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27/07/2007 | FRANCE | N°05DA01549

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 27 juillet 2007, 05DA01549


Vu la requête, enregistrée le 26 décembre 2005 par télécopie et confirmée par la production de l'original le 29 décembre 2005, au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société SOCOTEC, dont le siège est situé 31 avenue Pierre de Coubertin à Paris (75013), par la SCP Lebas et Associés ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0304296, en date du 25 octobre 2005, du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a, par ses articles 1 à 4, prononcé sa condamnation au titre des désordres affectant les salles de bain de la maiso

n de retraite de Maisnil-les-Ruitz appartenant au Sivom de la communauté ...

Vu la requête, enregistrée le 26 décembre 2005 par télécopie et confirmée par la production de l'original le 29 décembre 2005, au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société SOCOTEC, dont le siège est situé 31 avenue Pierre de Coubertin à Paris (75013), par la SCP Lebas et Associés ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0304296, en date du 25 octobre 2005, du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a, par ses articles 1 à 4, prononcé sa condamnation au titre des désordres affectant les salles de bain de la maison de retraite de Maisnil-les-Ruitz appartenant au Sivom de la communauté du bruaysis ;

2°) de rejeter les conclusions indemnitaires dirigées contre elle ;

3°) de mettre à la charge du Sivom de la communauté du bruaysis la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le Tribunal a entaché sa motivation de contradictions en retenant, d'une part, que les désordres affectant les salles de bain de la maison de retraite avaient fait l'objet de réserves lors de la réception et, d'autre part, que les malfaçons à l'origine de ces désordres avaient été constatées après cette réception par l'architecte alors même qu'elles étaient apparentes à cette date ; que la position prise par son assureur en première instance à propos du caractère contractuel des désordres est contestable ; que, bien que survenus dans l'année de la garantie de parfait achèvement, les désordres ont un caractère décennal ; que, par suite, la responsabilité des constructeurs ne peut être recherchée que sur le terrain de la garantie décennale ; que le bureau de contrôle devra, en tout état de cause, être mis hors de cause ; que la faute majeure a en effet été commise par M. X et l'Atelier du renouveau en leur qualité de membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ; qu'ils n'ont pas formulé de réserves lors de la réception sur des défauts pourtant apparents et reconnus comme tels par l'expert judiciaire ; que, ce faisant, a été donné quitus aux autres intervenants du respect de leurs engagements contractuels à l'égard du maître d'ouvrage ; que ce dernier ne pourra que rechercher la responsabilité des maîtres d'oeuvre sur le terrain de la faute commise lors des opérations de réception ; qu'en outre, l'origine des désordres doit être recherchée dans un défaut d'exécution incombant à l'entreprise Tern ; que le contrat de la société SOCOTEC ne portait pas sur ces travaux ; que ses frais de procédure devront être indemnisés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2006, présenté pour la SARL l'Atelier du renouveau, dont le siège est situé 588 rue Lamendin à Bruay-la-Buissière (62700) et M. Jean-Pierre X, architecte, demeurant ..., par Me Deleurence, avocat ; ils demandent à la Cour de réformer le jugement du 25 octobre 2005, de rejeter la requête du Sivom de la communauté du bruaysis en ce qu'elle tend principalement à mettre en oeuvre la responsabilité décennale des constructeurs et accessoirement la responsabilité contractuelle de droit commun, de les mettre hors de cause, subsidiairement, de condamner la société Tern in solidum avec la société SOCOTEC et le bureau d'études techniques Sechaud Bossuyt, ou de les relever indemnes des condamnations qui pourraient être prononcées contre eux, de laisser à la charge du Sivom de la communauté du bruaysis les frais d'expertise et enfin de condamner tous succombants à leur verser la somme de 1 500 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent que leur appel incident est recevable et bien-fondé ; qu'en ce qui concerne les désordres affectant les salles de bain, ces désordres ayant fait l'objet de réserves ou étant visibles, ne peuvent relever de la responsabilité décennale ; qu'en tout état de cause, à titre subsidiaire, ni le bureau d'études techniques ni le contrôleur technique ne sauraient échapper à leur responsabilité ; qu'il ne résulte d'aucun document que le bureau d'études techniques Sechaud Bossuyt n'aurait eu qu'une mission concernant les fluides ; qu'il était co-traitant aux côtés de l'architecte ; que le contrôleur technique n'a fait aucune réserve au cours du chantier ou dans son rapport final sur la mise en oeuvre par la société Tern de ses prestations ; que M. X et l'Atelier du renouveau ne formaient pas un groupement de maîtrise d'oeuvre ; que la société Tern a réalisé une prestation non conforme ; qu'en ce qui concerne la mission complémentaire d'expertise, et, compte tenu des premières conclusions, le Sivom de la communauté du bruaysis devra en assumer le coût ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 avril 2006, par lequel M. Rollet, expert, déclare n'avoir pas d'observation à formuler ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 mai 2006, pour la SMABTP, société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, dont le siège est situé 114 avenue Emile Zola à Paris

(75739 cedex 15), par Me Verley, avocat ; elle demande le rejet de la requête ainsi que toutes demandes susceptibles d'être formulées à son encontre, à titre subsidiaire, de condamner conjointement et solidairement l'ensemble des autres intervenants à l'acte de construire à la garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre, enfin la condamnation de toutes parties succombantes à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient qu'elle a résilié les polices d'assurance la liant à la société SOCOTEC ; qu'elle n'intervient que dans la limite des contrats souscrits à l'époque ; que la garantie décennale n'est pas susceptible d'être accordée à la société SOCOTEC ; que les désordres en cause ont bien fait l'objet d'une réserve et relèvent donc de la garantie contractuelle ; que, pour cette raison également, la garantie décennale ne peut donc être mobilisée ; qu'à titre subsidiaire, il s'agissait d'un vice apparent ; que les désordres n'entraînent pas l'impropriété de l'ouvrage ; que la garantie décennale ne peut trouver à s'appliquer ; qu'enfin, à titre encore plus subsidiaire, elle devra être garantie par les autres constructeurs ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 juin 2006, présenté pour M. Jean-Pierre X, qui conclut au rejet des conclusions présentées par la SMABTP dans son mémoire du 24 mai 2006 et de la condamner au paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir que l'action directe ouverte par l'article L. 124-3 du code des assurances contre l'assureur de l'auteur responsable d'un sinistre ne poursuit que l'exécution de l'obligation de l'assureur à réparation, laquelle est une obligation de droit privé ; qu'une telle action relève, par suite, de la seule compétence des tribunaux judiciaires, distincte de celle de l'action en responsabilité contre l'assuré qui a causé un dommage lors de l'exécution d'un travail public ; que l'assureur de l'auteur responsable d'un sinistre ne peut, dans ce cas, engager une action récursoire contre d'autres locataires d'ouvrage même s'ils sont liés au maître d'ouvrage par un marché de travaux publics puisque cet assureur agirait alors en application de l'article 1382 du code civil ; que seul l'ordre judiciaire serait compétent pour connaître de ce type d'actions ; que, par ailleurs, en aucun cas, la SMABTP ne vient préciser sur quel fondement elle entend exercer son action récursoire à l'encontre de l'architecte, ce qui rend son action irrecevable ; que l'assureur a, enfin, déposé un mémoire devant le Tribunal administratif de Lille dans lequel elle déclare intervenir dans la procédure pendante devant ce Tribunal sans rechercher une quelconque responsabilité envers quiconque ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 août 2006, présenté pour la SMABTP, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et, en outre, au rejet des conclusions reconventionnelles présentées par M. X à son encontre ; elle soutient qu'étant intervenante volontaire devant le Tribunal administratif de Lille, elle s'est limitée à demander à la Cour de confirmer le jugement rendu en ce qu'il a retenu que les désordres relèvent de la responsabilité contractuelle de la société SOCOTEC ; que ce n'est qu'à titre infiniment subsidiaire et pour le cas où une demande serait formulée par l'une ou l'autre partie à son encontre qu'elle a sollicité la garantie des autres intervenants ; que, pour l'instant, aucune demande n'étant formulée contre elle, elle n'en formule pas davantage contre M. X ; que ce n'est qu'en cause d'appel que M. X soulève la question de compétence ; que sa demande ne présente aucun caractère abusif et qu'elle ne saurait, par suite, devoir supporter une condamnation en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 août 2006, présenté pour la SARL Atelier du renouveau et M. X ; ils indiquent n'avoir aucune observation à formuler à propos du dernier mémoire de la SMABTP ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 août 2006, présenté pour la société Séchaud et Bossuyt Nord, dont le siège social est situé 172 rue de Paris à Lille (59040), par Me Ben Zenou, avocat ; elle conclut à ce que le jugement soit confirmé en ce qu'il l'a mise hors de cause, à ce que les conclusions dirigées contre elle soient rejetées, et, à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire de M. X, la Sarl Atelier du renouveau, l'entreprise Tern et la société SOCOTEC à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, enfin, à la condamnation du Sivom de la communauté du Bruaysis ou de tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que le désordre litigieux qui procède d'un défaut de pente du sol carrelé relève de la garantie de parfait achèvement ; qu'aucun manquement contractuel ne peut lui être reproché relatif aux travaux litigieux ; que sa mission de co-maîtrise d'oeuvre ne portait que sur les fluides correspondant aux lots n° 8 et n° 9 ainsi que l'attestent les pièces du marché ; que le désordre ne résulte pas du réseau d'électricité, ni de celui des canalisations de plomberie ; que la répartition des compétences entre l'architecte et le bureau d'études était opposable au maître d'ouvrage car elle était annexée à l'acte d'engagement ; que si des condamnations devaient être retenues à son encontre, elle devrait être intégralement garantie, n'ayant pas participé à la survenance des désordres ; que les défauts de pente résultent de fautes de conception ou d'exécution et de suivi de chantier imputables à l'équipe de conception architecturale ; que la juridiction administrative est compétente pour statuer sur ces appels en garantie ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 octobre 2006, par lequel la Sarl Atelier du renouveau et

M. X déclarent n'avoir pas d'observation à formuler sur le mémoire présenté par la société Séchaud et Bossuyt ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 décembre 2006, présenté pour le Sivom de la communauté du Bruaysis, représenté par son président en exercice, et par la Selarl Blondel Van den Schrieck Robillart et Pambo ; il conclut à la condamnation de la société Tern, de la société Atelier du renouveau Serge Doroginski, M. X, la société Sechaud et Bossuyt et la société SOCOTEC à lui verser d'une part, la somme de 198 000 euros à titre de réparation du préjudicie matériel avec réévaluation de cette somme en fonction de l'index BT 01 du 4 juin 2004 jusqu'au paiement avec intérêts au taux légal à compter de la demande de juillet 2003, y compris leur capitalisation, d'autre part, la somme de 54 000 euros, outre 1 000 euros par mois du 1er avril 2005 jusqu'à réfection complète des salles d'eau à titre de réparation du préjudice de jouissance et d'exploitation, enfin de condamner les mêmes in solidum à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient qu'il est fondé à demander la confirmation du jugement dans son principe et son quantum ; que l'impropriété des salles de bains a été clairement démontrée par l'expert ; qu'elle résulte du défaut d'écoulement suffisant des eaux lors de l'utilisation du local de douche ; que ce bâtiment est une maison de retraite qui accueille nécessairement des personnes âgées dont la mobilité et l'agilité sont réduites ; que ces malfaçons qui menacent la sécurité des personnes sont de nature à engager la responsabilité des constructeurs ; que le défaut d'évacuation des eaux ne peut être aperçu qu'à l'usage effectif des locaux ; que la responsabilité décennale des constructeurs est donc engagée ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 janvier 2007, par lequel M. X déclare n'avoir pas d'observation à formuler sur le mémoire présenté par le Sivom de la communauté du Bruaysis ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 février 2007, présenté pour la société SOCOTEC, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens et, en outre, par le moyen que les désordres sont apparus durant l'année de parfait achèvement ; qu'à défaut, ils étaient nécessairement visibles lors des opérations de réception ; qu'en sa qualité de bureau de contrôle, il n'est pas tenu par la garantie de parfait achèvement ni par la garantie biennale de bon fonctionnement ;

Vu le courrier communiqué par M. Rollet, expert, et enregistré le 27 février 2007 ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 février 2007, présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Vu la lettre en date du 10 mai 2007, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 mai 2007, présenté pour M. X, qui fait savoir qu'il s'associe au moyen d'ordre public susceptible d'être soulevé par la Cour ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 juin 2007, présenté pour la société Tern, dont le siége social est situé ZAL du Minopole à Bully-les-Mines (62160), par Me Dhonte, avocat ; elle conclut à ce que le jugement attaqué soit réformé en tant qu'il a prononcé sa condamnation vis-à-vis du maître d'ouvrage et, au titre des appels en garantie ; qu'elle demande, à titre subsidiaire, que la société Atelier du renouveau, M. X et la société SOCOTEC soient condamnés à la garantir intégralement des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre et, en toute hypothèse, la condamnation du Sivom de la communauté du bruaysis à lui verser la somme de

4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir qu'en retenant que les désordres trouvent leur origine dans l'exécution des travaux et non dans leur conception et qu'ils sont donc principalement imputables à l'entrepreneur et au bureau de contrôle, le Tribunal administratif de Lille n'a pas tenu compte, malgré ses écritures de première instance, de l'incohérence dont a fait preuve le rapport d'expertise ; que le choix d'implantation des siphons en angle, cause principale du désordre selon l'expert, a été le fait des architectes et non pas celui de l'entreprise ; que les premiers juges n'ont pas tiré les conséquences exactes de ces constatations ; que leur jugement sera donc réformé ; que sa responsabilité ne peut qu'être marginale et subsidiaire ; que le Tribunal a également fait une mauvaise appréciation du partage des responsabilités entre les constructeurs ; que le jugement sera réformé en ce qu'il l'a condamnée à garantir les autres intervenants ; qu'il y aura également lieu de condamner le maître d'oeuvre et le bureau de contrôle à la garantir et à la relever indemne de toute condamnation ; qu'à aucun moment, l'architecte ou le bureau de contrôle n'ont fait de remarques sur l'angle des pentes d'évacuation ; qu'elle a ainsi reçu leur assentiment tacite sur ce point ; que si des observations lui avaient été adressées, elle aurait eu le temps de modifier la pente du sol en cours d'exécution des travaux ; qu'en ne soulevant cette difficulté qu'après la réception, le maître d'oeuvre et le bureau de contrôle ont manifestement engagé leur responsabilité à son égard ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2007 à laquelle siégeaient Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et

Mme Agnès Eliot, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- les observations de Me Robilliart, pour le Sivom de la communauté du bruaysis, de

Me Ducloy, pour M. X et pour la SARL Atelier du renouveau, de Me Radiguet, pour le bureau d'études techniques Séchaud et Bossuyt, et de Me Verley, pour la SMABTP ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le Sivom de la communauté du bruaysis a conclu, en juin 1998, un marché de travaux avec la société Tern afin de réaliser l'extension et le réaménagement de la maison de retraite de Maisnil-les-Ruitz sous la maîtrise d'oeuvre conjointe de M. X,

architecte-urbaniste, et du bureau d'études techniques Séchaud et Bossuyt ainsi que sous le contrôle technique de la société SOCOTEC ; que, par un avenant au marché de maîtrise d'oeuvre, l'établissement public a pris acte du transfert des activités de M. X au profit de l'EURL d'architecture Atelier du renouveau dont le gérant est M. Y et en a tiré les conséquences au niveau du transfert de rémunération ; que la réception des travaux est intervenue suivant un procès-verbal en date du 28 novembre 2000 qui mentionnait de nombreuses réserves en annexes A et B ; qu'après avoir obtenu la désignation en référé d'un expert, le Sivom de la communauté du bruaysis a sollicité, par une requête au fond, la condamnation in solidum de la société Tern, de M. X, de l'Atelier du renouveau, du bureau d'études techniques Séchaud et Bossuyt et du contrôleur technique SOCOTEC à réparer, d'une part, les désordres affectant le sol des douches des chambres de la maison de retraite, à titre principal, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, et, à titre subsidiaire, sur le fondement de la garantie contractuelle, d'autre part, les autres désordres liés aux réserves non levées, sur le fondement de la garantie contractuelle ; que, par un jugement n° 0304296, en date du

25 octobre 2005, le Tribunal administratif de Lille a écarté la responsabilité du bureau d'études techniques Séchaud et Bossuyt et a prononcé la condamnation solidaire de l'Atelier du renouveau, de M. X et de la société Tern à réparer les désordres affectant le sol des douches des salles de bain sur le terrain de la garantie contractuelle en retenant que le défaut généralisé de pente du sol avait fait l'objet d'une réserve lors de la réception des travaux qui n'avait pas été levée ; qu'en ce qui concerne les autres désordres à l'exception de ceux précédemment mentionnés et de ceux affectant le raccordement au réseau d'assainissement, objet d'un autre jugement n° 033857 du même jour, le Tribunal a ordonné un complément d'expertise ; que la société SOCOTEC relève régulièrement appel du jugement n° 0304296, en tant qu'il concerne les désordres affectant les douches et en tant notamment qu'il procède à sa condamnation au titre desdits désordres ; que le Sivom de la communauté du bruaysis, M. X, l'Atelier du renouveau, la société Séchaud et Bossuyt et l'entreprise Tern présentent des appels incident ou provoqués ; que la SMABTP, en sa qualité d'assureur des architectes, appelée à la cause par la Cour, a la qualité d'observateur ;

Sur les conclusions d'appel principal de la société SOCOTEC et sur celles d'appel incident du Sivom de la communauté du bruaysis :

Considérant qu'il ne résulte pas du procès-verbal de réception des travaux d'extension et de réaménagement de la maison de retraite de Maisnil-les-Ruitz, en date du 28 novembre 2000, et notamment de ses annexes A et B, qu'une réserve ait été émise à propos d'un « défaut de pente dans les coins toilettes des chambres » ; qu'en revanche, il résulte de l'instruction, comme l'a d'ailleurs constaté dans ses conclusions l'expert judiciaire, que cette réserve n'a été formulée qu'au cours de la visite du 12 avril 2001 ; qu'elle a été portée au compte-rendu de cette visite sous la rubrique « réserves concernant le parfait achèvement », distincte de celle relative aux « réserves restant à lever à ce jour à la suite de la réception des travaux du 28/11/2000 » ; que, par suite, la société SOCOTEC est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a, pour prononcer sa condamnation à réparer les désordres consécutifs à ce défaut de pente, retenu que ces malfaçons ayant fait l'objet d'une réserve lors de la réception des travaux, la responsabilité du contrôleur technique se trouvait engagée sur le fondement de la garantie contractuelle de droit commun liée à l'existence de telles réserves ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le Sivom de la communauté du bruaysis devant le Tribunal administratif de Lille à l'encontre de la société SOCOTEC ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que les malfaçons relatives au défaut de pente du sol des douches dans les trente-trois chambres de la maison de retraite étaient visibles lors de la réception des travaux ; que les désordres en résultant qui rendaient cette partie d'une maison de retraite accueillant des personnes âgées impropre à sa destination, étaient aisément décelables et se sont d'ailleurs manifestés dans toute leur ampleur dès l'utilisation des douches ; que, par suite, le Sivom de la communauté du bruaysis n'est pas fondé à rechercher, à titre principal, la responsabilité de la société SOCOTEC sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société SOCOTEC est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à verser au Sivom de la communauté du bruaysis, solidairement avec d'autres constructeurs, les sommes de 198 000 euros et de

42 500 euros assorties des intérêts au taux légal par son article 1er, les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 5 836,78 euros par son article 2 ainsi que la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par son article 3 ;

Sur les conclusions d'appels provoqués du Sivom de la communauté du bruaysis à l'encontre de M. X, de la société Atelier du renouveau et de l'entreprise Tern :

Considérant, en premier lieu, que les malfaçons relatives au défaut de pente du sol des douches n'ayant pas fait, ainsi qu'il a été dit, l'objet de réserves lors de la réception, la responsabilité contractuelle de droit commun des maîtres d'oeuvre et de l'entrepreneur ne pouvait être recherchée ;

Considérant, en second lieu, que les vices dont s'agit ayant, ainsi qu'il a été dit, un caractère apparent au moment de la réception, la responsabilité des constructeurs ne pouvaient pas davantage être recherchées sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que, d'une part, M. X et la société Atelier du renouveau et, d'autre part, la société Tern, sont fondés à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il les a condamnés à verser au Sivom de la communauté du bruaysis, les sommes de 198 000 euros et de 42 500 euros assortis des intérêts au taux légal par son article 1er, les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 5 836,78 euros par son article 2 ainsi que la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par son article 3 ;

Sur les conclusions d'appels en garantie croisés de M. X, de la société Atelier du renouveau, de la société Tern et de la société SOCOTEC :

Considérant que M. X et la société Atelier du renouveau étant, par le présent arrêt, déchargés de toute condamnation prononcée par le jugement attaqué, les dispositions de l'article 4 de ce jugement condamnant la société Tern et la société SOCOTEC à garantir les architectes, doivent être annulées ; que les conclusions par lesquelles ces parties s'appellent mutuellement en garantie deviennent, désormais, compte tenu de ce qui est jugé par le présent arrêt, sans objet ;

Sur les conclusions de M. X et de la société Atelier du renouveau relatives à la nouvelle expertise :

Considérant que si M. X et la société Atelier du renouveau font valoir, en cause d'appel, que les frais de la nouvelle expertise qui a été ordonnée par l'article 5 du jugement attaqué, devront rester à la charge du Sivom de la communauté du bruaysis, il résulte de l'instruction que ladite expertise n'a pas encore été déposée ; que, de telles conclusions s'avèrent, en tout état de cause, prématurées et ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le jugement n° 0304296, en date du

25 octobre 2005, devra être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du Sivom de la communauté du bruaysis la somme de 2 000 euros que la société SOCOTEC réclame en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, sur le même fondement, il y a également lieu de condamner le Sivom de la communauté du bruaysis à verser à

M. X, d'une part, à l'EURL d'architecture Atelier du renouveau, d'autre part, à la société Tern et, enfin, à la société Séchaud et Bossuyt, la somme de 1 500 euros, chacun ;

Considérant que le Sivom de la communauté du bruaysis ayant la qualité de partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande qu'il présente sur ce fondement ;

Considérant que la SMABTP qui, en sa qualité d'ancien assureur des architectes, a été appelée en cause d'appel par la Cour, et contre laquelle aucune condamnation n'a été prononcée, n'a, dans le présent litige, pas la qualité de partie mais celle d'observateur ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle ce qu'il soit fait droit à sa demande présentée sur ce fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er, 2, 3 et 4 du jugement n° 0304296 du Tribunal administratif de Lille, en date du 25 octobre 2005, sont annulés.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions d'appels en garantie présentées en appel par la société SOCOTEC, l'Atelier du renouveau, M. X et la société Tern.

Article 3 : Le Sivom de la communauté du bruaysis versera à la société SOCOTEC la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le Sivom de la communauté du bruaysis versera à M. X la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le Sivom de la communauté du bruaysis versera à l'EURL d'architecture Atelier du renouveau la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le Sivom de la communauté du bruaysis versera à la société Séchaud et Bossuyt la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le Sivom de la communauté du bruaysis versera à la société Tern la somme de

1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : Les conclusions de la SMABTP présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 9 : Les conclusions du Sivom de la communauté du bruaysis présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 10 : Le surplus des conclusions de M. X et de l'Eurl d'architecture Atelier du renouveau est rejeté.

Article 11 : Le présent arrêt sera notifié à la société SOCOTEC, au Sivom de la communauté du bruaysis, à M. Jean-Pierre X, à l'EURL d'architecture Atelier du renouveau, à la société Séchaud et Bossuyt, à la SMABTP et à la société Tern.

Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.

N°05DA01549 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme Tricot
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SCP LEBAS - BARBRY et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 27/07/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05DA01549
Numéro NOR : CETATEXT000018004050 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-07-27;05da01549 ?
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