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10/11/2008 | FRANCE | N°07DA01886

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 10 novembre 2008, 07DA01886


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2007 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée le 12 décembre 2007 par la production de l'original, présentée pour Mme Nicole X, demeurant 1..., et M. Jean-Pierre Y, demeurant ..., par Me Denesle ; Mme X et M. Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500466 du 11 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à ce que le Centre hospitalier régional et universitaire de Rouen soit condamné à leur verser la somme de 15 000 euros chacun e

n réparation du préjudice moral résultant du décès de leur père à la su...

Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2007 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée le 12 décembre 2007 par la production de l'original, présentée pour Mme Nicole X, demeurant 1..., et M. Jean-Pierre Y, demeurant ..., par Me Denesle ; Mme X et M. Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500466 du 11 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à ce que le Centre hospitalier régional et universitaire de Rouen soit condamné à leur verser la somme de 15 000 euros chacun en réparation du préjudice moral résultant du décès de leur père à la suite d'une infection nosocomiale ;

2°) de condamner le centre hospitalier à leur verser lesdites sommes ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 700 euros pour chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le rapport de l'expert commis par le tribunal concluait que leur père a bien été victime d'une infection pulmonaire nosocomiale qui a joué un rôle important dans son décès ; que le tribunal n'a pas tenu compte des dispositions de la loi du 30 septembre 2002 entrées en vigueur le 1er janvier 2003 ; qu'il résulte de la décision du Conseil d'Etat du 13 juillet 2007 que cette loi crée un nouveau régime de prise en charge par la solidarité nationale des dommages causés par les infections nosocomiales, notamment lorsqu'elles ont entraîné le décès du patient ; que dans ce cas l'existence d'une cause endogène n'est pas de nature à exonérer l'établissement hospitalier de ses obligations d'indemnisation ; que l'opération cardiaque elle-même a été réussie, le décès ne résultant pas d'une insuffisance cardiaque ; qu'il n'est d'ailleurs pas établi que l'infection soit liée à des germes déjà présents chez le patient ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 11 avril 2008 au directeur de la Caisse primaire d'assurance maladie de Rouen, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2008 par télécopie et confirmé le 19 juin 2008 par la production de l'original, présenté pour le Centre hospitalier régional et universitaire de Rouen, dont le siège est 1 rue Germont à Rouen (76000), par Me le Prado, qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que les sommes réclamées par les requérants soient réduites compte tenu de la gravité de l'état de leur père qui laissait présumer une espérance de vie limitée ; il fait valoir que le rapport d'expertise énonce que le père des requérants est décédé des suites de la pathologie cardiaque dont il souffrait ; que la chirurgie mitrale était la seule chance de survie malgré un risque opératoire majeur compte tenu de l'âge du patient, de son état de santé qui présentait toutes les conditions défavorables, de la nécessité d'intervenir en urgence, et des risques liés à ce type de chirurgie ; que le décès résulte d'une décompensation poly-viscérale liée à son insuffisance cardiaque ; que l'infection pulmonaire qui a touché le patient résulte de germes déjà présents dans son organisme et ne peut donc être qualifiée de nosocomiale alors même qu'elle s'est développée à l'hôpital ; que toute indemnisation est refusée quand le patient n'avait pas le choix de recourir à une autre solution thérapeutique ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 juillet 2008, présenté pour Mme X et M. Y qui persistent dans leurs conclusions en faisant en outre valoir que l'origine endogène de l'infection n'est pas établie ;

Vu la lettre en date du 6 octobre 2008 par laquelle le président de la formation de jugement a informé les parties de ce que la décision était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 octobre 2008, présenté pour Mme X et M. Y qui persistent dans leurs conclusions et font en outre valoir que la Cour peut évoquer après avoir régularisé la mise en cause de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 octobre 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X et M. Y relèvent appel du jugement du 11 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à ce que le Centre hospitalier régional et universitaire de Rouen soit condamné à leur verser la somme de 15 000 euros chacun en réparation du préjudice moral résultant du décès, survenu à l'âge de 81 ans, de M. Paul Y, leur père, à la suite de l'opération cardiaque que ce dernier a subie le 17 janvier 2003 ;

Considérant que les requérants invoquent les dispositions de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi du 30 décembre 2002 qui ont créé un nouveau régime de prise en charge par la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales, à la seule condition qu'elles aient entraîné un taux d'incapacité permanente supérieur à 25 % ou le décès du patient ; que l'article L. 1142-21 du même code dispose : « Lorsque la juridiction compétente, saisie d'une demande d'indemnisation des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins dans un établissement de santé, estime que les dommages subis sont indemnisables au titre du II de l'article L. 1142-1 ou au titre de l'article L. 1142-1-1, l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) est appelé en la cause s'il ne l'avait pas été initialement. Il devient défendeur en la procédure. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert commis par le tribunal, que le père des requérants a été hospitalisé le 24 décembre 2002 à la suite de l'aggravation de difficultés respiratoires ; qu'il a subi une opération cardiaque consistant en la pose d'une valve mitrale le 17 janvier 2003 soit postérieurement à l'entrée en vigueur de l'article L. 1142-1-1 susvisé et qu'une infection pulmonaire a été détectée dans les jours suivants ; que l'expert indique que l'opération comportait des risques importants tant en raison de l'évolution de l'état cardiaque non stabilisé de M. Y, de son âge, que des autres troubles dont il était atteint, soit une insuffisance rénale et une bronchite chronique, mais que l'infection a joué un rôle important dans son décès ; qu'ainsi la demande d'indemnisation réclamée par les requérants était susceptible de relever du régime défini par l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique ; que le tribunal a omis de mettre en cause l'ONIAM et a ainsi méconnu l'article L. 1142-21 précité ; qu'eu égard à l'objet dudit article, la violation de ces prescriptions constitue une irrégularité que le juge d'appel est tenu de relever d'office ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler le jugement attaqué, et, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer le jugement de la demande devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du Centre hospitalier régional et universitaire de Rouen la somme de 700 euros chacun que demandent Mme X et M. Y au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0500466 du 11 octobre 2007 du Tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le Tribunal administratif de Rouen.

Article 3 : Le Centre hospitalier régional universitaire de Rouen versera à Mme X et M. Y la somme de 700 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nicole X, à M. Jean-Pierre Y, au Centre hospitalier régional et universitaire de Rouen et à la Caisse primaire d'assurance maladie de Rouen.

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N°07DA01886


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA01886
Date de la décision : 10/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Mme Marianne Terrasse
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : DENESLE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-11-10;07da01886 ?
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