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18/03/2010 | FRANCE | N°09DA00991

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 18 mars 2010, 09DA00991


Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Guy A, demeurant ..., par la SCP Croissant, de Limerville, Orts, Legru ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703216 du 7 avril 2009 du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2007 par lequel le préfet de l'Aisne a accordé à M. Benoît B l'autorisation d'exploiter une superficie de 12 hectares 30 ares de terres sur la commune d'Omissy ;

2°) d'annuler ledit arrêté du 7 nov

embre 2007 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros ...

Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Guy A, demeurant ..., par la SCP Croissant, de Limerville, Orts, Legru ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703216 du 7 avril 2009 du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2007 par lequel le préfet de l'Aisne a accordé à M. Benoît B l'autorisation d'exploiter une superficie de 12 hectares 30 ares de terres sur la commune d'Omissy ;

2°) d'annuler ledit arrêté du 7 novembre 2007 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que l'orientation principale du schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aisne applicable n'est pas de promouvoir l'installation de jeunes agriculteurs mais de maintenir le nombre actuel d'exploitants participant de façon effective et permanente aux travaux, et d'éviter le démembrement et la disparition d'exploitation d'une superficie au moins égale à 0,5 UR ; que c'est le cas de son exploitation qui est supérieure à 0,5 UR ; que malgré la reprise des terres envisagée, l'exploitation de M. B restera inférieure au seuil de 1,5 UR, qui est le seuil plancher d'optimisation foncière nécessaire, prévu par la troisième orientation du schéma directeur départemental des structures agricoles, et qu'ainsi la mise en valeur d'une si faible superficie n'est pas rationnelle économiquement ;

- que le préfet de l'Aisne a seulement considéré que la pluriactivité de M. B n'était pas, compte tenu de la superficie mise en valeur, incompatible avec une activité agricole ; qu'il n'a ainsi pas tenu compte des critères fixés par le schéma en ce qui concerne la création ou le maintien d'emplois, la création de valeur ajoutée, la démarche qualité et la protection de l'environnement dans la mesure où le projet de M. B concerne une exploitation inférieure au seuil de 1,5 UR ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqué ;

Vu l'ordonnance du 23 juillet 2009 fixant la clôture de l'instruction au 25 janvier 2010 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2009, présenté pour M. Benoît B, demeurant ..., par la SCP Prudhomme ; il conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir que les orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aisne ne sont pas hiérarchisées ; que le préfet de l'Aisne a procédé à une comparaison des situations ; qu'il pouvait se fonder sur l'une des orientations du schéma portant sur le non-démembrement de l'exploitation de M. A, preneur en place ; qu'en l'espèce, le taux de démembrement étant fixé à 10 % pour les exploitations inférieures à 3 UR, le projet de reprise est compatible dans la mesure où il ne représente que 8,4 % de la surface mise en valeur par M. A ; que l'article 1er du schéma précise qu'il convient de promouvoir l'installation des jeunes agriculteurs de façon à maintenir le nombre actuel d'exploitants participant de façon effective et permanente aux travaux ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 20 janvier 2010 et régularisé par la production de l'original le 25 janvier 2010, présenté par le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche; il conclut au rejet de la requête ; il fait valoir :

- que le préfet n'est pas tenu de se référer à l'ensemble des orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles dès lors que celles qu'il a retenues sont fondées en fait et en droit et que les dispositions du code rural ne prescrivent pas d'établir une hiérarchie entre les orientations définies par ce schéma ; qu'il est constant qu'en l'espèce, si le schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Aisne a notamment comme objectif de conforter par des agrandissements l'exploitation à responsabilité personnelle afin de constituer des exploitations d'une superficie comprise entre 1,5 et 3 UR, il a également comme autre objectif d'éviter le démembrement au-delà de 10 % pour les exploitations inférieures à 3 UR ; que l'opération envisagée par M. B répondait à cette dernière orientation du schéma ; que les dispositions du schéma directeur départemental des structures agricoles n'interdisent pas les reprises de terres dans l'hypothèse où l'exploitation du preneur serait inférieure au seuil de 1,5 UR, considéré comme un seuil plancher d'optimisation foncière nécessaire ; que par ailleurs, si le seuil de 3 UR est considéré comme un seuil plafond au-delà duquel l'agrandissement foncier n'est plus la seule voie de développement économique de l'exploitation agricole, il n'implique pas une interdiction des agrandissements au-delà de ce seuil ; qu'après reprise, la superficie de l'exploitation du preneur en place est de 133 hectares 82 ares, soit 1,34 UR et ne porte pas atteinte à l'autonomie et à la viabilité de son exploitation ;

- que le préfet de l'Aisne a examiné la situation de M. B et de M. A dans leur ensemble ; qu'il n'a pas fait une appréciation erronée de ces situations en accordant à M. B l'autorisation d'exploiter les terres en litige, ni méconnu les orientations du schéma en favorisant l'installation d'un jeune agriculteur pluriactif ;

Vu l'ordonnance du 25 janvier 2010 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Prudhomme, avocat, pour M. B ;

Considérant que, par un arrêté du 7 novembre 2007, le préfet de l'Aisne a accordé à M. Benoît B l' autorisation d'exploiter une superficie de 12 hectares 30 ares de terres sur le territoire de la commune d'Omissy, précédemment mise en valeur par M. Guy A ; que M. A relève appel du jugement du 7 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté du 7 novembre 2007 du préfet de l'Aisne ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural : L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de sa demande ; 2° S'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, que toutes les possibilités d'installation sur une exploitation viable ont été considérées ; 3° Prendre en compte les références de production ou droits à aide dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment, en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 ; 6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés et salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées ; 7° Prendre en compte la structure parcellaire des exploitations concernées, soit par rapport au siège de l'exploitation, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements réalisés à l'aide de fonds publics ; 8° Prendre en compte la poursuite d'une activité agricole bénéficiant de la certification du mode de production biologique ; 9° Tenir compte de l'intérêt environnemental de l'opération. L'autorisation peut n'être délivrée que pour une partie de la demande, notamment si certaines des parcelles sur lesquelles elle porte font l'objet d'autres candidatures prioritaires (...) ;

Considérant, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 331-3 du code rural que le préfet est tenu de se prononcer sur une demande d'autorisation présentée au titre du contrôle des structures au regard des critères fixés par l'article L. 331-3 du code rural et en se conformant aux orientations fixées par le schéma directeur départemental des structures ; que, contrairement à ce que soutient M. A, ces orientations ne sont pas hiérarchisées ; que par suite, le préfet de l'Aisne a pu légalement, pour accorder l'autorisation d'exploiter demandée par M. B, se fonder sur ce que la reprise envisagée par l'intéressé n'était pas contraire à l'une des orientations du schéma directeur applicable dans le département visant à éviter les démembrements successifs d'exploitations agricoles au-delà de 10 % pour les exploitations inférieures à 3 UR en privilégiant une autre orientation visant à promouvoir l'installation de jeunes agriculteurs, y compris ceux issus d'autres catégories sociales ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la reprise permet de conforter l'installation de M. B en qualité de jeune agriculteur et ne représente que 8,4 % de la superficie mise en valeur par M. A, preneur en place, soit un pourcentage inférieur au seuil de démembrement fixé à 10 % par ledit schéma ; que la circonstance que l'autorisation accordée méconnaît l'une des orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles ne suffit pas à la rendre illégale dans la mesure où elle répond à une autre orientation du même schéma ; que par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que, malgré la reprise des terres envisagée, l'exploitation de M. B restera inférieure au seuil de 1,5 UR, seuil plancher d'optimisation foncière nécessaire, ainsi que le prévoit la troisième orientation du schéma directeur départemental des structures agricoles et qu'ainsi, la mise en valeur d'une si faible superficie n'est pas rationnelle économiquement ;

Considérant, en second lieu, que si M. A soutient que le préfet de l'Aisne a seulement considéré que la pluriactivité de M. B n'était pas, compte tenu de la superficie mise en valeur, incompatible avec une activité agricole et qu'il n'a ainsi pas tenu compte des critères fixés par le schéma en ce qui concerne la création ou le maintien d'emplois, la création de valeur ajoutée, la démarche qualité et la protection de l'environnement, il ressort toutefois des pièces du dossier, et en particulier de l'extrait du procès-verbal de la commission départementale d'orientation de l'agriculture du 19 octobre 2007, que le préfet de l'Aisne a examiné la situation de M. B au regard des critères fixés par le code rural et des orientations fixées par le schéma dans son ensemble et non en se fondant sur la seule circonstance que l'intéressé est pluriactif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2007 du préfet de l'Aisne ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. A d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de M. A, qui est la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. B d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à M. B une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guy A, au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche et à M. Benoît B.

Copie sera transmise au préfet de l'Aisne.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA00991
Date de la décision : 18/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Marianne (AC) Terrasse
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SCP CROISSANT-DE LIMERVILLE-ORTS-LEGRU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-03-18;09da00991 ?
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