La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2007 | FRANCE | N°05DA01539

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 19 juin 2007, 05DA01539


Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société anonyme LA MONDIALE, dont le siège est

32 avenue Emile Zola à Lille Cedex 9 (59896), représentée par son président-directeur général en exercice, par la SELAFA FIDAL ; la SA LA MONDIALE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0303551-0303552 du 18 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant au dégrèvement, d'une part, d'une somme de 2 406 782 euros au titre du plafonnement en fonct

ion de la valeur ajoutée des cotisations de taxe professionnelle auxquelles el...

Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société anonyme LA MONDIALE, dont le siège est

32 avenue Emile Zola à Lille Cedex 9 (59896), représentée par son président-directeur général en exercice, par la SELAFA FIDAL ; la SA LA MONDIALE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0303551-0303552 du 18 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant au dégrèvement, d'une part, d'une somme de 2 406 782 euros au titre du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2001, d'autre part, d'une somme de 3 113 912 euros au même titre pour les années 1997 et 1998 et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles pour chacune des demandes ;

2°) de prononcer les dégrèvements demandés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le Tribunal en appliquant l'alinéa 2 de l'article 1647 B sexies II du code général des impôts a mal fondé sa décision ;

- que la définition donnée de la valeur ajoutée en vertu de la loi n° 80-10 du 10 janvier 1980 codifiée à l'article 1647 B sexies II-4 du code général des impôts retient sous la notion de « produits financiers » les seuls revenus financiers à l'exclusion des plus ou moins-values de cession d'éléments d'actifs ;

- que la notion de « produits de placement » du nouveau plan comptable ne correspond pas à celle de « produits financiers » en vigueur au moment de l'adoption des dispositions législatives ayant défini la valeur ajoutée pour les sociétés d'assurances et ne peut servir de référence pour la détermination des produits financiers ; en effet, le plan comptable actuel distingue les plus-values sur titres de placement, enregistrées au compte 7641 « Réalisation de placement », des revenus de placement visés au compte 760 pour considérer que les premières ne sont pas des produits financiers mais des gains en capital résultant de la réalisation d'éléments de l'actif ;

- qu'il convient de continuer à prendre en compte le plan comptable de 1969 en vigueur au moment où le législateur a défini la valeur ajoutée ; qu'en effet, un changement de norme comptable par décret ne peut avoir pour effet de changer l'assiette d'un impôt qui, en application de l'article 34 de la constitution, doit être déterminée par la loi ;

- que la définition légale de la valeur ajoutée a été confortée par l'instruction 6 E-9-79 du 17 décembre 1979 qui n'a jamais été remise en cause ni amendée même lors du changement de plan comptable ; que le premier paragraphe du chapitre C de l'instruction 6 E-8-95 du 18 juillet 1995 renvoie explicitement à l'instruction de 1979 ;

- que le Tribunal ne pouvait légalement donner la qualification de valeur ajoutée aux sommes en cause en se référant au caractère essentiel du produit pour l'activité de l'entreprise, notion qui se rattache à une analyse économique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 août 2006, présenté pour l'Etat par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Il soutient:

- que les dispositions de l'article 1647 B sexies II 2° reprennent les mêmes éléments de calcul que l'article 4 du décret n° 79-1154 du 28 décembre 1979 pris pour l'application de l'article 2-III 3ème alinéa de la loi n° 79-15 du 3 janvier 1979 qui dispose que la valeur ajoutée des entreprises soumises à un régime de bénéfice réel est déterminée à partir de leur comptabilité ; qu'il convient d'appliquer le plan comptable en vigueur à la date des faits ; que les notions de l'article 1647 B sexies se réfèrent implicitement aux définitions comptables de sorte que l'évolution de ces dernières conduit à une évolution de l'interprétation de l'article 1647 B sexies sans qu'il y ait empiètement dans le domaine de la loi ;

- que le plan comptable des assurances de 1995 prévoit, pour le résultat financier, deux séries de comptes à savoir les charges et les produits provenant de la réalisation de placements ; qu'il n'est pas prévu d'exclure certaines opérations financières de ce calcul ;

- que la doctrine administrative citée par la société ne remet pas en cause cette analyse et n'est pas opposable à l'administration dans le cadre du présent litige ; qu'en effet, l'instruction du 18 décembre 1985 concerne le plan comptable général révisé de 1982 et n'apporte pas de précision sur le régime des entreprises d'assurances ; que celle du 17 décembre 1979 ne donne pas de précisions sur les éléments à retenir dans les produits financiers ;

- que la circonstance que le plan comptable des assurances de 1995 n'évoque plus la notion de produits financiers n'implique pas qu'il faille appliquer le précédent, ce changement de terminologie faisant suite à la transposition de la directive 91/674/CEE du 19 décembre 1991 ; que le recours à l'ancien plan comptable serait d'ailleurs contraire à cette directive ;

- que les résultats de ces cessions, qui ne peuvent être qualifiés d'exceptionnels, doivent être inclus dans la valeur ajoutée des années en cause ;

- que leur taxation est conforme à l'article 1448 qui prévoit que la taxe professionnelle est établie suivant la capacité contributive des redevables ;

- que les frais irrépétibles demandés ne sont pas justifiés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 18 octobre 2006, présenté pour la SA LA MONDIALE, tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et en outre par les motifs que la loi fiscale n'a pas vocation à changer sous l'impulsion de la directive du

19 décembre 1991 qui ne concerne que le domaine comptable ; que la référence par la doctrine à des termes du plan comptable de 1970 n'est pas contraire à la directive de 1991 dès lors que l'autonomie du droit fiscal lui permet de se fonder sur des notions comptables qui ne sont plus applicables en comptabilité mais restent vraies en fiscalité ; que la position défendue est conforme à l'article 1448 dès lors que le législateur n'a pas estimé nécessaire de taxer les produits de cessions de titres de placement lors de l'adoption de l'article 1647 B et n'a pas modifié le texte lors de l'adoption du nouveau plan comptable ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 21 mars 2007 et confirmé par la production de l'original le 23 mars 2007, présenté par l'Etat et tendant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes motifs et, en outre, par le motif que la jurisprudence la plus récente du Conseil d'Etat confirme qu'il convient de prendre en compte le plan comptable applicable à la date des faits ; que par ailleurs, l'inscription des sommes en compte 79 ne constitue pas en soi un obstacle à leur intégration dans la valeur ajoutée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 avril 2007, tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et, en outre, par les moyens que par l'instruction BOI 6-E-1085 du 18 décembre 1985, l'administration a expressément admis qu'un changement comptable ne pouvait affecter les règles fiscales en vigueur ; que si le législateur avait entendu modifier l'article 1647 sexies B II-4 et les modalités de calcul de la taxe sur la valeur ajoutée, en matière d'assurances, il serait intervenu comme il l'a fait par la loi de finances pour 2006 s'agissant du compte transfert de charges ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 mai 2007, présenté pour l'Etat, s'en rapportant à ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, et notamment son article 34 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans ses rédactions applicables en l'espèce, qui prévoient le plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle selon la valeur ajoutée produite : « / II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. (…) 4. En ce qui concerne les entreprises d'assurance, de capitalisation et de réassurance de toute nature, la production est égale à la différence entre : d'une part, les primes ou cotisations ; les produits financiers ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les commissions et participations reçues des réassureurs ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les provisions techniques au début de l'exercice et, d'autre part, les prestations ; les réductions et ristournes de primes ; les frais financiers ; les provisions techniques à la fin de l'exercice. Les consommations intermédiaires comprennent également les commissions versées aux courtiers, agents et autres mandataires. » ;

Considérant que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle et qu'il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, de se reporter aux normes comptables, dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ; que seules les catégories d'éléments comptables étant définies par la loi, l'article 34 de la Constitution n'est pas méconnu ; que la circonstance que le législateur n'a pas adapté la rédaction des dispositions applicables en matière d'assurance contrairement à ce qu'il a fait dans d'autres domaines est sans incidence ;

Considérant qu'en vertu du plan comptable des assurances en vigueur depuis le 1er janvier 1995 et applicable aux années en cause, les profits et pertes provenant de la réalisation de placements sont comptabilisés sous les rubriques produits et charges des placements et doivent être considérés comme des produits financiers au sens des catégories d'éléments comptables fixées par l'article 1647 B sexies 4° du code général des impôts applicable pour la détermination de la valeur ajoutée des entreprises d'assurances ; qu'il suit de là que les sommes correspondantes doivent être prises en compte pour le calcul de la valeur ajoutée produite par la SA LA MONDIALE au cours desdites années ;

Considérant enfin que la société requérante ne saurait utilement se prévaloir de l'instruction référencée BOI 6 E-9-79 du 17 décembre 1979 ni de celle référencée BOI E-8-95 du 18 juillet 1985 reprise dans la documentation de base 6 E-4334 du 1er juin 1995 qui ne contiennent pas d'interprétation de la loi fiscale s'agissant du plafonnement de la valeur ajoutée des sociétés d'assurance ni de l'instruction BOI 6 E-10-85 du 18 décembre 1985 qui ne traite que des seules conséquences de l'adoption du plan comptable de 1982 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA LA MONDIALE n'est pas fondée à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SA LA MONDIALE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA LA MONDIALE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA LA MONDIALE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

2

N°05DA01539


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Brigitte Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SELAFA FIDAL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Date de la décision : 19/06/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05DA01539
Numéro NOR : CETATEXT000018003938 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-06-19;05da01539 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award