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15/11/2007 | FRANCE | N°07DA01060

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 15 novembre 2007, 07DA01060


Vu, I, sous le n° 07DA01060, la requête, enregistrée le 13 juillet 2007 par télécopie et régularisée le 18 juillet 2007 par réception de l'original au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, qui demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701307, en date du 28 mai 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé l'arrêté du PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, en date du 23 mai 2007, ordonnant la reconduite à la frontière

de
M. Long X et, d'autre part, l'a condamné à verser à M. X la somme de 400...

Vu, I, sous le n° 07DA01060, la requête, enregistrée le 13 juillet 2007 par télécopie et régularisée le 18 juillet 2007 par réception de l'original au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, qui demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701307, en date du 28 mai 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé l'arrêté du PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, en date du 23 mai 2007, ordonnant la reconduite à la frontière de
M. Long X et, d'autre part, l'a condamné à verser à M. X la somme de 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X en première instance ;

Il soutient que son arrêté ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé de mener une vie familiale normale et n'a donc pas violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que M. X possède des attaches familiales fortes dans son pays d'origine, ne démontre pas être dans l'impossibilité d'emmener avec lui ses trois enfants et ne justifie pas que ses enfants ne puissent être scolarisés en Chine ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu l'ordonnance du 23 juillet 2007 fixant la clôture de l'instruction au 3 septembre 2007 à
16 h 30 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2007, présenté pour M. Long X, demeurant ..., par la SELARL Eden Avocats ; M. X conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que ses attaches en Chine sont ténues dès lors que son père est décédé, que ses soeurs vivent en Europe et que son premier enfant a été élevé par sa soeur et son beau-frère ; que le fait qu'il ne maîtrise pas le français ne démontre pas un défaut d'insertion sociale dès lors qu'il réside en France depuis 7 ans, qu'il travaille, déclare ses revenus et dispose d'une promesse d'embauche en cas de régularisation de sa situation ; que ses enfants, qui sont scolarisés en France et n'ont jamais vécu en Chine, connaîtraient, en cas de retour dans ce pays, des difficultés d'adaptation liées au fait qu'ils sont nés en dehors des règles du planning familial chinois ; que l'arrêté de reconduite à la frontière est insuffisamment motivé et méconnaît les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ; que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que l'arrêté de reconduite à la frontière litigieux méconnaît l'intérêt supérieur des enfants ; que la décision fixant le pays de destination de la reconduite viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance du 6 septembre 2007 portant réouverture de l'instruction ;


Vu, II, sous le n° 07DA01061, la requête, enregistrée le 13 juillet 2007 par télécopie et régularisée le 18 juillet 2007 par réception de l'original au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, qui demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701308, en date du 28 mai 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé l'arrêté du PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS en date du 23 mai 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mei épouse X et, d'autre part, l'a condamné à verser à Mme X la somme de 400 euros au titre de l'articleL. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X en première instance ;


Il soutient que son arrêté ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée de mener une vie familiale normale et n'a donc pas violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que
Mme X possède des attaches familiales fortes dans son pays d'origine, ne démontre pas être dans l'impossibilité d'emmener avec elle ses trois enfants et ne justifie pas que ses enfants ne puissent être scolarisés en Chine ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu l'ordonnance du 23 juillet 2007 fixant la clôture de l'instruction au 3 septembre 2007 à
16 h 30 ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2007, présenté pour Mme Mei épouse X, demeurant ..., par la SELARL Eden Avocats ; Mme X conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que ses attaches en Chine sont ténues dès lors que son père est décédé, que les soeurs de M. X vivent en Europe et son premier enfant a été élevé par la soeur de M. X et son beau-frère ; que ses enfants, qui sont scolarisés en France et n'ont jamais vécu en Chine, connaîtraient, en cas de retour dans ce pays, des difficultés d'adaptation liées au fait qu'ils sont nés en dehors des règles du planning familial chinois ; que l'arrêté de reconduite à la frontière est insuffisamment motivé et méconnaît les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ; que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que l'arrêté de reconduite à la frontière litigieux méconnaît l'intérêt supérieur des enfants ; que la décision fixant le pays de destination de la reconduite viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance du 6 septembre 2007 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies relative aux droits de l'enfant signée à New-York le
26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la décision du président de la Cour en date du 30 mai 2007 prise en vertu de l'article
R. 222-33 du code de justice administrative, désignant M. Albert Lequien en tant que juge des reconduites à la frontière ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 2007 :

- le rapport de M. Albert Lequien, magistrat désigné ;

- les observations de Me Demir, pour les époux X ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes enregistrées le 13 juillet 2007 sous les nos 07DA01060 et 07DA01061 sont relatives aux jugements n° 0701307 et n° 0701308 en date du 28 mai 2007 par lesquels le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé les arrêtés du 23 mai 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et de Mme épouse X ; qu'elles concernent la situation d'un couple et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un seul arrêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1º Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X, de nationalité chinoise, n'ont pas été en mesure de présenter les documents justifiant de leur entrée régulière sur le territoire français ; qu'ainsi ils entraient dans le cas prévu par les dispositions du 1° de l'article L. 511-1-II précité ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que M. et Mme X font valoir qu'ils résident en France depuis 1999, que leurs trois enfants sont nés en France où deux d'entre eux sont scolarisés et bien intégrés et qu'ils s'efforcent de s'intégrer à la vie sociale en France ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'eu égard aux conditions de séjour en France des intéressés, qui sont en situation irrégulière et ont précédemment fait l'objet d'arrêtés de reconduite à la frontière les 1er mars 2001, 7 janvier 2002 et 13 mars 2006, et à la circonstance qu'ils ne sont pas dépourvus de tout lien familial avec leur pays d'origine, où réside notamment le premier enfant du couple, né en 1996, l'arrêté du PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'a pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur ce que les arrêtés attaqués auraient méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour en prononcer l'annulation ;

Considérant qu'il appartient, toutefois, à la Cour administrative d'appel de Douai, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par
M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Rouen ;


Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X vivent en France depuis 1999, que trois de leurs enfants sont nés en France, respectivement en 2000, 2003 et 2004, y ont toujours vécu et sont scolarisés ; qu'en outre, le soutien, tant de la population que des autorités locales, atteste des réels efforts d'intégration de la famille ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a entaché ses arrêtés de reconduite à la frontière du 23 mai 2007 d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces mesures sur la situation personnelle de M. et Mme X ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PRÉFET DE LA
SEINE-SAINT-DENIS n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé les arrêtés du
23 mai 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et de Mme épouse X ;


Sur les conclusions de M. et Mme X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de condamner l'Etat à verser à M. et Mme X les sommes de 1 000 euros, chacun, qu'ils demandent, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;



DÉCIDE :


Article 1er : La requête du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme X une somme de 1 000 euros, chacun, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, à M. Long X, à Mme Mei épouse X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Nos07DA01060,07DA01061 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Date de la décision : 15/11/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 07DA01060
Numéro NOR : CETATEXT000018396208 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-11-15;07da01060 ?
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