La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/03/2010 | FRANCE | N°09DA01668

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 04 mars 2010, 09DA01668


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 1er décembre 2009 et régularisée par la production de l'original le 3 décembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Benabdallah A, demeurant ..., par le cabinet Lequien, Lachal ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904573 du 22 octobre 2009 du Tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2009 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation

de quitter le territoire dans un délai d'un mois et a fixé le pays dont il ...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 1er décembre 2009 et régularisée par la production de l'original le 3 décembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Benabdallah A, demeurant ..., par le cabinet Lequien, Lachal ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904573 du 22 octobre 2009 du Tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2009 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire dans un délai d'un mois et a fixé le pays dont il a la nationalité comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, d'enjoindre audit préfet, dans les mêmes conditions, de procéder à un nouvel examen de sa situation ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- s'agissant de la décision de refus de séjour, que la délégation de signature consentie à M. B, signataire de ladite décision, fait référence exclusivement à sa qualité de secrétaire général adjoint ; que le titre de secrétaire général adjoint n'est pas réglementé par le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ; que si M. B a compétence de principe pour signer toute décision relevant des attributions de la direction de la réglementation et des libertés publiques, il n'a cependant compétence pour signer un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français que pendant les jours non ouvrables, dans le cadre de la permanence préfectorale ; qu'il remplissait l'ensemble des conditions pour se voir délivrer de plein droit un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale et que le préfet du Nord était donc tenu de saisir la commission du titre de séjour ; que la procédure est ainsi irrégulière ; que la décision de refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6-4° de l'accord franco-algérien ; qu'il est le père d'un enfant né sur le territoire français et qui y réside ; qu'il justifie de la prise en charge médicale de son fils en France ; que le centre de ses attaches privées et familiales se situe en France ; que le refus de séjour qui lui a été opposé porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation ;

- s'agissant de la décision d'obligation de quitter le territoire français, que le signataire de cette décision ne justifie pas de sa compétence ; que celle-ci est entachée d'illégalité, le refus de séjour étant lui-même illégal ; que le préfet du Nord a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ; que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- s'agissant de la décision fixant le pays de destination, que le signataire de cette décision ne justifie pas de sa compétence ; que ladite décision est entachée d'illégalité, la décision d'obligation de quitter le territoire français étant elle-même illégale ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2009, présenté par le préfet du Nord ; le préfet conclut au rejet de la requête ; il fait valoir :

- que l'arrêté du 15 juin 2009 en litige a été signé par une autorité compétente ; que M. Guillaume B, secrétaire général adjoint de la préfecture, bénéficiait d'une délégation de signature, par un arrêté du 3 novembre 2008 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord de la même date, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de la direction de la réglementation et des libertés publiques et de l'administration générale ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'article 3 de l'arrêté de délégation de signature précité n'a pas un caractère restrictif mais précise l'organisation du fonctionnement de la préfecture du Nord le week-end et les jours fériés ; que l'arrêté en litige a été signé un jour ouvrable ; que M. A ne remplit aucune des conditions de délivrance d'un certificat de résidence algérien ; que, par suite, il n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour de la demande de l'intéressé ;

- que M. A ne remplit pas les conditions de délivrance d'un certificat de résidence algérien en qualité de parent d'enfant français au regard des stipulations de l'article 6-4° de l'accord franco-algérien ; que si l'intéressé justifie être le père de l'enfant mineur Daho-Ali de nationalité française, il n'établit pas la présence effective de son fils sur le territoire français ; que cet enfant réside habituellement en Algérie ainsi que cela ressort notamment des cachets apposés sur son carnet de santé et d'une attestation de non paiement émanant de la Caisse d'allocations familiales de Lille indiquant que M. A n'a jamais perçu de prestations pour son enfant ; que l'intéressé, marié avec une compatriote, est dépourvu d'attaches familiales proches en France et n'est pas isolé en Algérie où réside sa cellule familiale constituée de son épouse et de ses six enfants ; que le centre de ses intérêts se situe dans son pays d'origine ; que M. A ne remplit pas les conditions de délivrance d'un certificat de résidence algérien au regard des stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien ; qu'il n'entre dans aucun autre cas d'attribution en application des dispositions dudit accord ; qu'il n'a commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de M. A ; que ladite décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que le signataire de la décision d'obligation de quitter le territoire français justifie de sa compétence ; que l'intéressé ne justifie pas se trouver dans l'un des cas dans lesquels il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le refus de séjour opposé à M. A n'est entaché d'aucune illégalité ; que, par suite, l'intéressé n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'encontre de la mesure d'obligation de quitter le territoire ; qu'il n'a commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de M. A ; que ladite décision ne méconnaît également pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que le signataire de la décision fixant le pays de destination justifie de sa compétence ; que le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachés d'illégalité, la décision fixant le pays de destination ne l'est pas davantage ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 28 décembre 2009 et régularisé par la production de l'original le 30 décembre 2009, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et, les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Lachal, pour M. A ;

Considérant que la requête de M. A, de nationalité algérienne, est dirigée contre un jugement du 22 octobre 2009 du Tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2009 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire dans un délai d'un mois et a fixé le pays dont il a la nationalité comme pays de destination ;

Sur la légalité du refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 3 novembre 2008, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet du Nord a donné délégation à M. Guillaume B, secrétaire général adjoint de la préfecture du Nord, à l'effet de signer (...) tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de la direction de la réglementation et des libertés publiques (...) ; que cette délégation partielle des attributions du préfet est régulière et lui donnait compétence pour signer l'arrêté attaqué ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 4° Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ;

Considérant que si M. A est père d'un enfant de nationalité française né à Lille le 13 novembre 2008, il n'établit toutefois pas la présence effective de son fils sur le territoire français ; qu'il ressort, en effet, des pièces du dossier que celui-ci vit en Algérie avec sa mère et ses cinq frères et soeurs ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour en litige méconnaît les stipulations de l'article 6-4° de l'accord franco-algérien précité ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A est entré en France le 19 mars 2009, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa Etats Schengen valable 90 jours, portant la mention voyage d'affaires ; que si M. A soutient que le centre de ses attaches privées et familiales se situe en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé est entré en France à l'âge de 49 ans après avoir toujours vécu dans son pays d'origine où il a conservé des attaches familiales fortes dans la mesure où son épouse et ses six enfants y résident ; que, dans ces conditions, eu égard au caractère récent de l'entrée en France de M. A, à la durée et aux conditions de séjour en France de l'intéressé, il n'est pas établi que la décision de refus de séjour du préfet du Nord a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) ; qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le préfet du Nord n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de saisir la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ; que, par suite, le moyen de M. A tiré du vice de procédure doit être écarté ;

Sur la légalité de la mesure d'obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux indiqués précédemment, le signataire de la décision d'obligation de quitter le territoire français justifie de sa compétence ;

Considérant, en deuxième lieu, que, comme cela a été dit précédemment, le refus de séjour opposé à M. A par le préfet du Nord n'est entaché d'aucune illégalité ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'encontre de la mesure d'obligation de quitter le territoire ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, la décision d'obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux indiqués précédemment, le signataire de la décision fixant le pays de destination justifie de sa compétence ;

Considérant, en second lieu, que le refus de séjour assorti d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français opposé à M. A par le préfet du Nord n'est entaché d'aucune illégalité ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2009 du préfet du Nord ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions de M. A à fin d'injonction assorties d'astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Benabdallah A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

''

''

''

''

N°09DA01668 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA01668
Date de la décision : 04/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Marianne (AC) Terrasse
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : LEQUIEN - LACHAL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-03-04;09da01668 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award