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04/03/2010 | FRANCE | N°09DA00482

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (ter), 04 mars 2010, 09DA00482


Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN, dont le siège est situé 2 place Hector Lamotte à Nesle (80190), par Me Garnier, avocat ; la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0701182-0801923 du 5 février 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er août 2000 au 31 juillet

2005 et, d'autre part et dans chaque instance, à la condamnation de l'E...

Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN, dont le siège est situé 2 place Hector Lamotte à Nesle (80190), par Me Garnier, avocat ; la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0701182-0801923 du 5 février 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er août 2000 au 31 juillet 2005 et, d'autre part et dans chaque instance, à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer les réductions demandées ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 9 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que sont seules applicables à son établissement, qui accueille des spectacles de variétés, les dispositions de l'article 279 b bis du code général des impôts ; que le tribunal administratif n'a pas tiré les conséquences de ses observations concernant le texte effectivement applicable et a commis de ce fait une erreur de droit ; qu'il n'a admis l'application du taux réduit que pour les clients ayant opté pour la formule spectacle seul mais non pour ceux ayant opté pour la formule tout compris , alors que le texte applicable ne fait aucune distinction en fonction de la formule choisie ; qu'en reprochant à la contribuable de ne pas justifier que la base des rappels de taxe en litige est partiellement constituée de recettes portant sur la formule spectacle seul , le Tribunal a renversé la charge de la preuve, qui incombait à l'administration en fonction de la procédure, et ainsi commis une autre erreur de droit ; que la doctrine a apporté des précisions sur l'application de l'article 279 b bis, par la réponse ministérielle Mollet du 22 janvier 1972 et la documentation de base 3 C 226 du 31 août 1994 reprise dans la documentation de base 3 C 224 du 30 mars 2001 ; qu'il en résulte que le taux réduit est applicable à condition que les consommations soient interrompues pendant le spectacle ; que le Tribunal a commis une erreur d'interprétation de cette doctrine, dont résulte que le taux réduit est applicable à condition que les consommations n'aient pas un caractère obligatoire et que le service soit interrompu pendant la durée du spectacle même ; que, la société proposant à ses clients un tarif spectacle seul , il est démontré que les consommations ne sont pas obligatoires pour assister au spectacle ; qu'il résulte de l'instruction que le service est interrompu pendant toute la durée du spectacle, ce service se déroulant pendant une durée de non spectacle , soit hors séance ; que l'administration n'a pas démontré, comme elle en a la charge, que le service ne serait pas interrompu et les tables non desservies pendant la durée du spectacle ; qu'elle entend se prévaloir de la lettre de M. Cadée du 21 mai 2001, le caractère facultatif des consommations étant établi et le service de ces dernières étant interrompu pendant la durée du spectacle ; que les repas et consommations ne sont pas obligatoires ; que la revue de music-hall s'articule en trois parties distinctes entrecoupées du service des entrées, puis des plats et enfin des desserts, le service des consommations étant interrompu pendant ces trois parties distinctes ; qu'il n'y a ni restauration, ni consommation d'alcool pendant le spectacle ; que les interventions du gérant entre les trois parties de la revue ne peuvent être regardées comme partie intégrante du spectacle ; que les rappels reposent sur une confusion entre deux régimes différents permettant le bénéfice de l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, alors que la contribuable n'entend pas se prévaloir des dispositions de l'article 279 b bis a 1° du code général des impôts ; que, dans la proposition de rectification du 27 septembre 2004, la motivation, stéréotypée, des pénalités pour mauvaise foi est insuffisante ; qu'elle entend à cet égard se prévaloir des instructions 13 L-1-80 du 6 février 1980 et 13 N-1-07 du 29 février 2007 ; que la mauvaise foi n'est pas établie ; que le Tribunal a, à cet égard, inversé la charge de la preuve et avait la possibilité de demander la production de cette proposition de rectification ou d'ordonner un supplément d'instruction ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir qu'en ce qui concerne l'application de la loi fiscale, que, dès lors que la formule tout compris correspond à une prestation globale incluant le spectacle, le repas et les boissons, les sommes perçues en contrepartie de ces prestations ne peuvent relever du taux réduit ; que le vérificateur a soustrait les factures spectacle seul afin de soumettre les droits d'entrée à la taxe sur la valeur ajoutée au taux normal ; que la base des rappels contestés n'inclue donc pas des recettes perçues sur les clients ayant opté pour la formule donnant accès au spectacle seul ; qu'en ce qui concerne l'application de la doctrine administrative, les clients ayant opté pour la formule tout compris incluant repas, boissons et spectacles ne sauraient être regardés comme ayant choisi un service de consommation à caractère facultatif ; que les conditions énoncées par la doctrine invoquée étant cumulatives, les premiers juges n'avaient pas à rechercher si la seconde condition était satisfaite ; qu'au surplus, le service des consommations n'est pas interrompu pendant le spectacle dès lors qu'une fois le public installé, le spectacle ne s'arrête jamais, le service des consommations n'étant pas totalement suspendu pendant toute la durée du spectacle, dont la prestation du gérant fait partie intégrante ; que la société ne peut davantage se prévaloir du courrier du 21 mai 2001 émanant du directeur des services fiscaux de la Somme ; que la décision d'infliger des pénalités de mauvaise foi a été régulièrement motivée et que la mauvaise foi est établie ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 21 juillet 2009, présenté pour la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens et, en outre, que la somme que l'Etat doit être condamné à lui payer en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative soit portée à 10 000 euros ;

Vu les nouvelles observations, enregistrées le 17 septembre 2009, présentées par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN exploite à Nesle, dans, le département de la Somme, un établissement de spectacles de variétés à l'enseigne Le P'tit Baltar ; qu'à la suite de vérifications de comptabilité ayant porté, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur les périodes du 1er août 2000 au 31 juillet 2003 et du 1er août 2003 au 31 juillet 2005, l'administration a remis en cause l'application du taux réduit de cette taxe à certaines des prestations délivrées par cet établissement ; que la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée procédant de cette remise en cause ;

Sur les conclusions en décharge :

En ce qui concerne le bien-fondé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 279 du code général des impôts : La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce qui concerne : (...) b bis) Les spectacles suivants : / théâtres ; / théâtres de chansonniers ; / cirques ; / concerts ; / spectacles de variétés, à l'exception de ceux qui sont donnés dans les établissements où il est d'usage de consommer pendant les séances ; (...) ; qu'il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si les recettes réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée ou dans celui du taux normal de cette taxe, eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ses opérations ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des périodes couvertes par les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, l'établissement de la société requérante proposait à la clientèle un spectacle de cabaret et de music-hall ; qu'était proposé au public, soit des formules repas et spectacle incluant, pour un prix global, la fourniture d'un repas et la prestation d'un spectacle, soit, à l'exception toutefois de l'exercice 2000/2001, des formules spectacle seul dont le prix correspondait seulement à la prestation d'un spectacle, la clientèle conservant la possibilité, quelle qu'était la formule choisie, de commander des consommations supplémentaires facturées en sus ;

Considérant, en premier lieu, qu'à supposer même que, comme le soutient la société requérante, le service des consommations serait interrompu pendant la durée des séances de spectacle, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas soutenu que les clients ayant opté pour une formule repas et spectacle et s'étant vu servir des consommations mais n'ayant pas achevé de les consommer lors du début du spectacle s'abstiendraient de les consommer ou de continuer à les consommer, ou se verraient interdire de le faire, pendant la durée dudit spectacle ; qu'il en va de même des clients ayant choisi une formule spectacle seul et commandant, en sus, des consommations ; qu'ainsi, il résulte de l'instruction que la société requérante exploite un établissement de spectacles de variétés où il est d'usage de consommer pendant les séances de spectacle ; que, par suite, c'est par une exacte application des dispositions précitées de l'article 279 du code général des impôts que l'administration a remis en cause l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée aux sommes perçues des clients en contrepartie d'une formule repas et spectacle ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'alors même qu'ainsi qu'il vient d'être dit, l'établissement de la société requérante n'est, en tout état de cause, pas au nombre de ceux auxquels est applicable le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée prévu par les dispositions précitées du b bis) de l'article 279 du code général des impôts, le vérificateur, après avoir dépouillé l'ensemble des pièces justificatives présentées par le gérant de la société, n'a remis en cause l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée qu'aux prix perçus des clients ayant opté pour une formule repas et spectacle et non, contrairement à ce que soutient la requérante sans apporter au soutien de cette allégation aucun élément de nature à en établir l'exactitude, aux prix perçus des clients ayant opté pour une formule spectacle seul et ce, à supposer que des clients auraient effectivement opté pour une telle formule, ce qui, en fait, ne résulte pas de l'instruction ; que la société requérante n'est donc, en tout état de cause, pas fondée à prétendre que la base des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle conteste inclurait des recettes perçues sur des clients ayant opté pour une formule spectacle seul ;

S'agissant du bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; qu'il appartient au juge d'apprécier, au vu du dossier qui lui est soumis par l'administration et le contribuable, si ce dernier est en droit de se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales relatives à la portée d'une instruction publiée ;

Considérant que, sur le fondement de ces dispositions, la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN se prévaut des énonciations d'une réponse ministérielle n° 21325 du 22 janvier 1972 à une question de M. Mollet, député, d'une instruction ministérielle 3 C-9-80 du 27 octobre 1980 ainsi que des paragraphes 7 et 8 de la documentation de base 3 C 226 du 31 août 1994, repris aux paragraphes 7 et 8 de la documentation de base 3 C 224 du 30 mars 2001 ; que, d'après ces énonciations, l'ensemble des recettes réalisées dans les établissements de spectacles de variétés dans lesquels sont servies des consommations est soumis au taux normal lorsque les spectateurs ont la possibilité de se faire servir des consommations pendant le déroulement des séances ; qu'en revanche, lorsque le paiement d'un prix est exigé à l'entrée en contrepartie du droit d'assister au spectacle de variétés, les recettes provenant de la perception de ce prix peuvent, le cas échéant, être imposées au taux réduit de la taxe si le service des consommations est totalement interrompu pendant toute la durée du spectacle et si le caractère non obligatoire des consommations servies avant ou après le spectacle est établi, en droit comme en fait, de manière certaine ; qu'il en résulte, d'une part, que le service des consommations facultatif et hors séances (avant le spectacle, à l'entracte ou après le spectacle) ne fait pas perdre à l'organisateur qui présente des spectacles passibles du taux réduit le bénéfice de ce taux pour les droits d'entrée et, d'autre part, que, dans tous les autres cas (service de consommation facultatif pendant les séances ou service obligatoire de consommation en dehors ou pendant les séances), il y a déqualification du spectacle, ce qui a pour effet d'entraîner l'application du taux normal pour les spectacles admis à bénéficier du taux réduit, sous réserve des concerts donnés dans des établissements où il est servi facultativement des consommations pendant le spectacle ;

Considérant, d'une part, que, dès lors que la formule repas et spectacle inclut, outre le droit d'assister au spectacle, la fourniture d'un repas et de boissons l'accompagnant et qu'il ne résulte pas de l'instruction, pas davantage qu'il n'est allégué, que la société requérante aurait proposé, au cours des années couvertes par les rappels en litige, une formule de prix incluant le spectacle et la fourniture des éléments solides d'un repas à l'exclusion d'éléments liquides, le caractère non obligatoire des consommations servies avant ou après le spectacle ne peut être regardé comme établi de manière certaine ; d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que les séances de spectacle proposées par l'établissement de la société requérante comportent trois parties entrecoupées d'intermèdes, et non d'entractes, pendant lesquels l'animation, et ainsi la continuité, du spectacle, sont assurées par le gérant de l'établissement ; qu'à supposer même que, comme le soutient la société requérante sans l'établir, le service des consommations serait interrompu pendant les trois parties susmentionnées, au cours duquel les tables seraient desservies, en sorte qu'il serait interdit à la clientèle de consommer pendant lesdites trois parties, le même service est assuré pendant les intermèdes et ce, quelle que soit la formule, repas et spectacle ou spectacle seul , choisie par le client ; que, dès lors, le service des consommations n'est pas totalement interrompu pendant la durée du spectacle ; que, la société requérante ne remplissant aucune des deux conditions, cumulatives, auxquelles est subordonné le bénéfice de la doctrine administrative qu'elle invoque, le moyen tiré de cette doctrine ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; (...) ;

Considérant que, sur le fondement de ces dispositions, la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN se prévaut d'une lettre du directeur des services fiscaux de la Somme en date du 21 mai 2001 ; que cette lettre, qui comporte une prise de position formelle sur l'appréciation de la situation de fait de l'établissement de la société requérante au regard des dispositions précitées de l'article 279 du code général des impôts, autorise cette dernière à appliquer le taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée à compter du 1er mai 2001sur les recettes provenant du prix d'entrée acquitté par les clients ayant choisi une formule spectacle seul , sous réserve que les brochures, dépliants et affiches établis, diffusés ou apposés fassent clairement apparaître la possibilité, soit d'assister au spectacle seul moyennant un prix fixé à l'avance, c'est-à-dire de choisir une formule spectacle seul , soit de retenir la formule du tout compris (spectacle, repas, boisson) , c'est-à-dire une formule repas et spectacle ; que, toutefois et comme il a été dit, il résulte de l'instruction que les rappels de taxe en litige sont assis seulement sur des recettes perçues par des clients ayant choisi une formule repas et spectacle ; que, dès lors, la société requérante ne saurait utilement, au soutien de ses conclusions en décharge, se prévaloir des énonciations de cette lettre du 21 mai 2001 ;

En ce qui concerne les pénalités pour mauvaise foi :

S'agissant de la régularité de la procédure :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressée au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable ; qu'aux termes de l'article 3 de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'examen de la page 28 de la notification de redressements du 27 septembre 2004 qu'elle énonce que la mauvaise foi de la société est établie et qu'il sera fait application, sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, de la majoration de 40 % prévue par ce texte lorsque la mauvaise foi du contribuable est établie et ce, compte tenu de l'importance et de la nature des infractions, à savoir une minoration de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle chiffre, pour chacune des années qu'elle concerne, le montant de la taxe éludée, tant en chiffres bruts qu'en proportion de l'ensemble de la taxe sur la valeur ajoutée collectée exigible et fait état d'une répétition systématique de l'infraction sur toute la période vérifiée et depuis les deux dernières vérifications de comptabilité dont la société a fait l'objet ; qu'elle ajoute que la société a majoré la taxe déductible par comptabilisation de la taxe sur location de véhicule de tourisme alors qu'une telle taxe n'est pas déductible et que ce rappel avait déjà été notifié lors de la précédente vérification de comptabilité ; qu'elle énonce enfin que la société ne pouvait ignorer minorer ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'une telle motivation, qui, d'une part, ne présente pas un caractère général et stéréotypé dès lors qu'elle comporte des références à plusieurs éléments précis propres à la situation particulière de la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN et dont, d'autre part, la régularité ne s'apprécie pas au regard du bien-fondé des motifs qu'elle énonce, satisfait aux exigences de l'article L. 80 D précité ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ce dernier doit être écarté ;

S'agissant du bien-fondé des pénalités :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montants des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ;

Considérant que l'administration établit que la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN a systématiquement appliqué à tort le taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée pendant la totalité des périodes couvertes par les rappels de droits en litige, qui, au cours de la première de ces périodes, ont représenté entre 18,78 % et 23,58 % de la taxe exigible collectée au cours des trois exercices qu'elle couvre ; que des méconnaissances identiques de la loi fiscale avaient déjà été constatées à l'occasion de deux vérifications de comptabilité dont la société avait précédemment fait l'objet ; qu'en outre, elle établit qu'alors même que la lettre susmentionnée du directeur des services fiscaux du 21 mai 2001 n'autorisait clairement la société, à certaines conditions, à appliquer le taux réduit qu'aux seules sommes payées par les clients ayant choisi une formule spectacle seul , elle a persisté à l'appliquer systématiquement à celles payées par les clients ayant choisi une formule repas et spectacle ; qu'en outre, elle a indûment majoré la taxe déductible en déduisant une taxe non déductible afférente à la location d'un véhicule de tourisme, alors qu'une taxe déduite de même nature avait, pour la même raison, été rappelée à l'occasion d'une précédente vérification de comptabilité ; qu'au regard de tels éléments, l'administration établit une volonté délibérée d'éluder l'impôt et, dès lors, la mauvaise foi, au sens de l'article 1729 précité, de la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN, qui ne saurait utilement se prévaloir d'erreurs commises par son comptable ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1729 du code général des impôts doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions, déjà citées, de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales - dans leur rédaction seule applicable en l'espèce, où les pénalités de mauvaise foi en litige ont été mises en recouvrement avant l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 47 de la loi de finances rectificative n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, qui ne sont pas rétroactives - et en particulier de la référence qu'elle comporte à un rehaussement d'impositions , que le droit qu'elles reconnaissent au contribuable de se prévaloir à l'encontre de l'administration de l'interprétation donnée par celle-ci d'un texte fiscal a pour seul objet de lui permettre de contester le bien-fondé d'une imposition à l'établissement de laquelle l'administration a procédé en faisant usage de ses pouvoirs de contrôle et de reprise et ne peut, en revanche, fonder une contestation du bien-fondé propre des pénalités dont a été assortie cette imposition ; qu'il en résulte que la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN ne peut utilement se prévaloir, au soutien de sa contestation des pénalités de mauvaise foi qui lui ont été infligées, des énonciations des instructions 13 L-1-80 publiée au bulletin officiel des impôts du 6 février 1980 ou 13 N-1-07 publiée au bulletin officiel des impôts du 19 février 2007, relative à l'aménagement du régime des pénalités fiscales ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN sur leur fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL MONIQUE ET CHRISTIAN et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°09DA00482 8


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 09DA00482
Date de la décision : 04/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS SEJEF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-03-04;09da00482 ?
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