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20/01/2009 | FRANCE | N°08DA00880

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 20 janvier 2009, 08DA00880


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

4 juin 2008 par télécopie et confirmée par la réception de l'original le 11 juin 2008, présentée pour M. Saïd X, demeurant ..., par Me Berthe ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706993 du 21 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

1er octobre 2007 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le terri

toire français dans le délai d'un mois ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

4 juin 2008 par télécopie et confirmée par la réception de l'original le 11 juin 2008, présentée pour M. Saïd X, demeurant ..., par Me Berthe ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706993 du 21 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

1er octobre 2007 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » assortie d'une astreinte de 155 euros par jour de retard à compter du délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour, assortie d'une astreinte de 155 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision de refus de séjour a été prise sans respect de la procédure préalable applicable au cas d'espèce ; que le défaut de saisine de la commission du titre de séjour entache également la décision contestée de vice de procédure ; que le préfet a commis également une erreur de droit en lui opposant le défaut de production d'un visa de long séjour ; que l'exposant remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour ; qu'au regard des éléments du dossier, la décision contrevient à l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi qu'à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, s'agissant de l'obligation de quitter le territoire, la décision est entachée d'un défaut de motivation ; que, par ailleurs, le préfet a omis de se livrer à un contrôle autonome des conséquences pour la situation de l'exposant de la décision d'éloignement ; qu'en tout état de cause, l'exécution de la mesure d'éloignement aurait pour l'exposant des conséquences graves au regard du développement et de la fixation de ses attaches privées et familiales en France ; que, par ailleurs, la nécessaire présence du requérant aux côtés de son épouse compte tenu de l'état de santé de celle-ci doit également être prise en considération ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision en date du 15 mai 2008 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2008, présenté par le préfet du

Pas-de-Calais ; le préfet conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait présenté une demande de visa de long séjour en même temps que le dépôt de sa demande de carte de séjour temporaire ; que les dispositions de l'article

L. 211-2-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne le dispensaient pas de déposer une demande de visa de long séjour en même temps que le dépôt de sa demande de carte de séjour temporaire ; que l'autorité administrative n'est tenue de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressé n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour ; que la motivation de la mesure d'éloignement se confond avec celle du refus du titre de séjour ; que la décision querellée fait explicitement référence à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision serait entachée d'erreur de droit pour les raisons développées précédemment ; que, s'agissant de l'atteinte à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ait vécu avec son épouse antérieurement à leur mariage, célébré le 13 janvier 2007 ; qu'il ne justifie, depuis son arrivée sur le territoire français, d'aucune activité professionnelle en France ; qu'il n'établit pas être isolé en cas de retour dans son pays d'origine où résident sa mère et ses cinq frères et soeurs ; qu'à titre incident, s'il souligne que son épouse serait enceinte et devrait garder une position allongée compte tenu des ses problèmes de genoux, il est constant qu'il ne justifie cette allégation par aucun élément probant, ni qu'une tierce personne puisse s'occuper de sa conjointe ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, signée par la France le même jour, ensemble le premier protocole additionnel signé le 20 mars 1952, ratifiée par la France en application de la loi

n° 73-1227 du 31 décembre 1973 et publiée au Journal officiel par décret n° 74-360 du 3 mai 1974 ;

Vu la convention franco-marocaine du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi, publiée au Journal officiel par décret no 94-203 du 4 mars 1994 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2009 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse,

président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;

- les observations de Me Berthe, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 21 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2007 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour et a prononcé à son encontre une mesure d'obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 4° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) » ; qu'en vertu de l'article L. 311-7 du même code : « Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour « compétences et talents » sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois » ; que selon l'article L. 211-2-1° du même code : « La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour (...) » ; qu'il résulte de ces dispositions que la délivrance d'une carte de séjour temporaire est subordonnée, sauf dispositions contraires expresses, à l'obtention d'un visa pour un séjour supérieur à trois mois délivré, sous réserve d'en remplir les conditions, à la demande de l'étranger ;

Considérant que M. X, de nationalité marocaine, est entré en France le 14 octobre 2002 à l'âge de vingt-quatre ans, muni d'un visa Schengen de type D portant la mention « salarié OMI » et valable 18 mois ; qu'il s'est, par la suite, maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; qu'il a épousé une ressortissante française le

13 janvier 2007 et a ensuite déposé une demande de titre de séjour en qualité de conjoint de français ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X ait présenté à la préfecture une demande de visa de long séjour ; que les dispositions du dernier alinéa de

l'article L. 211-2-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne dispensaient pas l'intéressé de déposer une demande pour obtenir de plein droit un visa de long séjour ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir de la circulaire ministérielle

n° INT/D/07/00031/C du 19 mars 2007 relative à l'application de l'article L. 211-2-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon laquelle l'autorité préfectorale invite les intéressés, s'ils en remplissent les conditions, à déposer un dossier de demande de visa de long séjour, dont les énonciations ne présentent pas un caractère impératif, et qui est, par suite, dépourvue de caractère réglementaire ; que, dans ces conditions, et alors même qu'il remplissait les conditions pour se voir délivrer un tel visa, M. X ne pouvait prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du même code ; qu'ainsi, le préfet du Pas-de-Calais, en prenant à son encontre l'arrêté en litige portant refus de séjour, n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée » ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) » ;

Considérant que si M. X a épousé le 13 janvier 2007 une ressortissante de nationalité française, il ne conteste pas que des membres de sa famille proche vivent toujours au Maroc ; que, compte tenu du caractère très récent de son mariage à la date de l'arrêté contesté, il n'est donc pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ni, par suite, à invoquer une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. X ne remplissait pas les conditions lui permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le préfet du Pas-de-Calais n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour instituée par les dispositions de l'article L. 312-2 du même code avant de rejeter sa demande de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de consultation de cette commission doit être écarté ;

Sur la légalité de la mesure d'obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « I - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa » ;

Considérant que si l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées par

l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; qu'il en résulte que, dès lors que ce refus de titre est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, cette dernière mesure doit être regardée comme satisfaisant aux exigences de motivation prescrites par les articles 1er et 3 de la loi précitée du 11 juillet 1979 ; qu'en l'espèce, l'arrêté attaqué comporte un énoncé circonstancié des faits et dispositions textuelles sur lesquels est fondée la décision d'obligation de quitter le territoire français et porte mention de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'une telle mesure ne serait pas motivée manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que si M. X soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie privée et familiale, son épouse étant atteinte de dyslexie et de gonarthrose bilatérale, cette seule circonstance n'est pas de nature à remettre en cause la légalité de cette décision alors même qu'il n'est pas établi que celle-ci serait isolée et que son état de santé nécessiterait la présence d'une tierce personne ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par suite, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction assorties d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Saïd X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.

N°08DA00880 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: M. Christian Bauzerand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : BERTHE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Date de la décision : 20/01/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08DA00880
Numéro NOR : CETATEXT000020418689 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-01-20;08da00880 ?
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