La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/06/2009 | FRANCE | N°08DA01952

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 04 juin 2009, 08DA01952


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 1er décembre 2008 par télécopie et régularisée par la réception de l'original le 5 décembre 2008, présentée pour M. Ibrahim X, demeurant ..., par Me Lequien ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805230, en date du 29 octobre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2008 par lequel le préfet du Nord a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français e

t a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté at...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 1er décembre 2008 par télécopie et régularisée par la réception de l'original le 5 décembre 2008, présentée pour M. Ibrahim X, demeurant ..., par Me Lequien ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805230, en date du 29 octobre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2008 par lequel le préfet du Nord a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 9 de la convention du 21 septembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de Côte d'Ivoire relative à la circulation et au séjour des personnes, la condition de sérieux dans les études n'étant pas au nombre des conditions prévues par ce texte pour obtenir le renouvellement d'un titre de séjour étudiant ; qu'il remplit les conditions fixées par l'article 9 de ladite convention ; que si les débuts de son cursus universitaire ont été difficiles, il a obtenu un diplôme universitaire de second cycle et est en phase d'obtenir son Master 1ère année de droit à l'Université de Lille II ; que la décision attaquée est donc entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation du sérieux de ses études ; que le préfet du Nord était tenu d'examiner le droit au séjour de M. X au regard des stipulations de l'article 11 de la convention liant la France à la Côte d'Ivoire ; qu'il n'était pas en mesure de demander la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dernières dispositions dès lors qu'il ne pouvait formuler sa demande que dans une seule catégorie juridique ; que les stipulations de cette convention ne renvoient au code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'en ce qui concerne les droits et taxes exigibles lors de la délivrance ou de son renouvellement d'un titre de séjour et pas concernant les conditions de délivrance de plein droit du certificat de résidence de dix ans ; que l'analyse du Tribunal sera confirmée concernant l'absence de menace pour l'ordre public de M. X ; que M. X résidait en France depuis huit ans à la date de la décision attaquée ; qu'il justifie y poursuivre ses études et exercer un emploi à temps partiel afin de subvenir à ses besoins ; qu'il est parfaitement intégré à la société française et vit en concubinage avec Mlle Y depuis trois ans ; que la décision portant refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'illégalité de la décision portant refus de séjour implique la nullité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; qu'il reprend dans leur intégralité, pour contester cette dernière décision, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français implique celle de la décision fixant le pays de renvoi ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2009, présenté par le préfet du Nord, qui demande à la Cour de rejeter la requête ; il soutient que l'arrêté attaqué a été signé par une autorité dûment habilitée ; que, à titre principal, la requête de première instance de M. X était irrecevable au regard de l'article R. 775-2 du code de justice administrative ; qu'à la date d'enregistrement de la demande de première instance, le délai de recours était clos ; que l'arrêté attaqué a été notifié à M. X le 23 janvier 2008, alors que sa requête n'a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Lille que le 31 juillet 2008 ; que si le délai de recours a été interrompu par la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. X, le requérant ne démontre pas l'absence de notification de la décision du 28 mars 2008 lui accordant l'aide juridictionnelle ; à titre subsidiaire, que les études de M. X ne peuvent être considérées comme présentant un caractère réel et sérieux ; qu'il ne pouvait être fait abstraction de la condamnation définitive dont a fait l'objet l'intéressé ; que les étudiants n'entrent pas dans un des cas prévus par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour se voir délivrer de plein droit une carte de résident ; que M. X est célibataire et sans enfant ; qu'il n'est pas isolé en Côte d'Ivoire ; que la décision attaquée portant refus de séjour ne méconnaît pas les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'était pas tenu d'examiner le droit au séjour du requérant sur un autre fondement que celui dont ce dernier se prévalait ; que la décision portant refus de séjour étant légale, M. X ne peut soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale par voie de conséquence ; que les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire seront écartés pour les mêmes motifs qu'évoqués précédemment ; que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire doit être rejeté ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 février 2009 par télécopie et régularisé par la réception de l'original le 12 février 2009, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que sa demande de première instance était recevable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention signée le 21 septembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Côte d'Ivoire relative à la circulation et au séjour des personnes ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Albert Lequien, président-assesseur, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. X, né en 1978, de nationalité ivoirienne, entré en France le 4 octobre 2000, célibataire, relève appel du jugement, en date du 29 octobre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2008 par lequel le préfet du Nord a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant que, le bureau d'aide juridictionnelle ayant rendu sa décision le 28 mars 2008, la demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord en date du 17 janvier 2008 n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 31 juillet 2008 ; que, toutefois, dès lors qu'aucune pièce du dossier n'établit la date à laquelle M. X a reçu notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle, le préfet du Nord n'est pas fondé à faire valoir que cette demande était tardive ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué en tant qu'il porte refus de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la convention du 21 septembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de la Côte d'Ivoire relative à la circulation et au séjour des personnes : Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation supérieur sur le territoire de l'autre Etat doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention étudiant . Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. (...) ;

Considérant qu'il est constant que M. X, entré en France en 2000 à l'âge de 22 ans pour y poursuivre ses études universitaires, n'a obtenu aucun résultat jusqu'en 2002 ; que, toutefois, l'intéressé a réussi ses première et seconde années de DEUG AES en 2003 et 2004, a obtenu sa licence en 2006 et poursuit depuis son cursus en Master ; que, par suite, M. X a connu depuis 2002 une progression dans ses études, dont la réalité n'est d'ailleurs pas sérieusement contestée et ce, malgré le fait qu'il ait dû exercer une activité salariée afin d'en financer la poursuite ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, il est fondé à soutenir que la décision en date du 17 janvier 2008 par laquelle le préfet du Nord a refusé de lui renouveler son titre de séjour étudiant en raison de l'absence de sérieux de ses études est entachée d'erreur d'appréciation et, par voie de conséquence, à en demander l'annulation ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire et qu'il fixe le pays de destination :

Considérant que l'illégalité dont est entachée la décision par laquelle le préfet du Nord a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. X entache, par voie de conséquence, la légalité des décisions portant respectivement obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens présentés par M. X, que celui-ci est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2008 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que le présent arrêt implique, eu égard à ses motifs et dès lors qu'il n'est pas allégué et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un changement des circonstances de droit ou de fait y ferait obstacle, qu'il soit enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. X une carte de séjour temporaire étudiant dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a, en revanche, pas lieu d'assortir d'une astreinte l'injonction ainsi prescrite ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et alors que M. X n'a pas sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que M. X réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0805230 du 29 octobre 2008 du Tribunal administratif de Lille et l'arrêté du 17 janvier 2008 du préfet du Nord sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. X une carte de séjour temporaire étudiant dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ibrahim X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

''

''

''

''

N°08DA01952 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01952
Date de la décision : 04/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : LEQUIEN - LACHAL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-06-04;08da01952 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award