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04/03/2010 | FRANCE | N°09DA01270

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (ter), 04 mars 2010, 09DA01270


Vu la requête, enregistrée le 24 août 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mlle Soraya A, demeurant ..., par Me Dubois, avocat ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902966 du 16 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du 30 mars 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2009 ;

3°) d'ordonner la saisin

e de la commission du titre de séjour ;

4°) de mettre les dépens de l'instance à la ...

Vu la requête, enregistrée le 24 août 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mlle Soraya A, demeurant ..., par Me Dubois, avocat ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902966 du 16 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du 30 mars 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2009 ;

3°) d'ordonner la saisine de la commission du titre de séjour ;

4°) de mettre les dépens de l'instance à la charge de l'Etat ;

Elle soutient qu'il n'est pas justifié de la compétence du signataire de l'arrêté attaqué ; que la commission du titre de séjour devait être saisie ; que le préfet a méconnu l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que sa décision emporte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que l'arrêté attaqué est dépourvu de motivation pertinente et de bien-fondé ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2009, présenté par le préfet du Nord, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que l'arrêté attaqué a été signé par une autorité compétente à cet effet ; qu'il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ; qu'il n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation et n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 16 octobre 2009, présenté pour Mlle A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu, enregistrées les 15 octobre 2009, 16 octobre 2009 et 28 octobre 2009, les pièces complémentaires produites pour Mlle A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et, les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Dubois, avocat, pour Mlle A ;

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 3 novembre 2008, qui présente un caractère réglementaire et a été publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord, le préfet du Nord a donné délégation à M. B, sous-préfet chargé de mission auprès du préfet du Nord, secrétaire général adjoint de cette préfecture et signataire de l'arrêté du 30 mars 2009 dont Mlle A demande l'annulation, à l'effet de signer, notamment, un arrêté d'une telle nature ; que le moyen tiré de l'incompétence de ce signataire ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 30 mars 2009 comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit en constituant le fondement ; que le moyen tiré de son absence de motivation, d'ailleurs inopérant s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que Mlle A ne remplit pas les conditions lui permettant l'octroi d'un titre de séjour dont la délivrance de plein droit est prévue par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il en résulte que le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de prendre l'arrêté en litige ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que Mlle A, qui est née en 1968 en France, est de nationalité marocaine ; qu'après avoir vécu au Maroc entre 1971 et 2002, elle est entrée en France le 12 décembre 2002, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour délivré le 20 novembre 2002 à l'issue de la durée de validité duquel elle est demeurée sur le territoire français, sans toutefois solliciter la délivrance d'un titre de séjour avant le 4 janvier 2007, date à laquelle elle a demandé au préfet du Nord la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ; que, si elle fait état de démarches antérieures en vue de l'obtention d'un titre de séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait présenté une demande de titre de séjour avant le 4 janvier 2007, la réalité de telles démarches ne ressortant d'aucune de ces pièces ;

Considérant que la requérante a vécu au Maroc pendant plus de trente ans et qu'elle y dispose d'importantes attaches familiales, dont ses deux parents, un frère et cinq soeurs ; que, si ses parents sont titulaires de cartes de résident portant la mention retraité , ils résident habituellement au Maroc et ce, conformément aux dispositions de l'article L. 317-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la requérante ayant elle-même indiqué, dans sa demande, qu'ils résident dans ce pays ; que, si Mlle A soutient qu'elle ne peut escompter de soutien de la part des membres de sa famille vivant dans le pays dont elle a la nationalité, elle est célibataire, n'a personne à charge et n'établit pas qu'au regard de son âge à la date de l'arrêté attaqué, elle serait dans l'incapacité d'assurer elle-même ses propres destinées dans ce pays où, à l'âge adulte, elle a vécu pendant de nombreuses années, où, d'après ses allégations, elle a bénéficié d'une formation littéraire supérieure et où, d'après les énonciations de son passeport, elle exerçait une profession ; que la requérante s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français entre le 11 janvier 2003, lendemain de l'expiration de la durée de validité du visa de court séjour susmentionné, et le début de l'année 2007 ; que, si elle allègue n'avoir plus de liens avec le Maroc, elle a toutefois fait proroger la durée de validité de son passeport marocain le 19 octobre 2005 par l'autorité consulaire marocaine en France et dispose au Maroc des attaches familiales susmentionnées ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble de ces éléments comme des conditions du séjour de Mlle A en France, et alors même que deux de ses frères et une de ses soeurs, outre des personnes qu'elle présente comme étant des cousins et cousines, résident en France et qu'elle a bénévolement prêté son concours à diverses associations dont l'une se propose de la salarier - les pièces produites en ce sens étant toutefois postérieures tant à l'arrêté du 30 mars 2009 qu'à la décision des premiers juges -, le préfet du Nord, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts dans lesquels ces décisions ont été prises ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui précise les cas dans lesquels les étrangers présents sur le territoire national ont droit à la délivrance d'un titre de séjour, ne fait pas obligation au préfet de refuser un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit sauf lorsque les textes l'interdisent expressément ; que, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est ainsi confié, il appartient au préfet d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé et des conditions non remplies, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

Considérant que Mlle A ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ; que le préfet du Nord n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne la faisant pas bénéficier à titre gracieux d'une mesure de régularisation ;

Considérant, enfin, que le préfet du Nord, en décidant d'assortir la décision rejetant la demande de titre de séjour présentée par Mlle A d'une obligation de quitter le territoire français n'a pas, eu égard à l'ensemble des éléments ci-dessus rappelés caractérisant la situation personnelle de l'intéressée, commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une telle obligation sur cette situation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet du Nord de saisir la commission du titre de séjour ne peuvent, dès lors, être accueillies ;

Sur les dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens ;

Considérant que la requérante ne justifie pas avoir exposé dans la présente instance de quelconques dépens ; que ces derniers ne sauraient, dès lors, être mis à la charge de l'Etat qui, d'ailleurs, n'est pas la partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mlle A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Soraya A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera délivrée au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 09DA01270
Date de la décision : 04/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : DUBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-03-04;09da01270 ?
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