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21/06/2007 | FRANCE | N°07DA00351

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 21 juin 2007, 07DA00351


Vu la requête, parvenue par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 6 mars 2007 et confirmée par courrier original le 8 mars 2007, présentée par le PREFET DE L'EURE ; le préfet demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700234 en date du 7 février 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de M. Willy Landry X, son arrêté en date du 3 février 2007 décidant la reconduite à la frontière de l'intéressé et désignant le Cameroun comme pays de destinati

on ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Willy Landry X devant le Tribu...

Vu la requête, parvenue par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 6 mars 2007 et confirmée par courrier original le 8 mars 2007, présentée par le PREFET DE L'EURE ; le préfet demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700234 en date du 7 février 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de M. Willy Landry X, son arrêté en date du 3 février 2007 décidant la reconduite à la frontière de l'intéressé et désignant le Cameroun comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Willy Landry X devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Le PREFET DE L'EURE soutient que le premier juge a estimé à tort que l'arrêté attaqué était entaché d'erreur manifeste d'appréciation, alors que le séjour en France de M. X revêtait un caractère récent et que la scolarisation en France de l'intéressé en vue de l'obtention d'un

BEP « installation sanitaire et thermique » n'était pas suffisante à révéler l'existence d'une telle erreur manifeste, pas davantage que la prise en charge de M. X par un oncle ; que rien n'empêche l'intéressé de rejoindre le Cameroun ou la Belgique où il est légalement admissible, soit pour y poursuivre sa scolarité, soit pour y solliciter auprès des autorités consulaires françaises la délivrance d'un visa « étudiant » lui permettant d'entrer légalement en France ; que les moyens présentés par M. X en première instance n'étaient pas fondés ; qu'en effet, l'arrêté attaqué ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, M. X étant célibataire et sans charge de famille et n'établissant pas être dépourvu d'attache dans son pays d'origine, alors que seul un oncle demeure en France ; que ce même arrêté n'a ainsi pas été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par ailleurs, en tant qu'il désigne le pays de destination, ce même arrêté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, M. X n'établissant pas, d'une part, être dépourvu d'attache au Cameroun et conservant, d'autre part, la possibilité d'effectuer des démarches en vue d'obtenir son admission sur le territoire belge ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 15 mars 2007, par laquelle le magistrat désigné par le président de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au 13 avril 2007 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2007, après la clôture de l'instruction, présenté pour M. X, par Me Taffou ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la délégation du président de la Cour en date du 30 mai 2007 prise en vertu de l'article

R. 222-33 du code de justice administrative ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2007 :

- le rapport de M. Albert Lequien, magistrat désigné ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour annuler, par le jugement attaqué en date du 7 février 2007, l'arrêté du 3 février 2007 du PREFET DE L'EURE décidant la reconduite à la frontière de M. Willy Landry X, ressortissant camerounais, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a estimé qu'eu égard à ce que l'intéressé, alors âgé de 18 ans, poursuivait assidûment des études au sein d'une classe de terminale d'un lycée d'Evreux en vue de l'obtention d'un BEP et résidait chez un oncle qui s'était engagé à l'héberger, l'arrêté attaqué était entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences que comportait cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle de M. X ;

Considérant, toutefois, que ces seules circonstances, alors qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a déclaré être arrivé en France au mois d'octobre 2002 sans toutefois être en mesure de justifier d'une entrée régulière sur le territoire français, ne suffisent pas, compte tenu de la faible durée et des conditions du séjour de l'intéressé en France et de la circonstance que l'intéressé n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il ne pourrait poursuivre ses études dans son pays d'origine ou en Belgique où demeure notamment sa mère, à établir que cet arrêté serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que, dès lors, le PREFET DE L'EURE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé ledit arrêté ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Sur la légalité de la mesure de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité » ; que M. X n'a pas été en mesure, ainsi qu'il a été dit, de justifier de son entrée régulière en France ; qu'ainsi, M. X se trouvait, à la date de l'arrêté attaqué, dans la situation prévue par les dispositions précitées qui autorisait le préfet de l'Eure à décider sa reconduite à la frontière ;

Considérant que si M. X fait état de ce qu'il est bien intégré en France où il aurait noué de nombreuses relations amicales et de la présence dans ce pays d'un oncle qui l'héberge, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, âgé de 18 ans, ne dispose pas d'autre attache familiale en France et que sa mère et ses deux demi-frères résident en Belgique, où il a lui-même vécu depuis l'âge de 12 ans ; que, dans ces conditions, en tant qu'il prononce la reconduite à la frontière de

M. X, l'arrêté préfectoral attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la désignation du pays de destination :

Considérant que l'arrêté attaqué prononce la reconduite à la frontière de M. X à destination du pays dont il a la nationalité, à défaut, de tout autre pays dans lequel il établirait être légalement admissible ou qui lui aurait délivré un titre de séjour en cours de validité ; que, dans ces conditions, à supposer même établi que l'intéressé n'aurait, ainsi qu'il le soutient, plus aucune attache dans son pays d'origine, l'arrêté préfectoral attaqué n'est pas, eu égard à la faculté dont dispose M. X d'engager des démarches auprès des autorités belges dans le but d'obtenir son admission dans ce pays, entaché d'erreur manifeste, en tant qu'il porte désignation du pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière, dans l'appréciation des conséquences qu'il comporte sur la vie privée et familiale de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que le PREFET DE L'EURE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté prononçant la reconduite à la frontière de

M. X et, d'autre part, que la demande présentée par ce dernier devant le Tribunal administratif de Rouen doit être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0700234 en date du 7 février 2007 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'EURE, à M. Willy Landry X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

N°07DA00351 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07DA00351
Date de la décision : 21/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SELARL TAFFOU et MONTRADE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-06-21;07da00351 ?
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