La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/07/2010 | FRANCE | N°10DA00509

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 13 juillet 2010, 10DA00509


Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Virginie A, demeurant ..., par Me Lesieur-Guinault ; Mme A demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°0902270 du 20 avril 2010, par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen, statuant en référé, a rejeté sa demande, tendant à ce qu'une expertise médicale soit prescrite, au contradictoire du Groupe hospitalier du Havre, en vue notamment de déterminer l'origine de la myélopathie dont elle s

'est avérée être atteinte après la réalisation d'un by-pass gastrique ;
...

Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Virginie A, demeurant ..., par Me Lesieur-Guinault ; Mme A demande au président de la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°0902270 du 20 avril 2010, par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen, statuant en référé, a rejeté sa demande, tendant à ce qu'une expertise médicale soit prescrite, au contradictoire du Groupe hospitalier du Havre, en vue notamment de déterminer l'origine de la myélopathie dont elle s'est avérée être atteinte après la réalisation d'un by-pass gastrique ;

2°) de faire droit à sa demande d'expertise, en confiant à l'expert la mission, après avoir convoqué et entendu les parties ainsi que tous sachants et avoir pris connaissance de tous documents utiles, de décrire l'état initial de l'intéressée avant les interventions des 5 décembre 2001 et 21 février 2005, de procéder à son examen clinique, de décrire les lésions et séquelles directement imputables aux soins et traitements critiqués, de dire s'il existe une faute dans l'organisation du service notamment concernant le devoir d'information préalable aux interventions ou au défaut de prescription médicale suite à la réalisation du by-pass, de donner au juge tous éléments de nature à lui permettre de déterminer les responsabilités encourues, le cas échéant, de donner au juge tous éléments de nature à lui permettre d'évaluer les préjudices subis ;

Mme A soutient que le premier juge a estimé à tort que sa demande d'expertise était dépourvue de caractère utile au motif que le recours en indemnisation qu'elle n'avait présenté que le 17 mars 2010 devant le juge du fond, serait irrecevable comme tardif ; qu'en effet, l'exposante, après avoir été rendue destinataire, le 4 mai 2009, d'une décision explicite de rejet du recours préalable qu'elle avait adressée au Groupe hospitalier du Havre, a formé une demande d'aide juridictionnelle le 23 juin 2009, soit dans le délai de recours contentieux, à laquelle il a été fait droit le 7 juillet 2009 ; qu'elle a introduit sa demande en référé-expertise le 17 août 2009 et, par ailleurs, réitéré, le 10 août 2009, sa demande indemnitaire auprès du Groupe hospitalier du Havre en la chiffrant, cette demande valant, seule, recours administratif préalable et non la précédente demande, qui n'était pas chiffrée ; qu'il n'a pas été expressément répondu à cette demande ; que, dès lors, aucune tardiveté de son recours introduit devant le juge du fond ne saurait lui être opposée ; qu'en outre, il a été jugé qu'une demande d'expertise médicale présentée au juge des référés aux fins de rechercher les causes de dommages imputés au service public hospitalier interrompt le délai de recours contentieux contre la décision de l'établissement hospitalier rejetant expressément la demande d'indemnité et que ce délai commence à courir à nouveau à compter de la notification au requérant du rapport d'expertise ou de l'ordonnance du juge des référés rejetant la demande d'expertise ; que, par suite, l'exposante n'est pas forclose à demander au Groupe hospitalier la réparation de ses préjudices et l'expertise médicale qu'elle sollicite est, dès lors et contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, utile au sens de l'article R. 532-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu la décision en date du 7 juin 2010, par laquelle le président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accorde à Mme A l'aide juridictionnelle partielle pour la présente procédure, en ce compris les frais d'expertise, et fixe à 15 % la part contributive de l'Etat ;

Vu les pièces du dossier desquelles il ressort que le Groupe hospitalier du Havre a reçu communication de la requête susvisée et n'a pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique, et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié, pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 555-1 du code de justice administrative : Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la cour administrative d' appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le juge des référés ; qu'aux termes de l'article R. 532-1 du même code : Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ;

Considérant que Mme A, qui souffrait d'une obésité morbide, a subi, le 5 décembre 2001 au sein du Groupe hospitalier du Havre, une intervention chirurgicale en vue de la pose d'un anneau gastrique ; que, le 26 novembre 2004, un déplacement de l'anneau a rendu nécessaire son ablation ; que la réalisation d'un by-pass gastrique a alors été envisagée, l'intervention correspondante étant pratiquée le 21 février 2005 ; qu'une laparotomie s'est, en cours d'intervention, avérée finalement nécessaire ; qu'après une nouvelle intervention chirurgicale induite par l'évolution de son état, Mme A a quitté l'établissement hospitalier le 18 mars 2005 ; qu'au cours de l'année 2007, l'intéressée a commencé à ressentir une fatigabilité notable à la marche associée à une faiblesse des membres inférieurs et à des troubles urinaires ; qu'une myélopathie sera, ensuite, diagnostiquée ; que Mme A forme appel de l'ordonnance en date du 20 avril 2010, par laquelle le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen, statuant en référé, a rejeté sa demande, tendant à ce qu'une expertise médicale soit prescrite, au contradictoire du Groupe hospitalier du Havre, en vue notamment de déterminer l'origine de cette pathologie ;

Considérant que la saisine du juge des référés devant le tribunal administratif d'une demande d'expertise médicale aux fins de rechercher les causes de dommages imputés au service public hospitalier interrompt le délai de recours contentieux contre la décision de l'établissement hospitalier rejetant expressément la demande d'indemnité ; que ce délai commence à courir à nouveau à compter de la notification au requérant du rapport de l'expert ou de l'ordonnance du juge des référés rejetant la demande d'expertise ; qu'il en est de même, en application des dispositions de l'article 38 du décret susvisé du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, de la demande d'aide juridictionnelle formée en vue du dépôt de la demande de référé expertise ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A a saisi, par courrier daté du 5 décembre 2008, le Groupe hospitalier du Havre d'une demande préalable d'indemnisation, dont ledit établissement a accusé réception le 19 décembre 2008 ; qu'estimant, après enquête, que l'intéressée avait reçu des soins conformes aux règles de l'art, le directeur général dudit établissement a rejeté cette réclamation, par un courrier daté du 4 mai 2009, mentionnant les voies et délais de recours ouverts contre ce rejet et dont l'intéressée a été rendue destinataire le 9 mai 2009 ; que Mme A a sollicité le 23 juin 2009 l'aide juridictionnelle en vue de demander la désignation d'un expert, cette demande ayant interrompu une première fois le délai de recours contentieux ; que le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal administratif de Rouen lui a accordé l'aide juridictionnelle partielle, par une décision en date du 7 juillet 2009 ; que le délai de recours contentieux a commencé de nouveau à courir à compter de cette date ; que, par une demande enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Rouen le 17 août 2009, Mme A a demandé au juge des référés de prescrire une expertise ; que cette demande a interrompu une seconde fois le délai de recours contentieux, lequel n'a recommencé à courir qu'à compter de la date de notification à l'intéressée de l'ordonnance attaquée, en date du 20 avril 2010, qui a rejeté cette demande ; qu'ainsi et contrairement à ce qu'a estimé, par ladite ordonnance le premier juge, la demande indemnitaire présentée devant le juge du fond par Mme A, bien qu'enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Rouen le 17 mars 2010, n'était pas tardive et la mesure d'expertise sollicitée n'était, dès lors et contrairement à ce que soutenait le Groupe hospitalier du Havre, pas dépourvue de caractère utile au sens de l'article R. 532-1 précité du code de justice administrative ; que la demande correspondante n'était, en outre, pas irrecevable ;

Considérant que la mesure d'expertise sollicitée, dont les conclusions permettront d'éclairer le juge du fond, qui est toujours saisi de la demande aux fins d'indemnisation formée par Mme A, s'avère utile au sens des dispositions précitées de l'article R. 532-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu de la prescrire et de confier à l'expert la mission demandée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen, statuant en référé, a rejeté sa demande tendant à ce qu'une expertise médicale soit prescrite au contradictoire du Centre hospitalier du Havre et en présence de la Caisse primaire d'assurance maladie du Havre ;

ORDONNE :

Article 1er: L'ordonnance n°0902270 du vice-président du tribunal administratif de Rouen en date du 20 avril 2010 est annulée.

Article 2 : M. le docteur Dominique Loisel, 29 rue Lord Kitchener au Havre (76600), est désigné comme expert avec mission, au contradictoire de Mme A, du Groupe hospitalier du Havre et de la Caisse primaire d'assurance maladie du Havre, de :

1°- prendre connaissance de l'entier dossier médical de Mme A, ainsi que de tous documents utiles ;

2°- convoquer et entendre les parties et tout sachant ;

3°- décrire l'état initial de l'intéressée avant les interventions des 5 décembre 2001 et 21 février 2005 et procéder à son examen clinique ;

4°- décrire les lésions et séquelles dont Mme A est atteinte, en distinguant celles qui seraient directement imputables aux interventions critiquées et celles susceptibles de résulter de l'évolution prévisible de son état initial ;

5°- dire si Mme A a bénéficié, au sein de l'établissement hospitalier, de soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science ;

6°- dire si les interventions pratiquées étaient nécessaires, si d'autres solutions étaient envisageables, si lesdites interventions comportaient des risques connus d'invalidité et si Mme A a été informée de ces risques dans des conditions permettant de recueillir son consentement éclairé ;

7°- dire si la réalisation d'un by-pass gastrique rendait nécessaire la mise en place d'un traitement dans le cadre du suivi postopératoire, dans l'affirmative, si un traitement a, en l'espèce été mis en place ou, en cas contraire, si l'absence de traitement a pu avoir une influence sur l'évolution de l'état de Mme A et revêtir un caractère fautif ;

8°- donner au juge, le cas échéant, tous éléments de nature à lui permettre de déterminer les responsabilités encourues et d'évaluer les préjudices subis, notamment le déficit fonctionnel temporaire, le déficit fonctionnel permanent, le pretium doloris, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément, le préjudice économique et professionnel.

Article 3 : Après avoir prêté serment par écrit et conduit ses opérations conformément aux dispositions des articles R. 621-1 et suivants du code de justice administrative, l'expert déposera son rapport au greffe de la Cour en deux exemplaires au plus tard le 28 février 2011. Des copies seront simultanément notifiées par l'expert aux parties intéressées. Avec leur accord, cette notification peut s'opérer sous forme électronique.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Virginie A, au Groupe hospitalier du Havre, à la Caisse primaire d'assurance maladie du Havre et à M. le docteur Loisel, es qualité d'expert.

Copie sera transmise au ministre de la santé et des sports.

''

''

''

''

3

N°10DA00509 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 10DA00509
Date de la décision : 13/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : LESIEUR-GUINAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-07-13;10da00509 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award