La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/05/2010 | FRANCE | N°08DA01634

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 20 mai 2010, 08DA01634


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 23 septembre 2008, présentée pour M. Camelle A, demeurant ..., par Me Griffon ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705009-0800746 du 4 juillet 2008 du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales du 8 janvier 2008 retirant deux points du capital affecté à son permis de conduire à la suite de l'infraction commise le 7 mai 2007, récapitu

lant les précédents retraits de points et l'informant de la perte de ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 23 septembre 2008, présentée pour M. Camelle A, demeurant ..., par Me Griffon ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705009-0800746 du 4 juillet 2008 du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales du 8 janvier 2008 retirant deux points du capital affecté à son permis de conduire à la suite de l'infraction commise le 7 mai 2007, récapitulant les précédents retraits de points et l'informant de la perte de validité de son titre de conduite pour solde de points nul, et des décisions ministérielles des 30 octobre 2006 et 5 juillet 2007 retirant respectivement un et trois points de son permis de conduire à la suite des infractions constatées les 4 février 2006 et 23 juin 2006 ;

2°) d'annuler les décisions attaquées ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réaffecter les points illégalement retirés de son permis de conduire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la réalité de l'infraction relevée le 4 février 2006 n'est pas établie ; qu'il a formé une réclamation invitant l'officier du ministère public à saisir le juge de proximité pour qu'il statue sur ladite réclamation ; que les premiers juges ont inversé la charge de la preuve ; qu'il appartient au ministre de l'intérieur d'apporter la preuve de la réalité de l'infraction ; que, s'agissant de l'infraction relevée le 23 juin 2006, il ne lui appartient pas d'apporter la preuve du non paiement de l'amende ou de l'absence d'émission d'un titre exécutoire ; que le juge de proximité de valenciennes a, par jugement du 18 juin 2008, jugé qu'il n'y avait pas de titre exécutoire et que l'action publique était éteinte ; qu'aucune information ne lui a été délivrée sur les pertes de points mentionnées dans la décision 48 S , hormis lors des infractions des 4 février 2006, 23 juin 2006 et 7 mai 2007, alors que cette information préalable constitue une garantie essentielle ; que c'est à tort que le premier juge a considéré qu'il n'était pas possible de se prévaloir devant lui de cette obligation d'information préalable ; que, s'agissant de l'infraction relevée le 7 mai 2007, le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité de l'infraction ; que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur le moyen tiré de ce que la décision du 8 janvier 2008 comportant une information globale sur les retraits de points était nulle ; qu'à l'exception des décisions relatives aux infractions commises les 4 février 2006, 23 juin 2006 et 7 mai 2007, il n'a été avisé d'aucune autre perte de points ; que les droits de la défense ont été méconnus puisqu'il n'a pu bénéficier du principe de l'égalité des armes en dispensant le ministre de la charge de la preuve ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 1er octobre 2008 fixant la clôture de l'instruction au 5 janvier 2009, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2009 par télécopie et confirmé le 8 janvier 2009 par la production de l'original, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que la procédure administrative de retrait de points dépend uniquement de la réalité de l'infraction telle qu'elle résulte de la procédure judiciaire ; que le ministre se trouve en situation de compétence liée ; que si M. A souhaitait contester la réalité des infractions qui lui sont reprochées, il lui appartenait de formuler une réclamation auprès de l'officier du ministère public territorialement compétent ; que, dans la mesure où l'officier du ministère public a saisi dans l'application informatique dédiée les données propres à chaque infraction, précisant la date à laquelle celles-ci sont devenues définitives, la procédure suivie doit être considérée comme régulière ; que les informations figurant sur le relevé individuel du requérant et reportées dans la décision référencée 48 SI doivent être considérées comme enregistrées au terme d'une procédure régulière ;

Vu l'ordonnance en date du 14 janvier 2009 portant réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 février 2009, présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Guillaume Mulsant, président de chambre, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lille du 4 juillet 2008 rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 janvier 2008 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a retiré deux points de son permis de conduire consécutivement à l'infraction commise le 7 mai 2007, a récapitulé les précédents retraits de points et l'a informé de la perte de validité de son titre de conduite pour solde de points nul et des décisions ministérielles portant chacune retrait de un et trois points de son permis de conduire consécutivement aux infractions commises les 4 février 2006 et 23 juin 2006 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ;

Considérant, d'une part, que s'agissant de l'infraction relevée le 23 juin 2006, il ressort des pièces du dossier que M. A, qui n'a pas payé l'amende forfaitaire relative à cette infraction, a formulé une requête tendant à son exonération ; que le juge de proximité, par un jugement en date du 18 juin 2008, a constaté la prescription de l'action publique au regard de l'article 9 du code de procédure pénale et l'a exonéré en conséquence du paiement de l'amende forfaitaire ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient le ministre de l'intérieur, et contrairement aux mentions figurant sur la décision 48S attaquée du 8 janvier 2008, la réalité de l'infraction en cause n'est pas établie conformément à l'article L. 223-1 du code de la route ; que, dès lors, M. A est fondé à demander l'annulation de la décision retirant trois points de son permis de conduire sur le fondement de cette infraction ;

Considérant, d'autre part, que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 de ce code dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ; que, quand de telles mentions figurent au relevé d'information intégral relatif à la situation de son permis de conduire, extrait du système national du permis de conduire, l'intéressé ne peut, dès lors, utilement les contredire en se bornant à affirmer qu'il n'a pas payé une amende forfaitaire enregistrée comme payée ou à soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve que la réalité de l'infraction a été établie dans les conditions requises par les dispositions précitées ;

Considérant que M. A soutient que la réalité des infractions relevées les 4 février 2006 et 7 mai 2007 n'est pas établie dès lors qu'il conteste avoir payé les amendes forfaitaires et que le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la délivrance et de la notification d'un titre exécutoire du montant de l'amende forfaitaire majorée ; que si le ministre de l'intérieur fait valoir que la réalité de ces infractions est établie par les mentions du relevé intégral d'information relatif à la situation de M. A, il ne produit pas ledit relevé intégral ; que les seules mentions amende forfaitaire et amende forfaitaire majorée portées dans la décision 48S attaquée ne sauraient établir la réalité des infractions en cause, dès lors que l'administration ne produit ni la copie du titre exécutoire ni ledit relevé intégral ; que, dès lors, M. A est fondé à demander l'annulation des décisions retirant un et deux points de son permis de conduire sur le fondement de ces infractions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que l'administration ayant retiré irrégulièrement six points affectés au permis de conduire de M. A, le présent arrêt implique que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales réaffecte six points au capital de son permis de conduire ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. A une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lille du 4 juillet 2008 et les décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales portant retrait de un, trois et deux points à la suite de la constatation des infractions commises les 4 février 2006, 23 juin 2006 et 7 mai 2007 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de réaffecter 6 points au capital de points du permis de conduire de M. A.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Camelle A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

''

''

''

''

2

N°08DA01634


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01634
Date de la décision : 20/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Guillaume Mulsant
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : GRIFFON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-05-20;08da01634 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award