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03/07/2008 | FRANCE | N°07DA01275

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 03 juillet 2008, 07DA01275


Vu la requête, enregistrée le 9 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL», dont le siège est situé 64 route de Guines à Coulogne (62137), par Me Broutin ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0600454, en date du 19 juin 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. et Mme Dominique X, annulé l'arrêté, en date du 22 décembre 2005, par lequel le maire de la commune de Salouël a délivré à la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» un permis de construire un bâtiment à

usage de bureaux et d'atelier et a mis à sa charge la somme de 500 euros sur ...

Vu la requête, enregistrée le 9 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL», dont le siège est situé 64 route de Guines à Coulogne (62137), par Me Broutin ; elle demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0600454, en date du 19 juin 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. et Mme Dominique X, annulé l'arrêté, en date du 22 décembre 2005, par lequel le maire de la commune de Salouël a délivré à la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» un permis de construire un bâtiment à usage de bureaux et d'atelier et a mis à sa charge la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme X ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme X la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'aucun des quatre motifs d'annulation retenus par le Tribunal ne justifie le jugement d'annulation ; qu'il a commis une erreur de fait en retenant que la notice exigée par l'article R. 521-5-2 du code de l'urbanisme n'avait pas été jointe au dossier de permis de construire ; qu'il s'est mépris sur le sens et la portée du mot « atelier » qui a été utilisé pour désigner l'affectation envisagée d'une des pièces du bâtiment à édifier ; qu'un tel espace professionnel n'entraîne pas nécessairement des nuisances pour le voisinage ; que si de tels troubles se manifestent, il appartient au maire de faire usage de son pouvoir de police pour y remédier ; que ces considérations n'entrent pas dans le champ de l'autorisation d'urbanisme ; qu'il ne s'agit pas d'une installation classée ; qu'il s'agit en réalité d'une pièce polyvalente qui peut servir au stockage de pièces ; que telle était l'affectation envisagée par le locataire avec lequel elle était en pourparlers ; qu'il ne s'agit pas nécessairement d'un atelier de réparation ; qu'en ce qui concerne l'insertion dans le site, le bardage métallique envisagé s'intègre au paysage urbain environnant où ce mode de protection est très fréquemment utilisé à l'exception de la maison de M. et Mme X ; que l'article UC II du plan d'occupation des sols ne comprend pas, dans l'énumération des matériaux interdits, celui envisagé ; qu'au contraire dans de nombreuses zones d'activités amiénoises, le bardage métallique est imposé ; que l'utilisation conjointe de la brique et du bardage constitue une association fréquente ; que le plan d'occupation des sols ne fixe aucune règle quantifiée de places de stationnement pour les bâtiments d'activité ; qu'il est simplement prévu de satisfaire les besoins ; que l'effectif de personnel correspondant à la capacité d'accueil de la construction projetée a été fixé de manière exagérée à 26 ; qu'il ne s'agissait que d'un maximum envisagé par un futur locataire intéressé ; que la commission de sécurité a retenu ce chiffre comme un effectif théorique maximum d'accueil et a émis un avis favorable à la délivrance du permis ; que la réunion de l'ensemble du personnel de manière simultanée n'a jamais été envisagée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'avis de mise en demeure en date du 21 janvier 2008 adressé à la commune de Salouël en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative et l'avis de réception postale de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 février 2008, présenté pour M. et Mme X, demeurant ..., par la SCP Pouillot-Doré ; ils demandent à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent que le Tribunal a exactement apprécié les documents produits en retenant que la construction projetée concernait des bureaux et un atelier ; que l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme permet au maire d'interdire la construction d'un bâtiment qui comporte des risques pour la sécurité ; que l'examen du dossier permet, en outre, de constater qu'il manque dans le dossier de demande de permis de construire deux documents photographiques permettant d'apprécier la situation du terrain dans le paysage proche et lointain pourtant exigés par les dispositions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme ; que le projet contrevient aux dispositions de l'article UC 11 du plan d'occupation des sols qui prévoient que les façades des bâtiments vues du domaine public doivent être constitués de

30 % de briques ; que le projet comporte une utilisation dominante de bardages métalliques et de quelques matériaux de bois pour marquer l'entrée ; que la légalité du permis de construire ne s'apprécie pas par rapport aux matériaux utilisés par les propriétaires de constructions voisines ; que le bardage métallique est un procédé architectural prohibé par l'article UC 11 du plan d'occupation des sols ; qu'il contrevient à l'harmonie de l'architecture des habitations voisines ; qu'au regard de l'article UC 12 du plan d'occupation des sols, le nombre de places de parking prévu qui est de 7 est insuffisant par rapport aux besoins du personnel et de la clientèle ; que les places, le cas échéant, disponibles sur les terrains voisins ou sur la voie publique ne peuvent être utilement prises en compte ; que la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» admet avoir été en pourparlers avec une société industrielle dont l'activité n'est pas compatible avec la vocation de la zone ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2008 à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et M. Albert Lequien, premier conseiller :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président-assesseur ;

- les observations de Me Broutin, pour la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL», et de

Me Tany pour M. et Mme X ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» relève appel du jugement, en date du 19 juin 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. et Mme X, et en se fondant sur quatre motifs, annulé le permis de construire qui lui avait été délivré le 22 décembre 2005 par le maire de la commune de Salouël, en vue de construire un bâtiment à usage de bureaux et d'atelier ;

Considérant, en premier lieu, que l'article R. 421-2-5 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable dispose que : « Lorsque les travaux projetés concernent des locaux autres que les établissements recevant du public et sont soumis aux règles d'accessibilité aux personnes handicapées fixées en application de l'article L. 111-7 du code de la construction et de l'habitation, le dossier de la demande de permis de construire est complété par l'engagement du demandeur et, le cas échéant, de l'architecte de respecter lesdites règles. Cet engagement est assorti d'une notice décrivant les caractéristiques générales des locaux, installations et aménagements extérieurs au regard des règles d'accessibilité » ; qu'il ressort des pièces produites en cause d'appel que le dossier de demande de permis de construire qui comportait, en « rubrique 4 », l'engagement signé du demandeur de respecter les règles d'accessibilité prévues par les dispositions précitées du code de la construction et de l'habitation, comprenait également la notice visée par l'article R. 421-2-5 du code de l'urbanisme laquelle était également signée du demandeur et de l'architecte ; que, dès lors, la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» est fondée à soutenir que le moyen tiré de la violation de l'article R. 421-2-5 précité devait être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions du règlement du plan d'occupation des sols applicable à la commune de Salouël à la date de la décision attaquée prévoient que les zones UC « correspondent à des lotissements ou groupes d'habitations individuelles ou de logements collectifs et à des constructions isolées, de réalisation relativement récente, comportant des commerces et activités qui en sont le complément naturel » ; que cette disposition est complétée notamment par les articles UC 1 et UC 2 ; que, selon ce premier article, sont soumises à des conditions spéciales d'autorisation, les constructions à usage de commerces ou de bureaux et d'artisanat sans nuisance et, selon le second article, sont interdites « les installations constructions » destinées à une activité professionnelle, lorsque cette activité est susceptible de causer une gêne pour les habitations voisines ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet faisant l'objet du permis de construire litigieux portait sur une construction à usage industriel mais, au contraire, sur un bâtiment à usage de bureaux ou d'artisanat ; qu'il ne ressort pas davantage de ces pièces que l'activité envisagée par l'entreprise qui devait à l'origine occuper le bâtiment mais qui y a renoncé depuis lors, aurait nécessairement provoqué des nuisances ou présenté une gêne pour les habitations voisines ou encore que la construction ne pourrait accueillir que des activités générant une telle gêne ; que, par suite, la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Amiens a retenu que le projet ne pouvait être implanté en zone UC dans la mesure où il provoquerait une gêne pour les habitations voisines ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article UC 11 (aspect extérieur) : « Esthétique générale : Les constructions, de quelque nature qu'elles soient, doivent respecter l'harmonie créée par les bâtiments avoisinants et le site, et l'architecture traditionnelle de la Région de l'Amiénois. / Matériaux : / a) Façades : Les façades de tous bâtiments vues depuis le domaine public devront être constituées à 30 % de brique. Les murs de façade qui ne sont pas réalisés en matériaux destinés à rester apparents (tels que : pierre de taille naturelle ou reconstituée, moellon appareillé, brique pleine jointoyée, essentage d'ardoises ou de clin-bois), doivent recevoir un parement ou (sic) en enduit soit teinté dans la masse, soit peint de couleur pierre ou pisé à l'exclusion du blanc. (...) » ; qu'il résulte de ces dispositions que le « bardage métallique » et le « bardage bois » couleur « gris et bleu », prévus en façades du bâtiment, même en tenant compte de l'ajout d'une proportion d'au moins 30 % de briques, n'entrent pas dans les prescriptions du règlement du plan d'occupation des sols rappelées plus haut dès lors que l'esthétique générale de la construction ne correspond pas à « l'architecture traditionnelle de la Région de l'Amiénois » et que ces procédés techniques ne sont pas davantage autorisés par les dispositions particulières applicables aux façades ; que, par suite, la SCI «LECAPRON DE SALOUEL» n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, pour prononcer l'annulation du permis de construire litigieux, le Tribunal administratif d'Amiens a retenu le moyen tiré de la violation de l'article UC 11 du règlement du plan d'occupation des sols ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'article UC 12 (stationnement des véhicules) du règlement du plan d'occupation des sols dispose que : « Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et des installations devra être assuré en dehors des voies publiques » ; qu'en ne prévoyant que sept places de stationnement dont une place pour personne handicapée, pour un bâtiment susceptible d'accueillir une clientèle, comportant cinq pièces « bureaux » ainsi qu'un vaste « atelier » permettant la présence simultanée de plusieurs personnes, le projet ne couvre pas la totalité des besoins en stationnement de véhicules qu'implique la destination de la construction ; que si la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» fait valoir qu'elle est également propriétaire du bâtiment voisin disposant d'un vaste parking, cette circonstance ne peut être utilement invoquée dès lors que les stationnements voisins sont nécessaires à la desserte d'une enseigne commerciale et à sa clientèle et concernent, en tout état de cause, deux constructions distinctes ; que, par suite, la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, pour prononcer l'annulation du permis de construire litigieux, le Tribunal administratif d'Amiens a également retenu le moyen tiré de la violation de l'article UC 12 du règlement du plan d'occupation des sols ;

Considérant que le juge d'appel, lorsqu'il confirme l'annulation du permis de construire prononcée par le Tribunal administratif sur au moins un des moyens d'annulation retenus par ce Tribunal en application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, n'a pas, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel et pour l'application des dispositions précitées, à examiner les autres moyens présentés en première instance et non retenus par le Tribunal ; qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer la solution du Tribunal administratif d'Amiens en retenant les moyens d'annulation tirés de la violation des articles UC 11 et UC 12 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Salouël ; que, par suite, la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a prononcé l'annulation du permis de construire qui lui avait été délivré le 22 décembre 2005 par le maire de la commune de Salouël ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme X, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme que la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» la somme de 1 500 euros en paiement de la somme que M. et Mme X réclament sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» est rejetée.

Article 2 : La SCI «LE CAPRON DE SALOUEL» versera à M. et Mme X la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI «LE CAPRON DE SALOUEL», à M. et Mme X, au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et à la commune de Salouël.

Copie sera transmise au préfet de la Somme.

2

N°07DA01275


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 07DA01275
Date de la décision : 03/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Estève
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : BROUTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-07-03;07da01275 ?
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