La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/2008 | FRANCE | N°08DA00506

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 09 décembre 2008, 08DA00506


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 19 mars 2008, régularisée par la production de l'original le 20 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme René X, demeurant ..., par Me Di Dio ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702723 du 10 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des pénalités afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 et au ve

rsement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 19 mars 2008, régularisée par la production de l'original le 20 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme René X, demeurant ..., par Me Di Dio ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702723 du 10 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des pénalités afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 et au versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer la décharge intégrale des pénalités de mauvaise foi ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent qu'il appartenait à l'administration fiscale d'apporter la preuve de l'élément intentionnel, à savoir la volonté délibérée d'éluder l'impôt ; qu'ils ne sont pas professionnels du droit et encore moins de la fiscalité ; que le fait qu'ils n'ont pas procédé au remboursement d'un crédit bancaire ne signifiait pas pour autant à leurs yeux que l'opération n'était pas conforme ; qu'ils n'ont à aucun moment été inquiétés par la chronologie de l'opération ; que la gérance loin de les alerter sur la non faisabilité de l'opération a été jusqu'à réunir une assemblée générale extraordinaire en décembre 2002 et ce, afin de procéder à l'augmentation du capital ; que le gérant de la SCI Poseidon Invest, seul interlocuteur des investisseurs, leur a fourni sciemment des informations erronées ; que le prêt bancaire prévu initialement avec la Sodema comportait un différé de remboursement tant du capital que des intérêts ; que dès lors, l'absence de remboursement de prêt ne pouvait constituer un indice suspect aux yeux des investisseurs ; que les investisseurs n'avaient pas de volonté manifeste de frauder l'impôt ; que les investisseurs résident à plus de 9 000 km du siège social de la société constituée ad hoc et donc du lieu de déroulement des opérations ; que la simple qualité d'associé ne permet pas la mise en oeuvre automatique des pénalités de mauvaise foi ; que les investisseurs n'ont joué aucun rôle actif dans la vie sociale de la SCI Poseidon Invest ; qu'il est extrêmement rare que l'administration fiscale ne procède pas à la remise gracieuse de telles pénalités de mauvaise foi ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique tendant au rejet de la requête ; il soutient qu'en contrepartie des réductions d'impôt prévues à l'article 199 undecies A-6 du code général des impôts, des obligations sont mises à la charge des sociétés et des investisseurs ; qu'en cas de remise en cause, le montant de la dépense ayant servi de base au calcul de la réduction d'impôt est assimilé à une insuffisance de déclarations pour l'application de l'article 1729 du code général des impôts ; que le contrôle sur place de la SCI Poseidon Invest a permis d'établir que la société n'a pas réalisé son objet social, ni respecté ses dispositions statutaires ; qu'il a été constaté que les associés personnes physiques de la SCI ne remplissaient pas les conditions pour bénéficier de l'aide fiscale outre-mer prévue à l'article 199 undecies A du code général des impôts ; que, dès le départ, le projet visant cette défiscalisation des sommes investies n'était pas finalisé ou financé ; qu'il ressort du procès-verbal d'assemblée du 28 décembre 2002, que les nouveaux associés ou personnes physiques de la SCI s'obligent à libérer leurs apports au plus tard le 31 décembre 2002 ; que M. X, nouvel investisseur, était obligé à l'égard de cette SCI avant le 31 décembre 2002 pour pouvoir prétendre à l'avantage fiscal de l'article 199 undecies A à hauteur d'un apport de 109 200 euros ; que les requérants ne peuvent être de bonne foi et ignorer n'avoir pas tenu cet engagement individuel ou personnel ; qu'il ne pouvait ignorer n'avoir pas effectué cet apport global de 109 200 euros avant le 31 décembre 2002, apport en contrepartie duquel par principe un certain nombre de titres est attribué ; qu'il ne pouvait également ignorer n'avoir pas versé l'intégralité de sa participation au capital de la SCI, au moment de l'établissement des déclarations de revenus des années 2002 et 2003 ; qu'il ne pouvait ignorer n'avoir jamais souscrit d'emprunt personnel afin de financer et participer à la réalisation du programme d'investissement immobilier envisagé par la SCI en cause alors même que le procès-verbal du 28 décembre 2002 fait état de prêts consentis par la Sodema à chacun des associés ; que les investisseurs entendaient financer les 72 % restant par un emprunt auprès de la société de crédit dite Sodema, cet emprunt n'ayant jamais été finalisé et, en tout état de cause, non remboursé ; qu'outre le fait que l'intégralité de l'apport n'a pas été réalisée, une incertitude demeure quant au financement des 72 % par emprunt ; que la demande de remboursement de frais irrépétibles ne peut être que rejetée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse, président-assesseur et Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller :

- le rapport de Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. et Mme X font appel du jugement en date du 10 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des pénalités de mauvaise foi afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts :

« 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droits au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales. » ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 199 undecies A du code général des impôts : « 1. Il est institué une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui investissent dans les départements et territoires d'outre-mer, dans les collectivités territoriales de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon et en Nouvelle-Calédonie entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2006. (...) 2. La réduction d'impôt s'applique :(...) c) Au prix de souscription de parts ou actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs situés dans les départements, territoires ou collectivités visés au 1 et qu'elles donnent en location nue pendant cinq ans au moins à compter de leur achèvement à des personnes, autres que les associés de la société, leur conjoint ou les membres de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. (...) 6. La réduction d'impôt s'applique pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, ou de la souscription des parts ou actions, et des quatre années suivantes. Chaque année, la base de la réduction est égale à 20 % des sommes effectivement payées au 31 décembre de l'année au cours de laquelle le droit à réduction d'impôt est né (...) » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme X ont, sur leurs déclarations de revenus au titre des années 2002 et 2003, mentionné comme leur ouvrant droit au bénéfice de la réduction d'impôt prévue par les dispositions précitées de l'article 199 undecies A du code général des impôts, la somme de 109 200 euros, correspondant à leur part dans l'augmentation de capital approuvée par l'assemblée générale de la société civile immobilière Poseidon Invest du 28 décembre 2002 ; que le service, après avoir constaté que les fonds nécessaires à l'augmentation de capital n'avaient été libérés ni au 31 décembre 2002, ni même au 31 décembre 2003, faute pour les intéressés d'avoir obtenu le prêt bancaire destiné à financer à hauteur de 72 % la souscription des nouvelles parts, a remis en cause les réductions d'impôt pratiquées par M. et Mme X et a assorti les suppléments d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignés, des majorations pour mauvaise foi prévues par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ; que si M. et Mme X ont accepté les redressements, ils contestent l'application des pénalités pour mauvaise foi en soutenant qu'il appartient à l'administration fiscale de démontrer leur volonté délibérée d'éluder l'impôt ;

Considérant que si M. et Mme X soutiennent qu'ils ont été tenus dans l'ignorance des agissements de la société civile immobilière Poseidon Invest, et du non-respect de ses engagements tenant à la construction des immeubles, par le gérant de celle-ci, ils ne pouvaient cependant ignorer, lorsqu'ils ont souscrit leurs déclarations de revenus des années 2002 et 2003, ne pas avoir effectivement payé la somme de 109 200 euros correspondant à leur souscription dans l'augmentation de capital de la société civile immobilière Poseidon Invest ; que si le paiement des parts sociales devait être assuré au moyen d'un prêt à souscrire auprès d'une société Sodema, la société civile immobilière Poseidon Invest ne devait intervenir dans cette opération que pour se porter caution des emprunts, lesquels devaient être souscrits par les associés eux-mêmes ; qu'il est constant qu'au cours des années 2002 et 2003, M. et Mme X n'ont souscrit aucun emprunt afin de financer leur investissement et que le versement des sommes correspondantes n'a pas été assuré ; que les requérants ne pouvaient pas davantage ignorer que le bénéfice de la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies A du code général des impôts était subordonné à la condition du paiement effectif des sommes correspondant à la souscription des nouvelles parts avant le 31 décembre de l'année au titre de laquelle l'avantage est sollicité, compte tenu notamment de ce que cette condition était rappelée dans le procès-verbal de l'assemblée générale des associés du 28 décembre 2002 ; que, par suite, et sans qu'y fassent obstacle l'éloignement géographique ou encore l'absence de « professionnalisme » des investisseurs, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'intention délibérée de M. X d'éluder l'impôt lorsqu'il a porté la somme susmentionnée sur ses déclarations d'impôt des années 2002 et 2003 et par suite de sa mauvaise foi ; que, par suite, c'est à juste titre que le service a assorti les suppléments d'impôt sur le revenu qui ont été assignés à M. et Mme X au titre des années 2002 et 2003 de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;

Considérant, par ailleurs, que si les requérants produisent la réponse aux observations d'un autre contribuable, auquel le bénéfice de l'article 199 undecies A a été refusé, dans laquelle l'administration admet l'abandon des pénalités de mauvaise foi, ils ne peuvent utilement se prévaloir de ce document qui ne vise aucun destinataire particulier et n'est pas signé, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande de décharge des pénalités de mauvaise foi afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que M. et Mme X demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme René X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

2

N°08DA00506


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Mme Elisabeth Rolin
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : DI DIO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 09/12/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08DA00506
Numéro NOR : CETATEXT000020252874 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-12-09;08da00506 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award