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20/01/2009 | FRANCE | N°07DA01901

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 20 janvier 2009, 07DA01901


Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Kamel X, demeurant ..., par Me Desmazières ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704931 du 13 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2007 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il

sera reconduit à l'issue de ce délai ;

2°) d'annuler, pour excès de pouv...

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Kamel X, demeurant ..., par Me Desmazières ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704931 du 13 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2007 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit à l'issue de ce délai ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire assortie d'une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de quinzaine suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, d'enjoindre au préfet du Nord de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour assortie d'une astreinte de

50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont il appartiendra à la Cour de fixer le montant en équité ;

Il soutient que, s'agissant de la décision de refus de séjour, celle-ci est entachée d'une irrégularité en ce que sa motivation est stéréotypée ; qu'en ne saisissant pas la commission du titre de séjour, l'administration a commis un vice de procédure ; qu'il est incontestable au regard des éléments du dossier que le refus de séjour constitue une atteinte aux dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et porte atteinte de façon disproportionnée au respect dû à sa vie privée et familiale ; qu'il y a également une atteinte aux dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision de refus de séjour comporte de graves conséquences pour la situation de l'intéressé ; que, s'agissant de l'obligation de quitter le territoire, la décision ne comporte pas de motivation spécifique ; que l'illégalité de la décision de refus de séjour la prive de base légale ; qu'elle porte atteinte également de façon disproportionnée au respect dû à sa vie privée et familiale ; qu'elle est contraire aux dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle comporte pour l'exposant des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, s'agissant de la décision fixant le pays de destination, celle-ci n'est pas motivée ; que l'illégalité de la décision de refus de séjour la prive de base légale ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision en date du 12 décembre 2007 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu l'ordonnance en date du 27 décembre 2007 portant clôture de l'instruction au

31 janvier 2008 à 16 heures 30 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2008, présenté par le préfet du Nord ; le préfet conclut au rejet de la requête ; il soutient que la décision de refus de séjour est parfaitement motivée ; que l'administration n'était pas tenue de soumettre le cas du requérant à la commission du titre de séjour puisqu'il ne remplissait pas les conditions de fond prévues ; que la situation personnelle du requérant a été examinée au regard du droit et des éléments de fait correspondant à sa situation personnelle ; que l'intéressé ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne remplit pas les conditions requises par les dispositions de l'accord franco-algérien pour obtenir la délivrance d'un certificat de résidence en qualité de salarié puisqu'il ne produit ni le visa de long séjour exigé, ni le visa de travail visé par l'article 7 de cette convention ; que, s'agissant de l'obligation de quitter la France, la décision n'a pas à être motivée en elle-même, dès lors qu'elle découle d'une décision de refus de séjour qui l'est déjà ; que le requérant ne peut utilement exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour ; qu'il n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application de l'accord susvisé ; qu'il allègue mais ne justifie pas se trouver dans l'un des cas dans lesquels un étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, s'agissant du pays de destination, la décision n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte ; que le requérant ne peut utilement exciper de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire ; que, de plus, la décision n'a pas porté, eu égard à la permanence de ses attaches familiales en Algérie, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus lui a été opposé et n'a pas méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance en date du 24 janvier 2008 portant réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 février 2008 par télécopie et confirmé par la réception de l'original le 12 février 2008, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, signée par la France le même jour, ensemble le premier protocole additionnel signé le 20 mars 1952, ratifiée par la France en application de la loi

n° 73-1227 du 31 décembre 1973 et publiée au Journal officiel par décret n° 74-360 du 3 mai 1974 ;

Vu l'accord-franco algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des algériens, entrée en vigueur le même jour et publiée au Journal officiel par décret n° 69-243 du 18 mars 1969 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2009 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse,

président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 13 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2007 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, que la décision querellée énonce les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde ; que, contrairement à ce qui est soutenu, il ressort des pièces du dossier que, dans le formulaire de demande de titre de séjour, déposé le 11 juin 2007,

M. X a coché la case « salarié » ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur dans la motivation de sa décision en indiquant que la demande avait été déposée à ce titre ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que M. X, qui est entré sur le territoire français en mars 2007 selon ses déclarations, fait valoir qu'il a des liens indéniables en France où son père a travaillé pendant dix-neuf ans et où une de ses soeurs est régulièrement installée ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. X, qui est célibataire et sans enfant, n'est pas dépourvu de toute attache familiale en Algérie, où résident l'ensemble de ses neuf autres frères et soeurs ainsi que ses parents et où il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans ; que la décision attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que doit, dès lors, être écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ledit refus de séjour n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'il comporte sur la situation personnelle du requérant ; qu'enfin, M. X ne saurait utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont pas applicables à sa situation dès lors que l'accord franco-algérien, modifié, régit de manière complète, à l'exception de certaines garanties procédurales, les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis au séjour, ainsi que la nature et la durée de validité des titres qui peuvent leur être délivrés ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. X ne remplit pas les conditions lui permettant d'obtenir de plein droit un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'ainsi, le préfet du Nord n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour instituée par les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avant de rejeter sa demande de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de consultation de cette commission doit être écarté ;

Sur la légalité de la mesure d'obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « I - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa » ;

Considérant que si l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées par l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; qu'il en résulte que, dès lors que ce refus de titre est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, cette dernière mesure doit être regardée comme satisfaisant aux exigences de motivation prescrites par les articles 1er et 3 de la loi précitée du 11 juillet 1979 ; qu'en l'espèce, l'arrêté attaqué comporte un énoncé circonstancié des faits et dispositions textuelles sur lesquels est fondée la décision d'obligation de quitter le territoire français et la lettre d'accompagnement porte mention de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'une telle mesure ne serait pas motivée manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que comme cela a été dit précédemment, le refus de titre de séjour n'est entaché ni d'insuffisance de motivation, ni d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier, telles que rappelées ci-dessus, que la mesure en cause méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que la décision par laquelle le préfet fixe le pays de destination auprès duquel sera reconduit l'étranger s'il ne satisfait pas à l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure de police qui doit, en principe, être motivée en fait comme en droit en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que la motivation en droit est identique à celle de l'obligation de quitter le territoire français et résulte de la mention portée sur la lettre d'accompagnement de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors que le préfet a relevé, d'une part, que l'intéressé pourra être reconduit à destination du pays dont il a la nationalité et que, d'autre part, ladite décision ne contrevient pas aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la décision fixant le pays de destination doit être également regardée comme motivée en fait ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale ; que, par suite, la décision fixant le pays de destination n'est pas privée de base légale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au prononcé d'injonctions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; et qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ;

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit prescrit, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation doivent, par suite, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui, en tout état de cause, ne sont pas recevables, faute d'être chiffrées, doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Kamel X et au ministre l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

N°07DA01901 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA01901
Date de la décision : 20/01/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: M. Christian Bauzerand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : SCM COTTIGNIES - DESMAZIERES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-01-20;07da01901 ?
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