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19/06/2007 | FRANCE | N°06DA01644

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 19 juin 2007, 06DA01644


Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Francis X, demeurant ..., par Me Durand ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502172 du 12 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999 et 2000, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;



Il soutient :

- que la procédure d'imposition n'a pas été régulière dès lors que l'...

Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Francis X, demeurant ..., par Me Durand ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502172 du 12 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999 et 2000, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Il soutient :

- que la procédure d'imposition n'a pas été régulière dès lors que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales ; qu'en effet la seconde notification de redressement intervenue le 27 septembre 2002 et portant sur l'année 2000 est intervenue au delà du délai d'un an qui expirait le 21 juin 2002 et sans que M. X ait été informé d'une quelconque prorogation du délai ; que l'administration qui avait lors de la première notification de redressement du 20 juin 2002, connaissance de l'existence de comptes bancaires ouverts en Espagne ne peut invoquer le fait qu'elle n'était alors pas en possession des relevés de ces comptes ; qu'elle n'a pas mis en oeuvre la procédure de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ;

- que l'administration n'est pas fondée à retenir comme revenus occultes de M. X les sommes créditées sur le compte de Mme Y dès lors qu'elle n'apporte pas la preuve qu'il aurait fait usage de la procuration dont il était titulaire dans des conditions révélant qu'il était le bénéficiaire réel des sommes inscrites sur ce compte ; que, par ailleurs, ces sommes rapportées au pourcentage de commissions sur ventes de 5 % retenu par l'administration dans la notification de redressement du 20 juin 2002 aboutirait sur deux mois à un chiffre d'affaires de 41 256 500 francs dépourvu de tout réalisme économique et démontrant que les encaissements litigieux ne peuvent trouver leur origine dans les seules commissions de M. X ;

- que l'administration, suivie en cela par les premiers juges, a considéré que les sommes créditées sur les comptes financiers de M. X n'étaient pas justifiées quant à leur nature et leur origine ; que l'administration n'a pas tenu compte des salaires déclarés au cours de cette période pour des montants de 57 912 francs au titre de 1999 et 192 483 francs au titre de 2000 ; qu'il y a double imposition à hauteur de ces sommes ;

- que le solde inexpliqué de la balance espèces résulte de la seule évaluation du volume global de dépenses de train de vie réglées en espèces pour 1999 et que pour 2000, il n'existe pas d'écart significatif entre les revenus déclarés et le solde inexpliqué ; que la procédure de demande de justifications prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ne pouvait être légalement mise en oeuvre en l'espèce ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2007, présenté pour l'Etat par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la réclamation préalable ne comportant aucun moyen de nature à contester les rehaussements relatifs à la balance espèces et le montant du bénéfice industriel et commercial pour la partie concernant le compte ouvert en Espagne par le requérant, les conclusions de la requête d'appel se rapportant à ces sommes ne sont pas recevables ;

- que M. X supporte la charge de la preuve dès lors qu'il a fait l'objet d'une évaluation d'office pour les sommes tirées de son activité non déclarée d'intermédiaire de commerce et qu'il s'est abstenu de répondre dans les délais impartis aux demandes d'éclaircissements ou de justifications du 12 avril 2002 et a dès lors été taxé d'office sur lesdites sommes ;

- que la procédure d'imposition s'est déroulée régulièrement ; que la durée de la procédure a été prolongée, pour les revenus de source étrangère, du temps de réponse des autorités fiscales étrangères soit cent quarante quatre jours entre la date d'envoi de la demande par l'attaché fiscal et la date de réponse ainsi que le permet l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ; que, par ailleurs, la dissimulation volontaire de comptes bancaires prive le requérant du bénéfice de la protection de l'article L. 50 du même code ; que la notification de redressement du 27 septembre 2002 n'est donc pas intervenue irrégulièrement ;

- que les opérations de contrôle ont révélé une activité occulte de commissionnaire sur ventes pour l'entreprise individuelle Huguette Y-Servi Plus implantée en Espagne et ayant pour activité le négoce de voitures qui a été évaluée d'office sur la base des articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales ; que le requérant n'apporte pas la preuve de l'exagération des sommes retenues correspondant à un compte ouvert au nom de l'entreprise Y sur lequel il possède une procuration dont il n'établit pas qu'il n'en n'aurait pas bénéficié ;

- que le requérant n'établit pas que les crédits bancaires figurant sur des comptes français taxés d'office correspondraient comme il le soutient à des salaires, faute de toute justification, à des remboursements de frais reçus de sociétés, la copie des bordereaux de remise des chèques assortie de l'indication par le requérant de la nature de ces crédits n'étant pas probante, ni à la vente de véhicules préalablement achetés, faute de fournir des documents probants, la seule existence de débits bancaires proches des crédits étant insuffisante ;

- que, pour l'année 1999, le service a constaté qu'il n'y avait aucun retrait d'espèces, contrairement à l'année suivante et alors qu'il devait effectuer l'avance de certains frais professionnels ; que le service a évalué les dépenses de train de vie pour 1999 en retenant les retraits d'espèces de l'année suivante ce qui correspond à 22 % du train de vie déterminé par le requérant ; que cette évaluation n'est donc pas arbitraire ; que pour l'année 2000, le ratio des crédits bancaires hors dépôt d'espèces sur les revenus déclarés est de 2,65 correspondant à un écart de 318 697 francs et la balance des espèces fait apparaître une discordance de

93 020 francs, justifiant la demande de justifications adressée au requérant ; qu'au demeurant, s'il était établi que la procédure d'imposition d'office aurait été utilisée à tort, cette erreur serait sans incidence dès lors que le requérant n'a été privé d'aucune garantie liée à l'application de la procédure de redressement contradictoire et qu'en particulier, il a pu formuler des observations en réponse à la notification de redressement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant qu'il est constant que dans sa réclamation le requérant a demandé la décharge totale des impositions supplémentaires qui lui ont été assignées ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, M. X était recevable à présenter pour la première fois en appel des moyens relatifs à la réintégration de disponibilités en espèces et aux bénéfices industriels et commerciaux pour son activité de commissionnaire, dès lors qu'ils n'excédaient pas les conclusions chiffrées de sa réclamation préalable ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales alors applicable : « Lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des redressements pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts. /. Il est fait exception à cette règle dans les cas prévus à l'article L. 188 A » ;

Considérant qu'à l'occasion de l'examen de sa situation fiscale personnelle, M. X a fourni à l'administration des renseignements incomplets en omettant de révéler l'existence de certains comptes bancaires à l'étranger lui appartenant ou sur lesquels il détenait une procuration et que l'administration, qui avait adressé une demande d'assistance administrative internationale, l'avait d'ailleurs informé dans la notification de redressement du 20 juin 2002, qu'elle n'avait pas encore obtenu les réponses attendues ; qu'eu égard aux renseignements erronés ou incomplets qu'il avait fournis, M. X n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 50 précité auraient été méconnues ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales que l'administration peut demander au contribuable des justifications lorsqu'elle a recueilli des éléments permettant d'établir que celui-ci peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration, et qu'en cas de défaut de réponse, le contribuable est taxé d'office à l'impôt sur le revenu ; qu'il appartient au juge de l'impôt de vérifier que les éléments invoqués en ce cas par l'administration constituaient des indices suffisants de dissimulation de revenus ; que, dans le cas où l'administration se fonde sur l'existence d'un déséquilibre entre les ressources connues et une évaluation des disponibilités engagées, il incombe au juge de s'assurer que le solde ainsi établi présente un caractère significatif et ne résulte, ni d'une évaluation arbitraire des dépenses de train de vie, ni de l'inclusion dans les disponibilités engagées d'éléments de patrimoine dont rien ne permet de présumer l'acquisition au cours de la période vérifiée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour justifier à l'égard de M. X de la procédure prévue par les dispositions précitées, l'administration fait valoir que M. X n'avait procédé à aucun retrait d'espèces en 1999 et qu'elle a évalué les dépenses de train de vie au titre de cette année en retenant la moyenne des retraits en espèces constatés en 2000 ; qu'il résulte de l'instruction que ces montants résultaient exclusivement de l'évaluation faite par l'administration des sommes en espèces dont le contribuable pouvait avoir besoin dans sa vie courante ; que, dans ces conditions, compte tenu du caractère nécessairement approximatif d'une telle évaluation, l'administration ne pouvait être regardée comme ayant réuni les éléments suffisants lui permettant d'établir que le contribuable pouvait avoir eu, pour les années en cause, des revenus plus importants que ceux qu'il avait déclarés ; que, dès lors, M. X est fondé à soutenir que l'administration ne pouvait légalement engager la procédure de demande de justification des soldes créditeurs des balances espèces ayant abouti, par voie de taxation d'office, aux impositions contestées et à demander la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti à raison desdites sommes ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les commissions sur ventes :

Considérant que l'administration a constaté que d'importants crédits figuraient sur les comptes espagnols et a taxé lesdites sommes au titre de son activité occulte ; que M. X se borne à soutenir que les sommes figurant sur le compte espagnol ouvert à son nom et sur celui pour lequel il avait procuration ne présentaient pas le caractère de sommes issues de son activité dans la mesure où elles correspondraient à un chiffre d'affaires pour la société de plus de quarante millions de francs sur deux mois sans apporter la moindre preuve de leur origine et de leur nature ; que la seule circonstance qu'elles correspondraient à un chiffre d'affaires très important ne suffit pas à établir qu'elles ne constitueraient pas des commissions ; que c'est donc à bon droit que l'administration a estimé que ces sommes correspondaient aux revenus tirés de son activité occulte ;

En ce qui concerne les crédits bancaires taxés d'office :

Considérant que M. X soutient que les crédits bancaires taxés d'office correspondraient, d'une part, à des salaires et remboursements de frais, d'autre part, à la vente de véhicules automobiles et s'il soutient que les revenus qu'il a déjà déclarés seraient ainsi taxés deux fois, il n'apporte, alors que la charge lui en incombe compte tenu de la procédure de taxation d'office non contestée mise en oeuvre, aucun élément de preuve de ses allégations ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande en ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales mises à sa charge correspondant à une base de 33 600 francs (5 122 euros) au titre de l'année 1999 et de

93 020 francs (14 180 euros) au titre de l'année 2000 et des pénalités y afférentes et à demander la décharge desdites sommes ;

DÉCIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assigné à M. Francis X est réduite d'une somme de 33 600 francs (5 122 euros) au titre de l'année 1999 et d'une somme de

93 020 francs (14 180 euros) au titre de l'année 2000.

Article 2 : M. Francis X est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales mises à sa charge correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 1 et des pénalités y afférentes.

Article 3 : Le jugement n° 0502172 du Tribunal administratif de Lille du 12 octobre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Francis X est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Francis X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

2

N°06DA01644


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA01644
Date de la décision : 19/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Brigitte Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : CABINET DURAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-06-19;06da01644 ?
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