La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/12/2007 | FRANCE | N°07DA00802

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 11 décembre 2007, 07DA00802


Vu la requête, enregistrée le 30 mai 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DU NORD ; le préfet demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0605725 en date du 3 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 10 mai 2006 refusant de délivrer un certificat de résidence à M. Ahmed X, ensemble sa décision du 1er août 2006 rejetant le recours gracieux formé par l'intéressé, et lui a enjoint de procéder à un réexamen de sa situation ;
2°) de rejeter la demande présentée par M.

X devant le Tribunal administratif de Lille ;


Le PREFET DU NORD sou...

Vu la requête, enregistrée le 30 mai 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DU NORD ; le préfet demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0605725 en date du 3 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 10 mai 2006 refusant de délivrer un certificat de résidence à M. Ahmed X, ensemble sa décision du 1er août 2006 rejetant le recours gracieux formé par l'intéressé, et lui a enjoint de procéder à un réexamen de sa situation ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lille ;


Le PREFET DU NORD soutient :

- que, contrairement à ce qu'a estimé à tort le tribunal administratif, M. X ne pouvait se prévaloir des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, qui énonce les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent prétendre à la délivrance d'un certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale », dès lors que sa demande de certificat de résidence n'était pas fondée sur les stipulations de cet article, mais exclusivement sur celles de l'article 7 ter du même accord, qui posent les conditions requises pour obtenir un certificat de résidence de dix ans en qualité de retraité et qu'il ne remplissait pas les conditions posées par l'article 7 ter dudit accord ;

- que compte tenu de sa situation familiale, la décision attaquée n'est entachée d'aucune erreur de droit au regard des stipulations de l'accord franco-algérien, ni d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur la situation personnelle de l'intéressé et n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 5 juin 2007, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au 6 août 2007 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2007, présenté pour M. Ahmed X, demeurant chez M. Saad X, ..., par Me Abbas ; M. X conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au PREFET DU NORD de lui délivrer un titre de séjour et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. X soutient :

- que la décision de refus de séjour attaquée est insuffisamment motivée, dès lors qu'elle ne vise pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que sa motivation ne révèle pas que le préfet se serait livré à un examen de la situation de l'exposant au regard des stipulations de ce texte ;

- que le PREFET DU NORD, qui pensait être lié par la demande de M. X, a instruit sa demande sur le seul fondement de l'article 7 ter de l'accord franco-algérien et n'a pas examiné sa situation au regard des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, qu'il a méconnu ;

- que M. X justifiait d'une vie privée et familiale sur le territoire français, où résident quatre de ses fils, dont l'un est de nationalité française, et leur famille ainsi qu'une de ses filles ; que ceux-ci subviennent à l'intégralité de ses besoins ; qu'il est, en outre, isolé dans son pays d'origine depuis le décès de son épouse ; qu'il a vécu régulièrement et a travaillé sur le territoire français de 1970 à 1977 et perçoit une pension de retraite au titre des années 1970 à 1976 ;

Vu l'ordonnance en date du 13 novembre 2007 du président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par une décision en date du 10 mai 2006, le PREFET DU NORD a refusé d'admettre au séjour M. X, ressortissant algérien, au motif qu'il ne remplissait pas les conditions posées par les stipulations de l'article 7 ter de l'accord franco-algérien, modifié, du 27 décembre 1968 pour prétendre à la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans portant la mention « retraité » ; que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé ladite décision, ensemble le rejet du recours gracieux formé par l'intéressé, au motif qu'il ressortait des termes mêmes des décisions attaquées que le PREFET DU NORD n'avait pas procédé à un examen de la situation personnelle de M. X au regard des stipulations de l'article 6-5° de l'accord susmentionné et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier et notamment de la demande de titre de séjour, que M. X n'avait pas présenté de demande sur le fondement de l'article 6-5 de la convention franco-algérienne susvisée et que dès lors le PREFET DU NORD n'était pas tenu d'examiner sa demande au regard desdites stipulations ; que par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DU NORD se soit abstenu, avant de prendre la décision contestée, et comme il lui appartenait de le faire en application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'examiner si son refus portait à la vie familiale de M. X une atteinte disproportionnée ; que la seule circonstance, retenue par les premiers juges, que les termes de la décision refusant le certificat de résidence ne feraient pas apparaître cet examen n'est pas suffisante à elle seule pour l'établir ; qu'ainsi, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur l'absence d'examen de la demande de M. X au regard des stipulations de l'article 6-5 de la convention
franco-algérienne et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler les décisions attaquées ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Lille ;

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la demande de titre de séjour présentée par M. X n'était pas fondée sur les stipulations de l'article 6-5 de la convention franco-algérienne ; que dès lors, le PREFET DU NORD, qui n'était pas tenu d'examiner cette demande au regard desdites stipulations, n'avait pas à motiver sa décision sur ce fondement ;

Considérant, en deuxième lieu, que s'il appartenait au PREFET DU NORD, comme il a été dit ci-dessus, d'examiner la situation de M. X au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'était pas tenu, en l'absence de demande présentée sur ce fondement, de motiver sur ce point sa décision ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, né en 1935, a regagné l'Algérie après avoir travaillé en France pendant sept années ; que veuf depuis 1980, il est entré en France en 2006 pour rejoindre son fils Saab, titulaire d'une carte de résident ; que si cinq de ses enfants sont établis en France, l'un d'eux ayant la nationalité française, il ne ressort cependant pas des pièces du dossier qu'en refusant à M. X un titre de séjour, le PREFET DU NORD ait porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée compte tenu notamment des années passées en Algérie depuis son retour y compris après le décès de sa femme et de la circonstance qu'il n'y est pas isolé, deux autres de ses enfants y demeurant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU NORD est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé sa décision du
10 mai 2006, ensemble le rejet du recours gracieux formé par l'intéressé ;


Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui annule le jugement attaqué et rejette la demande présentée par M. X ne comporte aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte doivent être rejetées ;


Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :


Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Lille en date du 3 avril 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. Ahmed X devant le Tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ahmed X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Copie sera transmise au PREFET DU NORD.

N°07DA00802 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Brigitte Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : ABBAS KAMEL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Date de la décision : 11/12/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 07DA00802
Numéro NOR : CETATEXT000018624260 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-12-11;07da00802 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award