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16/10/2007 | FRANCE | N°06DA01221

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 16 octobre 2007, 06DA01221


Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Pierre X, demeurant ..., par Me Delaporte ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400033 en date du 29 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département de la Seine-Maritime à lui verser la somme de 127 987,05 euros assortie des intérêts à compter de sa demande ;

2°) de condamner le département de la Seine-Maritime à lui verser cette somme augmentée d

es intérêts légaux à compter du 7 janvier 2004 et des intérêts capitalisés ;
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Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Pierre X, demeurant ..., par Me Delaporte ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400033 en date du 29 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département de la Seine-Maritime à lui verser la somme de 127 987,05 euros assortie des intérêts à compter de sa demande ;

2°) de condamner le département de la Seine-Maritime à lui verser cette somme augmentée des intérêts légaux à compter du 7 janvier 2004 et des intérêts capitalisés ;

3°) de mettre à la charge du département de la Seine-Maritime la somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Il soutient que la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre pour la reconstruction du collège René Coty à Auffay était, en ce qui le concerne, irrégulière et infondée dès lors que le département n'a pas rapporté la preuve des fautes qui lui sont reprochées ; que les faits reprochés par le maître de l'ouvrage dans son courrier du 31 juillet 2003 sont imputés par l'administration à M. Y ; qu'il n'a pas été informé de la rupture abusive du contrat en ce qui le concerne ; que la décision le concernant n'est pas motivée ; que le courrier du 11 septembre 2003 qui confirme son éviction émane d'une personne incompétente ; que la rupture est intervenue à quelques mois seulement de la réception, alors que les 17 mois de chantier n'avaient posé aucun problème ; que cette rupture abusive a engendré un préjudice de 91 354,25 euros à titre de manque à gagner sur ses honoraires d'architecte, de 5 632,80 euros au titre des frais d'assurance et de 31 000 euros au titre de l'atteinte à sa réputation professionnelle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2006, présenté pour le département de la Seine-Maritime, par la SCP Parmentier, Didier ; il conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. X la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que la requête est tardive ; que les manquements de M. X à ses obligations contractuelles de maître d'oeuvre chargé spécifiquement du suivi du chantier dans le cadre de la mission DET qui lui était dévolue sont établis par les pièces du dossier et, en particulier, par les pièces du dossier de première instance ; que ces défaillances ont été à plusieurs reprises portées à sa connaissance ; que la compétence du signataire de la lettre du 11 septembre 2003 est sans incidence dès lors que cette lettre n'est que le simple rappel de la véritable décision de le remplacer prise le 31 juillet 2003 ; que cette dernière décision a été prise par la personne responsable du marché ; qu'en tout état de cause, la méconnaissance du formalisme de la décision critiquée, que le Tribunal a qualifiée de résiliation de fait en ce qui concerne M. X, ne donne droit à aucune indemnité dès lors qu'elle est justifiée au fond ; que les manquements reprochés au requérant, nombreux, réitérés et pour certains, graves, étaient de nature à justifier la sanction au fond ; qu'à titre subsidiaire, le requérant ne pourrait prétendre qu'à une indemnité correspondant aux sommes restant dues en vertu du marché, soit 4 % de la somme de 76 383,15 euros ; que les frais d'assurance étaient couverts par le prix du marché ; que l'atteinte à la réputation n'est pas établie dès lors que seules les entreprises intervenant sur le chantier ont été informées du remplacement du requérant ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 février 2007, présenté pour M. X ; il conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que la requête a été présentée dans le délai de deux mois qui a suivi la notification du jugement le 17 juillet 2006 ; que M. Y était, comme lui, totalement impliqué dans la mission DET ; que l'immixtion du maître de l'ouvrage dans les rapports entre maîtres d'oeuvre est abusive ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978 ;

Vu la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 et le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;


Sur le préjudice lié à la mesure d'éviction de M. X :

Considérant que, par un marché signé le 15 mars 2001, le département de la
Seine-Maritime a confié la conception et la direction des travaux de reconstruction du collège René Coty situé à Auffay à un groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre composé, notamment, de M. X et de M. Y, architectes ; que, sur la demande du département exprimée par lettre du 31 juillet 2003, M. Y, mandataire du groupement, a assuré seul, à compter du 1er septembre 2003, les missions liées au suivi du chantier qui incombaient à M. X ; qu'à compter de la même date, ce dernier n'a plus été convié aux réunions de chantier et les entreprises intervenantes ont été informées que M. Y serait leur seul interlocuteur en qualité de représentant de chantier ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte des rapports techniques, des ordres de service, des comptes rendus de réunion de chantier et des échanges de correspondances entre M. Y et M. X versés au dossier, que celui-ci était chargé, au sein du groupement de maîtrise d'oeuvre, de l'exécution de la mission dite DET, de suivi du chantier ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient M. X, la lettre de mise en demeure du 31 juillet 2003, régulièrement adressée par le département de la Seine-Maritime à M. Y pris en qualité de mandataire du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre et, comme tel, seul interlocuteur du maître de l'ouvrage, ne peut être interprétée comme ayant imputé à ce dernier, pris personnellement, la plupart des manquements relevés à l'encontre du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des lettres de mise en demeure des 5 mai, 15 mai et 31 juillet 2003, des échanges de correspondances susmentionnés ainsi que des comptes rendus de réunion de chantier de construction du collège produits au dossier que M. X a accepté la commande de prestations différentes de celles prévues pour l'exécution du lot n° 17 de chauffage et de ventilation, sans l'accord du maître de l'ouvrage et en contradiction avec les stipulations de l'article 26 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre ; qu'il ne s'est pas davantage opposé à la réalisation de travaux supplémentaires pour l'exécution des marchés des lots nos 18 et 19 relatifs aux courants forts et faibles ; que l'architecte requérant n'a, malgré des remarques faites par le maître de l'ouvrage en réunion le 6 février 2003, fait produire que tardivement en mai 2003 par la société Sero, dont il devait assurer la surveillance des travaux, une série d'études de synthèse pour l'installation d'un système d'aspiration des poussières, pour l'implantation d'une citerne de gaz et pour la gestion du chauffage par zones ; que, malgré des remarques répétées jusqu'à la réunion de chantier du 2 juin 2003, M. X n'a pas pris en considération des observations du bureau de contrôle relatives au désenfumage de divers espaces du bâtiment, à des problèmes d'alimentation en gaz et à la mise en place d'éléments électriques ; que l'inertie à tirer les conséquences techniques imposées par les prescriptions du permis de construire en matière d'accessibilité et à répondre aux demandes des entreprises relatives à l'application des stipulations particulières de leur contrat au sujet des intempéries révèle, avec une série d'une vingtaine de points récapitulés dans une note de synthèse établie le 14 avril 2004 par le groupement de maîtrise d'oeuvre, une série de manquements dans la mission de surveillance et de contrôle qui incombait au requérant au titre de sa mission de suivi du chantier ; qu'à ces manquements, s'ajoute la méconnaissance du pouvoir de direction du maître de l'ouvrage dès lors que M. X n'a pas donné suite à une demande du département concernant le dépoussiérage de la zone Segpa du collège, n'a pas pris en compte une demande d'analyse d'une solution proposée par une entreprise en matière de régulation du chauffage, n'a pas produit de devis relatif à l'implantation d'une cuve, s'est abstenu de produire un plan parcellaire exigé après l'ouverture du chantier et un organigramme des clés du bâtiment ; que ces manquements, dont la matérialité est établie par les pièces du dossier, présentait, par leur répétition et leur nature, un caractère de gravité qui justifiait que le groupement de maîtrise d'oeuvre fût mis en demeure par le maître de l'ouvrage, en application des dispositions de l'article 5 du cahier des clauses administratives générales « prestations intellectuelles » auxquelles renvoie l'article 33.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre en litige, de faire remplacer M. X, chargé de l'exécution des prestations qui lui étaient confiées ; que, la décision prescrivant ce remplacement, sous peine de résiliation du contrat, étant justifiée au fond, M. X n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir qu'elle est intervenue dans des conditions irrégulières ; que celui-ci n'est, par suite, pas fondé à demander la condamnation du département de la Seine-Maritime à l'indemniser des préjudices subis du fait de son éviction du chantier ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête opposée par le département de la Seine-Maritime, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;


Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Seine-Maritime qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X la somme de 1 500 euros que le département de la Seine-Maritime demande au titre des mêmes dispositions ;










DÉCIDE :


Article 1er : La requête de M. Pierre X est rejetée.

Article 2 : M. Pierre X versera la somme de 1 500 euros au département de la Seine-Maritime en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pierre X et au département de la Seine-Maritime.

N°06DA01221 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA01221
Date de la décision : 16/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Patrick Minne
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : DELAPORTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-10-16;06da01221 ?
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