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11/12/2008 | FRANCE | N°06DA01640

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 11 décembre 2008, 06DA01640


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 11 décembre 2006 et régularisée par la production de l'original le 14 décembre 2006, présentée pour la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE, dont le siège est 38 rue de la République à Montreuil Cedex (93107), représentée par son président-directeur général en exercice, par la société d'avocats Jones Day ; la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402790 du 27 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté le surp

lus de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 8 mar...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 11 décembre 2006 et régularisée par la production de l'original le 14 décembre 2006, présentée pour la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE, dont le siège est 38 rue de la République à Montreuil Cedex (93107), représentée par son président-directeur général en exercice, par la société d'avocats Jones Day ; la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402790 du 27 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 8 mars 2004 du préfet du Nord en tant qu'elle lui a prescrit la réalisation d'une étude des sols (phase B) et d'une évaluation simplifiée des risques en ce qui concerne les parcelles cadastrées section BE n° 474, 502, 504 et 507 situées sur le territoire de la commune de Denain et la mise en place d'un réseau de surveillance des eaux souterraines sur l'ensemble des parcelles cadastrées section BE n° 165, 473, 474, 476, 477, 478, 502, 503, 504, 505, 507, 508, 509, 510 et 511 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision en tant qu'elle lui a prescrit la réalisation d'une étude des sols (phase B) et d'une évaluation simplifiée des risques en ce qui concerne les parcelles cadastrées section BE n° 474, 502, 504 et 507 situées sur le territoire de la commune de Denain et la mise en place d'un réseau de surveillance des eaux souterraines sur l'ensemble des parcelles cadastrées section BE n° 165, 473, 474, 476, 477, 478, 502, 503, 504, 505, 507, 508, 509, 510 et 511 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui communiquer les documents administratifs sollicités par la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE par une lettre en date du 3 mai 2005, conformément à l'avis de la commission d'accès aux documents administratifs en date du 29 septembre 2005 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE soutient que l'arrêté du préfet du nord en date du 8 mars 2004 est insuffisamment motivé, se contentant de viser des rapports d'experts dont certains ont été réalisés non contradictoirement pour le compte de tiers ; que le préfet ne pouvait se référer à la procédure prévue à l'article 18 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pour inclure dans le périmètre du site soumis aux prescriptions des parcelles qui n'ont jamais connu d'activité industrielle ; que la société générale de traitement des métaux (GTM) doit être regardée comme s'étant substituée à la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE en tant qu'exploitant d'un établissement relevant de la réglementation relative aux installations classées et doit être considérée comme étant le dernier exploitant du site, nonobstant l'absence de notification à l'administration du changement d'exploitant ; que l'administration ne dispose d'aucun élément lui permettant de rattacher les sources de pollutions potentielles du site aux activités exercées par la passé par la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE sur le site de Denain ; qu'en particulier, d'autres entreprises sont susceptibles d'être également à l'origine des risques de pollution relevés, notamment EDF-GDF ; que la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE n'a pas à supporter la mise en place d'un réseau de surveillance des eaux souterraines sur l'ensemble du site, l'étude des sols (phase B) et l'étude simplifiée des risques ne pouvant lui être imposées pour les parcelles dont elle n'a plus la propriété ni pour les parcelles n'ayant jamais connu d'activité industrielle ; que, malgré un avis favorable de la commission d'accès aux documents administratifs en date du 29 septembre 2005, le préfet ne lui a toujours pas communiqué des informations sollicitées sur les activités exercées par EDF-GDF sur le site de Denain ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2007, présenté par le ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, qui conclut au rejet de la requête ; le ministre soutient que l'arrêté en date du 8 mars 2004 est parfaitement motivé et s'appuie, de plus, sur un rapport de l'inspection des installations classées, visé dans la décision attaquée, en date du 23 septembre 2003, rappelant les éléments historiques et techniques qui ont conduit à cette décision ; que le préfet était fondé à prendre son arrêté sur la base des dispositions de l'article 18 du décret n° 77-1133 y compris pour l'ancienne cité ouvrière à partir du moment où l'activité en cause est directement à l'origine des pollutions constatées ; que les anciennes activités des sociétés dont la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE est issue sont à l'origine des sources de pollutions potentielles identifiées sur le site de Denain, que la mise en place d'un réseau de surveillance des eaux souterraines est une mesure de suivi justifiée pour l'ensemble sur le site ; que le préfet à d'ores et déjà communiqué certains éléments en sa possession à la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE et que des études complémentaires sont en cours en vue de satisfaire sa demande, cependant, il a déjà été indiqué à l'appelante que les documents sollicités concernent des activités datant de la seconde moitié du XIXème siècle ;

Vu l'ordonnance en date du 19 février 2008 fixant la clôture d'instruction au 19 mars 2008, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 17 mars 2008 et régularisé par la production de l'original le 19 mars 2008, présenté pour la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ; elle soutient que le préfet n'a toujours pas communiqué l'intégralité des documents relatifs aux activités exercées par EDF-GDF sur le site de Denain ; que ces informations sont utiles pour déterminer avec certitude le bien-fondé des prescriptions imposées par l'administration ;

Vu l'ordonnance en date du 20 mars rouvrant l'instruction, en application des articles R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 modifié pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2008 à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Albert Lequien, président-assesseur et M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller :

- le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller ;

- les observations de Me Farge, pour la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE venant aux droits d'entreprises qui ont exploité des établissements industriels sur le territoire de la commune de Denain depuis 1882 jusqu'en 1986 a loué, dans un premier temps, puis cédé en 1990 une partie du site à une entreprise devenue actuellement société générale de traitement des métaux (GTM) ; que le préfet du Nord a, par un arrêté en date du 8 mars 2004, prescrit à la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE de réaliser une étude des sols (phase B), une étude simplifiée des risques et la mise en place d'un réseau de surveillance des eaux souterraines sur l'ensemble du site, tant pour les terrains dont elle est encore propriétaire que pour ceux qu'elle a vendus ; que le Tribunal administratif de Lille a, par un jugement en date du 27 septembre 2006, annulé la décision du préfet en tant qu'elle imposait la réalisation de l'étude des sols (phase B) et l'étude simplifiée des risques pour les terrains dont la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE est toujours propriétaire, ces mesures ayant été réalisées dès avant la signature de l'arrêté attaqué ; que la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 mars 2004 lui prescrivant la réalisation d'une étude des sols (phase B) et d'une étude simplifiée des risques pour les terrains dont elle n'est plus propriétaire et la mise en place d'un réseau de surveillance des eaux souterraines pour l'ensemble du site ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1, premier alinéa, du code de l'environnement : « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité et la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments » ; qu'aux termes de l'article 34-I du décret du 21 septembre 1977 modifié susvisé : « I - Lorsqu'une installation classée est mise à l'arrêt définitif, son exploitant remet son site dans un état tel qu'il ne s'y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976. Le préfet peut, à tout moment, imposer à l'exploitant les prescriptions relatives à la remise en état du site, par arrêté pris dans les formes prévues à l'article 18 ci-dessus » ;

Considérant que le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté, dès lors que l'arrêté vise les dispositions légales et réglementaires applicables et était accompagné, lors de sa notification, d'un document joint répondant aux observations formulées par l'appelante lors de la communication préalable du projet d'arrêté pour avis ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions des articles L. 511-1 et suivants du code de l'environnement, que l'obligation de remise en état du site d'une installation classée s'impose à son exploitant après arrêt de l'exploitation ; que, dans cette hypothèse, l'obligation de remise en état du site imposée par l'article 34-I du décret du 21 septembre 1977 modifié pèse sur l'ancien exploitant ou, si celui-ci a disparu, sur son ayant droit ; que lorsque l'exploitant ou son ayant droit a cédé le site à un tiers, cette cession ne l'exonère de ses obligations que si le cessionnaire s'est substitué à lui en qualité d'exploitant ;

Considérant, toutefois, qu'aucune de ces dispositions n'a pour objet ou pour effet d'imposer à l'exploitant, dans le cadre de la remise en état du site, de remédier à des dommages ou des nuisances dépourvus de tout lien avec l'exploitation ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'étude des sols (phase A), établi le 5 avril 2000, que la nature des activités exercées sur le site par la société GTM ne peut être regardée comme étant à l'origine des pollutions potentielles du site mises en évidence par ce rapport ; que ces pollutions trouveraient leurs origines dans les procédés utilisés par les sociétés aux droits desquelles se trouve la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE lors de leur exploitation du site ; qu'ainsi la société GTM ne s'est pas substituée à la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE comme dernier exploitant du site ;

Considérant que le moyen tiré de l'absence de certitude de l'origine de la pollution potentielle du site, eu égard notamment aux activités exercées à Denain par la compagnie des mines d'Anzin avant la reprise des parcelles par les sociétés aux droits desquelles se trouve la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE et la présence sur le site d'une installation classée, exploitée par Gaz de France, doit être écarté compte tenu, d'une part, que l'implantation sur le site de Denain des sociétés aux droits desquelles se trouve la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE remonte à 1882, et d'autre part, qu'il ressort de l'instruction que l'installation de la société Gaz de France ne se situait pas dans le périmètre concerné ; que, par suite, les risques de pollution mentionnés par l'arrêté attaqué doivent être tenus comme établis et regardés comme se rattachant directement à l'exploitation des sociétés aux droits desquelles se trouve la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE ; qu'ainsi le préfet pouvait, à bon droit, imposer à la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE des prescriptions complémentaires pour les parcelles qu'elle avait cédées à la société GTM et la mise en place d'un réseau de surveillance des eaux souterraines sur l'ensemble du site ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 8 mars 2004 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant, en tout état de cause, que les conclusions à fins d'injonction présentées par la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE tendant à l'obtention d'un certain nombre de documents suite à l'intervention de la commission d'accès aux documents administratifs constituent un litige distinct ; que, par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA COMPAGNIE DE FIVES LILLE et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

N°06DA01640


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Estève
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guyau
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : JONES DAY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Date de la décision : 11/12/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 06DA01640
Numéro NOR : CETATEXT000020252830 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-12-11;06da01640 ?
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