas été produit aux débats, il est impossible d'apprécier si l'avis rendu par cette commission est motivé au regard de l'article R. 331-6 du code rural et si l'ensemble des critères légaux et la situation respective des parties ont été prises en considération ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 juillet 2006 par télécopie et son original enregistré le

13 juillet 2006, présenté par le ministre de l'agriculture et de la pêche qui conclut à l'annulation du jugement en date du 19 janvier 2006, au rejet de la demande de première instance de

M. et Mme Y et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 713 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; le ministre fait valoir que la motivation du jugement du Tribunal administratif d'Amiens est erronée en droit ; que le préfet a valablement apprécié la surface mise en valeur individuellement par le demandeur, M. X ; qu'au surplus, ce dernier a déposé sa demande d'autorisation préalable à titre personnel et non au nom de

l'EARL X ; qu'il était loisible au préfet d'apprécier la demande en tenant compte de la surface de 45 hectares 90 ares exploités par M. X et ce, quand bien même ces terres seraient destinées à être exploitées au sein d'une EARL ; que le préfet n'a donc pas entaché sa décision de contradiction de motifs ; que les moyens développés par les consorts Y en première instance sont dénués de toute pertinence ;

Vu l'ordonnance en date du 18 juillet 2006 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les mémoires, enregistrés le 9 août 2006 et le 28 mars 2007, présentés pour M. et Mme Y, qui concluent aux mêmes fins que celles présentées dans leur précédent mémoire par les mêmes moyens ; ils font valoir, en outre, que le préfet devait prendre en compte la superficie mise en valeur au sein de l'EARL pour examiner la demande ;

Vu la lettre en date du 2 avril 2007 par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 avril 2007 par télécopie et son original enregistré le 10 avril 2007, présenté pour M. et Mme Y, par la SCP Croissant, de Limerville, Orts, en réponse au moyen d'ordre public ; ils font valoir que, devant le Tribunal administratif d'Amiens, ils avaient soulevé le moyen de légalité externe tiré de ce que l'arrêté était insuffisamment motivé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2007 à laquelle siégeaient

Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

M. Alain Stéphan, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural dans sa rédaction alors alors applicable: « (…). L'autorité administrative, après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de sa demande ; 2° S'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, que toutes les possibilités d'installation sur une exploitation viable ont été considérées ; 3° Prendre en compte les références de production ou droits à aide dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment, en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et le cas échéant, celle du preneur en place ; 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 ; 6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés et salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées ; 7° Prendre en compte la structure parcellaire des exploitations concernées, soit par rapport au siège de l'exploitation, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements réalisés à l'aide de fonds publics ; 8° Prendre en compte la poursuite d'une activité agricole bénéficiant de la certification du mode de production biologique. L'autorisation ne peut être délivrée que pour une partie de la demande, notamment si certaines des parcelles sur lesquelles elle porte font l'objet d'autres candidatures prioritaires. Elle peut également être conditionnelle ou temporaire. » et qu'aux termes de l'article R. 331-6 du même code : « Au vu de l'avis motivé de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, le préfet prend une décision d'autorisation ou de refus d' autorisation d'exploiter. Cette décision est motivée. (…) » ;

Considérant que, par une décision en date du 29 juillet 2002, le préfet de la Somme a accordé à M. X l'autorisation d'exploiter sur la commune de Villers-les-Roye une superficie supplémentaire de 10 hectares et 28 ares de terres précédemment mises en valeur par

M. Pierre Y ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X exploite au sein de l'EARL X, dont il est un des deux associés, 123 hectares 84 ares dont 44 hectares 46 ares qu'il met personnellement à disposition de la société ; que M. X ayant sollicité, à titre personnel, la reprise de 10 hectares 28 ares mis en valeur par M. Pierre Y afin d'agrandir les surfaces qu'il met à disposition de l'EARL, le préfet de la Somme n'a pas entaché son autorisation d'une contradiction de motifs en retenant que les terres apportées par M. X à l'EARL constituaient une exploitation inférieure à l'unité de référence fixée à 60 hectares par le schéma directeur départemental des structures agricoles de la Somme tout en précisant que l'ensemble des terres exploitées au sein de l'EARL dépassait ce seuil ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a retenu l'existence d'une contradiction de motifs pour annuler l'autorisation accordée le 29 juillet 2002 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par

M. et Mme Y devant le Tribunal administratif et la Cour ;

Considérant que M. et Mme Y se sont bornés, contrairement à ce qu'ils soutiennent, dans leur demande devant le Tribunal administratif d'Amiens, à invoquer dans le délai de recours contentieux des moyens de légalité interne ; que, par suite, s'ils ont contesté dans un mémoire, enregistré le 5 mars 2005 au greffe du Tribunal administratif, la légalité externe de l'arrêté du

29 juillet 2002, cette contestation fondée sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle s'appuyait leur demande d'annulation, constituait une demande nouvelle présentée tardivement et qui, dès lors, n'était pas recevable ; que, par suite, les moyens de légalité externe soulevés en cause d'appel par M. et Mme Y sont irrecevables ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme Y, le préfet de la Somme en précisant, dans la décision attaquée, que les terres en litige « ont fait l'objet d'une demande concurrente (n° 21770) » et que « l'opération envisagée, qui vise à agrandir une exploitation inférieure à une unité de référence, est conforme aux priorités du schéma directeur départemental des structures agricoles de la Somme », a pris en compte la demande d'autorisation présentée par leur fils François portant sur les mêmes parcelles ; que la circonstance que le préfet de la Somme ait, postérieurement à la décision attaquée, refusé, par décision en date du 12 août 2002, d'accorder à M. François Y l'autorisation d'exploiter est sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision litigieuse est entachée d'une erreur de fait ou d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 29 juillet 2002 ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à verser aux époux Y la somme qu'ils demandent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche de condamner M. et Mme Y à verser au ministre de l'agriculture et de la pêche qui justifie des frais d'avocat qu'il a engagés pour assurer sa défense, d'une somme de 713 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0202066 en date du 19 janvier 2006 du Tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme Y devant le Tribunal administratif d'Amiens et le surplus de leurs conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : M. et Mme Y verseront au ministre de l'agriculture et de la pêche une somme de 713 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hervé X, à M. et Mme Pierre Y et au ministre de l'agriculture et de la pêche.

Copie sera transmise au préfet de la Somme.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 06DA00479
Date de la décision : 10/05/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Olivier (AC) Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP CORSAUT-VERDEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-05-10;06da00479 ?
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