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21/06/2007 | FRANCE | N°07DA00403

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 21 juin 2007, 07DA00403


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 16 mars 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée par la production de l'original le 19 mars 2007, présentée pour

M. Celal X, demeurant ..., par Me Demir ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700284 en date du 9 février 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant : 1°) à l'annulation de l'arrêté du 6 février 2007 du préfet de l'Eure décidant sa reconduite à la frontière fixant

le pays de destination de la reconduite ; 2°) à ce que le Tribunal enjoigne audit p...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 16 mars 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée par la production de l'original le 19 mars 2007, présentée pour

M. Celal X, demeurant ..., par Me Demir ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700284 en date du 9 février 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant : 1°) à l'annulation de l'arrêté du 6 février 2007 du préfet de l'Eure décidant sa reconduite à la frontière fixant le pays de destination de la reconduite ; 2°) à ce que le Tribunal enjoigne audit préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 3°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de

1 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet de l'Eure ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux semaines à compter de la notification de l'arrêt, et de statuer à nouveau sur son droit à séjourner en France, dans un délai d'un mois à compter de ladite notification , sous astreinte de

100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté de reconduite à la frontière est illégal dès lors que le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour alors qu'il avait déposé une première demande de carte de séjour « vie privée et familiale » ; que le refus de lui délivrer un titre de séjour s'apparente à un « refus de guichet » qui rend illégal l'arrêté de reconduite à la frontière litigieux ; que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour a été prise par une autorité incompétente et n'est pas motivée ; que l'arrêté de reconduite à la frontière a été pris en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article

L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance du 20 avril 2007 fixant la clôture de l'instruction au 21 mai 2007 à 16 h 30 ;

Vu l'ordonnance du 22 mai 2007 fixant la réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 21 mai 2007, présenté par le préfet de l'Eure ; le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête ; il soutient que le dépôt d'une nouvelle demande d'admission au séjour ne fait pas obstacle à l'édiction et à l'exécution d'un arrêté de reconduite à la frontière ; que la décision contestée respecte les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que la cellule familiale de M. X peut se reconstituer en Turquie ; qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure de reconduite sur la situation personnelle de l'intéressé ; que le requérant n'apporte aucune justification permettant d'établir qu'il serait personnellement menacé en cas de retour en Turquie ;

Vu l'ordonnance en date du 22 mai 2007 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la délégation du président de la Cour en date du 30 mai 2007 prise en vertu de l'article

R. 222-33 du code de justice administrative ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2007 :

- le rapport de M. Albert Lequien, magistrat désigné ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, ne justifie, ni être entré régulièrement sur le territoire français, ni avoir été titulaire d'un titre de séjour en cours de validité à la date de l'arrêté attaqué ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de subordonner la légalité d'un arrêté de reconduite à la frontière pris sur le fondement de l'article L. 511-1-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'examen préalable de la demande de titre de séjour que l'étranger a pu présenter alors qu'il se trouvait en situation irrégulière au regard des dispositions relatives aux conditions d'entrée et du séjour des étrangers en France ;

Considérant que la circonstance, à la supposer établie, que M. X se soit présenté le

5 janvier 2007 à la préfecture de l'Eure pour y déposer une demande de carte de séjour « vie privée et familiale », suite à l'arrivée de son épouse en France et au rejet des décisions relatives à sa demande d'asile, n'obligeait pas le préfet de l'Eure à surseoir à l'édiction de son arrêté de reconduite à la frontière jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande ; que, par suite, le moyen tiré de l'illégalité du refus de la demande de titre de séjour « vie privée et familiale » ne peut qu'être écarté dès lors que, comme il a été dit, la légalité d'un arrêté de reconduite à la frontière pris sur le fondement d'une entrée irrégulière sur le territoire n'est pas subordonnée à l'examen préalable de la nouvelle demande de titre de séjour présentée par l'intéressé ;

Considérant, en deuxième lieu, que si à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X soutient qu'il possède des attaches familiales intenses en France où vivent son épouse et le reste de sa famille, il ressort des pièces du dossier que son épouse, entrée en France en 2005, se trouve également en situation irrégulière après le rejet de ses demandes d'asile et que l'intéressé n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où vivent ses parents, ainsi que ses frères et soeurs ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Eure aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant, enfin, qu'à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X, soutient qu'il est bien intégré en France où il dispose d'attaches privées intenses et détient une promesse d'embauche dans le secteur du BTP ; que ces circonstances ne sont pas de nature à faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination de la reconduite :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 » ;

Considérant que si M. X soutient qu'en cas de retour en Turquie, son pays d'origine, il serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'apporte néanmoins aucun élément de nature à l'établir ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 6 février 2007 du préfet de l'Eure fixant la Turquie comme pays de destination de la reconduite ;

Sur les conclusions de M. X à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ces conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Celal X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Copie sera transmise au préfet de l'Eure.

N°07DA00403 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07DA00403
Date de la décision : 21/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : DEMIR SELÇUK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-06-21;07da00403 ?
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