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12/05/2010 | FRANCE | N°09DA01602

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 12 mai 2010, 09DA01602


Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Nedzad A, demeurant ..., par Me Laporte, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903738 du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 janvier 2009 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

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) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer...

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Nedzad A, demeurant ..., par Me Laporte, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903738 du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 janvier 2009 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai qu'il plaira à la Cour d'impartir à l'administration ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la délégation donnée à M. B, signataire de l'arrêté attaqué, est irrégulière dans la mesure où seule une disposition législative aurait pu permettre au préfet de déléguer sa signature ; que, s'agissant de la décision portant refus de séjour, le préfet ne s'est pas livré à un examen approfondi de sa situation personnelle car il n'a pas mentionné son appartenance à la communauté Rom, qui est l'objet de discriminations dans l'ex-Yougoslavie, et n'a pas pris en compte les pays d'origine différents des époux ; que la famille est entrée en France en 2002 fuyant les persécutions en Bosnie où il n'a plus de lien, sa mère et ses deux soeurs se trouvant sur le territoire français ; que ses enfants sont scolarisés et bien intégrés et n'auraient pas accès à l'éducation dans leur pays d'origine ; que les Roms ne peuvent pas mener une vie familiale normale en Bosnie ; que la décision est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la situation des Roms justifie une admission au séjour sur le fondement humanitaire ; que M. A ne peut séjourner en Serbie cependant que son épouse n'a pas de droit au séjour en Bosnie ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 janvier 2010, présenté par le préfet du Nord, qui conclut au rejet de la requête en faisant valoir que la délégation donnée à M. B est régulière, le décret relatif aux pouvoirs des préfets les autorisant à déléguer leur signature à tout fonctionnaire sous leurs ordres ; que les époux A ne peuvent se prévaloir d'une résidence habituelle en France car, entrés en 2002, ils sont repartis en Bosnie en 2004 selon leur propres dires, et revenus en France seulement en 2008 ; que Madame a ses parents et son frère dans son pays d'origine et que, si Monsieur invoque la présence de sa mère et de ses soeurs en France, celles-ci sont en situation irrégulière et cette seule circonstance, en tout état de cause, ne saurait justifier la présence de l'intéressé en France ; que la scolarisation des enfants en France ne s'oppose pas à ce que la cellule familiale se reconstitue dans le pays d'origine ; que les époux A ont vécu près de trente ans en Bosnie, pays dont Madame a déclaré à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à la Cour nationale du droit d'asile avoir la nationalité ; qu'aucune pièce ne permet de regarder comme établies les craintes invoquées en cas de retour en Bosnie-Herzégovine ; que les époux n'ont pas demandé la délivrance de cartes de séjour à titre humanitaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et les départements ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, ressortissant de Bosnie-Herzégovine, est entré une première fois en France avec son épouse et ses enfants en 2002 pour solliciter la reconnaissance du statut de réfugié qui leur a été refusé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision en date du 12 décembre 2002, confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 24 janvier 2005 ; que les époux A ont déclaré être repartis en Bosnie-Herzégovine en 2004 ; qu'ils sont revenus en France en 2008 et ont alors demandé la délivrance d'un titre de séjour mention vie privée et familiale ; que M. A relève appel du jugement n° 0903738 du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 janvier 2009 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions d'annulation :

Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 3 novembre 2008 publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord, le préfet du Nord a donné délégation à M. B, sous-préfet, secrétaire général adjoint, à l'effet de signer (...) tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de la direction de la réglementation et des libertés publiques (...) en application des dispositions du décret susvisé du 29 avril 2004 ; que, d'une part, les dispositions contenues dans ce décret ne sont pas au nombre de celles dont la Constitution réserve l'édiction au législateur et, d'autre part, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile donnant compétence au préfet pour délivrer les titres de séjour et prendre des mesures d'éloignement sont de nature réglementaire ; que, par suite, l'appelant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité dudit décret, en soutenant que la délégation de signature aurait dû résulter d'un texte de valeur législative ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. A soutient que l'absence de visa de son appartenance à la communauté Rom et de la différence de nationalité des époux révèle que l'arrêté attaqué a été pris sans que leur situation ait fait l'objet d'un examen approfondi ; que, toutefois, il ressort des termes mêmes dudit arrêté que la situation des deux conjoints et son évolution ont été examinées depuis leur première entrée en France en 2002 ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'examen insuffisant de la situation particulière de l'intéressé doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les époux A ont vécu jusqu'à l'âge de 29 ans pour l'époux et de 30 ans pour l'épouse sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, et plus particulièrement en République de Serbie, où sont nés au moins quatre de leurs sept enfants dont le dernier en 2006, et où résident les parents et le frère de Mme C ; qu'ils ne peuvent, par suite, soutenir que leur vie familiale normale ne pourrait se poursuivre qu'en France ; que si M. A invoque la présence en France de sa mère et de deux soeurs, cette seule circonstance, alors au surplus que toutes sont en situation irrégulière, n'est pas davantage de nature à démontrer que le préfet aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en France ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 40 de la loi susvisée du 20 novembre 2007 : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ; que si M. A soutient que son appartenance à la communauté Rom justifie que lui soit délivré un titre de séjour, sur le fondement de ces dispositions, pour motif humanitaire, en raison des discriminations dont cette communauté fait l'objet, il n'en a, en tout état de cause, jamais fait la demande ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet, qui n'était pas tenu de rechercher s'il pouvait se voir délivrer un titre de séjour sur un autre fondement que celui de sa demande, aurait violé les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné, sous astreinte, au préfet du Nord de délivrer à M. A un titre de séjour ou de réexaminer sa situation ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Nedzad A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

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N°09DA01602 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA01602
Date de la décision : 12/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Marianne Terrasse
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : LAPORTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-05-12;09da01602 ?
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