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09/10/2008 | FRANCE | N°08DA00382

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 09 octobre 2008, 08DA00382


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

3 mars 2008, présentée pour M. Ako Atse Jean-Paul X, demeurant ..., par Me Clément ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0708022, en date du 20 décembre 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2007 du préfet du Nord décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour du préfet du Nord désignant la Côte d'I

voire comme pays de destination de cette mesure ;

2°) d'annuler ledit arrêté et ladi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

3 mars 2008, présentée pour M. Ako Atse Jean-Paul X, demeurant ..., par Me Clément ; M. X demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0708022, en date du 20 décembre 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2007 du préfet du Nord décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour du préfet du Nord désignant la Côte d'Ivoire comme pays de destination de cette mesure ;

2°) d'annuler ledit arrêté et ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. X soutient que l'autorité préfectorale ne s'est pas livrée à un examen particulier de sa situation personnelle avant de prendre l'arrêté attaqué ; que les motifs de l'arrêté, qui sont, au demeurant, rédigés à l'aide d'une formule stéréotypée, ne mentionnent pas, en effet, que ses quatre frères et soeurs, dont trois sont de nationalité française, résident en France, et que son père a vécu dans ce pays durant vingt-cinq ans ; que cette méconnaissance par l'autorité préfectorale de la situation personnelle de l'exposant résulte essentiellement de ce qu'il n'a été entendu à aucun moment par les services préfectoraux, qui se sont bornés à exploiter les éléments transmis par la préfecture de l'Orne et n'ont pas sollicité des autorités belges la production des éléments susceptibles d'avoir été recueillis par elles ;

- que l'arrêté attaqué ne pouvait légalement être pris sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'exposant avait fait précédemment l'objet d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, en exécution de laquelle il avait quitté la France pour se rendre en Belgique, où il a été interpellé ; que la procédure de reconduite à la frontière ne pouvait, dans ces conditions, être mise en oeuvre à son égard, seul un nouveau refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français étant susceptible d'être légalement pris en l'espèce ;

- qu'il est entré régulièrement en France en 2003 ; que ses quatre frères et soeurs, dont trois sont français, résident en France ; que le frère qui l'héberge est disposé à lui offrir un emploi dans sa société ; que son père a vécu durant vingt-cinq ans en France ; que, dans ces circonstances, l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 31 mars 2008 fixant la clôture de l'instruction au 30 avril 2008 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention du 19 juin 1990, modifiée, d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des États de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2008 :

- le rapport de M. André Schilte, président de la Cour ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté du 13 décembre 2007, le préfet du Nord a décidé de reconduire M. X, ressortissant ivoirien, né le 15 juin 1979 et entré en France le 4 juillet 2003, à la frontière, en se fondant sur les dispositions de l'article L. 511-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. X forme appel du jugement en date du 20 décembre 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté et contre la décision du même jour désignant la Côte d'Ivoire comme pays de destination de ladite mesure d'éloignement ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (...) II - L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 511-3 du même code : « Les dispositions du 2° et du 8° du II de l'article

L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne si, en provenance directe du territoire d'un des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, il s'est maintenu sur le territoire métropolitain sans se conformer aux stipulations de l'article 19, paragraphe 1 ou 2, de l'article 20, paragraphe 1, et de l'article 21, paragraphe 1 ou 2, de ladite convention » ; qu'enfin, aux termes de l'article 19 de la convention d'application des accords de Schengen, modifiée : « Art. 19 - 1. Les étrangers titulaires d'un visa uniforme qui sont entrés régulièrement sur le territoire de l'une des Parties contractantes peuvent circuler librement sur le territoire de l'ensemble des Parties contractantes pendant la durée de validité du visa (...)» ; qu'il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté que si

M. X est entré régulièrement en France le 4 juillet 2003 muni d'un passeport et d'un visa de court séjour en cours de validité, il s'est maintenu sur le territoire des Etats membres de l'Union européenne sans se conformer aux obligations posées par les stipulations précitées de l'article 19 de la convention d'application des accords de Schengen ; qu'il entrait ainsi dans le cas visé au 2° précité de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auquel renvoient les dispositions susrappelées de l'article L. 511-3 du même code permettant au préfet du Nord de décider, alors même que l'intéressé avait précédemment fait l'objet, le 30 juillet 2007, d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français prise par le préfet de l'Orne, qu'il serait reconduit à la frontière ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, alors même que les motifs de l'arrêté attaqué ne mentionnent pas la présence en France des quatre frères et soeurs de

M. X, dont trois sont de nationalité française, ni la circonstance que son père a vécu durant vingt-cinq ans sur le territoire français, et que certaines mentions sont rédigées à l'aide de formules stéréotypées, que le préfet du Nord ne se serait pas livré à un examen suffisant de la situation particulière de l'intéressé avant de prendre ledit arrêté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; que si M. X fait état de la présence en France de ses quatre frères et soeurs, dont trois sont de nationalité française, et de ce que son père a vécu régulièrement en France durant vingt-cinq ans, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans enfant ; que M. X, qui, ainsi qu'il a été dit, est entré en France le 4 juillet 2003, n'établit pas, en outre, ni même n'allègue, être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu habituellement jusqu'à l'âge de 24 ans ; que, dans ces circonstances et eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé, malgré les perspectives d'insertion professionnelle qui seraient les siennes et les liens entretenus par sa famille avec la France, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, enfin, que si M. X conclut à l'annulation de la décision distincte du 13 décembre 2007 par laquelle le préfet du Nord a désigné le pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière prise le même jour à son égard, il n'assortit lesdites conclusions d'aucun moyen ; que, dès lors, les conclusions dont s'agit ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, dès lors, les conclusions aux fins d'injonction assorties d'astreinte qu'il présente doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Ako Atse Jean-Paul X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

N°08DA00382 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 08DA00382
Date de la décision : 09/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. André Schilte
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-10-09;08da00382 ?
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