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29/04/2010 | FRANCE | N°09DA00532

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 29 avril 2010, 09DA00532


Vu la requête, enregistrée le 1er avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Georges A, demeurant ..., par Me Demailly, avocat ; ils demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0701407-0800295 du 22 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes tendant à la décharge des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de

7 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de just...

Vu la requête, enregistrée le 1er avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Georges A, demeurant ..., par Me Demailly, avocat ; ils demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0701407-0800295 du 22 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes tendant à la décharge des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que la Cour de justice des communautés européennes a jugé que la France n'était pas en droit d'appliquer la CSG et la CRDS aux revenus d'activité et de remplacement des travailleurs salariés et indépendants qui résident en France mais travaillent dans un autre Etat membre et ne sont pas soumis à la législation française de sécurité sociale ; que les prélèvements en litige n'ont pas le caractère d'impositions diverses mais bien celui de cotisations de sécurité sociale ;

- qu'une ordonnance du 2 mai 2001 a prévu que l'assujettissement à la CSG et à la CRDS était soumis à un double critère ; qu'ils ne répondent pas à la seconde condition posée par cette ordonnance ; qu'ils ne dépendent d'aucun régime de sécurité sociale ; que l'organisation de la sécurité sociale est fondée sur le principe de la solidarité nationale ;

- que la pratique française, qui crée une discrimination, est contraire à toutes les conventions internationales sur les droits de l'homme ratifiées par la France ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir :

- que la requête concernant les impositions contestées au titre de l'année 2005 a été présentée tardivement devant le tribunal administratif ; qu'elle est ainsi irrecevable ;

- que la question de savoir si les contributions constituent un impôt ou une cotisation est indépendante de l'éventuelle existence d'une violation des dispositions nationales et communautaires ;

- que les requérants ne peuvent utilement invoquer l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale dès lors que les cotisations ont été établies au titre des revenus fonciers et des revenus de capitaux mobiliers relevant des dispositions de l'article L. 136-6 du code ; que les moyens invoqués sont inopérants ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de sécurité sociale ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Corinne Baes Honoré, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. et Mme Georges A relèvent appel du jugement du 22 janvier 2009, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis, sur leurs revenus fonciers et revenus de capitaux mobiliers, au titre des années 2005 et 2006 ;

Sur les conclusions tendant à la décharge de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale au titre de l'année 2005 :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales : L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur la réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10 ... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, nouvelles en appel, que la décision en date du 16 mars 2007, par laquelle le directeur des services fiscaux de l'Oise a rejeté la réclamation présentée par M. et Mme A portant sur les contributions sociales au titre de l'année 2005, a été reçue par les intéressés le 27 mars 2007 ; que le délai de deux mois dont disposaient les contribuables pour saisir le tribunal administratif expirait donc le 28 mai 2007 à minuit ; qu'ainsi, la demande de M. et Mme A enregistrée au greffe du Tribunal le 30 janvier 2008 était tardive ; que, dès lors le ministre est fondé à soutenir que les conclusions tendant à la décharge des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à la décharge de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale au titre de l'année 2006 :

S'agissant de la contribution sociale généralisée :

Considérant qu'aux termes de l'article 1600-0 C du code général des impôts : La contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine est établie, contrôlée et recouvrée conformément aux dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ; qu'aux termes de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale : I. - Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, ... : a) Des revenus fonciers ; ... c) Des revenus de capitaux mobiliers ... ;

Considérant, en premier lieu, que l'obligation faite par la loi d'acquitter ces contributions est dépourvue de tout lien avec l'ouverture d'un droit à une prestation ou un avantage servi par un régime obligatoire de sécurité sociale ; qu'ainsi, alors même que, comme le font valoir les requérants, la Cour de justice des communautés européennes a jugé que ces mêmes prélèvements, en tant qu'ils frappaient des salaires et avaient pour objet de financer des régimes de sécurité sociale, entraient dans le champ d'application des règlements communautaires, notamment du règlement 1408/71 régissant le droit d'assujettir les travailleurs frontaliers à des cotisations sociales, ces prélèvements ont le caractère d'impositions de toute nature et non celui de cotisations de sécurité sociale, au sens des dispositions constitutionnelles et législatives nationales ainsi que de la jurisprudence du Conseil constitutionnel ; que les dispositions précitées de l'article 1600-0 C renvoient aux dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, qui précisent que toutes les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B sont assujetties à ces impositions, sans définir de condition liée à l'existence d'une prise en charge de ces personnes à un régime général de sécurité sociale obligatoire en France ; que par suite, les moyens tirés de ce que M. et Mme A sont assujettis à ces contributions alors qu'ils ne dépendent d'aucun régime de sécurité sociale et ne bénéficient pas des régimes résultant de la législation française de la sécurité sociale sont inopérants à l'appui de leur demande de décharge des impositions en cause ; qu'est également inopérant la circonstance que l'organisation de la sécurité sociale est fondée sur le principe de solidarité nationale ;

Considérant, en second lieu, que les moyens tirés de ce que l'application des impositions en cause serait discriminatoire et contraire à toutes les conventions internationales sur les droits de l'homme ratifiées par la France, ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant à la Cour d'apprécier la portée des moyens ;

S'agissant de la contribution au remboursement de la dette sociale :

Considérant qu'aux termes de l'article 1600-0 G du code général des impôts : I. Les personnes physiques désignées à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale sont assujetties à une contribution perçue à compter de 1996 et assise sur les revenus du patrimoine définis au I de l'article L. 136-6 du même code. / Cette contribution est établie chaque année ... . Elle est établie, recouvrée et contrôlée dans les conditions et selon les modalités prévues au III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, à l'exception du troisième alinéa ; qu'aux termes de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale : Il est institué une contribution sociale sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement à laquelle sont assujettis : 1° Les personnes physiques qui sont à la fois considérées comme domiciliées en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie ... ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article 1600-0 G du code général des impôts, reprenant en cela celles de l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 instaurant la contribution pour le remboursement de la dette sociale, renvoient expressément, et sans aucune restriction, aux dispositions de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale quant aux personnes physiques assujetties à cette contribution ; que ces dispositions de l'article L. 136-1 trouvent à s'appliquer dans leur rédaction en vigueur aux années en litige alors même que cet article a institué une contribution sociale généralisée sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement ; qu'il s'ensuit que seuls peuvent être assujetties à la contribution pour le remboursement de la dette sociale assise sur les revenus du patrimoine, les personnes qui remplissent les conditions précitées de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, à savoir celles qui sont à la fois considérées comme domiciliées en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie ;

Considérant que s'il est constant que les requérants étaient domiciliés en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, M. et Mme A soutiennent sans être contestés qu'ils n'étaient pas à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie ; que par suite, M. et Mme A ne remplissaient pas l'une des deux conditions pour être assujettis à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les revenus fonciers et revenus de capitaux mobiliers perçus au cours de l'année 2006 ; que dans ces conditions, M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande en tant qu'elle tendait à la décharge des contributions pour le remboursement de la dette sociale au titre de l'année 2006 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme A sont déchargés de la contribution au remboursement de la dette sociale à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2006 sur les revenus de capitaux mobiliers et fonciers.

Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme A la somme de 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

Article 3 : Le jugement nos 0701407-0800295 du 22 janvier 2009 du Tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Georges A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°09DA00532


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA00532
Date de la décision : 29/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Corinne Baes Honoré
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : DUCELLIER AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-04-29;09da00532 ?
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