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03/07/2008 | FRANCE | N°07DA01002

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 03 juillet 2008, 07DA01002


Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Marie-Claude X, demeurant ..., par Me Coudray ; Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0500577 du 4 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du maire de Varengeville sur Mer rejetant son recours gracieux tendant au retrait de l'arrêté du 15 octobre 2004 par lequel il lui avait refusé un permis de construire aux fins d'extension d'une maison d'habita

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Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Marie-Claude X, demeurant ..., par Me Coudray ; Mme X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0500577 du 4 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du maire de Varengeville sur Mer rejetant son recours gracieux tendant au retrait de l'arrêté du 15 octobre 2004 par lequel il lui avait refusé un permis de construire aux fins d'extension d'une maison d'habitation, ensemble l'arrêté du 15 octobre 2004 et, d'autre part, à la condamnation de ladite commune à lui verser une somme de 2 152,80 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de faire droit à sa demande présentée en première instance ;

3°) de condamner la commune de Varengeville sur Mer à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'il ne mentionne pas l'ensemble des pièces de procédure, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ; que le motif opposé par le maire tiré de l'absence de caractère mesuré de l'extension projetée, au sens de l'article ND 2.2 du plan d'occupation des sols (POS) est erroné dès lors que le projet, qui constitue le minimum d'une extension possible en habitation, est incontestablement une extension mesurée au sens des dispositions applicables ; que seules, des modifications conduisant à augmenter d'au moins 30 % la superficie de l'existant ne sont pas considérées comme « limitées ou mesurées » par la jurisprudence ; qu'en l'espèce, l'augmentation de la surface hors oeuvre brute (SHOB) est de 26,45 % et celle de la surface hors oeuvre nette (SHON) de 25,78 % ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2007, présenté pour la commune de Varengeville sur Mer, représentée par son maire en exercice, par Me Capitaine, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme X à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la requête est irrecevable en raison de l'absence de mise en oeuvre de la notification prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; que le dossier de permis de construire déposé par Mme X est incomplet au regard des prescriptions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme ; que le refus de permis de construire était nécessaire au regard de l'objectif de conservation des paysages naturels prescrit par l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ; que le projet d'extension ne correspond pas à une extension limitée ; que le fait que le terrain soit situé dans une zone naturelle protégée au titre de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme implique une rigueur accrue afin d'assurer la protection du littoral, protection qui ne saurait être assurée si l'on considère qu'une extension de plus de 26 % de la SHON est une extension mesurée ; que le maire a donc pu refuser le permis de construire au motif que l'extension envisagée n'était pas mesurée ; que le projet de construction ne respecte pas l'article ND11 du POS qui proscrit les teintes unies sur les enduits lisses ;

Vu l'ordonnance en date du 1er avril 2008 portant clôture de l'instruction au 2 mai 2008 ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 avril 2008, présenté pour

Mme Marie-Claude X qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et soutient en outre que les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'ont pas vocation à s'appliquer s'agissant d'un rejet opposé à une demande de permis de construire ; que le projet ne porte atteinte ni au site, ni au lieu avoisinant, ni au paysage ; que la substitution de motif tiré du dossier de permis incomplet n'est pas possible dès lors qu'il appartient à l'administration de solliciter les pièces complémentaires qui pourraient être nécessaires ; qu'en tout état de cause, les prétendues insuffisances du dossier ne sont pas démontrées ; qu'un document photographique et un document graphique faisant état de l'insertion du projet figurent au dossier ; que l'impact visuel est précisé, la maison étant totalement entourée de bois ; quant au traitement des accès et des abords, aucune modification n'était apportée à l'existant ; qu'en tout état de cause, les éléments fournis à l'appui du dossier permettaient à l'autorité administrative d'être suffisamment informée, en sorte que les éventuelles omissions étaient sans influence sur la régularité du dossier déposé ; qu'aucun élément n'est apporté pour justifier l'incompatibilité entre le projet et l'environnement au sens de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ; qu'il n'y a pas eu violation de l'article ND 11 du règlement du POS dès lors qu'il convient d'assurer entre l'extension et le bâtiment existant une continuité visuelle en sorte qu'en adoptant, s'agissant de l'aspect extérieur de la construction projetée, un enduit identique de l'existant, le projet n'entrait pas en contradiction avec les dispositions invoquées ; que des permis pour des extensions supérieures ont été accordés et il appartient à l'administration de justifier la différence de traitement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2008 à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et M. Albert Lequien, premier conseiller :

- le rapport de M. Albert Lequien, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de Mme X est dirigée contre le jugement du 4 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du maire de Varengeville sur Mer rejetant son recours gracieux tendant au retrait de l'arrêté du 15 octobre 2004 lui refusant un permis de construire aux fins d'extension d'une maison d'habitation, ensemble l'arrêté du 15 octobre 2004 ;

Sur la recevabilité de l'appel :

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme qu'en employant l'expression de « décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code », ne sont visées, conformément à l'objectif de sécurité juridique poursuivi, que les décisions valant autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol qui sont régies par le code de l'urbanisme ; qu'il en résulte qu'un refus de permis de construire ne constitue pas une décision entrant dans le champ d'application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; qu'en conséquence le recours contentieux dirigé contre une telle décision n'est pas assujetti au respect des formalités de notification prévues par l'article R. 600-1 ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la commune de Varengeville sur Mer, l'appel de Mme X n'est pas entaché d'irrecevabilité pour méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si Mme X soutient que le jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'il ne mentionne pas l'ensemble des pièces de la procédure en violation des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, elle n'apporte aucune précision quant aux pièces de procédure qui ne seraient pas, selon elle, mentionnées dans ledit jugement ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Sur la légalité du permis de construire :

Considérant qu'aux termes de l'article ND 2.2 du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Varengeville sur Mer, seules sont autorisées « L'extension mesurée et la rénovation des constructions et installations existantes au jour d'approbation du POS révisé » ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet présenté par Mme X avait pour objet de porter la surface hors oeuvre brute (SHOB) de son habitation à 245 m2, soit une augmentation de 26,45 %, et la surface hors oeuvre nette (SHON) à 224 m2, soit une augmentation de 25,78 % ; que ce projet, alors même qu'il se situe dans une zone naturelle protégée qui fait l'objet d'une destination particulière, constitue une extension mesurée d'une construction existante au sens de l'article ND 2.2 précité ; qu'ainsi, en se fondant sur le seul motif tiré de ce que le projet ne s'apparente pas à une extension mesurée, le maire de Varengeville sur Mer a entaché son arrêté de refus de permis de construire du 15 octobre 2004 d'illégalité ; que, par suite, Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté du 15 octobre 2004 ;

Considérant, toutefois, que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant que, pour justifier le refus de permis de construire pris par le maire de Varengeville sur Mer, par arrêté du 15 octobre 2004, la commune de Varengeville sur Mer invoque pour la première fois en appel d'autres motifs tirés de ce que, d'une part, le dossier de demande de permis de construire déposé par Mme X était incomplet au regard des prescriptions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, d'autre part, le refus de permis de construire était nécessaire au regard de l'objectif de conservation des paysages naturels prescrits par l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et enfin, le projet de construction ne respectait pas les prescriptions de l'article ND 11 du POS ;

En ce qui concerne le motif tiré du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme : « A.- Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (...) 2° Le plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions, des travaux extérieurs à celle-ci et des plantations maintenues, supprimées ou créées ; (...) 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe (...) 6° Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords (...) 7° Une notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet (... ) » ;

Considérant que si la commune de Varengeville sur Mer soutient que dans le dossier de permis de construire le plan de masse, les documents photographiques et graphiques sont insuffisants et que la notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet n'est pas jointe, et ce en méconnaissance des prescriptions du 2°, 5°, 6° et 7° de l'article R. 421-2 A. du code de l'urbanisme, il appartenait à l'autorité compétente pour instruire la demande, de mettre en demeure le pétitionnaire de compléter son dossier sur ces manquements, en application de l'article R. 421-13 du code de l'urbanisme ; qu'ainsi le motif de la commune de Varengeville sur Mer tiré du non-respect des prescriptions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne le motif tiré de la méconnaissance des prescriptions de l'article

R. 111-21 du code de l'urbanisme :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : « Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par « leur situation, leur architecture, leurs dimensions, ou l'aspect extérieur » des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des documents graphiques et des photographies produites que le projet d'extension de la maison d'habitation en cause, construite sur un terrain d'environ 65 000 m2, n'est pas de nature à porter atteinte au site et au paysage naturel, alors même que cette maison est située dans une zone boisée et à proximité du littoral ; qu'ainsi le motif de refus tiré par la commune de Varengeville sur Mer du non-respect des prescriptions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne le motif tiré du non-respect des prescriptions de l'article ND11 du POS :

Considérant qu'aux termes de l'article ND.11-1 du POS de la commune de Varengeville sur Mer : « En cas de travaux de transformation ou d'agrandissement de bâtiments existants, ou de construction d'annexes, ceux-ci doivent respecter ou restituer le caractère de l'ensemble » ; qu'aux termes de l'article ND. 11-2 du même POS : « Tant sur les bâtiments que sur les clôtures, les maçonneries doivent présenter des teintes en harmonie avec celles des matériaux rencontrés sur les bâtiments anciens, ce qui exclut le blanc cru et les teintes unies sur des enduits lisses » ; que contrairement à ce que soutient la commune de Varengeville sur Mer, s'agissant d'une extension d'un bâtiment existant, en adoptant pour l'extérieur de la construction projetée, un enduit identique à l'existant de couleur grise, le projet n'a pas méconnu les dispositions précitées du POS ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite du maire de Varengeville sur Mer rejetant son recours gracieux tendant au retrait de l'arrêté du 15 octobre 2004 par lequel il lui avait refusé un permis de construire aux fins d'extension d'une maison d'habitation, ensemble l'arrêté du 15 octobre 2004 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme X qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la commune de Varengeville sur Mer au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, au titre de ces mêmes dispositions, il y a lieu de condamner la commune de Varengeville sur Mer à payer à Mme X une somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Rouen du 4 mai 2007 est annulé.

Article 2 : La décision implicite du maire de Varengeville sur Mer rejetant le recours gracieux de Mme X tendant au retrait de l'arrêté du 15 octobre 2004 refusant de lui délivrer un permis de construire, ensemble l'arrêté du 15 octobre 2004 sont annulés.

Article 3 : La commune de Varengeville sur Mer versera à Mme X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Varengeville sur Mer tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-Claude X et à la commune de Varengeville sur Mer.

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N°07DA01002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 07DA01002
Date de la décision : 03/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Estève
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-07-03;07da01002 ?
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