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11/03/2008 | FRANCE | N°07DA01599

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 11 mars 2008, 07DA01599


Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 19 octobre 2007 et régularisée par la production de l'original le 22 octobre 2007, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701669 du 20 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé son arrêté du 31 mai 2007 refusant la demande d'admission au séjour de M. M'Barek X, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de destination et, d'autre

part, lui a enjoint de délivrer à M. X un titre de séjour portant la me...

Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 19 octobre 2007 et régularisée par la production de l'original le 22 octobre 2007, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701669 du 20 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé son arrêté du 31 mai 2007 refusant la demande d'admission au séjour de M. M'Barek X, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de destination et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. X un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X en première instance ;

Il soutient que c'est à tort que le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté pour atteinte à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la vie commune de M. X et de son épouse est récente ; que compte tenu de la durée de la vie commune, sa décision du 31 mai 2007 ne méconnaît pas l'article L. 511-4-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi l'intensité et la durée de la relation avec Mme Y ne sont pas suffisantes pour justifier de l'illégalité de la décision attaquée ; que le jugement attaqué vide de sens l'article L. 313-11-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. X ne pouvait pas bénéficier des dispositions de l'article L. 211-2-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que sa décision respecte également les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. X n'est pas entré sur le territoire national sous couvert d'un visa de long séjour ; qu'en outre, M. X n'établit pas que sa présence auprès de son épouse, qui est atteinte de la maladie de Crohn depuis 1990, est indispensable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 6 novembre 2007 portant clôture de l'instruction au 7 janvier 2008 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2007, présenté pour

M. M'Barek X, demeurant résidence Mirabeau, 2/2092 rue Henri Wallon à

Saint-Étienne-du-Rouvray (76800), par Me Falacho ; M. X conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à verser à la SELARL Eden Avocats la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve de renonciation au versement de l'aide juridictionnelle ; il soutient que le Tribunal n'a méconnu ni l'article L. 511-4-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni vidé de sens l'article L. 313-11-4° du même code mais fait prévaloir sur le droit national les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision de refus de séjour est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est marié avec une ressortissante française, d'origine marocaine, que ce mariage est sincère, que la vie commune des époux remonte au mois de janvier 2006 et qu'il participe à l'entretien et à l'éducation du dernier des quatre enfants de son épouse ; que sa présence auprès de son épouse, qui est atteinte de la maladie de Crohn, est indispensable ; que la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée au regard de la loi du 11 juillet 1979 dans la mesure où elle ne précise pas quel est son fondement juridique ;

Vu l'ordonnance du 10 janvier 2008 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et

M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- les observations de Me Rouly, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME relève appel du jugement du 20 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 31 mai 2007 refusant de délivrer à M. X une carte de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le Maroc comme pays de destination ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité marocaine, est entré en France au cours du mois de février 2003 et s'est marié le 4 novembre 2006 avec une ressortissante française, mère de quatre enfants nés d'une précédente union, avec qui il vivait depuis plusieurs mois ; que la sincérité de l'union n'est pas contestée ; que sa présence est indispensable auprès de son épouse qui, atteinte de la maladie de Crohn, est fréquemment hospitalisée ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X participe à l'éducation et à l'entretien du plus jeune des enfants, âgé de 12 ans ; que la circonstance que M. X ne pouvait prétendre ni à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni à la protection de l'article L. 511-4-7° du même code, ne saurait faire obstacle à l'application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, en dépit de la faible durée de la vie commune, le PREFET DE LA SEINE-MARITIME a, comme l'a relevé le tribunal administratif, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 31 mai 2007 refusant la demande d'admission au séjour de M. X, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination et a enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » et qu'aux termes de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 : « Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre (...) » ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la SELARL Eden Avocats, avocat de M. X, la somme de 1 000 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens sous réserve qu'elle renonce à percevoir la rémunération correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DE LA SEINE-MARITIME est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à la SELARL Eden Avocats, avocat de M. X, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sous réserve qu'elle renonce à percevoir la rémunération correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement et à M. M'Barek X.

Copie sera transmise au PREFET DE LA SEINE-MARITIME.

N°07DA01599 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA01599
Date de la décision : 11/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Mme Brigitte (AC) Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-03-11;07da01599 ?
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