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18/02/2010 | FRANCE | N°09DA01129

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 18 février 2010, 09DA01129


Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Stephen A, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel, Pereira ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901160 du 26 juin 2009 du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2009 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de lui renouveler son titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire français, dans un délai d'un mois, et a fixé le Nige

ria, pays dont il a la nationalité comme pays de destination ;

2°) d'an...

Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Stephen A, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel, Pereira ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901160 du 26 juin 2009 du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2009 par lequel le préfet de l'Oise a refusé de lui renouveler son titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire français, dans un délai d'un mois, et a fixé le Nigeria, pays dont il a la nationalité comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté du 13 mars 2009 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois ;

Il soutient :

- qu'il était fondé à se voir renouveler de plein droit son titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que son état de santé nécessite un suivi médical dont le défaut est susceptible d'entraîner de graves conséquences ; que, contrairement à ce qu'affirme le médecin inspecteur de la santé publique, les soins nécessités par son état de santé sont inaccessibles au Nigeria ; qu'il est atteint d'un glaucome bilatéral avancé à l'oeil droit et que le défaut de soins peut conduire à sa cécité ; qu'il ne peut ainsi faire l'objet d'une mesure d'éloignement au regard des dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il est recherché par des intégristes musulmans et fait l'objet d'un mandat d'arrêt délivré le 7 octobre 2005 par la Haute Cour de la Charia de l'Etat du Plateau ; qu'il ne peut être éloigné à destination de son pays d'origine conformément aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet de l'Oise a ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du 1er septembre 2009 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. A ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2009, présenté par le préfet de l'Oise ; il conclut au rejet de la requête ; il fait valoir :

- s'agissant de la décision de refus de séjour, que l'avis du médecin inspecteur de la santé publique n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spéciale au motif que deux avis favorables avaient précédemment été rendus permettant à M. A de recevoir des soins en France pendant deux fois douze mois ; que l'intéressé ne démontre pas en quoi l'administration a mal apprécié sa situation en estimant qu'après avoir reçu des soins en France durant deux périodes de douze mois, il pouvait désormais suivre son traitement dans son pays d'origine ; qu'il ne produit aucun certificat médical détaillé et probant ; qu'il se borne à des déclarations générales sur l'état sanitaire de son pays ; que la décision de refus de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où l'intéressé est célibataire et sans enfant à charge ; qu'il n'est pas isolé dans son pays d'origine ;

- s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, que M. A ne justifie pas être dans une situation lui permettant d'obtenir un titre de séjour de plein droit, ni être dans l'une des situations visées à l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ferait obstacle à la mesure d'éloignement ;

- s'agissant de la décision fixant le pays de destination, que M. A est de nationalité nigériane ; qu'il n'a pas le statut de réfugié et ne justifie pas être admissible dans un autre pays que le Nigeria ; que la décision en litige ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. A n'établit pas que sa vie ou sa liberté serait menacée en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, de nationalité nigériane, a déclaré être entré en France le 20 juillet 2004 et a demandé son admission au séjour au titre de l'asile politique le 27 août 2004 ; que sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 14 décembre 2004 et que ce refus a été confirmé par la Commission des recours des réfugiés le 23 septembre 2005 ; que l'intéressé a fait l'objet d'une invitation à quitter le territoire, par un arrêté du 25 octobre 2005 du préfet de la Loire-Atlantique ; que M. A a sollicité le réexamen de sa demande d'asile, qui a de nouveau été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par une décision du 22 décembre 2005, confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 15 septembre 2006 ; que l'intéressé a alors demandé son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et s'est vu délivrer à ce titre une carte de séjour temporaire du 20 novembre 2006 au 14 février 2009 ; que, par un arrêté du 13 mars 2009, le préfet de l'Oise a refusé à M. A de lui renouveler son titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire français et a fixé le Nigeria, pays dont il a la nationalité, comme pays de destination de cette mesure ; que M. A relève appel du jugement du 26 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté du 13 mars 2009 ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays d'origine ; qu'aux termes de l'article R. 511-1 du même code : L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues aux deux premiers alinéas de l'article R. 313-22 ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : (...) Le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...). L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a sollicité en 2006 son admission au séjour en qualité d'étranger malade et, après deux avis favorables du médecin inspecteur de la santé publique faisant état de la nécessité d'une poursuite des soins pendant deux périodes successives de 12 mois, a été mis en possession d'une carte de séjour temporaire du 20 novembre 2006 jusqu'au 14 février 2009 ; qu'au vu de l'évolution de l'état de santé de l'intéressé, le préfet de l'Oise a refusé, le 13 mars 2009, de renouveler son titre de séjour en se fondant sur un nouvel avis du médecin inspecteur de la santé publique émis le 12 février 2009, précisant que M. A pouvait, dorénavant, bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que si l'intéressé soutient que son état de santé nécessite toujours un suivi médical dont le défaut est susceptible d'entraîner de graves conséquences et que, contrairement à ce qu'affirme le médecin inspecteur de la santé publique, les soins nécessités par son état de santé sont inaccessibles au Nigeria, le certificat médical qu'il produit, qui fait état d'un glaucome bilatéral avancé avec perte de la vision périphérique de l'oeil droit et se borne à préciser que des soins réguliers doivent être poursuivis en France car ils ne sont pas efficaces dans son pays, n'est pas de nature à lui seul à remettre en cause l'appréciation portée par le médecin inspecteur de la santé publique quant aux possibilités de traitement de M. A dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Oise n'a pas, en refusant à M. A de lui renouveler son titre de séjour pour raisons médicales, méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées, ni celles de l'article L. 511-1 10° du même code ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que M. A soutient qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine car il est recherché par des intégristes musulmans et a fait l'objet d'un mandat d'arrêt délivré le 7 octobre 2005 par la Haute Cour de la Charia de l'Etat du Plateau ; que, toutefois, il ne produit aucun élément justificatif au soutien de ses allégations ; qu'au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par deux décisions des 14 décembre 2004 et 22 décembre 2005, confirmées par la Commission des recours des réfugiés, les 23 septembre 2005 et 15 septembre 2006 ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de l'Oise a, en prononçant une mesure d'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. A et en fixant le Nigeria comme pays de destination de cette mesure, méconnu les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est pas davantage établi, pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, que le préfet de l'Oise a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. A ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2009 du préfet de l'Oise ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions de M. A à fin d'injonction ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Stephen A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet de l'Oise.

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N°09DA01129 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Marianne (AC) Terrasse
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SCP CARON-DAQUO-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Date de la décision : 18/02/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 09DA01129
Numéro NOR : CETATEXT000022364289 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-02-18;09da01129 ?
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