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13/02/2008 | FRANCE | N°07DA01582

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 13 février 2008, 07DA01582


Vu la requête, parvenue par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 16 octobre 2007 et confirmée par courrier original le 19 octobre 2007, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le préfet demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702348, en date du 10 septembre 2007, du vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a annulé, à la demande de M. Ferhat X, la décision en date du 7 septembre 2007 désignant l'Algérie comme pays de destination de la mesure de reconduite à la

frontière prononcée le même jour à l'égard de l'intéressé ;

2°) de rejet...

Vu la requête, parvenue par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 16 octobre 2007 et confirmée par courrier original le 19 octobre 2007, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le préfet demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702348, en date du 10 septembre 2007, du vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a annulé, à la demande de M. Ferhat X, la décision en date du 7 septembre 2007 désignant l'Algérie comme pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière prononcée le même jour à l'égard de l'intéressé ;

2°) de rejeter les conclusions dirigées contre ladite décision de la demande présentée par

M. X devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Le PREFET DE LA SEINE-MARITIME soutient que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'égard de M. X a été regardé à tort comme comportant une décision désignant le pays de destination de cette mesure ; que, par ailleurs, la décision en litige, à la supposer existante, a été prise en considération d'une situation de droit et de fait postérieure de quatre ans à celle qui a conduit au prononcé du jugement du 24 octobre 2003 qui annulait une décision désignant l'Algérie comme pays de renvoi d'une mesure de reconduite prise précédemment à l'égard de M. X ; que ce dernier a depuis lors cessé ses activités professionnelles et son engagement politique dans ce pays ; qu'à supposer qu'elle puisse être regardée comme désignant l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement prise à l'égard de M. X, la décision présentement en litige n'a donc, en l'absence de production par l'intéressé d'un quelconque élément de preuve contraire, méconnu ni l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ce jugement, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance, en date du 5 novembre 2007, par laquelle le magistrat désigné par le président de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au

17 décembre 2007 ;

Vu le mémoire en défense, parvenu par télécopie le 14 décembre 2007 et confirmé par courrier original le 17 décembre 2007, présenté pour M. Ferhat X, demeurant ..., par Me Demir ; M. X conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; M. X soutient que, contrairement à ce que soutient le préfet, l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son égard comportait une décision désignant l'Algérie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ; que, par ailleurs, la seule considération du délai de quatre ans écoulé entre la date du prononcé du précédent jugement invoqué et celle à laquelle la décision en litige a été prise ne saurait constituer la preuve de ce que l'exposant ne serait plus effectivement menacé en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il démontre au contraire l'actualité et le caractère personnel de ces menaces ; que ces menaces l'ont contraint à rejoindre la France alors qu'il jouissait d'une très bonne situation professionnelle en Algérie ; que les éléments d'information disponibles concernant la situation prévalant actuellement dans ce pays démontrent que les menaces terroristes perdurent ;

Vu l'ordonnance, en date du 18 décembre 2007, prononçant la réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la décision du président de la Cour en date du 15 octobre 2007 prise en vertu de l'article

R. 222-33 du code de justice administrative, désignant M. Albert Lequien en tant que juge des reconduites à la frontière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2008 :

- le rapport de M. Albert Lequien, magistrat désigné ;

- les observations de Me Demir, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté en date du 7 septembre 2007, le PREFET DE LA

SEINE-MARITIME a prononcé la reconduite à la frontière de M. X, ressortissant algérien, né le 9 mars 1962 et entré en France le 16 avril 2002 ; que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME forme appel du jugement, en date du 10 septembre 2007, du vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a annulé, à la demande de M. X, la décision en date du 7 septembre 2007 désignant l'Algérie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'examen de l'arrêté de reconduite à la frontière pris le 7 septembre 2007 à l'égard de M. X que celui-ci précise en son article 2 que l'intéressé sera éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ou d'un pays qui lui aurait délivré un titre de voyage en cours de validité ou encore de tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible ; que cette mention doit être regardée, ainsi que l'a estimé à juste titre le premier juge, comme révélant l'existence d'une décision désignant notamment l'Algérie comme pays de renvoi ; que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME n'est, par suite, pas fondé à soutenir que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'égard de M. X n'aurait pas comporté de décision désignant l'Algérie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

Considérant, en second lieu, que, pour annuler ladite décision désignant l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement prise à l'égard de M. X, le premier juge s'est fondé sur ce que, par un jugement en date du 24 octobre 2003 devenu définitif, le magistrat délégué du Tribunal administratif de Rouen avait annulé une précédente décision désignant l'Algérie comme pays de renvoi de M. X au motif que l'intéressé encourait des risques en cas de retour dans ce pays et que cette circonstance faisait obstacle à ce qu'il y soit reconduit ; qu'eu égard à l'autorité de la chose jugée qui s'attache tant au dispositif de ce jugement qu'au motif qui en est le soutien nécessaire, l'autorité préfectorale ne pouvait de nouveau décider que M. X serait reconduit à destination de l'Algérie qu'à la condition que des faits nouveaux, postérieurs à la décision annulée et de nature à établir la disparition des circonstances ayant pu faire obstacle à la décision d'éloignement vers l'Algérie, soient intervenus ; qu'en se bornant à faire état du temps écoulé depuis le prononcé de ce jugement du 24 octobre 2003 et à relever que l'intéressé a cessé depuis lors son activité professionnelle et son engagement politique en Algérie, le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ne démontre pas, comme il peut le faire pour la première fois en appel, que la situation en Algérie se soit à ce point améliorée que M. X n'encourrait plus de risques en cas de retour dans ce pays ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision du 7 septembre 2007 désignant l'Algérie comme pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière prononcée le même jour à l'égard de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, par application desdites dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DE LA SEINE-MARITIME est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Ferhat X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Copie sera transmise au PREFET DE LA SEINE-MARITIME.

N°07DA01582 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07DA01582
Date de la décision : 13/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : DEMIR SELÇUK

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-02-13;07da01582 ?
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