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13/06/2007 | FRANCE | N°07DA00446

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 13 juin 2007, 07DA00446


Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Hugo Rudy X, demeurant ..., par Me Goeminne ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0607587 du 18 décembre 2006, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 décembre 2006 du préfet du Nord décidant sa reconduite à la frontière et la décision du même jour fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté de reconduite à l

a frontière et la décision fixant le pays de destination ;

3°) de condamner le préfet...

Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Hugo Rudy X, demeurant ..., par Me Goeminne ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0607587 du 18 décembre 2006, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 décembre 2006 du préfet du Nord décidant sa reconduite à la frontière et la décision du même jour fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté de reconduite à la frontière et la décision fixant le pays de destination ;

3°) de condamner le préfet du Nord au versement d'une somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. X soutient que la décision fixant le pays de destination doit être annulée en ce qu'elle est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est atteint du syndrome de transsexualisme et que son apparence féminine suffit à l'exposer au risque de mauvais traitement dans son pays d'origine ; que l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'arrivé en 2002 en France, il a pu y nouer des liens importants ; que le préfet a en outre commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement, l'arrêté et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du 29 mars 2007 fixant la clôture d'instruction au 30 avril 2007, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu la décision du 21 février 2007 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant à M. X le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le décret n° 95-304 portant publication de la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2007 à laquelle siégeaient M. Jean-Claude Stortz, président de chambre, M. Alain Dupouy, président-assesseur et

M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller :

- le rapport de M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller ;

- les observations de Me Goeminne, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité » ; qu'aux termes de l'article L. 511-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Les dispositions du 1º du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : a) S'il ne remplit pas les conditions d'entrée prévues à l ‘article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; b) Ou si, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à cette convention, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2 » ; qu'aux termes de l'article 5 de cette convention : « 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois, l'entrée sur le territoire des Parties contractantes peut être accordée à l'étranger qui remplit les conditions suivantes : a) Posséder un document ou des documents valables permettant le franchissement de la frontière déterminés par le conseil exécutif (…) » ; qu'aux termes de l'article 20 de la même convention : « 1. Les étrangers non soumis à l'obligation de visa peuvent circuler librement sur le territoire des Parties contractantes pendant une durée maximale de trois mois au cours d'une période de six mois à compter de la date de première entrée, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrées visées à l'article 5, paragraphe 1, points a, c, d et e (...) » ;

Considérant que M. X, de nationalité équatorienne, ne conteste pas qu'il puisse faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application des dispositions précitées ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que si M. X soutient que l'arrêté litigieux méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'apporte à l'appui de ce moyen aucun élément tendant à démontrer qu'il a fixé le centre de sa vie privée en France ou qu'il ne dispose plus d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 21 ans ; qu'ainsi, il n'est pas établi que l'arrêté attaqué porte au droit au respect de la vie privée de M. X une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, ni que le préfet du Nord a entaché cet arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que, pour demander l'annulation de la décision fixant l'Equateur comme pays de destination, M. X soutient que sa condition de transsexuel l'expose à des menaces de persécutions dans son pays d'origine ; qu'à l'appui de ses allégations, il fournit des documents dont un article de journal, un rapport du comité contre la torture de novembre 2005 et cinq rapports de l'organisation non gouvernementale « amnesty international » ; qu'il ressort des pièces du dossier que la Constitution équatorienne prohibe les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle ; que M. X n'avance aucune précision, ni aucune justification susceptible d'établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé et n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'en désignant comme pays de destination l'Equateur, le préfet du Nord a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hugo Rudy X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

N°07DA00446 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 07DA00446
Date de la décision : 13/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Stortz
Rapporteur ?: M. Jean-Eric Soyez
Rapporteur public ?: M. Le Garzic
Avocat(s) : GOEMINNE AURELIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-06-13;07da00446 ?
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