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18/03/2010 | FRANCE | N°08DA01146

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 18 mars 2010, 08DA01146


Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Philippe A, demeurant ..., par Me Farcy, avocat ; ils demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402807 du 27 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1995 et 1996 ;

2°) de prononcer la décharge

demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 4 000 euros en a...

Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Philippe A, demeurant ..., par Me Farcy, avocat ; ils demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402807 du 27 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1995 et 1996 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que les notifications de redressement ne détaillent pas les crédits inexpliqués et sont ainsi insuffisamment motivées ; que les montants restant inexpliqués, tels qu'indiqués dans les mises en demeure du 8 octobre 1998, ne correspondent pas avec ceux contenus dans les notifications de redressements ;

- que l'administration a, par un avis d'imposition du 19 octobre 2000, exonéré les salaires de M. A au titre de l'année 1997 ; qu'ils sont ainsi fondés à invoquer l'application des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

- qu'ils ont fourni un certain nombre de documents permettant d'établir avec certitude l'origine et la nature des sommes en litige ; que la production des documents bancaires atteste de l'origine des crédits litigieux qui ne peuvent correspondre qu'aux salaires, remboursements de frais de déplacement et indemnité d'expatriation revenant à M. A ;

- que les traitements et salaires qui lui ont été versés doivent être exonérés en application des dispositions de l'article 81 A II du code général des impôts ; que les termes du contrat de travail sont suffisamment explicites quant au lien de subordination vis-à-vis de l'employeur ; que la condition de durée de plus de 183 jours est remplie ; que les fonctions décrites dans son contrat de travail correspondent à la définition de l'activité exercée dans des chantiers de construction ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir :

- que les notifications de redressements se réfèrent expressément aux mises en demeure correspondantes qui comportent toutes informations utiles permettant de rapprocher les montants en litige des crédits injustifiés ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

- que la garantie visée à l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ne peut être invoquée dès lors que les impositions en litige concernent les années 1995 et 1996 et sont intervenues après l'émission de la copie de l'avis d'absence d'imposition de l'année 1997 ; qu'en outre, les requérants ne justifient ni l'existence, ni le contenu de cette interprétation ; qu'enfin, une décision de dégrèvement non motivée ne constitue pas une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

- que les requérants supportent la charge de la preuve puisque les impositions litigieuses ont été établies d'office ;

- que les justificatifs fournis ne permettent pas de déterminer la nature et l'origine des crédits bancaires litigieux ;

- qu'à titre subsidiaire, il entend faire valoir que les montants perçus ne peuvent être regardés comme des salaires ; que le contrat de travail versé au dossier n'est pas un justificatif suffisamment probant en l'absence de date certaine ; que les sommes en cause s'analyseraient alors comme des revenus générés par une activité non déclarée imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; que la durée d'activité à l'étranger de plus de 183 jours n'est pas justifiée ; qu'il n'est pas établi que le requérant a été envoyé à l'étranger par un employeur établi en France ; que si la Cour considère que les explications apportées permettent de considérer que tout ou partie des sommes en litige ont été perçues dans le cadre d'une activité relevant des bénéfices non commerciaux, il lui est demandé de substituer à la base légale initialement retenue par le service, l'article 92 du code général des impôts ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 février 2009, présenté pour M. et Mme A ; ils soutiennent en outre :

- qu'ils ont effectivement obtenu un dégrèvement de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1997 ;

- que les dates de virement sur les relevés bancaires de la société Dalian Ftz International sont antérieures de 2 ou 3 jours aux dates d'encaissements sur le compte du requérant ; que les montants virés sont identiques à ceux encaissés par ce dernier ; qu'il y a une corrélation entre les sommes virées et celles encaissées par M. A ;

- que l'administration requalifie son contrat de travail en contrat d'entreprise alors qu'il n'y a jamais eu d'intention de conclure un tel contrat ; que les sommes perçues ne peuvent être considérées comme des bénéfices non commerciaux ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 février 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui n'apporte aucun élément nouveau à l'appui de ses conclusions de rejet de la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Corinne Baes Honoré, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Farcy, pour M. et Mme A ;

Considérant que M. Philippe A a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 1995 et 1996 ; que ce contrôle a concerné M. A sur la période du 1er janvier au 2 décembre 1995, date de son mariage, et les époux A sur la période du 2 décembre 1995 au 31 décembre 1996 ; que le service a mis en oeuvre la procédure de la taxation d'office à raison de crédits bancaires injustifiés ; que les intéressés demandent à la Cour d'annuler le jugement du 27 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1995 et 1996 ;

Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions :

S'agissant de la régularité de la procédure :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination ... ;

Considérant, d'une part, que s'il ressort de la notification de redressement du 4 décembre 1998, que l'administration fiscale s'est bornée à indiquer, pour chaque compte bancaire en cause, le montant global des crédits bancaires taxés d'office, soit les sommes de 30 000 francs (4 573,47 euros), 60 000 francs (9 146,94 euros), 68 881 francs (10 500,84 euros), 40 000 francs (6 097,96 euros) et 384 015 francs (58 542,71 euros), ladite notification se référait à la mise en demeure de justifier les crédits inexpliqués du 8 octobre 1998 qui détaillait les crédits bancaires en cause, à l'exception toutefois de la somme de 68 881 francs (10 500,84 euros) ; que toutefois, la notification de redressement précisait que ce dernier montant correspondait à la somme initialement injustifiée de 248 553 francs (37 891,66 euros) à laquelle le service avait retranché les montants justifiés portés sur le compte le 26 juillet 1995 pour des montants de 168 325 francs (25 660,98 euros) et 11 347 francs (1 729,84 euros) ; que le montant global de 248 553 francs (37 991,66 euros) était également détaillé dans la mise en demeure et permettait ainsi aux requérants de connaitre les remises de chèques devant être encore justifiées ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort de la notification de redressement du 19 mars 1999 adressée à M. et Mme A, que pour chaque compte bancaire en cause, était indiqué le montant global des crédits bancaires taxés d'office, soit les sommes de 181 665 francs (27 694,65 euros), 180 900 francs (27 578,03 euros) et 426 751 francs (65 057,77 euros) ; que ladite notification se référait cependant à la mise en demeure de justifier les crédits inexpliqués du 8 octobre 2008, qui donnait la liste détaillée des crédits bancaires en cause, à l'exception de la somme de 181 665 francs (27 694,65 euros) ; que la notification de redressement précisait cependant qu'elle correspondait à la somme initialement injustifiée de 208 665 francs (31 810,77 euros), à laquelle avait été retranchée la somme justifiée de 27 000 francs (4 116,12 euros), provenant du compte 09295992000 ; qu'il ressort de la mise en demeure que cette somme correspondait aux chèques émis le 28 mai et 19 juin 1996 ; que le montant global de 208 665 francs (31 810,77 euros) y était également détaillé et permettait aux requérants de connaitre les remises de chèques devant être justifiées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que le moyen tiré de ce que les notifications de redressements ne détaillaient pas les crédits bancaires en litige et auraient ainsi été insuffisamment motivées, doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que l'administration a taxé d'office, sur le fondement des dispositions des articles L. 16, L. 16 A et L. 69 du livre des procédures fiscales, des crédits bancaires demeurés injustifiés à l'issue de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. A ; qu'en application des dispositions des articles L. 192 et L. 193 du livre des procédures fiscales, il appartient à M. et Mme A, qui ne discutent pas la régularité de l'imposition d'office, d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration ;

Sur la qualification des crédits litigieux :

Considérant que les requérants soutiennent que M. A a travaillé en Chine et versent au dossier le contrat de travail à durée de chantier du 2 janvier 1995 passé avec la société TSCIN ainsi que des attestations de son gérant selon lesquelles M. A a effectivement été employé en Chine, moyennant le versement d'un salaire dont il précise le montant versé ; que si les requérants soutiennent que les crédits en litige correspondent à des salaires et remboursements de frais de déplacement, les documents bancaires établis au nom de la société Dalian Ftz Xinye International Trade and co, permettent d'établir la réalité d'un transfert provenant de ladite société, mais ne sont pas de nature à établir que les sommes en cause auraient dû être qualifiées de salaires et imposées dans cette catégorie ;

Sur l'application des dispositions de l'article 81A du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes du II de l'article 81A du code général des impôts : Les traitements et salaires perçus en rémunération de leur activité à l'étranger par des personnes de nationalité française autres que les travailleurs frontaliers, qui ont leur domicile fiscal en France et qui, envoyées à l'étranger par un employeur établi en France, justifient d'une activité à l'étranger d'une durée supérieure à 183 jours au cours d'une période de douze mois consécutifs, ne sont pas soumis à l'impôt. / Cette exonération n'est accordée que si les rémunérations considérées se rapportent aux activités suivantes à l'étranger : / a Chantiers de construction ou de montage, installation d'ensembles industriels, leur mise en route et leur exploitation, la prospection et l'ingénierie y afférents ... ; que les requérants ne peuvent utilement invoquer l'exonération prévue par les dispositions précitées, dès lors qu'il n'est pas établi, ainsi qu'il a été dit, que les crédits en cause correspondaient à des traitements et salaires ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ... ; qu'aux termes de l'article L. 80 A dudit livre : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration .... ;

Considérant qu'il ressort d'un avis d'imposition du 19 octobre 2000, que l'administration a exonéré d'impôt sur les revenus, les salaires perçus par M. A au titre de l'année 1997 ; que toutefois, cet avis d'imposition, non motivé, par lequel l'administration a accordé un dégrèvement, ne constituait pas une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait au regard du texte fiscal de nature à entraîner, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, l'octroi à M. et Mme A pour les années 1995 et 1996, du bénéfice de l'exonération prévue par l'article 81 A II du code général des impôts ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme A la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Philippe A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°08DA01146


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 08DA01146
Date de la décision : 18/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Corinne Baes Honoré
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SELARL GUY FARCY-OLIVIER HORRIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-03-18;08da01146 ?
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