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30/07/2009 | FRANCE | N°08DA01491

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 30 juillet 2009, 08DA01491


Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 septembre 2008 et confirmée par la production de l'original le 9 septembre 2008, présentée pour la COMMUNE D'HAZEBROUCK, représentée par son maire, par Me Caffier ; la COMMUNE D'HAZEBROUCK demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702260 du 4 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a condamné la COMMUNE D'HAZEBROUCK à verser à Mme A la somme de 165 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui a causé l'illégal

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Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 septembre 2008 et confirmée par la production de l'original le 9 septembre 2008, présentée pour la COMMUNE D'HAZEBROUCK, représentée par son maire, par Me Caffier ; la COMMUNE D'HAZEBROUCK demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702260 du 4 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a condamné la COMMUNE D'HAZEBROUCK à verser à Mme A la somme de 165 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui a causé l'illégalité de la décision du 14 août 2002 du maire d'HAZEBROUCK lui refusant la délivrance d'une autorisation de lotir sur la parcelle cadastrée section CN n° 23 située au lieudit Kreule Straëte ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme GANTOIS en première instance ;

3°) de condamner Mme A au paiement d'une indemnité de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La COMMUNE D'HAZEBROUCK soutient que les décisions du Tribunal administratif de Lille du 18 février 2005 et de la Cour administrative d'Appel de Douai du 30 mars 2006 ont l'autorité de la chose jugée, s'agissant des mêmes chefs de demandes relatives à l'indemnisation des conséquences d'un seul et même acte, ce qui s'oppose à ce qu'il soit fait droit aux prétentions à nouveau émises ; qu'il n'existe aucun lien direct et certain entre l'acte illégal émis par le maire de la commune et le préjudice que Mme A allègue avoir subi, qu'il est vain d'alléguer une augmentation de l'indice du coût de la construction ; que l'instauration d'une participation pour voirie nouvelle et réseaux et la taxe de raccordement à l'égout sont sans lien direct avec l'illégalité commise ; que la perte de loyers alléguée par Mme A présente un caractère purement éventuel ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2009, présenté pour Mme A, demeurant ..., par la SCP Lefranc, Bavencoffe, Meillier, qui conclut, d'une part, au rejet de la requête de la COMMUNE D'HAZEBROUCK et à la réformation du jugement du Tribunal administratif de Lille en tant que les premiers juges n'ont fait droit que partiellement à sa demande indemnitaire, en condamnant la commune à lui verser la somme de 165 000 euros, d'autre part, à la condamnation de la COMMUNE D'HAZEBROUCK à lui verser la somme de 371 076,47 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2007, date d'introduction de la demande, et enfin, à ce qu'il soit mis à la charge de la COMMUNE D'HAZEBROUCK une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Mme A soutient, qu'ayant présenté une demande indemnitaire auprès du maire d'Hazebrouck, par courrier en date du 5 décembre 2006, elle a lié le contentieux et que les décisions du Tribunal administratif de Lille du 18 février 2005 et de la Cour administrative d'Appel de Douai du 30 mars 2006 n'ont pas l'autorité de la chose jugée ; que la COMMUNE D'HAZEBROUCK est responsable du retard de ses projets du fait du refus d'arrêté de lotir en date du 14 août 2002 et du fait de ne pas avoir réexaminé sa demande dès les premières décisions du Tribunal administratif de Lille et de la Cour administrative d'appel de Douai ; qu'elle a subi un préjudice de 92 795,33 euros, tenant à l'augmentation du coût de la construction entre le 14 août 2002, date du refus illégal de l'autorisation de lotir, et le 21 janvier 2008, date de l'arrêté d'autorisation de lotir, un préjudice de 217 134,43 euros pour perte de loyers, conséquence directe de la faute de la commune, un préjudice de 59 600,64 euros du fait du surcoût concernant la participation pour voirie nouvelle et réseau, qu'elle n'aurait pas eu à assumer si l'autorisation lui avait été délivrée à bonne date, et, enfin, un préjudice de 1 881,34 euros du fait de l'augmentation de la taxe de raccordement intervenue depuis son instauration le 15 février 2005 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Albert Lequien, président-assesseur, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Caffier, pour la COMMUNE D'HAZEBROUCK, et Me Meillier, pour Mme A ;

Considérant que Mme A s'est vu opposer un refus à sa demande d'autorisation de lotir, par arrêté du maire d'Hazebrouck, en date du 14 août 2002 ; que, par jugement du 18 février 2005, le Tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté et a rejeté les conclusions indemnitaires de la requérante, jugement confirmé par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Douai en date du 30 mars 2006 ; que Mme A a alors saisi le maire d'Hazebrouck, le 5 décembre 2006, afin qu'il instruise de nouveau sa demande d'autorisation de lotir et que la commune lui verse la somme de 267 145,31 euros en réparation du préjudice subi ; qu'en raison de l'absence de réponse du maire, Mme A a saisi la Cour administrative d'appel de Douai, qui, par un arrêt du 29 novembre 2007, a enjoint au maire d'Hazebrouck de statuer sur la demande d'autorisation de lotir de la requérante dans un délai de 2 mois à compter de la notification dudit arrêt, sous peine d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ; qu'enfin, par arrêté en date du 21 janvier 2008, le maire d'Hazebrouck a délivré à Mme A le permis de lotir qu'elle sollicitait ;

Considérant que la COMMUNE D'HAZEBROUCK relève appel du jugement du 4 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille l'a condamnée à payer à Mme A la somme de 165 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui a causé l'illégalité de la décision du 14 août 2002 du maire d'Hazebrouck lui refusant la délivrance d'une autorisation de lotir ; que, par appel incident, Mme A demande que la somme de 165 000 euros que la commune a été condamnée à lui payer en première instance, soit portée à 371 076,47 euros ;

Sur l'exception de chose jugée opposée par la COMMUNE D'HAZEBROUCK :

Considérant que, par son jugement précité du 18 février 2005, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sur le fond la demande indemnitaire de Mme A pour le motif que celle-ci ne justifiait pas de son préjudice ; que, par son arrêt en date du 30 mars 2006, la Cour de céans a rejeté l'appel formé par Mme A contre ledit jugement sans examiner le bien-fondé de ses prétentions par le motif que, faute d'avoir été dirigée contre une décision préalable du maire de la COMMUNE D'HAZEBROUCK, la demande présentée devant le Tribunal administratif de Lille était irrecevable ; que le motif ainsi retenu par le juge d'appel s'est rétroactivement substitué à celui qu'avaient retenu les premiers juges ; que, par suite, l'exception de chose jugée ne peut plus être légalement opposée à la nouvelle demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Lille le 2 avril 2007, dirigée contre la décision du maire d'Hazebrouck du 14 août 2002 rejetant sa demande d'indemnité ;

Sur la responsabilité :

Considérant que l'illégalité dont était entaché l'arrêté du maire d'Hazebrouck en date du 14 août 2002 refusant à Mme A l'autorisation de lotir qu'elle sollicitait, est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la COMMUNE D'HAZEBROUCK à raison des préjudices qui en seraient directement résultés pour Mme A ;

Sur le préjudice :

Considérant que Mme A fait valoir que le délai qui s'est écoulé entre le refus illégal de l'autorisation de lotir qui lui a été opposé par le maire d'Hazebrouck le 14 août 2002 et la délivrance effective de cette autorisation de lotir le 21 janvier 2008 lui a causé divers préjudices d'un montant global de 371 076,47 euros ;

Considérant, en premier lieu, qu'en exécution de la décision de la Cour administrative d'appel de Douai en date du 29 novembre 2007, le maire d'Hazebrouck a, comme il a été dit, par arrêté du 21 janvier 2008, délivré l'autorisation de lotir, sans demander à Mme A la participation pour voiries et réseaux , prévue par délibération du 27 janvier 2004, soit postérieurement au refus d'autorisation de lotir ; que dès lors, Mme A ne subit aucun préjudice à ce titre ;

Considérant, en deuxième lieu, que, même si l'autorisation de lotir lui avait été délivrée dès sa première demande en 2002, Mme A aurait dû s'acquitter de la taxe de raccordement assignée aux nouveaux lotissements dès lors que celle-ci avait été instituée par une délibération du conseil municipal d'HAZEBROUCK en date du 3 décembre 2001 ; que, toutefois, la délibération du conseil municipal en date du 15 février 2005 a porté le montant de celle-ci de 460 euros à 940,67 euros par lot ; que, par suite et contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'augmentation du montant de la taxe payée par Mme A résultant ainsi directement de l'illégalité dont est entaché le refus initial d'autorisation de lotir, elle a subi de ce fait un préjudice s'élevant à une somme de 961,34 euros pour les deux lots en cause ;

Considérant en troisième lieu, que Mme A est fondée à demander l'indemnisation du préjudice consécutif à l'augmentation du coût de la construction entre le 14 août 2002, date du refus illégal d'autorisation de lotir, et le 21 janvier 2008, date à laquelle cette autorisation lui a été finalement accordée ; qu'il résulte de l'instruction et notamment des justificatifs et devis fournis par l'intéressée, que le Tribunal administratif de Lille a fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 15 000 euros, et non à celle de 92 460,60 euros réclamée en appel par Mme A ;

Considérant en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme A pouvait espérer raisonnablement louer les deux immeubles dont elle projetait la construction ; que toutefois, prenant en compte les différents aléas inhérents à la location d'immeubles, les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme A du fait de la perte de loyers, en le fixant à la somme de 150 000 euros ;

Considérant que, suite à la délivrance d'un permis de lotir, le 21 janvier 2008, Mme A a immédiatement déposé les demandes de permis de construire les immeubles ; que la COMMUNE D'HAZEBROUCK qui n'établit ni même allègue qu'elle n'aurait pas la possibilité de réaliser son projet n'est pas fondée à soutenir que les délais mis par l'intéressée pour obtenir un permis de lotir ne seraient pas à l'origine des préjudices dont l'indemnisation est demandée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la COMMUNE D'HAZEBROUCK doit être condamnée à verser à Mme A une somme globale de 165 961,34 euros en réparation du préjudice résultant de l'illégalité de la décision du 14 août 2002 du maire d'Hazebrouck, et non celle de 165 000 euros retenue par le Tribunal administratif de Lille, ni celle de 371 076,47 euros réclamée à titre incident par celle-ci ;

Sur les intérêts :

Considérant que Mme A a droit aux intérêts de la somme de 165 961,34 euros à compter du 2 avril 2007, date d'enregistrement de sa requête introductive d'instance au Tribunal administratif de Lille ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 6 mars 2008 ; que, toutefois, à cette date, il n'était pas dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 3 avril 2008 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la COMMUNE D'HAZEBROUCK au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE D'HAZEBROUCK à verser à Mme A la somme de 1 500 euros au titre de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 165 000 euros que la COMMUNE D'HAZEBROUCK a été condamnée à verser à Mme A par le jugement du Tribunal administratif de Lille du 4 juillet 2008 est portée à la somme de 165 961,34 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2007. Les intérêts échus le 3 avril 2008 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement n° 0702260 en date du 4 juillet 2008 du Tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La requête de la COMMUNE D'HAZEBROUCK et le surplus de conclusions de l'appel incident de Mme A sont rejetés.

Article 4 : La COMMUNE D'HAZEBROUCK versera à Mme GANTOIS une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'HAZEBROUCK et à Mme Nicole A.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

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N°08DA01491 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01491
Date de la décision : 30/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Albert Lequien
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : CAFFIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-07-30;08da01491 ?
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