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03/12/2009 | FRANCE | N°09DA00832

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 03 décembre 2009, 09DA00832


Vu la requête, enregistrée le 8 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SOMME ; le préfet demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0700544 du 31 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. Veysel A, d'une part, annulé sa décision du 2 janvier 2007 refusant d'abroger l'arrêté du 23 mars 1998 par lequel il avait prononcé l'expulsion de M. A et lui a, d'autre part, enjoint d'abroger ledit arrêté du 23 mars 1998 dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement ;

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Vu la requête, enregistrée le 8 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SOMME ; le préfet demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0700544 du 31 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. Veysel A, d'une part, annulé sa décision du 2 janvier 2007 refusant d'abroger l'arrêté du 23 mars 1998 par lequel il avait prononcé l'expulsion de M. A et lui a, d'autre part, enjoint d'abroger ledit arrêté du 23 mars 1998 dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement ;

Il soutient que le Tribunal a considéré, à tort, que la décision en litige a porté atteinte à la vie privée et familiale de M. A, dans la mesure où ce dernier justifie d'une vie familiale et où il ne s'était pas fait remarquer défavorablement depuis l'arrêté du 23 mars 1998, alors que M. A a été condamné en 2002 et en 2008 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2009, présenté pour M. Veysel A, demeurant ..., par Me Pereira, avocat ; M. A conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que sa vie familiale est définitivement fixée en France ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui a reconnu le statut de réfugié ; que le Tribunal de grande instance de Bobigny a fait droit à sa requête en relèvement de l'interdiction du territoire français ; qu'il démontre une bonne intégration professionnelle ; qu'il n'a pas subi de condamnation depuis 1997 ;

Vu la décision du 6 août 2009 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai maintenant l'aide juridictionnelle totale accordée à M. A par la décision du 13 avril 2007 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gérard Gayet, président de chambre, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, ressortissant turc, né le 5 avril 1957, est entré en France en 1984 ; qu'il a fait l'objet, le 23 mars 1998, d'un arrêté préfectoral d'expulsion suite à plusieurs condamnations pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique et infractions à la législation sur les stupéfiants ; qu'il a été assigné à résidence par décision ministérielle du 10 avril 1998 ; que, par un jugement du 12 septembre 2005, le Tribunal correctionnel de Bobigny a fait droit à sa requête en relèvement de l'interdiction de territoire français ; que le PREFET DE LA SOMME a refusé, par une décision du 2 janvier 2007, de faire droit à sa demande d'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 23 mars 1998 ; que, par jugement du 31 mars 2009, le Tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de M. A, annulé cette décision et a fait injonction au préfet d'abroger l'arrêté du 23 mars 1998 ; que le PREFET DE LA SOMME relève appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant, d'une part, que M. A a été condamné, le 29 août 2002, par le Tribunal correctionnel d'Amiens à une peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis pour refus de se soumettre aux vérifications tendant à établir l'état alcoolique à la suite d'une infraction routière ou d'un accident ; qu'il a, pour des faits commis le 20 janvier 2006, été condamné par le Tribunal correctionnel de Rochefort et la Cour d'appel de Poitiers, les 4 décembre 2007 et 2 octobre 2008, à deux ans d'emprisonnement et 2 500 euros d'amende pour plusieurs infractions à la législation sur le travail et abus de biens sociaux ; que, d'autre part, M. A, qui bénéficie du statut de réfugié politique et dont il n'est pas contesté qu'il réside habituellement sur le territoire français depuis 1984, vit en concubinage avec une ressortissante marocaine titulaire d'une carte de résident ; qu'ils élèvent ensemble leur fils, né en France en 1994 et scolarisé ; qu'il est père de deux autres enfants, nés en 1979 et 1981, qui résident en France, et dont l'un possède la nationalité française ; qu'il justifie d'une vie familiale stable et ancienne sur le territoire français ; que, dès lors et nonobstant les infractions commises par M. A postérieurement à l'arrêté du 23 mars 1998, le préfet a, en refusant d'abroger ladite décision, porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts de protection de l'ordre public en vue desquels l'arrêté d'expulsion a été pris ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SOMME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de M. A, la décision en date du 2 janvier 2007 refusant d'abroger l'arrêté du 23 mars 1998 portant expulsion et lui a fait injonction de procéder à l'abrogation dudit arrêté ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DE LA SOMME est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et à M. Veysel A.

Copie sera transmise au PREFET DE LA SOMME.

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N°09DA00832

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA00832
Date de la décision : 03/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Gérard Gayet
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SCP CARON-DAQUO-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-12-03;09da00832 ?
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