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08/04/2008 | FRANCE | N°07DA01589

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 08 avril 2008, 07DA01589


Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Bahri X et Mme Sati épouse X, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0701516-0701818 du 25 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés en date du 2 mai 2007 par lesquels le préfet de l'Oise a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a enjoint de quitter le territoire français et a fixé la Turquie co

mme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdi...

Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Bahri X et Mme Sati épouse X, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0701516-0701818 du 25 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés en date du 2 mai 2007 par lesquels le préfet de l'Oise a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a enjoint de quitter le territoire français et a fixé la Turquie comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise, sous astreinte de 25 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de leur délivrer une carte de séjour temporaire ;

Ils soutiennent qu'il est permis d'émettre un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ils justifient de la présence en France d'une grande partie de leur famille ; que le couple est parfaitement intégré et s'efforce de fonder une famille à son tour ; que depuis plusieurs mois, ils sont engagés dans une démarche de procréation médicalement assistée ; que le préfet n'est pas lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique et se doit d'étudier la situation personnelle des intéressés ; qu'en décidant de les renvoyer en Turquie avec pour conséquence l'interruption du traitement engagé depuis deux ans, le préfet de l'Oise a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu l'ordonnance du président de la Cour en date du 6 novembre 2007 portant clôture de l'instruction au 7 janvier 2008 à 16 heures 30 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2007, présenté par le préfet de l'Oise ; le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête ; il soutient que les décisions contestées ne souffrent d'aucune illégalité externe ; que le médecin inspecteur de la santé publique a estimé que l'état de santé des requérants ne nécessitait pas de prise en charge médicale ; que les requérants ne produisent aucune pièce médicale qui viendrait contredire cet avis ; que, s'agissant de la procédure de procréation médicalement assistée, il n'est pas justifié que ces derniers ne puissent la suivre en Turquie ou dans un autre pays, dont la France, sous couvert de visas ; que les requérants n'ont d'ailleurs pas justifié que l'interruption du traitement suivi compromettrait gravement ses chances de succès ; que les pièces médicales produites sont inexploitables faute d'informations sur leur nature précise ; que, manifestement, les requérants n'établissent pas devoir bénéficier de plein droit du titre de séjour sollicité ; qu'il n'a commis aucune erreur d'appréciation au regard de leur droit au respect de leur vie privée et familiale ; que les décisions querellées ne portent aucune atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale ; qu'en faisant obligation aux requérants de quitter la France et en fixant la Turquie comme pays de renvoi, aucune erreur de droit ou d'appréciation n'a été commise et aucune atteinte n'a été portée aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision du 17 décembre 2007 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai refusant d'accorder à M. et Mme X l'aide juridictionnelle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,

président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. et Mme X, ressortissants turcs, établis à Creil (Oise), ont sollicité le 23 août 2006 leur admission au séjour en tant qu'étrangers malades en raison de la poursuite d'un projet de procréation médicalement assistée ; qu'après avis négatifs du médecin inspecteur de la santé publique, en date du 20 avril 2007, le préfet de l'Oise a pris deux décisions de refus de séjour le 2 mai 2007 assorties d'une obligation de quitter le territoire français et fixant la Turquie comme pays de destination ; que M. et Mme X interjettent appel du jugement du Tribunal administratif d'Amiens, en date du 25 septembre 2007, qui a rejeté leurs demandes d'annulation desdites décisions ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'il ne résulte pas des motifs des décisions de refus de séjour, ni des autres pièces du dossier, que le préfet se serait cru lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique et aurait ainsi, en se conformant à cet avis, commis une erreur de droit ;

Sur la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 11º A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : « Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10º L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) » ;

Considérant que si M. et Mme X font valoir qu'ils se sont engagés dans une procédure de procréation médicalement assistée, ils ne justifient pas, par cette seule circonstance, que leur état de santé nécessiterait des soins dont le défaut aurait pour eux des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de l'Oise aurait méconnu les dispositions précitées des articles L. 313-11 et L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents médicaux produits par les requérants, que le processus de procréation médicalement assistée dont ils font état n'a pas été engagé avant le mois d'août 2006, alors que leur demande de titre de séjour a été présentée le 23 août 2006 ; qu'au surplus, l'acte de consentement en vue de la procréation médicalement assistée, nécessitant un tiers donneur enregistré devant le Tribunal de grande instance de Paris conformément à l'article 311-20 du code civil, n'est daté que du 9 mai 2007, c'est-à-dire postérieurement aux décisions attaquées ; que les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions attaquées sur leur situation personnelle ; que si M. et Mme X font également valoir qu'ils sont intégrés à la société française et qu'ils ont des liens familiaux en France où se trouvent un frère, des oncles et des tantes, ce seul fait ne suffit pas à établir que les décisions par lesquelles le préfet de l'Oise a refusé de leur délivrer à chacun un titre de séjour portent à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises, ni, par suite, qu'elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bahri X, à Mme Sati épouse X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet de l'Oise.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 07DA01589
Date de la décision : 08/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: M. Christian Bauzerand
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SCP CARON-DAQUO-AMOUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-04-08;07da01589 ?
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