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02/06/2009 | FRANCE | N°08DA01942

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 02 juin 2009, 08DA01942


Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Mamadou X, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802302 du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Oise en date du 5 juillet 2008 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et désignant la Côte d'Ivoire comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pou

voir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer u...

Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Mamadou X, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802302 du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Oise en date du 5 juillet 2008 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et désignant la Côte d'Ivoire comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

Il soutient que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et familiale et porte atteinte aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la motivation de la décision du préfet qui se contente d'affirmer que la vie commune n'est pas établie s'avère sinon insuffisante, sujette à caution ; que le tribunal ne pouvait juger l'enquête administrative comme suffisante pour affirmer que la vie commune ne se poursuivait plus de manière régulière ; qu'il convient, par ailleurs, de préciser que la vie du couple ne pourrait se reconstituer en Côte d'Ivoire ; que Mme Y, sa partenaire, souffre d'une grave pathologie ; que l'exposant rencontre également des problèmes de santé nécessitant des soins médicaux et que, postérieurement à la décision préfectorale, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2009, présenté par le préfet de l'Oise, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que, comme seule attache en France, le requérant se prévaut de son PACS conclu avec Mme Y ; que cette dernière a déclaré aux gendarmes qu'il n'habitait pas avec elle et ne venait pas régulièrement la voir ; qu'ils ont constaté qu'il n'y avait au domicile de Mme Y aucun signe apparent de vie commune ; que le requérant ne représente manifestement et contrairement à ce qu'il soutient aucune aide pour sa concubine ; qu'il n'est, au demeurant, pas justifié qu'elle soit isolée, dépendante de l'aide d'un tiers et qu'elle ne puisse compter que sur l'aide de ce dernier ; que la stabilité de la relation dont il se prévaut n'est pas certaine et son ancienneté n'est pas établie ; que son intégration en France n'a rien d'exceptionnelle, qu'il vit clandestinement sur le territoire français depuis le premier jour et n'a aucune situation sociale, notamment professionnelle, établie et reconnue en France, nonobstant le fait qu'il aurait une promesse d'embauche ; qu'il n'est pas fondé à se prévaloir de son état de santé pour soutenir qu'une erreur d'appréciation aurait été commise, le moyen n'ayant pas été soulevé en première instance ; qu'il ne justifie pas être dans une situation lui permettant d'obtenir un autre titre de séjour de plein droit ;

Vu la décision du 19 janvier 2009 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, signée par la France le même jour, ensemble le premier protocole additionnel signé le 20 mars 1952, ratifiée par la France en application de la loi n° 73-1227 du 31 décembre 1973 et publiée au Journal officiel par décret n° 74-360 du 3 mai 1974 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. X, de nationalité ivoirienne, est entré en France le 31 décembre 2002 sous couvert d'un visa court séjour et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; qu'il a conclu le 9 août 2005 un pacte civil de solidarité avec une ressortissante française demeurant au Mesnil-en-Thelle (Oise) ; qu'il a sollicité le 28 septembre 2007 un titre de séjour vie privée et familiale ; que le préfet de l'Oise a rejeté sa demande, par arrêté du 5 juillet 2008, en assortissant sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, au motif que la vie commune n'était pas établie ; que M. X relève appel du jugement du 4 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que le préfet s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour de M. X sur un procès-verbal d'enquête des services de gendarmerie en date du 19 décembre 2007 ; que les gendarmes ont mentionné sur ce procès-verbal que s'étant présentés le 17 décembre au domicile de M. X, ce dernier étant absent, sa conjointe leur a déclaré qu'il ne venait pas régulièrement de peur d'être contrôlé en raison de sa situation irrégulière ; que les gendarmes ont également indiqué n'avoir remarqué aucun signe de vie commune et que les services administratifs de la commune de Mesnil-en-Thelle, contactés par eux, ont déclaré ne pas connaître l'intéressé ; qu'il ressort toutefois des pièces produites par M. X et notamment du libellé des factures de France Telecom d'octobre 2005 à juin 2008 et de ses avis d'imposition de 2005 et 2006 ainsi que sa déclaration de revenus pour l'année 2007, que les deux conjoints sont domiciliés à la même adresse ; que M. X produit également la procuration dont il dispose sur le compte bancaire de sa conjointe, ainsi que diverses attestations dont celles de la fille de sa compagne et du curé de la paroisse de Persan qui témoignent d'une relation stable et durable ; que pour répondre aux dires des gendarmes selon lesquels il serait inconnu des services de la commune, M. X fait en outre valoir, sans être contredit, que sa résidence étant située à plusieurs kilomètres du centre de Mesnil-en-Thelle, mais à proximité de Persan dans le Val d'Oise, c'est dans cette dernière localité que le couple a le centre de ses activités ; qu'il ressort de ces éléments que le préfet de l'Oise, en se fondant sur les seules constatations rappelées ci-dessus opérées par les gendarmes, pour conclure à l'absence de vie commune entre M. X et sa conjointe, a entaché sa décision d'une erreur de fait ; que M. X est, par suite, fondé à soutenir que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour vie privée et familiale et lui faisant obligation de quitter le territoire français a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et a ainsi méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à demander, pour ce motif, l'annulation ensemble de ladite décision et du jugement du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant que M. X demande qu'il soit enjoint au préfet de l'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ; que le présent jugement, qui annule la décision de refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale implique que le préfet de l'Oise délivre à M. X une telle carte ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Oise de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif d'Amiens du 4 novembre 2008 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Oise en date du 5 juillet 2008 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Oise de délivrer à M. X une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mamadou X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet de l'Oise.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01942
Date de la décision : 02/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: M. Christian Bauzerand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : SCP CARON - DAQUO - AMOUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-06-02;08da01942 ?
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