La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2008 | FRANCE | N°08DA00077

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 5, 17 juin 2008, 08DA00077


Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Paloma X, demeurant ..., par Me Rouly ; Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0702443 du 13 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 août 2007 du préfet de l'Eure refusant son admission au séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant l'Angola comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté du préfet de l'Eure ;

) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un ...

Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Paloma X, demeurant ..., par Me Rouly ; Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0702443 du 13 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 août 2007 du préfet de l'Eure refusant son admission au séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant l'Angola comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté du préfet de l'Eure ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à venir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser à la SELARL Eden Avocats la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, ladite condamnation valant renonciation au versement de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que la décision attaquée est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York sur les droits de l'enfant dès lors que l'état de santé de son fils nécessite un traitement médical qui ne peut être interrompu et qui n'est pas disponible en Angola ; que la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les enfants du couple sont scolarisés, que tous les membres de la famille maîtrisent la langue française, que

Mme X a tissé un réseau amical important et bénéficie d'un soutien des associations, qu'elle remplit ses obligations fiscales, qu'elle est dépourvue d'attaches familiales en Angola depuis le décès de ses parents et que les risques en cas de retour dans son pays d'origine sont avérés ; que la décision portant refus de séjour étant illégale, la mesure d'obligation de quitter le territoire français est, dès lors, privée de base légale ; que cette décision est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'état de santé du fils de Mme X s'oppose à tout voyage en avion ; que la décision fixant l'Angola comme pays de destination est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que Mme X, qui est adhérente du Front de libération de l'enclave de Cabinda et milite pour l'indépendance de ce territoire, risque d'être exposée à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Angola comme l'atteste notamment le mandat d'arrêt dont elle fait l'objet ; que toute sa famille a été tuée par les autorités angolaises ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 11 février 2008 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme X ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 février 2008, présenté par le préfet de l'Eure, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que Mme X n'établit pas que l'état de santé de son fils nécessite un traitement médical dont l'absence de prise en charge pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'aucune demande de dossier médical tendant à saisir le médecin inspecteur de santé publique n'a été déposée à la préfecture ; qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que la scolarisation des enfants ne justifie pas à elle seule le maintien de la famille en France, que le concubin de Mme X est également en situation irrégulière et que l'absence d'attaches familiales en Angola n'est pas établie ; que la décision fixant l'Angola comme pays de destination respecte les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que Mme X n'établit pas que sa vie ou sa liberté serait menacée en cas de retour dans son pays d'origine ; que ses allégations ont été écartées par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Commission des recours des réfugiés ; que la requérante n'apporte aucun élément nouveau postérieur à ces décisions et n'a pas sollicité le réexamen de sa demande d'asile ; qu'en outre, il n'a commis aucune erreur de droit ; que la décision litigieuse est conforme aux articles L. 311-12 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le

26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2008 à laquelle siégeaient

M. André Schilte, président de la Cour, M. Antoine Mendras, président de chambre,

Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur, M. Patrick Minne, premier conseiller et

M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;

Sur la décision de refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ;

Considérant que Mme X fait valoir que son fils est atteint de d'une rhinopharyngite chronique responsable d'otites séro-muqueuses et d'un retard de langage et qu'il a besoin de soins qui lui imposeraient de rester sur le territoire français ; que, toutefois, la requérante ne produit qu'une étude impersonnelle sur les troubles de langage chez les enfants de migrants, et deux certificats médicaux datés des 23 août 2007 et 26 septembre 2007, postérieurs à la décision attaquée, qui sont rédigés en termes généraux et ne précisent pas les risques encourus en cas d'interruption du traitement médical ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de soins exposerait son enfant à des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Eure n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur de son enfant dans la décision litigieuse, laquelle n'est pas contraire à la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Considérant, en second lieu, que si l'intéressée fait valoir que ses enfants sont scolarisés, qu'elle est bien insérée socialement, qu'elle bénéficie du soutien d'associations, qu'elle remplit ses obligations fiscales, qu'elle maîtrise la langue française grâce au suivi régulier de cours et est dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, ces circonstances, compte tenu notamment des conditions et de la durée du séjour en France de Mme X, ne sont pas de nature à faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, Mme X n'est pas fondée à soutenir qu'elle entacherait d'illégalité la décision l'obligeant à quitter le territoire français et que, pour les mêmes motifs que précédemment, cette décision n'est pas contraire à l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Considérant, en second lieu, que si Mme X soutient que l'état de santé de son fils l'empêche de voyager en avion, elle n'apporte, en tout état de cause, aucune justification à l'appui de ce moyen ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant l'Angola comme pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 » ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que Mme X soutient que sa vie serait menacée en cas de retour en Angola en raison de son origine cabindaise et de sa participation au mouvement indépendantiste du Front de libération de l'enclave de Cabinda ; que l'intéressée, dont les demandes d'admission au statut de réfugié ont été rejetées tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Commission des recours des réfugiés, n'apporte, à l'appui de ce moyen, que des articles provenant de sites internet et un mandat d'arrêt daté du 31 août 2007, postérieurement à la décision attaquée, comportant des surcharges concernant notamment l'âge et la date de naissance de Mme X et pris pour « crime situation politique du pays » ; que ces éléments ne sont pas probants pour établir la réalité des risques encourus ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la décision fixant l'Angola comme pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction assorties d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Paloma X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet de l'Eure.

N°08DA00077 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 08DA00077
Date de la décision : 17/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Schilte
Rapporteur ?: Mme Brigitte (AC) Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-06-17;08da00077 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award