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10/10/2007 | FRANCE | N°07DA00691

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 10 octobre 2007, 07DA00691


Vu, I, sous le n° 07DA00691, la requête parvenue par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 mai 2007 et confirmée par courrier original le 10 mai 2007, présentée pour Mlle Tatiana X, demeurant au ..., par Me Ramas-Muhlbach ; Mlle X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702903, en date du 4 mai 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 avril 2007 du préfet du Pas-de-Calais décidant sa reconduit

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Vu, I, sous le n° 07DA00691, la requête parvenue par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 mai 2007 et confirmée par courrier original le 10 mai 2007, présentée pour Mlle Tatiana X, demeurant au ..., par Me Ramas-Muhlbach ; Mlle X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702903, en date du 4 mai 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 avril 2007 du préfet du Pas-de-Calais décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour désignant la Moldavie comme pays de destination de cette mesure ;

2°) à titre principal, d'annuler lesdites décisions pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ou une autorisation provisoire de séjour ;

4°) à titre subsidiaire, de désigner Israël comme pays de destination ;


Mlle X soutient :

- qu'alors qu'elle avait présenté les éléments justifiant des dangers qu'elle encourt en cas de retour dans son pays d'origine, le magistrat désigné du tribunal administratif a insuffisamment motivé son jugement ;

- qu'au fond, l'exposante a développé une relation affective durable avec un ressortissant israélien qui effectue de fréquents séjours en Grande-Bretagne et qu'elle avait l'intention de rejoindre lorsqu'elle a été interpellée ; qu'elle souhaite se rendre en Israël pour pouvoir se marier avec lui ; que, dans ces conditions, un retour dans son pays d'origine porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la mesure d'éloignement dont s'agit a été prise et constituerait une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que l'exposante craint pour sa sécurité en cas de retour en Moldavie, compte tenu des conditions dans lesquelles elle est entrée en France et des informations qu'elle a fournies aux services de police concernant les passeurs auxquels elle a eu recours ; qu'elle a d'ailleurs déposé une demande d'asile politique auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ce qu'elle était en droit de faire ainsi qu'en dispose le préambule de la constitution de 1958 ; que, dans ces conditions, la décision désignant la Moldavie comme pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière dont elle fait l'objet a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 22 juin 2007, par laquelle le magistrat désigné par le président de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au 16 juillet 2007 ;

Vu les pièces du dossier établissant que le préfet du Pas-de-Calais a régulièrement reçu notification de la requête susvisée mais n'a pas produit de mémoire ;


Vu, II, sous le n° 07DA00934, la requête parvenue par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 mai 2007 et confirmée par courrier original le 10 mai 2007, présentée pour Mlle Tatiana X, demeurant au ..., par Me Ramas-Muhlbach ; Mlle X demande au président de la Cour de décider qu'il sera sursis, jusqu'à ce que la Cour ait statué sur le fond de l'affaire, à l'exécution du jugement n° 0702903, en date du 4 mai 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 avril 2007 du préfet du Pas-de-Calais décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour désignant la Moldavie comme pays de destination de cette mesure ;

Mlle X soutient que la mise à exécution du jugement attaqué aurait pour elle des conséquences d'une particulière gravité ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la décision du président de la Cour en date du 30 mai 2007 prise en vertu de l'article
R. 222-33 du code de justice administrative, désignant M. Albert Lequien en tant que juge des reconduites à la frontière ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2007 :

- le rapport de M. Albert Lequien, magistrat désigné ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par arrêté en date du 29 avril 2007, le préfet du Pas-de-Calais a prononcé la reconduite à la frontière de Mlle X, ressortissante Moldave et, par décision distincte du même jour, désigné la Moldavie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ; que Mlle X forme appel du jugement en date du 4 mai 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions et demande, par la requête enregistrée sous le n° 07DA00691, l'annulation de celles-ci pour excès de pouvoir et, par la requête enregistrée sous le n° 07DA00934, qu'il soit sursis, jusqu'à ce que la Cour statue sur sa requête au fond, à l'exécution dudit jugement ;

Considérant que les deux requêtes susvisées, présentées pour Mlle X, sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un seul arrêt ;


Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, contrairement à ce que soutient Mlle X, le jugement attaqué, qui relève, pour rejeter les conclusions tendant à l'annulation de la décision désignant le pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière, que l'intéressée n'apporte aucun élément probant au soutien de ses allégations relatives aux risques qu'elle encourrait dans son pays d'origine et qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que ladite décision aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, est suffisamment motivé tant en droit qu'en fait sur ce point ;

Sur la légalité de la mesure de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que
Mlle X est entrée clandestinement en France munie d'un passeport qui n'était pas revêtu du visa requis, ainsi au demeurant que d'un faux document d'identité, et qu'elle n'était titulaire d'aucun titre de séjour l'autorisant à demeurer sur le territoire national ; qu'elle entrait, ainsi, dans le cas prévu par les dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui autorisait le préfet du Pas-de-Calais à prononcer sa reconduite à la frontière ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X, qui est célibataire et sans charge de famille, a elle-même indiqué lors de son interpellation n'être entrée que temporairement sur le territoire français le 28 avril 2007, dans le seul but de rejoindre son fiancé résidant actuellement en Grande-Bretagne ; qu'il est constant que l'intéressée n'a aucune attache familiale en France, tandis qu'elle n'établit ni même n'allègue être dépourvue d'attaches en Moldavie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans ; que, dans ces conditions et eu égard aux conditions et à la très brève durée de son séjour en France, l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, que si Mlle X a formulé le 2 mai 2007, lors de sa rétention administrative, une demande tendant à obtenir la reconnaissance du statut de réfugié, cette demande a été déposée postérieurement à la date à laquelle l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué a été pris et s'avère, par suite, sans incidence sur sa légalité ; que la circonstance qu'une telle demande, qui a été soumise à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides pour examen selon la procédure prioritaire, a été présentée, fait seulement obstacle à ce qu'il soit procédé à l'exécution dudit arrêté jusqu'à ce que l'Office se soit prononcé sur cette demande ;

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que Mlle X fait valoir qu'elle a l'intention de se marier avec son fiancé, de nationalité israélienne, avec lequel elle souhaite s'installer en Israël et soutient qu'un retour dans son pays d'origine compromettrait la réalisation de ces projets ; qu'elle n'apporte, toutefois, aucun élément de nature à établir qu'elle se trouverait dans l'impossibilité d'effectuer en Moldavie les démarches nécessaires à obtenir son admission au séjour en Israël ; que, dès lors, la décision attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en second lieu, que si Mlle X fait état des risques qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine dès lors qu'elle aurait donné aux services de police, à l'occasion de son interpellation, des renseignements concernant les passeurs en compagnie desquels elle est entrée en France, ni le récit écrit de sa main, ni la lettre de son fiancé, qu'elle a produits devant les premiers juges et qui sont peu circonstanciés et peu convaincants, ne sont de nature à établir qu'elle serait effectivement et personnellement en proie à des menaces en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée, désignant la Moldavie comme pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière dont
Mlle X a fait l'objet, aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction assortie d'astreinte présentées par la requérante doivent être rejetées ; qu'enfin, dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif de procéder lui-même à la désignation du pays de destination d'une mesure d'éloignement prise à l'égard d'un ressortissant étranger, les conclusions présentées par Mlle X et tendant à ce que la Cour désigne Israël comme pays de destination de la reconduite à la frontière prononcée à son égard ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Considérant que le présent arrêt statue sur la requête, enregistrée sous le n° 07DA00691, présentée par Mlle X et tendant à l'annulation du jugement attaqué du magistrat désigné du Tribunal administratif de Lille en date du 4 mai 2007 ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête enregistrée sous le n° 07DA00934 et tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement jusqu'à ce que la Cour statue sur les conclusions de la requête au fond ;



DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 07DA00934 présentée pour
Mlle Tatiana X.

Article 2 : La requête n° 07DA00691 présentée pour Mlle Tatiana X est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mlle Tatiana X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Copie sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : RAMAS-MUHLBACH

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Date de la décision : 10/10/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 07DA00691
Numéro NOR : CETATEXT000018259336 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-10-10;07da00691 ?
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