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30/10/2008 | FRANCE | N°08DA00312

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Formation plénière, 30 octobre 2008, 08DA00312


Vu la requête, enregistrée le 20 février 2008 par télécopie et régularisée par l'envoi de l'original le 5 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Ahmed X, demeurant ..., par Me Adjaout ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706784, en date du 21 janvier 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

31 août 2007 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fi

xant le pays de destination et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat au paie...

Vu la requête, enregistrée le 20 février 2008 par télécopie et régularisée par l'envoi de l'original le 5 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Ahmed X, demeurant ..., par Me Adjaout ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706784, en date du 21 janvier 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

31 août 2007 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la formulation des délais et voies de recours ne satisfait pas à l'exigence d'une information claire et adaptée ; que le Tribunal administratif de Lille a méconnu le principe du contradictoire de la procédure d'instruction ainsi que l'étendue de ses pouvoirs d'instruction ; que l'arrêté portant refus de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ; qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2008, présenté par le préfet du Nord, qui conclut au rejet de la requête ; à cette fin, il fait valoir que la requête formée par

M. X est irrecevable, faute d'avoir été introduite dans les délais ; que le principe du contradictoire a été respecté ; que le refus de titre de séjour n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'intéressé appartient à la catégorie des étrangers ouvrant droit au regroupement familial et ne peut invoquer directement le bénéfice de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'arrêté contesté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivé ; que M. X ne justifie pas se trouver dans l'un des cas dans lesquels un étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'enfin, l'obligation de quitter le territoire national ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 27 avril 2008 par télécopie et régularisé par l'envoi de l'original le 29 avril 2008, présenté pour M. X ; le requérant verse des pièces complémentaires au débat, réitère ses conclusions et moyens et soutient que le mémoire de Mme Y n'est pas recevable, faute de disposer d'une délégation précise et régulière du préfet du Nord ; que, si l'administration soutient qu'il appartient à la catégorie des étrangers ouvrant droit au regroupement familial, une demande en ce sens a été présentée le 23 octobre 2007 par l'épouse de l'intéressée, à laquelle un refus implicite a été opposé le 23 avril 2008 ; que l'administration n'a pas apprécié sa situation familiale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain en date du 9 octobre 1987, modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique plénière du 27 octobre 2008 à laquelle siégeaient M. André Schilte, président de la Cour, M. Marc Estève, président de chambre, M. Antoine Mendras, président de chambre, M. Gérard Gayet, président de chambre et

M. Albert Lequien, président-assesseur :

- le rapport de M. Albert Lequien, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X relève appel du jugement du 21 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 août 2007 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si M. X n'a reçu que le 23 novembre 2007 communication du mémoire par lequel le préfet du Nord a soulevé la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête sur laquelle, au demeurant, le Tribunal administratif de Lille n'a pas statué, l'intéressé a disposé jusqu'au 26 novembre 2007, date de la clôture de l'instruction, d'un délai suffisant pour répondre à cette fin de non-recevoir ; qu'un mémoire en réplique a d'ailleurs été enregistré les 23 et 26 novembre 2007 pour M. X ; que le moyen tiré du défaut de respect du principe du contradictoire manque en fait ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'étranger qui fait l'objet d'un refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour ou d'un retrait de titre de séjour, de récépissé de demande de carte de séjour ou d'autorisation provisoire de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination peut, dans le délai d'un mois suivant la notification, demander l'annulation de ces décisions au tribunal administratif » ; et qu'aux termes de l'article R. 775-2 du code de justice administrative relatif au contentieux des décisions de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français : « Le délai de recours est d'un mois à compter de la notification de la décision attaquée. Il n'est pas prorogé par l'exercice d'un recours administratif préalable » ; qu'enfin aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : « Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 31 août 2007 mentionne la possibilité de former, dans un délai d'un mois, un recours contentieux ou « dans le délai de

2 mois suivant la notification de la décision » un recours administratif, gracieux ou hiérarchique, dépourvu d'effet suspensif ; que, d'une part, l'absence d'effet suspensif du recours administratif ne s'attache qu'à l'exécution de la décision et non à la prorogation du délai de recours ; que, d'autre part, l'indication de la condition du délai de deux mois, laquelle est sans fondement s'agissant d'un recours administratif qui ne prorogerait pas le délai du recours contentieux, laisse entendre qu'un tel recours pourrait avoir cet effet ; qu'ainsi, faute d'indiquer précisément à l'intéressé qu'un recours administratif, contrairement au droit commun, ne prorogerait pas le délai de recours contentieux, la notification des voies et délais de recours de la décision attaquée a pu, compte tenu des ambiguïtés ci-dessus relevées qu'elle comporte, induire en erreur

M. X sur la portée d'un recours administratif ; que, dans ces conditions, le recours gracieux du requérant, présenté le 14 octobre 2007, a prorogé le délai de recours contentieux ouvert à l'intéressé, qui n'était pas expiré à la date du 20 octobre 2007, à laquelle sa demande a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Lille ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient le préfet, la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lille n'était pas tardive ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet ne peut qu'être rejetée ;

Sur la légalité de l'arrêté portant refus de titre de séjour :

Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le premier juge, d'écarter le moyen qui n'est assorti d'aucun élément de fait ou de droit nouveau, par rapport à l'argumentation développée en première instance par M. X, tiré de ce que la décision du 31 août 2007 prise à son encontre par le préfet du Nord serait entachée d'une erreur d'appréciation ;

Sur la légalité de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant que l'obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, toutefois, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant que si l'arrêté attaqué du 31 août 2007 se borne à viser le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la lettre du même jour notifiant cette décision informe M. X que : « Conformément aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile », ce dernier était dans l'obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ; qu'eu égard aux termes de ce courrier et alors même qu'il est distinct de l'arrêté attaqué, le préfet du Nord doit être regardé comme ayant ainsi communiqué les motifs de sa décision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée de défaut de motivation doit être écarté ;

Considérant que si M. X se prévaut également, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté portant obligation de quitter le territoire, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 août 2007 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ahmed X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Formation plénière
Numéro d'arrêt : 08DA00312
Date de la décision : 30/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Schilte
Rapporteur ?: M. Marc Estève
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : ADJAOUT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-10-30;08da00312 ?
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