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30/10/2007 | FRANCE | N°07DA01469

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des référés, 30 octobre 2007, 07DA01469


Vu la requête, enregistrée sous le n° 07DA01469 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 17 septembre 2007, présentée pour la société par actions simplifiée TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES dont le siège social est 15 bis rue du Dronckaert à Roncq (59223) par Me Legrand ; la SAS TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES doit être regardée comme demandant au juge des référés de la Cour, d'ordonner en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'avis de mise en recouvrement du 23 décembre 2004 n° 041200008 d'un

montant de 1 925 011 euros soit 507 245 euros en principal, ...

Vu la requête, enregistrée sous le n° 07DA01469 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 17 septembre 2007, présentée pour la société par actions simplifiée TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES dont le siège social est 15 bis rue du Dronckaert à Roncq (59223) par Me Legrand ; la SAS TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES doit être regardée comme demandant au juge des référés de la Cour, d'ordonner en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'avis de mise en recouvrement du 23 décembre 2004 n° 041200008 d'un montant de 1 925 011 euros soit 507 245 euros en principal, 124 268 euros en intérêts de retard et 1 293 498 euros au titre de l'amende 1740 ter du code général des impôts ou au moins en ce qui concerne cette amende, à la suite du jugement du Tribunal administratif de Lille du 26 avril 2007 rejetant sa demande en décharge desdites impositions et majorations ;


Elle soutient que la condition d'urgence est satisfaite ; que la mise en recouvrement des impositions contestées mettrait en péril son équilibre financier et la poursuite de son activité, menaçant les 49 emplois crées ; que l'urgence est évidente comme l'atteste la liasse fiscale au 31 décembre 2006 surtout s'agissant de la pénalité de l'article 1740 ter du code général des impôts alors même que le commissaire du gouvernement de Lille a reconnu la réalité de facturations et de livraisons de camions ; qu'il existe un doute sérieux eu égard à l'argumentation développée tant sur la régularité de la procédure d'imposition que sur le bien-fondé des impositions et des pénalités ; que s'agissant de la régularité de la procédure d'imposition, l'administration a méconnu le principe d'indépendance des procédures, a commis un détournement de procédure en méconnaissant les dispositions des articles L 101 et L 82c du livre des procédures fiscales et R 155-2 et 11 du code de procédure pénale, a méconnu le principe du contradictoire et les dispositions de la charte des droits et obligations du contribuable relatives à la saisine du supérieur hiérarchique et de l'interlocuteur départemental ; que s'agissant du bien-fondé, les dispositions combinées des articles 272-2° et 283-4° du code général des impôts remettant en cause la déduction de la TVA lorsque la facture est fictive ne sont opposables lorsque l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et se présente comme assujetti à la TVA, que si l'administration démontre le caractère fictif de la facture ; que s'agissant de la participation à un circuit de fraude à la TVA ou carrousel, l'administration doit démontrer l'implication volontaire ou au moins la complicité passive de la société avec le fraudeur selon les critères de la Cour de justice des communautés européennes ; qu'en l'espèce, l'administration n'a établi ni le caractère fictif des livraisons de camions et des factures correspondantes ni que la société aurait participé volontairement ou aurait réalisé les diligences normales qui lui auraient permis de découvrir le caractère frauduleux de l'opération ; que le tribunal administratif a opéré un renversement de la charge de la preuve en tenant pour certaines les affirmations du vérificateur sans se prononcer sur les nombreux justificatifs établissant la réalité des factures et des livraisons fournis par la requérante et en présumant que les particularités dans la constitution et le fonctionnement des fournisseurs de véhicules étaient connues de la société ; qu'aucun élément ne permet de conclure que les factures d'achat produites sont fictives ; qu'en tant qu'un des plus grands négociants du secteur, elle est en mesure de retracer l'itinéraire économique réel de tous les véhicules acquis ; qu'elle démontre la réalité des transactions par la présentation d'une fiche complète appuyée de toutes les pièces justificatives notamment le livre de police ; que le principe de neutralité de la TVA interdit la remise en cause de la déductibilité de la taxe dont elle s'est effectivement acquittée ; qu'elle n'est tenue qu'à l'accomplissement de diligences normales relatives à l'existence réelle des fournisseurs, à l'annonce de défaillance financière antérieure, à une éventuelle participation antérieure à un circuit de fraude, à la réalisation de facturations inhabituelles ; que le groupe est le premier opérateur belge et il ne peut être affirmé que le chiffre d'affaires se serait anormalement accru ; que l'assiette de l'amende est constituée par les factures de revente de la société à la société belge du même groupe alors que les véhicules sont bien entrés dans son patrimoine et ont effectivement été transférés à la société de droit belge ; que le commissaire du gouvernement du Tribunal administratif de Lille proposait de réduire l'assiette de l'amende ; que ces majorations sont incompatibles avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme car l'article 1740 ter du code général des impôts prévoit un taux unique ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique (Direction de contrôle fiscal - nord) par lequel le ministre conclut au rejet de la requête présentée par la SAS TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES ; il soutient que la société ne fait état que de sa situation financière sans justifier que la mise en recouvrement des sommes litigieuses mettrait en péril la poursuite de son activité ; que la société a constitué en 2006 une provision pour impôt non déductible fiscalement de 100 000 euros ; qu'elle ne démontre pas que le recouvrement des impositions entraînerait la fin de son activité ; qu'en 2006, la société a procédé à des distributions importantes de dividendes ; que la situation comptable du 31 décembre 2006 est certainement différente de la situation actuelle ; que les mesures d'exécution jusqu'alors mises en oeuvre ne sont pas non plus justifiées ; que les résultats de la société sont largement bénéficiaires ; que, concernant la régularité de la procédure d'imposition, l'administration a déjà répondu dans son mémoire en défense produit en annexe ; que s'agissant du caractère fictif des livraisons, elle s'en réfère à la défense produite devant les premiers juges ; que le Tribunal s'est fondé sur des éléments objectifs découlant de l'instruction pour conclure que la société ne pouvait ignorer participer à un circuit de fraude à la TVA ; qu'elle procédait à des échanges de courriers avec des sociétés participant à la fraude en amont de ses fournisseurs directs ; que son activité de négoce de camions neufs a été développée spécifiquement avec les sociétés ALTUS et ORCA qui étaient inconnues du métier ; que son chiffre d'affaires a connu un développement brutal ; que le Tribunal qui n'a pas renversé la charge de la preuve a estimé que cette preuve était administrée ;





Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 octobre 2007 (télécopie), présenté pour la société TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES qui demande la suspension de l'exécution de l'avis de mise en recouvrement pour l'intégralité des pénalités s'élevant à 1 417 766 euros par les mêmes moyens ; elle soutient en outre qu'il résulte de la situation comptable de la société établie au 30 septembre 2007 un bénéfice net comptable de 169 144 euros après provision exceptionnelle pour rappel de TVA, les pénalités n'ayant pas été provisionnées ; que la situation nette d'élève à 2 717 447 euros et la trésorerie disponible à 396 382 euros ; que les pénalités restant à régler représentent entre deux et trois années de bénéfice net moyen et plus de 50% de la situation nette ; qu'elle ne serait plus en état de mobiliser la trésorerie suffisante pour régler ses achats de véhicules si elle provisionnait ces pénalités ; qu'elle a réglé le montant de la TVA rappelée soit 507 245 euros ; que le fonds de commerce et les valeurs mobilières sont nantis au profit du Trésor ; que le service du recouvrement a la faculté d'appréhender tout remboursement de crédit de TVA , toute créance réglée par voie d'avis à tiers détenteur ; qu'une récente décision de la Cour de justice des communautés européennes du 27 septembre 2007 indique qu'une entreprise ne peut être impliquée dans un circuit de fraude lorsqu'elle a pris toute mesure raisonnable en son pouvoir pour s'assurer que l'opération réalisée ne la conduit pas à participer à une telle fraude ; qu'elle s'est interrogée sur l'immatriculation des fournisseurs au registre du commerce et des sociétés, sur la validité des numéros de TVA, ces sociétés n'ayant pas connu de défaillance financière ni déjà participé à une fraude ; qu'aucune connivence ni complicité n'a pu être démontrée ; que si la réalisation d'une fraude en amont a été démontrée par l'administration, elle ne s'est pas prononcée sur la nécessité économique pour la société de recourir à un marché parallèle à celui des fabricants de camions pour faire face à une importante demande du marché et assurer un développement commercial rapide ;


Vu la décision en date du 15 octobre 2007 par laquelle le président de la Cour a désigné Mme Helmholtz , président de chambre, en qualité de juge des référés, en application de l'article L 511-2 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour et de l'heure de l'audience ;

Après avoir entendu à l'audience publique qui s'est ouverte le 22 octobre 2007 à 11 heures et a été levée à 11 heures 25, le rapport de Mme Helmholtz, juge des référés, les observations de M. X pour la direction de contrôle fiscal-nord, la société n'étant ni présente, ni représentée ; M. X prend connaissance du mémoire en réplique de la société et indique que la situation au 30 septembre 2007 ne reflète pas nécessairement la situation de la société bien que les impositions à la charge de celle-ci sont importantes ; que sur le bien-fondé, il s'en remet aux mémoires présentés tant en première instance qu'en appel ;



Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision dans les meilleurs délais. La suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision. » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 522-1 du même code : « La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit contenir l'exposé au moins sommaire des faits et moyens et justifier de l'urgence de l'affaire… » ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 522-3 du même code : « Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L.522-1. » ;
Considérant que pour justifier que la condition d'urgence est remplie, la société requérante fait valoir que le recouvrement des impositions contestées et notamment de l'amende de l'article 1740 ter du code général des impôts met en péril l'équilibre financier et la poursuite de son activité ; qu'elle fait valoir dans ses dernières écritures que la situation nette comptable établie au 30 septembre 2007 pour la période allant du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2007 fait apparaître un bénéfice net comptable de 169 144 euros après provision exceptionnelle pour rappel de TVA de 507 245 euros qui vient d'être réglé ; que toutefois, les pénalités s'élevant à 1 417 766 euros dont l'amende de l'article 1740 ter du code général des impôts représentent entre deux et trois années de bénéfice net moyen et plus de 50% de la situation nette ; qu'elle indique que si elle provisionnait les pénalités, elle ne serait plus en état de mobiliser la trésorerie suffisante pour régler ses achats de véhicules et ne pourrait vraisemblablement recourir à l'emprunt bancaire, alors que son fonds de commerce et les valeurs mobilières sont nantis au profit du Trésor qui a la faculté d'appréhender tout remboursement de crédit de TVA, toute créance réglée par voie d'avis à tiers détenteur ; que toutefois, la présentation de la situation nette comptable au 30 septembre 2007 produite par la société dans ses dernières écritures alors qu'elle indique elle même avoir réglé les droits en principal ne suffit pas à établir, comme elle le soutient, que le paiement des majorations bien qu'importantes, mises à sa charge et dont elle peut au demeurant demander l'aménagement des conditions de règlement, mettrait en péril la pérennité de l'entreprise ; que ses allégations sur le caractère vraisemblable de l'impossibilité de recourir à l'emprunt ne sont corroborées par aucun élément alors qu'elle fait par ailleurs partie d'un ensemble d'entreprises liées, le groupe Hoet qui a des sociétés dans d'autres pays d'Europe et dont la holding est en Belgique et n'apporte aucun élément indiquant qu'elle ne pourrait bénéficier d'aides de la part d'autres sociétés de cet ensemble ; qu'ainsi, eu égard aux éléments présentés, la condition d'urgence exigée par l'article L 521-1 du code de justice administrative n'est pas justifiée ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner s'il existe un moyen propre à créer un doute sérieux, la requête de la SAS TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES ne peut qu'être rejetée ;






ORDONNE :


Article 1er : La requête présentée par la société TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société TURBO'S HOET - PIECES ET VEHICULES et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal-nord et au Trésorier-payeur général de la région Nord - Pas-de-Calais et du département du Nord.

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N° 07DA01469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 07DA01469
Date de la décision : 30/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Câm Vân Helmholtz
Avocat(s) : CABINET THERET et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-10-30;07da01469 ?
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