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06/11/2008 | FRANCE | N°07DA01654

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 06 novembre 2008, 07DA01654


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 29 octobre 2007 et régularisée par la production de l'original le 31 octobre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société EVONIK REXIM venant aux droits de la société REXIM, dont le siège social est 33 rue de Verdun à Ham (80400), par Me Sappin de la SELAFA Capstan ; la société EVONIK REXIM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501564-0503079 du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 12 avril 2005 de l'inspecteur du travail au

torisant le licenciement pour motif économique de M. X, salarié protégé, ...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 29 octobre 2007 et régularisée par la production de l'original le 31 octobre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société EVONIK REXIM venant aux droits de la société REXIM, dont le siège social est 33 rue de Verdun à Ham (80400), par Me Sappin de la SELAFA Capstan ; la société EVONIK REXIM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501564-0503079 du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 12 avril 2005 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement pour motif économique de M. X, salarié protégé, ensemble la décision implicite, née le 9 octobre 2005, par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a rejeté le recours hiérarchique formé par M. X à l'encontre de ladite décision du 12 avril 2005 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. X devant le Tribunal administratif d'Amiens ;

3°) de condamner M. X à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- à titre principal, que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la société a respecté son obligation de reclassement vis-à-vis de M. X ; qu'elle a mis en oeuvre trois grandes séries de mesures dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi dont certaines étaient destinées à favoriser les reclassements internes et externes ; que M. X ayant fait acte de candidature afin de bénéficier du mécanisme de préretraite dans le cadre d'un accord collectif signé le 19 janvier 2005 avec les délégués syndicaux, la société n'avait aucune obligation supplémentaire de lui rechercher un poste de reclassement ; que la mesure de préretraite constitue en tant que telle une mesure de reclassement ; que M. X, qui s'est porté volontaire pour entrer dans ce mécanisme, ne peut ainsi prétendre que les recherches relatives à son reclassement ont été insuffisantes ;

- à titre subsidiaire, que M. X n'a pas soulevé de moyen de légalité externe devant les premiers juges ; qu'en tout état de cause, la procédure de licenciement engagée à l'encontre de M. X a été régulière ; que la réalité du motif économique du licenciement est établie ; que les difficultés, tant conjoncturelles que structurelles, rencontrées dans le secteur d'activité de la société nécessitaient une réorganisation de la société REXIM ; que le licenciement de M. X est sans lien avec son mandat représentatif ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du 29 novembre 2007 portant clôture de l'instruction au 29 février 2008 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2008, présenté pour

M. Jean-Claude X, demeurant ..., par Me Bielasiak, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société EVONIK REXIM à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir :

- que la requête présentée pour la société EVONIK REXIM, par télécopie, le 29 octobre 2007, n'a été régularisée que le 28 novembre 2007 ; qu'elle est, par suite, irrecevable ;

- que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la société EVONIK REXIM n'avait pas respecté son obligation en matière de reclassement en ce qui le concerne ; que la société ne peut soutenir que la mesure de préretraite constitue en elle-même une mesure de reclassement ; qu'il a été contraint d'adhérer à ce mécanisme de préretraite, ne pouvant bénéficier d'aucun revenu pendant plusieurs mois ; que la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi ne dispensait pas la société de procéder à un examen particulier de sa situation et de procéder à une recherche individuelle d'offres de reclassement ;

- que, contrairement à ce qui est soutenu par la société EVONIK REXIM, il avait soulevé devant les premiers juges un moyen de légalité externe tiré de l'irrégularité de la procédure préalable à son licenciement ; que l'entretien préalable n'était que de pure forme et que le comité d'entreprise n'a pas disposé d'un dossier comportant l'exposé des faits justifiant la procédure de licenciement engagée ;

- que l'inspecteur du travail et le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale n'ont pas vérifié la réalité du motif économique de son licenciement ; que celle-ci n'est pas établie ; que le groupe auquel appartient la société REXIM s'est volontairement désengagé et a privilégié le niveau de rentabilité au détriment de la stabilité de l'emploi en cherchant à améliorer les profits ; que la réalité de la suppression du poste qu'il occupait n'est pas démontrée ; que la définition des fonctions du nouveau poste de « responsable informatique-chef de projet SAP » créé correspond exactement à celle des fonctions qu'il occupait antérieurement ;

- que la procédure de licenciement engagée à son encontre, qui ne concerne que des salariés protégés cadres, est en lien avec l'exercice de son mandat représentatif ; qu'il avait dénoncé des discriminations, notamment celles consistant à ne faire bénéficier d'une retraite par capitalisation que les seuls cadres travaillant au siège de la société ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 10 juin 2008, présenté pour la société EVONIK REXIM par lequel elle conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que sa requête, enregistrée par télécopie le 29 octobre 2007, a été régularisée par la production de l'original le 31 octobre 2007 ;

Vu l'ordonnance du 12 juin 2008 portant réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 juillet 2008, présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens ;

Vu la mise en demeure adressée le 7 juillet 2008 au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 août 2008, présenté pour la société EVONIK REXIM qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 14 août 2008 et régularisé par la production de l'original le 18 août 2008, présenté par le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité ; il déclare s'en remettre à la sagesse de la Cour du soin d'apprécier les mérites de la requête de la société EVONIK REXIM ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 13 octobre 2008 et régularisé par la production de l'original le 14 octobre 2008, présenté pour M. X, par Me Ascensio, avocat, qui conclut aux mêmes fins que ses précédents mémoires, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2008 à laquelle siégeaient M. Gérard Gayet, président de chambre, Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur et Mme Corinne Baes Honoré, premier conseiller :

- le rapport de Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur ;

- les observations de Me Dubuissons, avocat, pour la société EVONIK REXIM et de Me Ascensio, avocat, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Alain de Pontonx, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société REXIM a demandé à l'inspecteur du travail, le 17 mars 2005, l'autorisation de licencier pour motif économique M. X, délégué du personnel titulaire ; que, par une décision du 12 avril 2005, l'inspecteur du travail lui a accordé cette autorisation ; que le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, saisi par la voie du recours hiérarchique, a, par une décision implicite née le 9 octobre 2005, rejeté le recours formé par M. X à l'encontre de ladite décision ; que la société EVONIK REXIM venant aux droits de la société REXIM relève appel du jugement du 3 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 12 avril 2005 de l'inspecteur du travail, ensemble la décision implicite de rejet du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : « Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques (...) » ; le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises » ;

Considérant que le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise au sein du groupe auquel appartient cette dernière ;

Considérant que la société REXIM a entendu, dans un objectif de sauvegarde de la compétitivité, réorganiser l'activité de la division à laquelle elle appartient, au sein du groupe allemand Degussa ; que, pour autoriser le licenciement pour motif économique de M. X, embauché depuis août 1993 et exerçant les fonctions de responsable informatique, l'inspecteur du travail s'est fondé sur l'absence de possibilité de proposition de reclassement interne et sur la notification de la candidature de l'intéressé au dispositif de départ en préretraite, par courrier du 1er février 2005 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la société REXIM a, dans le cadre de la réorganisation de son activité, mis en place pour l'ensemble de ses salariés licenciés, un plan de sauvegarde de l'emploi qui prévoyait, notamment, des mesures de reclassement internes au sein du groupe ainsi qu'un dispositif de départ en préretraite pour les salariés âgés de 53 ans au minimum, ayant dix ans d'ancienneté ; que si la société REXIM soutient que M. X s'est porté candidat pour bénéficier du dispositif de départ en préretraite et que sa candidature a été acceptée, cette circonstance ne la dispensait pas de respecter l'obligation qui lui incombait d'examiner au préalable les possibilités particulières de reclassement de M. X, en sa qualité de salarié protégé ; qu'au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre par la société REXIM excluait expressément des mesures de reclassement interne les salariés candidats au dispositif de départ en préretraite, y compris ceux dont la candidature aurait été acceptée ; qu'en l'espèce, la société REXIM n'établit pas avoir procédé à un examen individuel des possibilités de reclassement interne de M. X, ni avoir proposé à l'intéressé, préalablement à sa candidature au dispositif de préretraite, d'offre de reclassement, ainsi que le fait d'ailleurs valoir M. X ; qu'elle ne peut, ainsi, être regardée comme s'étant acquittée de son obligation

vis-à-vis de l'intéressé, ainsi que l'ont estimé, à bon droit, les premiers juges ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer tant sur la fin de non-recevoir opposée par M. X que sur les autres moyens soulevés, que la société EVONIK REXIM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a annulé les décisions en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la société EVONIK REXIM la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société EVONIK REXIM, le paiement à M. X d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société EVONIK REXIM est rejetée.

Article 2 : La société EVONIK REXIM versera à M. X une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société EVONIK REXIM venant aux droits de la société REXIM, à M. Jean-Claude X et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.

N°07DA01654 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA01654
Date de la décision : 06/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Marie-Christine Mehl-Schouder
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SELAFA CAPSTAN LMS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-11-06;07da01654 ?
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