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10/12/2009 | FRANCE | N°09DA00618

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 10 décembre 2009, 09DA00618


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 15 avril 2009, présentée pour M. Dominique A, demeurant ..., par Me Calonne ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0807958 du 12 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 novembre 2008 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais lui a refusé son admission au séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;
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3°) d'enjoindre...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 15 avril 2009, présentée pour M. Dominique A, demeurant ..., par Me Calonne ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0807958 du 12 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 novembre 2008 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais lui a refusé son admission au séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt de la Cour, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt de la Cour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant l'instruction de son dossier, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que la décision du préfet du Pas-de-Calais porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale compte tenu de la durée de son mariage avec une compatriote en situation régulière ; qu'un enfant est né de leur union le 19 mai 2007 et que le foyer héberge également un enfant de nationalité française issu d'une précédente union de son épouse ainsi que la nièce de son épouse également de nationalité française ; que le préfet du Pas-de-Calais a incorrectement apprécié sa situation familiale ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ; que cette même décision est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation et viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision fixant le pays de destination en cas de renvoi l'expose à un traitement inhumain et dégradant en le contraignant à vivre séparé de sa famille ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2009, présenté par le préfet du Pas-de-Calais, qui conclut au rejet de la requête ; le préfet soutient que la requête est irrecevable, celle-ci étant la reproduction littérale des écritures présentées devant les premiers juges ; que le fait que M. A ait noué des liens avec sa belle-fille et la nièce de son épouse est inopérant sur la légalité de sa décision, l'appelant n'ayant pas l'autorité parentale sur ces deux enfants ; que son épouse a déclaré aux services de police le 22 avril 2008 qu'il avait quitté le domicile conjugal depuis plus de 6 mois ; qu'il est possible pour son épouse de solliciter son séjour régulier sur le territoire français au titre du regroupement familial ; que l'intéressé s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français à l'expiration de son visa ; qu'aucun justificatif probant n'établit la réalité de la vie commune du couple ; que l'appelant n'établit pas encourir des risques en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu la décision du 8 juin 2009 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, ressortissant ivoirien, né en 1975, et entré sur le territoire français le 20 juillet 2006, relève appel du jugement, en date du 12 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 7 novembre 2008, par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :

Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu par le préfet du Pas-de-Calais, la requête d'appel présentée par M. A, qui ne constitue pas la reproduction littérale du mémoire de première instance, répond aux exigences de motivation des requêtes prévues par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est marié depuis le 16 décembre 2006 avec une compatriote en situation régulière, résidant elle-même en France depuis 2001, mère d'un enfant de nationalité française issu d'une précédente union et ayant la garde d'une nièce également de nationalité française ; qu'un enfant est né de leur vie commune, le 19 mai 2007 ; que, s'il est vrai qu'au cours des investigations menées le 22 avril 2008 au domicile du couple, Mme Beugre a déclaré aux services de police être sans nouvelle de son époux depuis plus de 6 mois, il ressort de manière suffisamment probante des pièces du dossier et notamment des attestations produites en cause d'appel par Mme Beugre et par leurs voisins que la communauté de vie entre les époux n'a jamais cessé ; que, dans ces circonstances et alors même que l'intéressé pourrait bénéficier du regroupement familial, le refus de lui délivrer un titre de séjour a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant que la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. A est entachée d'illégalité ; que, par voie de conséquence, les décisions par lesquelles le préfet l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé la Côte d'Ivoire comme pays de destination de cette mesure sont privées de base légale et doivent être annulées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais en date du 7 novembre 2008 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'eu égard à ses motifs, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet du Pas-de-Calais délivre un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale à M. A dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Calonne en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi n° 91-64 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de sa renonciation au versement de l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lille du 12 mars 2009 et la décision du préfet du Pas-de-Calais en date du 7 novembre 2008 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Pas-de-Calais de délivrer à M. A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Calonne, avocat, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ledit avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Dominique A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.

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N°09DA00618 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guyau
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : CALONNE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 10/12/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 09DA00618
Numéro NOR : CETATEXT000021924632 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-12-10;09da00618 ?
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