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09/12/2008 | FRANCE | N°08DA01167

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 09 décembre 2008, 08DA01167


Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Aimé X, demeurant ..., par Me Bera ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801862 du 19 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2007 du préfet du Nord en tant qu'il lui a refusé un titre de séjour et a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint audit préfet de réexamine

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Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Aimé X, demeurant ..., par Me Bera ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801862 du 19 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 20 juillet 2007 du préfet du Nord en tant qu'il lui a refusé un titre de séjour et a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint audit préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, enfin, à la condamnation de l'Etat au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

2°) de faire droit à la demande présentée en première instance ;

3°) de condamner l'Etat à verser la somme de 2 000 euros à Me Bera en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondante à la part contributive de l'Etat ;

Il soutient qu'en estimant que la décision attaquée ne portait pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il participe de manière régulière à l'entretien et à l'éducation de son enfant et s'évertue à être à ses côtés ; que la mère de son enfant réside de manière régulière sur le territoire national ; qu'étant mère de deux enfants nés en France de deux pères différents, celle-ci ne peut envisager de reconstituer sa vie familiale à l'étranger sans priver l'un des deux pères, de nationalité différente, de la possibilité d'exercer ses responsabilités ; que sa présence est nécessaire auprès de sa fille pour assurer son épanouissement, protéger sa santé, sa sécurité et sa moralité ; qu'il lui rend de fréquentes visites et participe à ses activités de loisirs et, dans la mesure de ses moyens, à son entretien en lui versant régulièrement des subsides ; que s'il a un enfant né d'une précédente union dans son pays d'origine, cet enfant vit aux côtés de sa mère qui n'entretient plus de lien avec lui ; qu'il a de nombreux liens affectifs et sociaux en France ; qu'il maîtrise parfaitement le français et n'a jamais troublé l'ordre public ; que la décision attaquée méconnaît les exigences de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision du 1er septembre 2008 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai admettant M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2008, présenté par le préfet du Nord, qui demande à la Cour de rejeter la requête de M. X ; il soutient que l'autorité signataire de l'acte était bien compétente ; à titre principal, que la requête présentée en première instance était irrecevable dès lors que l'intéressé a accusé réception de la décision contestée le 24 juillet 2007 ; que la requête au greffe du Tribunal administratif de Lille n'a été enregistrée que le 19 mars 2008, soit hors du délai d'un mois prescrit par les dispositions de l'article R. 775-2 de code de justice administrative ; que si M. X allègue avoir sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Lille en date du 18 octobre 2007, il ne démontre pas avoir réceptionné cette décision il y a moins d'un mois ; à titre subsidiaire, qu'il n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation de sa situation ; que l'intéressé vit maritalement avec une femme elle-même sous le coup d'une mesure l'invitant à quitter le territoire au moment de l'adoption de l'acte contesté ; que si celle-ci a obtenu, suite à la naissance de son fils de nationalité française, le 12 septembre 2007, une carte de séjour comme mère d'enfant français, valable du 25 mars 2008 au 24 mars 2009, cet élément, postérieur à la date de la décision attaquée, est sans influence ; que les liens familiaux de l'intéressé qui attachent M. X en République démocratique du Congo ne sont pas moins intenses que ceux invoqués en France ; qu'il a un enfant mineur en République démocratique du Congo, un enfant mineur en France et une compagne qui vient d'avoir un enfant avec un autre homme ; que M. X ne s'est présenté à la préfecture qu'en avril alors qu'il était en situation irrégulière depuis la fin du mois suivant la notification de la décision du 10 mai 2004 l'invitant à quitter la France, soit en dehors du délai prévu par l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne peut appartenir à la catégorie des étrangers ouvrant droit au regroupement familial dès lors qu'il n'est pas marié ; que M. X ne justifie pas d'une ancienneté voire d'une stabilité telle qu'il pourrait invoquer directement les dispositions protectrices de l'article L. 313-11-7° dudit code ; que son entrée en France est récente ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où réside notamment sa fille ; que, par suite, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision attaquée ne viole pas les stipulations de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le départ de l'intéressé, qui a deux enfants, l'un en République démocratique du Congo, l'autre en France, serait de nature à porter gravement atteinte à son équilibre psychologique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le

26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse,

président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de M. Antoine Mendras, président-rapporteur ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par arrêté du 20 juillet 2007, le préfet du Nord a rejeté la demande de titre de titre de séjour présentée par M. X, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ; que M. X relève appel du jugement du 19 juin 2008 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en tant qu'il lui a refusé un titre de séjour et a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que si M. X, présent sur le territoire national depuis 5 ans, fait valoir qu'il a eu avec une compatriote en situation régulière un enfant né en 2005 sur le sol français, et que la décision attaquée a pour effet de le priver de la présence de sa fille, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, M. X et la mère de son enfant, tous deux de nationalité congolaise, étaient en situation irrégulière ; que c'est postérieurement à la date de la décision attaquée et uniquement en raison de ce que la mère de son enfant, de laquelle il est séparé, a eu un autre enfant avec un ressortissant français, que cette dernière a obtenu un titre de séjour ; qu'en outre, la simple production d'une fiche de relevé de compte, au demeurant postérieure à la décision attaquée, attestant du versement d'une somme de 1 000 euros au profit de sa fille ne suffit pas à établir la contribution effective du père à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; qu'il ressort également des pièces du dossier que M. X n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside son premier enfant né d'une précédente union ; que s'il soutient qu'il ne peut entretenir de relations avec ce premier enfant, ces allégations ne sont étayées par aucune des pièces versées au dossier ; qu'ainsi, dans ces conditions, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision du préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ni, par suite, qu'elle a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si l'intéressé fait valoir qu'il a tissé de nombreux liens affectifs et sociaux depuis son entrée sur le territoire national, qu'il maîtrise parfaitement le français et ne constitue pas une menace à l'ordre public, ces éléments, à les supposer établis, ne sont pas de nature, à eux seuls, à entacher la décision attaquée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que si M. X soutient que la décision attaquée a pour effet de le séparer de sa fille et est gravement préjudiciable à l'équilibre affectif et psychologique de celle-ci, l'intéressé, comme il a été dit plus haut, n'établit pas avoir effectivement, à la date de la décision attaquée, participé à l'entretien et à l'éducation de sa fille et avoir avec celle-ci des relations suivies ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de ladite convention ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, toutefois, en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. X doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Aimé X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

N°08DA01167 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01167
Date de la décision : 09/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: M. Antoine Mendras
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : BERA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-12-09;08da01167 ?
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