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05/05/2009 | FRANCE | N°08DA00782

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 05 mai 2009, 08DA00782


Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour l'EURL BMB INTERNATIONAL, représentée par Me Wiart, pris en sa qualité de liquidateur, demeurant 20 place du Palais de Justice à Dunkerque (59140), par Me Durand ; la société BMB INTERNATIONAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700642 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période couvrant les mois de juin à octobre 2004 ;



2°) de lui accorder le remboursement desdits crédits de taxe sur la v...

Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour l'EURL BMB INTERNATIONAL, représentée par Me Wiart, pris en sa qualité de liquidateur, demeurant 20 place du Palais de Justice à Dunkerque (59140), par Me Durand ; la société BMB INTERNATIONAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700642 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période couvrant les mois de juin à octobre 2004 ;

2°) de lui accorder le remboursement desdits crédits de taxe sur la valeur ajoutée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement est irrégulier car il n'a été que tardivement averti du jour de l'audience soit le 15 février 2008 alors que la date d'audience était fixée au 21 février 2008 ; que la société BMB INTERNATIONAL a présenté au service vérificateur un certain nombre de documents justifiant des livraisons intracommunautaires, dont les documents administratifs d'accompagnement visés par les douanes belges et françaises ; que ce visa justifie du paiement des droits d'accises dans l'autre pays membre et, par conséquent, les livraisons intracommunautaires ; que l'administration n'apporte aucun élément sérieux permettant d'établir le caractère fictif des documents produits ; que les services des douanes après contrôle n'ont pas remis en cause l'effectivité de l'expédition dans un autre Etat membre ; que les erreurs relevées sont de simples erreurs de plume ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la société BMB INTERNATIONAL est en liquidation judiciaire depuis le 11 avril 2006 ; que l'entreprise a déposé des demandes de remboursement de crédit de taxes pour un montant global cumulé de 1 509 667 euros au titre des mois de juin à octobre 2004 ; que la société BMB INTERNATIONAL a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juin au 31octobre 2004 en matière de taxe sur la valeur ajoutée qui a conclu à la remise en cause de l'exonération des livraisons intracommunautaires déclarées par l'entreprise et corrélativement, à la diminution des crédits de taxe sur la valeur ajoutée constatés au titre des mois de juin, juillet, août, septembre et octobre 2004 ; que l'avis d'audience adressé à l'administration et daté du 11 février 2008 a été reçu par cette dernière le 13 février 2008 pour une audience inscrite au rôle du 21 février 2008 ; que le délai de sept jours francs a été tenu ; que la jurisprudence du Conseil d'Etat a étendu aux livraisons intracommunautaires la jurisprudence selon laquelle les exonérations de taxe sur la valeur ajoutée sont soumises à un régime de preuve objective ; que les preuves doivent être appréciées au cas par cas et peuvent résulter de différents documents constituant un faisceau d'indices de la réalité de la livraison ; qu'au cas d'espèce, la société BMB INTERNATIONAL avait pour fournisseur quasi exclusif la société Interbrew France située à Armentières ; que cette dernière société, filiale du groupe belge Interbrew, lui facturait les marchandises toutes taxes comprises ; que l'entreprise BMB INTERNATIONAL disposait d'un client principal, la société belge X, à qui elle facturait hors taxes la plupart de ses ventes ; qu'il n'existait aucun contrat commerciale entre la société BMB INTERNATIONAL et, d'une part, son fournisseur Interbrew France, d'autre part, son principal client, X ; que dans le cadre d'une demande d'assistance administrative auprès des autorités belges, celles-ci ont indiqué que la société X déclarait elle-même des livraisons intracommunautaires à destination de cash and carry situés en région Nord-Pas-de-Calais dont plusieurs étaient fiscalement défaillants, leur durée d'activité se limitant en tout état de cause à quelques mois ; qu'ainsi, l'entreprise BMB INTERNATIONAL achetait, en passant par la filiale française d'une société belge, des boissons alcoolisées en provenance de Belgique qu'elle revendait ensuite à un intermédiaire belge qui lui-même la négociait enfin à des cash and carry situés en France ; que la marchandise ne transitait pas par les locaux de la société BMB INTERNATIONAL ; que cette organisation traduit une double incohérence au regard du circuit physique des marchandises, lesquelles provenant de Belgique y retournent pour être revendues en France mais aussi de la logique économique ; que l'entreprise BMB INTERNATIONAL prélevait une marge alors qu'elle intervenait manifestement comme une simple société relais sans réel moyen d'exploitation ; qu'elle disposait en effet d'un actif immobilisé total d'une valeur de 739 euros au 31 décembre 2002 ; que les factures de ventes à X indiquaient une seule et même date en ce qui concerne les commandes, livraisons et facturations ; que contrairement à ce que soutient la société requérante, les documents administratifs d'accompagnement (DAA) visés par les douanes étrangères ne prouvent pas le transfert physique des marchandises ; que les DAA visés par les douanes belges ne peuvent constituer à eux seuls une preuve tangible de la réalité de la livraison intracommunautaire ; que l'examen exhaustif des documents susmentionnés a mis en évidence des incohérences manifestes qui rendent ces justificatifs formels inopérants ; que les mentions figurant sur les DAA qui font l'objet d'un traitement par masse différé dans le temps ne peuvent tenir lieu de justificatifs quant à l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ; que c'est à bon droit que le tribunal administratif a refusé à la société BMB INTERNATIONAL le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 262 ter-I du code général des impôts en faveur des livraisons intracommunautaires ; que, par suite, les remboursements de crédits de taxe sur la valeur ajoutée sollicités au titre des mois de juin à octobre 2004 ont pu être valablement minorés dans les mêmes proportions ; que la demande de remboursement de frais irrépétibles ne peut être que rejetée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 octobre 2008, présenté pour la société BMB INTERNATIONAL qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ; elle souligne qu'elle n'a reçu l'avis d'audience que le 15 février 2008 ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 novembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que la société BMB INTERNATIONAL, placée en liquidation judiciaire depuis le 11 avril 2006, et qui avait pour activité la vente de boissons, a demandé le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 1 509 667 euros au titre des mois de juin à octobre 2004 ; que cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet le 27 novembre 2006 ; que Me WIART, mandataire judiciaire pris en sa qualité de liquidateur de la société BMB INTERNATIONAL fait appel du jugement du Tribunal administratif de Lille du 13 mars 2008 qui a rejeté sa demande de remboursement desdits crédits de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : Toute partie est avertie, par une notification faite conformément aux articles R.611-3 ou R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. Dans les deux cas, l'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience (...) ;

Considérant que si l'avis relatif à l'audience du 21 février 2008 a été envoyé par lettre recommandée le 11 février 2008 à l'avocat du liquidateur judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL, il résulte de l'instruction que cet avis ne lui a été présenté et effectivement remis que le 15 février 2008 ; que, dans ces conditions, Me WIART, mandataire judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL est fondé à soutenir que les prescriptions de l'article R. 711-2 du code de justice administrative ont été méconnues et que le jugement doit être annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Me WIART, mandataire judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL, devant le tribunal administratif ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que par une décision en date du 13 juillet 2007, postérieure à l'introduction de la demande devant le Tribunal administratif de Lille, le directeur des services fiscaux du Nord-Lille a accordé à la société BMB INTERNATIONAL le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée au titre des mois de juin, juillet, août, septembre et octobre 2004 pour des montants respectifs de 69 491 euros, 71 443 euros, 28 193 euros, 10 899 euros et 21 396 euros ; que, dans cette limite, les conclusions de la demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée sont devenues sans objet ;

Sur le surplus des conclusions de la requête :

Sur la régularité de la décision du directeur rejetant la réclamation :

Considérant que, si la décision en date du 27 novembre 2006 par laquelle le directeur des services fiscaux du Nord-Lille a rejeté la réclamation de la société BMB INTERNATIONAL fait état d'un motif erroné, cette circonstance n'est par elle-même d'aucun effet sur la régularité de la procédure d'imposition ou sur le bien-fondé de l'imposition ;

Sur le bien-fondé de la demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant que pour rejeter le surplus de la demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er juin au 31 octobre 2004, l'administration fiscale fait valoir qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société BMB INTERNATIONAL, elle a remis en cause le régime d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévu par l'article 262 ter I-1° du code général des impôts sous lequel était placée la société pour des livraisons intracommunautaires de marchandises, au motif que la réalité de ces livraisons n'était pas établie et a, en conséquence, procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'il résulte des éléments recueillis par l'administration que la société BMB INTERNATIONAL avait pour fournisseur quasi exclusif la société Interbrew France, filiale du groupe belge Interbrew, producteur européen de bières, qui disposait d'un établissement à Armentières et que plus de 90 % de ses ventes était réalisé avec la société belge X qui déclarait elle-même des livraisons intracommunautaires à destination d'établissements cash and carry situés dans la région Nord-Pas-de-Calais qui disposaient d'une simple adresse de domiciliation et qui ne remplissaient pas leurs obligations comptables et fiscales ; que les boissons achetées par la société BMB INTERNATIONAL auprès du groupe Interbrew étaient directement livrées par la société mère située en Belgique à l'établissement dont disposait sa filiale française à Armentières, sans même transiter par l'entrepôt de la société requérante, avant d'être revendues au client belge de cette dernière, la société X, qui se chargeait lui-même de procéder au chargement et à l'enlèvement de la marchandise depuis ledit établissement ; que les factures de ventes adressées à la société X indiquaient une seule et même date en ce qui concerne les commande, livraison, facturation et échéance de paiement et visaient toujours les mêmes quantités et prix de marchandises, soit 24 palettes de boîtes de bières Stella ; que l'absence de toute activité économique réelle de la société BMB INTERNATIONAL est par ailleurs corroborée par l'inexistence de ses stocks et l'absence de moyens d'exploitation, le montant de son actif immobilisé ne s'élevant qu'à la somme de 739 euros au 31 décembre 2002 ; que si la société BMB INTERNATIONAL soutient qu'elle apporte la preuve de la réalité des livraisons intracommunautaires par la production de factures, documents administratifs d'accompagnement et de déclarations d'échanges de biens prouvant des règlements en provenance de l'étranger, l'administration fait valoir sans être utilement contredite que les documents administratifs d'accompagnement visés par les douanes étrangères, s'ils établissent la réalité du paiement des droits d'accises dans le pays désigné comme destinataire des biens, n'apportent cependant pas la preuve du transfert physique des marchandises dans ce pays ; que si la société BMB INTERNATIONAL fait également valoir qu'elle disposait du statut d'entrepositaire agréé auprès des douanes et que l'établissement d'Armentières correspondait à un entrepôt fiscal agréé permettant d'expédier les marchandises en suspension des droits d'accises, toutefois, le recoupement des documents de transport souvent incomplets ou manquants, des factures portant des erreurs d'identification, de lieux de livraison, des bons de livraison et des informations tirés de l'interrogation de la base des assujettis a confirmé que la société requérante ne procédait pas elle-même à la livraison des biens ; que s'agissant tout particulièrement des livraisons effectuées en exonération du client belge X, l'absence de lettres de voitures dites CMR par la contribuable pour la majeure partie des expéditions en litige a permis à l'administration d'apporter la preuve d'une recherche systématique d'une vente en exonération ; qu'enfin, la circonstance que les douaniers français ou belges n'aient pas contrôlé l'existence physique des flux de marchandises, ni engagé de poursuites est sans incidence sur le bien-fondé de la remise en cause de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue par l'article 262 ter I-1° du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le surplus des conclusions de la demande présentée par Me WIART, mandataire judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL, tendant à obtenir le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée au titre des mois de juin à octobre 2004 devant le Tribunal administratif de Lille, doit être rejetée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions Me WIART, mandataire judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0700642 du Tribunal administratif de Lille du 13 mars 2008 est annulé.

Article 2 : A concurrence du remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée accordé par le directeur des services fiscaux du Nord-Lille au titre des mois de juin, juillet, août, septembre et octobre 2004 pour des montants respectifs de 69 491 euros, 71 443 euros, 28 193 euros, 10 899 euros et 21 396 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de Me WIART, mandataire judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par Me WIART, mandataire judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL devant le Tribunal administratif de Lille est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me WIART, mandataire judiciaire de la société BMB INTERNATIONAL et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°08DA00782


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Mme Elisabeth Rolin
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : CABINET DURAND

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 05/05/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08DA00782
Numéro NOR : CETATEXT000021646401 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-05-05;08da00782 ?
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