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09/10/2008 | FRANCE | N°08DA00735

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Juge des reconduites à la frontière, 09 octobre 2008, 08DA00735


Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2008 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée le 5 mai 2008 par courrier original, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le préfet demande au président de la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0800893, en date du 25 mars 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté en date du

20 mars 2008 prononçant la reconduite à la frontière de M. Djamal X et désignant l'Algérie comme pays de destination de cette mesure ;



2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le président du Tribunal a...

Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2008 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée le 5 mai 2008 par courrier original, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le préfet demande au président de la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0800893, en date du 25 mars 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté en date du

20 mars 2008 prononçant la reconduite à la frontière de M. Djamal X et désignant l'Algérie comme pays de destination de cette mesure ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le président du Tribunal administratif de Rouen ;

Le préfet soutient que le premier juge a estimé à tort que l'arrêté attaqué a porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et méconnu ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, bien qu'étant arrivé en France en 1992, M. X n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel son père et trois de ses soeurs résident toujours et dans lequel il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 19 ans ; que l'intéressé, qui a épousé une ressortissante française le 11 juillet 1998, n'a effectué les démarches nécessaires à l'obtention d'un titre de séjour qu'en avril 2003 ; qu'il n'a, par ailleurs, jamais sollicité son admission au séjour pour raison médicale et n'apporte aucun document établissant de manière précise la pathologie dont il souffrirait ; que, si M. X a fait état du traitement médical qu'il suit en France, aucun élément ne permet d'établir qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement médical adapté en Algérie, ni même que son état de santé nécessite une prise en charge médicale ; que le comportement de l'intéressé, qui a fait l'objet de multiples condamnations pénales depuis son entrée en France pour des faits de vol, contrefaçon ou falsification de chèque et usage de chèque contrefait ou falsifié, ne reflète pas une réelle volonté d'intégration ; que M. X, qui est âgé de 35 ans, est divorcé et sans charge de famille ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance, en date du 23 mai 2008, par laquelle le président de la Cour fixe la clôture de l'instruction au 7 juillet 2008 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2008 :

- le rapport de M. André Schilte, président de la Cour ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour annuler, par le jugement attaqué en date du 25 mars 2008, l'arrêté du 20 mars 2008 par lequel le PREFET DE LA SEINE-MARITIME a prononcé la reconduite à la frontière de M. X, ressortissant algérien, né le 19 janvier 1973 et entré en France le 9 novembre 1992, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a estimé, qu'eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M. X et aux circonstances que trois des frères et soeurs de l'intéressé, qui, par ailleurs, souffre d'une affection psychiatrique nécessitant un traitement suivi, résident en France, ledit arrêté avait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, toutefois, ainsi que le relève le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, qui forme appel de ce jugement, M. X, qui est divorcé et sans enfant, n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu jusqu'à son arrivée en France en 1992, à l'âge de 19 ans, et où demeurent, ainsi qu'il l'a lui-même déclaré lors de son interpellation, son père et trois de ses soeurs ; que, dans ces conditions, eu égard aux conditions du séjour de M. X en France et malgré la durée de ce séjour et la présence en France de trois frères et soeurs, l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé, nonobstant la pathologie dont il serait atteint, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen s'est, dès lors, fondé à tort sur ce motif pour annuler ledit arrêté ;

Considérant qu'il appartient toutefois au président de la Cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par M. X devant le président du Tribunal administratif de Rouen ;

Considérant, au préalable, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (...) II - L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois suivant l'expiration de ce titre (...) » ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X, qui s'est maintenu au-delà d'un délai d'un mois après l'expiration du certificat de résidence d'un an qui lui avait été précédemment délivré en qualité de conjoint de ressortissante française, ait demandé le renouvellement de ce titre ; qu'il entrait ainsi dans le cas visé par les dispositions précitées autorisant le PREFET DE LA SEINE-MARITIME à décider, par l'arrêté attaqué, qu'il serait reconduit à la frontière ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué a été signé par M. Claude Y, sous-préfet, secrétaire général de la préfecture de la Seine-Maritime, qui bénéficiait d'une délégation de signature qui lui avait été donnée par un arrêté préfectoral du 26 décembre 2007 régulièrement publié le 28 décembre 2007 au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que cette délégation habilitait notamment M. Y à signer les arrêtés de reconduite à la frontière ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué, qui manque en fait, ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que les conditions dans lesquelles est organisée la rétention administrative d'un ressortissant étranger sont sans incidence sur la légalité de la mesure de reconduite à la frontière prise parallèlement à son égard ; que, dès lors, M. X ne peut utilement se prévaloir, en l'espèce, de la circonstance, à la supposer même établie, que l'administration n'aurait pas apporté la preuve de la tenue sur les lieux de sa rétention du registre prévu aux articles L. 553-1 et R. 551-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) » ; que si M. X fait valoir qu'il souffre d'une pathologie psychiatrique et si le certificat médical et l'ordonnance qu'il a versés au dossier établissent qu'il bénéficie d'un suivi médical et d'un traitement médicamenteux qui lui sont prodigués par l'hôpital Pierre Janet du Havre, ces mêmes pièces ne sont pas de nature à établir que l'état de santé de M. X nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il n'est, au surplus, établi par aucun élément du dossier que l'intéressé ne pourrait, le cas échéant, bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait figuré, à la date à laquelle l'arrêté attaqué a été pris, parmi les ressortissants étrangers visés au 10° précité de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ; que, pour les mêmes motifs, l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'il comporte sur l'état de santé de M. X ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté en date du 20 mars 2008 prononçant la reconduite à la frontière de M. X et désignant l'Algérie comme pays de destination de cette mesure ; que, dès lors, la demande présentée par M. X devant le président du Tribunal administratif de Rouen doit être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0800893 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen en date du 25 mars 2008 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le président du Tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à M. Djamal X.

Copie sera transmise au PREFET DE LA SEINE-MARITIME.

N°08DA00735 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 08DA00735
Date de la décision : 09/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. André Schilte
Rapporteur public ?: M. Lepers

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-10-09;08da00735 ?
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