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12/02/2009 | FRANCE | N°08DA00818

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 12 février 2009, 08DA00818


Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Olivier X, demeurant ..., par Me Delerue ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705041 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la réduction de l'imposition contestée ainsi que des

pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre...

Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Olivier X, demeurant ..., par Me Delerue ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705041 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la réduction de l'imposition contestée ainsi que des pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le tribunal a retenu uniquement les droits reçus de Mme Y par donation et a occulté une partie des droits reçus à la succession de M. Y ; que Mme X a reçu le fonds de commerce en plusieurs parties ; qu'à la succession de son père en 1986, le fonds de commerce a été évalué à 1 900 000 francs, soit 289 654 euros ; qu'elle a hérité de la moitié en nue-propriété, soit 101 379 euros ; que la seconde partie a été reçue en 1992 à la suite de la donation de sa mère ; qu'à cette date, le fonds de commerce a été évalué à 1 200 000 francs en toute propriété, soit 182 939 euros ; que Mme Y a donné à sa fille les droits équivalant à la somme de 720 000 francs soit 109 764 euros ; qu'en conséquence, Mme X a acquis à titre gratuit le fonds de commerce pour une partie à la suite de la succession de son père pour un montant de 101 379 euros et, pour l'autre partie, à la suite de la donation de sa mère pour un montant de 109 764 euros, soit une somme totale de 211 143 euros ; que conformément aux dispositions de l'article 150-0 D du code général des impôts, la plus-value imposable est déterminée par la différence entre le prix effectif de cession des droits soit 2 253 439 euros, correspondant à l'indemnité versée par la Française des jeux et la valeur vénale retenue pour la détermination des droits de mutation soit 211 143 euros ; que la plus-value imposable s'élève donc en réalité à 2 042 296 euros, à laquelle il convient de déduire la plus-value initialement déclarée déjà imposée de 966 439 euros ; que la plus-value restant à imposer est donc évaluée à 1 075 857 euros et non à 1 287 000 euros comme le maintient l'administration fiscale ; qu'en ce qui concerne les pénalités, s'ils ont commis une erreur, ils n'ont aucunement cherché à éluder l'impôt ; que Mme X n'ayant jamais procédé à l'estimation de la valeur de son fonds de commerce a souhaité régulariser sa situation avant de cesser son activité ; que pour évaluer la valeur vénale du fonds de commerce, ils ont pris en compte la valeur de la rente viagère versée par Mme X à sa mère en contrepartie de la donation et la valeur de l'usufruit ; que si cette méthode de calcul est erronée, ce n'était absolument pas en vue de minorer le montant imposable de la plus-value ; que cette valeur était en plus en conformité avec la réalité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique tendant au rejet de la requête ; il soutient qu'à titre liminaire, il a été accordé à Mme X un dégrèvement à hauteur de 199 865 euros ; qu'il n'y a pas lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé ; que, dans l'acte de donation du fonds consentie par la mère de Mme X, les parties avaient entendu bénéficier du sursis d'imposition de l'article 41-1 du code général des impôts concernant les transmissions à titre gratuit d'exploitation ; qu'une des conditions pour bénéficier de ce sursis est de n'apporter aucune augmentation aux évaluations des éléments d'actif figurant au dernier bilan dressé par l'ancien exploitant ; qu'afin de bénéficier de ce sursis d'imposition, les parties ont inscrit le fonds pour une valeur nulle, reprenant ainsi la valeur du fonds dans le dernier bilan de la donatrice ; que l'écriture comptabilisée en juillet 2004, au titre de l'exercice clos en 2005, a ajouté à l'actif du bilan de la société individuelle dans le poste « 208002 fonds de commerce » une somme de 1 287 000 euros ; que, dès lors, la condition posée pour bénéficier du sursis d'imposition n'était plus respectée, les plus-values ayant bénéficié du sursis d'imposition devenant taxables au taux réduit ; que Mme X a procédé le 25 janvier 2005 à la cession de son fonds de commerce à la Française des jeux moyennant le versement d'une indemnité de résiliation d'un montant total de 2 253 439 euros ; qu'en application de l'article 39 duodecies du code général des impôts, cette cession entraîne une plus-value imposable à long terme, l'élément cédé étant détenu depuis plus deux ans ; que la plus-value imposable du fait de cette cession est donc égale à la différence entre le prix de cession soit 2 253 439 euros et le montant de la plus-value initialement déclarée par les requérants soit 966 439 euros soit 1 287 000 euros ; que, par suite, le montant invoqué par les requérants quant à la détermination du prix d'acquisition est donc sans influence puisque le montant de la plus-value imposable en 2005 est de 2 253 439 euros ; que, dès lors, l'écriture comptabilisée en juillet 2004, quelques mois avant la cession du fonds n'avait comme unique objectif de minorer la plus-value imposable ; que cette somme a été déterminée forfaitairement dans le but de soustraire une partie de la plus-value imposable dont les époux X étaient normalement redevables ; que, sous couvert du respect apparent d'une partie de leurs obligations déclaratives, ils ont délibérément minoré le montant de la plus-value imposable ; que ces circonstances justifient l'application de la majoration de 40 % conformément aux dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, alors applicable ; que la demande de remboursement des frais irrépétibles ne peut être que rejetée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 septembre 2008, présenté pour M. et Mme X qui prennent acte du dégrèvement de 199 865 euros et qu'il n'y a plus lieu à statuer sur leurs conclusions à due concurrence et maintiennent leurs précédentes observations ; ils soulignent qu'ils n'ont pas cherché à éluder volontairement l'impôt mais à mettre leur situation en conformité avec la réalité et qu'il serait inéquitable de laisser à leur charge les frais qu'ils ont engagés pour obtenir ce dégrèvement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2009 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse, président-assesseur et Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller :

- le rapport de Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X a hérité en avril 1986 en nue-propriété de la moitié du fonds de commerce de courtier mandataire en loterie nationale exploité par son père, l'autre moitié de la nue-propriété ainsi que l'usufruit étant revenus à sa mère ; que ce fonds a été déclaré à la succession pour une valeur de 1 900 000 francs, soit 289 654 euros ; que Mme X est, par l'effet d'une donation qui lui a été consentie en 1992 par sa mère, devenue seule propriétaire du fonds de commerce, dont la valeur a été estimée dans l'acte de donation à 1 200 000 francs soit 182 939 euros ; que les parties à l'acte de donation ont placé la plus-value réalisée à cette occasion sous le régime du report d'imposition prévue par l'article 41-I du code général des impôts pour les reprises à titre gratuit d'une exploitation familiale ; que Mme X a, en conséquence, pour satisfaire à la condition posée par ce texte de n'apporter aucune augmentation aux évaluations des éléments d'actif figurant au dernier bilan établi par l'ancien exploitant, inscrit le fonds à son actif pour une valeur nulle ; que toutefois, en juillet 2004, Mme X a procédé, dans sa comptabilité, à une réévaluation de la valeur du fonds de commerce en inscrivant au bilan le montant de 1 287 000 euros puis, le 25 janvier 2005, a cédé le fonds à la Française des Jeux pour un montant stipulé de 2 253 439 euros ; que M. et Mme X ont déclaré une plus-value de cession taxable à 16 % d'un montant de 966 439 euros correspondant à la différence entre le montant de l'indemnité versée par la Française des Jeux de 2 253 439 euros et le montant de la valeur du fonds de commerce tel que réévalué en 2004 à 1 287 000 euros ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet Mme X, l'administration a remis en cause ce calcul en estimant que dès lors que le fonds avait été reçu en donation et acquis à titre gratuit, la plus-value s'élevait à 2 253 439 euros, dont elle a déduit le montant de la plus-value réalisée en 1992 pour un montant de 182 939 euros placée initialement en report d'imposition mais déjà imposée au titre de l'année 2004 en conséquence de la réévaluation au cours de cette année de la valeur du fonds de commerce ; que M. et Mme X font appel du jugement du Tribunal administratif de Lille qui a rejeté leur demande tendant à la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis en conséquence de ce redressement au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 5 septembre 2008 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux d'Amiens a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence de la somme de 199 865 euros, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 2005 ; que les conclusions de la requête de M. et Mme X relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : « Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation (...) » ; qu'aux termes de l'article 39 duodecies du même code : « Par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme (...)» ; qu'aux termes de l'article 39 quindecies du même code : « ... Le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 16 % (...) » ;

Considérant que, pour contester le redressement dont elle a fait l'objet, Mme X ne soutient plus, en appel, que la plus-value imposable devait être calculée en retranchant de l'indemnité versée par la Française des Jeux, d'un montant de 2 253 439 euros, la somme de 211 143 euros correspondant, d'une part, pour 101 379 euros, à la moitié de la nue-propriété du fonds de commerce reçue en héritage à la succession de son père en 1986, et d'autre part, pour 109 764 euros, à la partie reçue par donation de sa mère en 1992 ; qu'il résulte, toutefois, des dispositions précitées du code général des impôts que le montant d'une plus-value réalisée à long terme s'entend de la différence entre le produit effectivement retiré de cette cession et la valeur pour laquelle l'élément cédé est inscrit au bilan de l'entreprise à la date de cette cession ; qu'il est, en l'espèce, constant que le fonds qui a été acquis à titre gratuit a été inscrit à l'actif pour une valeur nulle jusqu'à ce que la requérante effectue en juillet 2004 la réévaluation libre de ce seul élément d'actif dans des conditions dont elle ne conteste pas qu'elles étaient irrégulières au regard des dispositions de l'article L. 123-18 du code de commerce ; que la demande de réduction de la plus-value imposable présentée par M. et Mme X ne peut donc qu'être rejetée ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts applicable à la date du redressement contesté : « 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) » ;

Considérant qu'en faisant valoir que l'écriture comptabilisée en juillet 2004, quelques mois avant la cession du fonds, n'a eu comme unique objectif que de minorer la plus-value imposable alors que Mme X avait inscrit le fonds acquis à titre gratuit pour une valeur nulle pour bénéficier du report d'imposition et qu'elle n'apporte aucune justification économique et comptable correspondant à cette nouvelle estimation évaluée forfaitairement à 1 287 000 euros sans rapport avec le prix de cession, l'administration établit la mauvaise foi de Mme X ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à demander la décharge des pénalités dont a été assorti le redressement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme de 2 500 euros que M. et Mme X demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 199 865 euros, il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions de M. et Mme X tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Olivier X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°08DA00818


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Mme Elisabeth Rolin
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : DELERUE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Date de la décision : 12/02/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08DA00818
Numéro NOR : CETATEXT000020418700 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-02-12;08da00818 ?
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