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01/09/2008 | FRANCE | N°08DA01259

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des référés, 01 septembre 2008, 08DA01259


Vu la requête, enregistrée sous le n°08DA01259 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 août 2008 par télécopie et régularisée le 8 août 2008 par courrier original, présentée pour la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT (Pas-de-Calais), représentée par son maire en exercice, par Me Morel-Rager ; la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°0804452 en date du 21 juillet 2008 par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Lille, statuant en référé, a décidé, à la demande du p

réfet du Pas-de-Calais, que l'exécution des délibérations n°s 2008-096, 2008-09...

Vu la requête, enregistrée sous le n°08DA01259 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 août 2008 par télécopie et régularisée le 8 août 2008 par courrier original, présentée pour la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT (Pas-de-Calais), représentée par son maire en exercice, par Me Morel-Rager ; la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°0804452 en date du 21 juillet 2008 par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Lille, statuant en référé, a décidé, à la demande du préfet du Pas-de-Calais, que l'exécution des délibérations n°s 2008-096, 2008-097, 2008-098, 2008-099, 2008-100 et 2008-112 du 11 juin 2008 du conseil municipal d'HENIN-BEAUMONT relatives à la passation de marchés et à une cession de terrain à la société Artois Développement serait suspendue jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur leur légalité ;

2°) de rejeter le déféré préfectoral présenté devant le président du Tribunal administratif de Lille ;

La COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT soutient :

- que les marchés publics ne constituent pas des actes budgétaires, même s'ils ont une incidence financière, et n'entrent dès lors pas dans le champ des articles L. 1612-1 à L. 1612-20 du code général des collectivités territoriales instituant une procédure spéciale de contrôle budgétaire ; qu'en tant qu'actes administratifs, ils sont en revanche soumis au contrôle de légalité de droit commun prévu à l'article L. 2131-6 du même code ; que, dès lors, le déféré du préfet du Pas-de-Calais, qui est expressément placé sur le fondement des articles L. 1612-1 à L. 1612-20 susmentionnés, ne pouvait qu'être rejeté ;

- que les délibérations querellées sont relatives à des opérations de mise aux normes et d'aménagements de voirie nécessaires notamment à la sécurité des personnes et des biens ;

- que la Chambre régionale des comptes, saisie par le préfet du Pas-de-Calais, a finalement validé la cession de terrain autorisée par la délibération n°2008-112 ;

- qu'en appliquant à une délibération afférant à une recette, des textes concernant les dépenses, le premier juge a rendu une décision dépourvue de base légale ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu, enregistré le 14 août 2008 par télécopie et régularisé le 19 août 2008 par courrier original, le mémoire en défense présenté par le préfet du Pas-de-Calais ; le préfet conclut au rejet de la requête ;

Le préfet soutient :

- qu'il ressort des dispositions des articles L. 1612-5, L.1612-9 et L. 1612-10 du code général des collectivités territoriales que la saisine de la juridiction financière emporte la suspension de tout pouvoir budgétaire de la collectivité jusqu'au terme de la procédure, l'assemblée délibérante étant uniquement en droit d'engager, de liquider et de mandater les dépenses de fonctionnement dans la limite de celles inscrites au budget de l'année précédente, ainsi que les dépenses d'investissement dans la limite de la moitié des crédits inscrits à ce budget et de mettre en recouvrement les recettes de fonctionnement ; qu'en l'espèce, la Chambre régionale des comptes, saisie le 16 mai 2008, s'est prononcée le 23 juin 2008 ; que le conseil municipal d'HENIN-BEAUMONT, dessaisi dans les conditions susmentionnées de sa compétence budgétaire durant la période séparant ces deux dates, ne pouvait donc prendre le

11 juin 2008 les délibérations en litige, qui ont une incidence sur la section d'investissement du budget communal excédant, s'agissant des dépenses, la limite de la moitié des crédits ouverts au budget de l'année précédente, soit la somme de 3.693.186,52 euros, et impliquant, s'agissant des recettes, la mise en recouvrement de recettes d'investissement telles celles relatives à une cession de terrain ;

- que, contrairement à ce que soutient la commune appelante, la Chambre régionale des comptes a souligné, dans ses deux avis successifs, la gravité de la situation financière communale et a notamment invité celle-ci à hiérarchiser ses priorités en matière d'équipements ; que les marchés en cause, dont le montant total s'élève à la somme de 8.459.319,53 euros, excèdent la somme de 7.683.369 euros que la Chambre régionale des comptes a proposé d'inscrire en dépenses d'équipement et qui a été retenue par l'arrêté préfectoral du 1er août 2008 réglant le budget primitif 2008 pour la commune ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour et de l'heure de l'audience ;

A l'audience publique qui s'est ouverte le 29 août 2008 à 11 heures sont entendus :

- M. Schilte, président de la Cour, en son rapport ;

- Me Morel-Rager, représentant la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT ;

- M. X, adjoint au chef du bureau du contrôle administratif des collectivités locales et Mme Y, chef de section au bureau du contrôle administratif des collectivités locales, représentant le préfet du Pas-de-Calais ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : «Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ci-après reproduit : Art. L. 2131-6, alinéa 3.-Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois. (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 1612-5 du code général des collectivités territoriales : «Lorsque le budget d'une collectivité territoriale n'est pas voté en équilibre réel, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l'Etat dans un délai de trente jours à compter de la transmission prévue aux articles L. 2131-1, L. 3131-1 et L. 4141-1, constate et propose à la collectivité territoriale, dans un délai de trente jours à compter de la saisine, les mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre budgétaire et demande à l'organe délibérant une nouvelle délibération. (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 1612-9 du même code : «A compter de la saisine de la chambre régionale des comptes et jusqu'au terme de la procédure prévue à l'article L. 1612-5, l'organe délibérant ne peut se prononcer en matière budgétaire, sauf pour la délibération prévue au deuxième alinéa de l'article L. 1612-5 et pour l'application de l'article L. 1612-12. (...) » ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 1612-10 du même code : «La transmission du budget de la collectivité territoriale à la chambre régionale des comptes au titre des articles L. 1612-5 et L. 1612-14 a pour effet de suspendre l'exécution de ce budget jusqu'au terme de la procédure. Toutefois, sont applicables à compter de cette transmission les dispositions de l'article L. 1612-1. En outre, les dépenses de la section d'investissement de ce budget peuvent être engagées, liquidées et mandatées dans la limite de la moitié des crédits inscrits à ce titre. » ; qu'aux termes de l'article L.1612-1 : « Dans le cas où le budget d'une collectivité territoriale n'a pas été adopté avant le 1er janvier de l'exercice auquel il s'applique, l'exécutif de la collectivité territoriale est en droit, jusqu'à l'adoption de ce budget, de mettre en recouvrement les recettes et d'engager, de liquider et de mandater les dépenses de fonctionnement dans la limite de celles inscrites au budget de l'année précédente. » ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales que, lorsque le préfet saisit la chambre régionale des comptes après avoir estimé que le budget d'une collectivité territoriale n'a pas été voté en équilibre, cette saisine suspend jusqu'au terme de la procédure ouverte devant la juridiction financière le pouvoir budgétaire de la collectivité territoriale concernée ; que celle-ci garde toutefois compétence d'une part, pour engager, liquider et mandater les dépenses de fonctionnement dans la limite de celles inscrites au budget de l'année précédente, ainsi que les dépenses d'investissement dans la limite de la moitié des crédits inscrits au budget primitif et d'autre part, pour mettre en recouvrement les recettes de fonctionnement ; que le préfet est fondé, dans le cadre de son contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales, à saisir le tribunal administratif aux fins d'annulation de toute délibération qui par son objet ou ses effets méconnaîtrait les dispositions sus-rappelées, son recours pouvant en outre être assorti de la demande de suspension prévue à l'article L.554-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'estimant que le budget voté par la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT n'était pas en équilibre réel, le préfet du Pas-de-Calais a saisi le 16 mai 2008 la Chambre régionale des comptes ;

Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que, par les délibérations 2008-096, 2008-097, 2008-098, 2008-099 et 2008-100 en date du 11 juin 2008, soit avant le terme de procédure prévue à l'article L.1612-5 du code général des collectivités territoriales, le conseil municipal d'HENIN-BEAUMONT a autorisé la signature de divers travaux d'aménagements pour un montant total de 8.459.319,53 euros ; que, compte-tenu des dispositions sus-rappelées, il ne pouvait légalement autoriser l'engagement des dépenses d'investissement qu'à hauteur de la moitié des dépenses d'investissement du budget primitif, soit 3.693.186,52 euros ; qu'ainsi la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT, qui ne peut utilement se prévaloir de ce que les dépenses en cause seraient nécessaires pour la mise aux normes de différents équipements publics, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif a suspendu, sur déféré du préfet fondé sur les dispositions de l'article L.554-1 du code de justice administrative, l'exécution des délibérations sus-rappelées ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions sus-rappelées n'autorisent en matière de recettes que le recouvrement des recettes de fonctionnement ; que, par suite, la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif, qui s'est fondé, contrairement à ce que soutient la commune, sur les dispositions pertinentes du code général des collectivités territoriales, a suspendu l'exécution de la délibération 2008-112 du 11 juin 2008 relative à la cession d'un terrain faisant partie du patrimoine de la commune ;

ORDONNE :

Article 1er: La requête de la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la COMMUNE D'HENIN-BEAUMONT, ainsi qu'au préfet du Pas-de-Calais.

Copie sera transmise au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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N°08DA01259 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 08DA01259
Date de la décision : 01/09/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. André Schilte
Avocat(s) : L.MOREL-RAGER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-09-01;08da01259 ?
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